Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 29 octobre 2020 par lequel le préfet de police l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.
Par un jugement n° 2018520 du 28 décembre 2020, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 23 mars 2021, M. B..., représenté par Me Mouret, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 2018520 du 28 décembre 2020 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Paris ;
2°) d'annuler l'arrêté du 29 octobre 2020 par lequel le préfet de police l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination ;
3°) d'enjoindre au préfet territorialement compétent de procéder au réexamen de sa situation dans un délai de quinze jours à compter de la date de notification de la décision à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard et de lui délivrer durant cet examen une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler ;
4°) d'enjoindre au préfet de police ou au préfet territorialement compétent de procéder à l'effacement du signalement au système d'information Schengen (SIS) sous les mêmes conditions de délai et d'astreinte ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au bénéfice de Me Mouret en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve de renonciation à percevoir la part contributive de l'Etat.
Il soutient que :
- la décision portant obligation de quitter le territoire français est insuffisamment motivée ;
- elle révèle un défaut d'examen particulier de sa situation ;
- en décidant de son éloignement du territoire sur le fondement des dispositions du 1° de l'article L. 511-1-I du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet de police a entaché sa décision d'une erreur de droit ;
- cette décision est entachée d'erreurs de faits tenant aux conditions de son entrée sur le territoire français, à la durée de son séjour en France et à son insertion professionnelle ;
- le préfet de police a commis une erreur de droit en s'estimant à tort en situation de compétence liée ;
- la mesure d'éloignement en litige est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;
- la décision fixant le pays de destination est illégale, par voie d'exception, en conséquence de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français sur laquelle elle se fonde.
Par un mémoire, enregistré le 24 juin 2022, le préfet de police conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.
M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Paris en date du 26 février 2021.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridictionnelle ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme A... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Par un arrêté du 29 octobre 2020, le préfet de police a obligé M. B..., ressortissant malien né en 1971, à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il est susceptible d'être éloigné. M. B... relève régulièrement appel du jugement du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Paris du 28 décembre 2020 rejetant ses conclusions tendant à l'annulation de cet arrêté.
2. En premier lieu, en première instance, M. B... a fait valoir que l'arrêté en litige était insuffisamment motivé. Le premier juge a retenu que l'arrêté attaqué visait les dispositions du 1° du I de l'article L. 511-1 I du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, sur le fondement duquel il a été pris, ainsi que les articles 8 et 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et considéré que l'arrêté contenait l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement, en dépit de l'absence de mention de la date d'entrée en France de l'intéressé et de la durée de son séjour. Il en a déduit que le moyen tiré de l'insuffisance de motivation devait être écarté. En se bornant à alléguer que le préfet aurait dû préciser les circonstances de son arrivée en France, l'ancienneté de sa résidence et son insertion professionnelle, M. B... ne remet pas en cause l'appréciation portée à bon droit par le premier juge sur le caractère suffisant de la motivation de l'arrêté en litige. Par suite, ce moyen doit être écarté par adoption des motifs retenus par le magistrat désigné au point 4 de son jugement.
3. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction applicable à la date de l'arrêté attaqué :
" - L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne (...) lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : 1° Si l'étranger ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité ; (...) ".
4. D'une part, si la condition tenant à la régularité de l'entrée sur le territoire français n'est pas opposable à un étranger souhaitant introduire une demande d'asile, le dépôt d'une telle demande n'a pas pour effet de régulariser l'entrée en France du demandeur une fois la demande d'asile examinée et définitivement rejetée. Il ressort des pièces du dossier que la demande d'asile de M. B... a été examinée et définitivement rejetée en dernier lieu par une décision de la Cour nationale du droit d'asile du 27 février 2002. D'autre part, si M. B... soutient être titulaire d'un passeport, la délivrance de ce document le 25 juin 2019, ne permet pas de justifier de son entrée régulière sur le territoire français en 2001. Enfin, ainsi qu'il sera dit au point 8 du présent arrêt, il ne ressort pas des pièces du dossier que M. B... ait résidé de manière continue sur le territoire français depuis 2001. Dans ces conditions, et en l'absence de titre de séjour en cours de validité, le préfet de police pouvait légalement l'obliger à quitter le territoire français sur le fondement des dispositions du 1° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Le moyen tiré de l'erreur de droit doit donc être écarté.
5. En troisième lieu, les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers, relatives à l'admission exceptionnelle au séjour, ne prescrivent pas la délivrance de plein droit d'un titre de séjour. Par suite, la circonstance que M. B... aurait déposé une telle demande le 13 février 2019 est sans incidence sur la légalité de la mesure d'éloignement attaquée. En tout état de cause, il ressort des pièces produites à l'instance que cette demande a été rejetée antérieurement à la mesure d'éloignement contestée, par un arrêté du préfet de police du 18 septembre 2020 qui a assorti cette décision d'une obligation de quitter le territoire français.
6. En quatrième lieu, d'une part, si le préfet de police a retenu à tort que M. B... n'était pas titulaire d'un passeport, cette erreur de fait est restée sans incidence sur la légalité de la décision contestée, dès lors que le préfet de police aurait pris la même décision s'il s'était uniquement fondé sur l'irrégularité de son entrée sur le territoire français et le défaut de titre de séjour en cours de validité justifiant à eux seuls la mesure d'éloignement prononcée sur le fondement des dispositions du 1° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. D'autre part, le préfet de police n'a pas commis d'erreur de fait en retenant le caractère irrégulier de son entrée en France, pour les motifs précédemment énoncés au point 4.
7. En cinquième lieu, il ne ressort ni des termes de l'arrêté attaqué, ni des pièces du dossier que le préfet de police n'aurait pas procédé à un examen suffisamment approfondi de la situation personnelle de M. B... au regard tant de l'ancienneté de sa résidence en France que de son insertion professionnelle ou se serait estimé en situation de compétence liée pour prononcer à son encontre une décision portant obligation de quitter le territoire français.
8. En sixième lieu, M. B... ne démontre pas l'ancienneté et le caractère habituel de sa résidence sur le territoire français depuis 2001, notamment au titre des années 2004 à 2007 et 2016 à 2018, même si sa présence ponctuelle peut être tenue pour établie, compte tenu du caractère peu diversifié des pièces produites à l'instance et constituées pour l'essentiel de relevés bancaires sans mouvements réguliers, de déclarations de revenus ou avis d'imposition ne comportant aucune ressource ou dont les revenus déclarés à hauteur de 1 100 euros au titre de l'année 2017 et de 3 500 euros au titre de l'année 2018 ne sont attestées par aucune autre pièce justificative, de quelques courriers de l'assurance maladie et pièces se rapportant à des prises en charge médicales, de correspondances commerciales, ou d'attestations de chargement de forfait Navigo. Il ne justifie pas davantage l'insertion professionnelle dont il entend se prévaloir au sein de la société par actions simplifiée Sainte-Hemoise où il soutient avoir été employé en qualité de plongeur sous une autre identité entre 2013 et 2019, par la seule production de l'attestation de concordance établie par cette société et qui n'est corroborée par aucune autre pièce du dossier. Il est par ailleurs constant que M. B... est célibataire et sans charge de famille. Par suite, il ne ressort d'aucune des pièces produites à l'instance qu'en l'obligeant à quitter le territoire français, le préfet de police aurait entaché sa décision d'une erreur de fait tenant à la durée de son séjour en France et à l'insertion professionnelle dont il entend se prévaloir ou aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de cette décision sur sa situation personnelle. Ces moyens doivent par suite être écartés.
9. En dernier lieu, la décision portant obligation de quitter le territoire français n'étant entachée d'aucune illégalité, le moyen tiré de l'exception d'illégalité de cette décision, invoqué à l'appui des conclusions dirigées contre la décision fixant le pays de destination doit, en conséquence, être écarté.
10. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande de première instance. Doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte ainsi que celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Copie en sera adressée au préfet de police.
Délibéré après l'audience du 10 novembre 2022, à laquelle siégeaient :
- M. Carrère, président,
- Mme Boizot, première conseillère
- Mme Lorin, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe de la Cour, le 28 novembre 2022.
La rapporteure,
C. A...
Le président,
S. CARRERE
La greffière,
C. DABERT
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 21PA01525