Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. D... C... a demandé au Tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 10 mars 2020 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jour, a fixé le pays de destination et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de deux ans.
Par un jugement n° 2004938 du 4 décembre 2020, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et deux mémoires enregistrés les 4 janvier, 12 février et 21 septembre 2021, M. C..., représenté par Me Angot, demande à la Cour, dans le dernier état de ses écritures :
1°) d'annuler le jugement n° 2004938 du 4 décembre 2020 du Tribunal administratif de Montreuil ;
2°) d'annuler l'arrêté du 10 mars 2020 du préfet de la Seine-Saint-Denis ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de lui délivrer un titre de séjour dès la notification de la décision à intervenir et sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à verser à Me Angot au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve de sa renonciation à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle.
Il soutient que :
En ce qui concerne la régularité du jugement :
- il est entaché d'erreurs manifestes d'appréciation ;
En ce qui concerne la légalité de l'arrêté contesté :
- il est insuffisamment motivé ;
-il est entaché d'erreurs manifestes d'appréciation dès lors qu'il justifie d'une considération humanitaire et de motifs exceptionnels de nature à l'admettre exceptionnellement au séjour.
La requête a été communiquée au préfet de la Seine-Saint-Denis qui n'a pas produit d'observations.
Par ordonnance du 19 novembre 2021, la clôture de l'instruction a été fixée au 23 novembre 2021 à 12h.
M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal judiciaire de Paris du 23 juin 2021.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi du 10 juillet 1991 ;
- le décret n° 2020-1717 du 28 décembre 2020 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. B... A... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. C..., ressortissant sri-lankais né le 18 août 1965 et entré irrégulièrement sur le territoire français le 10 juillet 2007 selon ses déclarations, a sollicité le 17 juillet 2018 la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans leur rédaction alors en vigueur. Il relève appel du jugement du 4 décembre 2020 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 10 mars 2020 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de destination et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de deux ans.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Hormis dans le cas où le juge de première instance a méconnu les règles de compétence, de forme ou de procédure qui s'imposaient à lui et a ainsi entaché son jugement d'une irrégularité, il appartient au juge d'appel non d'apprécier le bien-fondé des motifs par lesquels le juge de première instance s'est prononcé sur les moyens qui lui étaient soumis mais de se prononcer directement sur les moyens dirigés contre la décision administrative contestée dont il est saisi dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel. Par suite, M. C... ne peut utilement se prévaloir de ce que le jugement attaqué serait entaché d'erreurs manifestes d'appréciation.
Sur la légalité de l'arrêté contesté :
3. En premier lieu, si M. C... soutient que l'arrêté contesté serait insuffisamment motivé, il n'assortit ce moyen d'aucune précision permettant d'en apprécier le bien-fondé.
4. Aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : / 1° Restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police (...) ". Aux termes de l'article L. 211-5 du même code : " La motivation exigée par le présent chapitre doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision ".
5. D'une part, l'arrêté en litige vise la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, notamment ses articles 3 et 8, ainsi que les dispositions pertinentes du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. D'autre part, le préfet de la Seine-Saint-Denis a précisé que le réexamen de la demande d'asile de M. C... a été rejeté par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) du 25 novembre 2011, confirmée par une décision de la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) du 19 septembre 2012, a également indiqué qu'il ne possédait aucune attache familiale en France, qu'il ne justifiait d'aucune expérience ou qualification professionnelle ni de perspective réelle d'embauche et que, compte tenu des circonstances propres à la situation du requérant, il n'était pas porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale, ni qu'il serait exposé à des peines ou traitements contraires à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en cas de retour dans son pays d'origine. Dans ces conditions, l'arrêté contesté comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement, en application des dispositions précitées du code des relations entre le public et l'administration. Par suite, et sans qu'il soit besoin d'examiner sa recevabilité, le moyen tiré de l'insuffisante motivation de l'arrêté contesté doit être écarté.
6. En second lieu, aux termes du premier alinéa de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors en vigueur : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir (...) ".
7. L'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile permet la délivrance de deux titres de séjour de nature différente que sont la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " et la carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " ou " travailleur temporaire " mentionnée au 1° de l'article L. 313-10. En présence d'une demande de régularisation présentée sur ce fondement par un étranger qui ne serait pas en situation de polygamie et dont la présence en France ne présenterait pas une menace pour l'ordre public, il appartient à l'autorité administrative de vérifier, dans un premier temps, si l'admission exceptionnelle au séjour par la délivrance d'une carte portant la mention " vie privée et familiale " répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard de motifs exceptionnels et, à défaut, dans un second temps, s'il est fait état de motifs exceptionnels de nature à permettre la délivrance, dans ce cadre, d'une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " ou " travailleur temporaire ". Dans cette première hypothèse, l'existence d'une menace grave, directe et individuelle contre la vie ou la personne d'un étranger qui demande sa régularisation pour des raisons humanitaires peut être prise en considération, sans qu'elle soit subordonnée à la condition que l'étranger rapporte la preuve qu'il est visé spécifiquement en raison d'éléments propres à sa situation personnelle dès lors que le degré de violence aveugle caractérisant le conflit armé atteint un niveau si élevé qu'il existe des motifs sérieux et avérés de croire qu'un civil renvoyé dans le pays ou la région concernés courrait, du seul fait de sa présence sur le territoire, un risque réel de subir ces menaces, quand bien même les demandes d'asile qu'il aurait déposé auraient été rejetées par l'OFPRA et la CNDA. Dans la seconde hypothèse, un demandeur qui justifierait d'une promesse d'embauche ou d'un contrat lui permettant d'exercer une activité, ne saurait être regardé, par principe, comme attestant de motifs exceptionnels exigés par la loi. Il appartient en effet à l'autorité administrative, sous le contrôle du juge, d'examiner, notamment, si la qualification, l'expérience et les diplômes de l'étranger ainsi que les caractéristiques de l'emploi auquel il postule, dans un métier et une zone géographique caractérisés par des difficultés de recrutement, de même que tout élément de sa situation personnelle dont l'étranger ferait état à l'appui de sa demande, tel que par exemple, l'ancienneté de son séjour en France, peuvent constituer, en l'espèce, des motifs exceptionnels d'admission au séjour.
8. D'une part, si M. C... fait valoir qu'il est menacé par les forces de l'ordre sri-lankaises dès lors que sa famille et lui-même ont soutenu les révoltes menées par le peuple tamoul, il n'établit ni être visé par une menace grave, directe et individuelle contre sa vie ou sa personne, ni un degré de violence aveugle caractérisant un conflit armé se déroulant dans son pays d'origine. S'il se prévaut également de la durée significative de sa présence sur le territoire français, il n'établit pas résider habituellement en France depuis plus de dix ans à la date de l'arrêté contesté, dès lors qu'il se borne à produire des avis d'imposition indiquant une absence de revenus pour une période comprise entre 2007 et 2019. Ainsi, le requérant ne justifie pas de circonstances humanitaires ou de motifs exceptionnels au sens des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors qu'il ressort, au demeurant, des pièces du dossier qu'il ne se prévaut d'aucune attache familiale en France, sa femme et ses enfants vivant toujours au Sri Lanka, et que son frère séjournerait en Norvège.
9. D'autre part, M. C... se borne à produire une promesse d'embauche d'une société de nettoyage datée du 16 juillet 2018, élément insuffisant pour justifier d'une admission exceptionnelle au séjour en qualité de salarié. Par suite, le préfet de la Seine-Saint-Denis n'a pas entaché l'arrêté contesté d'erreurs manifestes d'appréciation en considérant que M. C... ne remplissait pas les conditions d'admission exceptionnelle au séjour de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
10. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction sous astreinte et celles présentées au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent qu'être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... C... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Copie en sera adressée au préfet de la Seine-Saint-Denis.
Délibéré après l'audience du14 novembre 2022, à laquelle siégeaient :
- M. Le Goff, président de chambre,
- M. Ho Si Fat, président assesseur,
- Mme Jayer, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 5 décembre 2022.
Le rapporteur,
F. HO SI A... Le président,
R. LE GOFF
Le greffier,
P.TISSERAND
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
2
N° 21PA00105