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10/11/2022 | FRANCE | N°21PA06188

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 5ème chambre, 10 novembre 2022, 21PA06188


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... C... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 5 juillet 2021 par lequel le préfet de police a refusé de renouveler son titre de séjour et l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours en fixant le pays à destination duquel elle pourra être reconduite.

Par un jugement n° 2116105 du 25 octobre 2021, le tribunal administratif de Paris a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire c

omplémentaire, enregistrés les 6 décembre 2021 et 15 février 2022, Mme C..., représentée par Me C...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... C... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 5 juillet 2021 par lequel le préfet de police a refusé de renouveler son titre de séjour et l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours en fixant le pays à destination duquel elle pourra être reconduite.

Par un jugement n° 2116105 du 25 octobre 2021, le tribunal administratif de Paris a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés les 6 décembre 2021 et 15 février 2022, Mme C..., représentée par Me Cheron, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2116105 du 25 octobre 2021 du tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler l'arrêté du 5 juillet 2021 du préfet de police ;

3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient, dans le dernier état de ses écritures, que :

- l'arrêté attaqué est entaché d'un vice de procédure en ce qu'il incombait au préfet, avant de statuer sur sa demande, de saisir pour avis le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) ;

- il est entaché d'une erreur de droit en ce que le préfet n'était pas compétent pour se prononcer sur son état de santé et la disponibilité en Guinée des soins qui lui sont nécessaires ;

- il a été adopté en méconnaissance des dispositions de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- en ne lui délivrant pas de titre de séjour alors qu'elle justifie de motifs exceptionnels de régularisation, le préfet a entaché l'arrêté d'erreur de fait ;

- il méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense enregistré le 22 septembre 2022, le préfet de police conclut au rejet de la requête en ce que les moyens y soulevés ne sont pas fondés.

Par un courrier du 23 septembre 2022, les parties ont été informées, en application de la jurisprudence issue la décision du Conseil d'Etat du 11 janvier 1995, n° 123665, que l'arrêt à intervenir est susceptible d'être fondé sur le moyen soulevé d'office tiré de ce que le moyen de légalité externe tiré du vice de procédure de la décision refusant le renouvellement de son titre de séjour, présenté par Mme C... dans son mémoire complémentaire enregistré au greffe de la Cour le 15 février 2022, est irrecevable en ce qu'il relève d'une cause juridique distincte de celle développée dans la requête introductive d'instance dans laquelle Mme C... n'a soulevé que des moyens tenant à la légalité interne de cette décision, et qu'il a été présenté après l'expiration du délai d'appel.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales,

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile,

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. D... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme B... C..., ressortissante guinéenne née le 24 avril 1969 à Conakry, a sollicité le 25 novembre 2020 le renouvellement de son titre de séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 5 juillet 2021, le préfet de police a rejeté sa demande et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours en fixant le pays à destination duquel elle pourra être reconduite. Elle relève appel du jugement du 25 octobre 2021 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

2. En premier lieu, sous réserve des moyens d'ordre public, un requérant qui n'a soulevé dans le délai d'appel que des moyens tenant à la légalité interne de l'acte administratif attaqué n'est pas recevable, après l'expiration du délai d'appel, à contester la légalité externe de l'acte, laquelle constitue une cause juridique distincte de la précédente.

3. Mme C..., qui n'a soulevé dans sa requête sommaire enregistrée le 6 décembre 2021 au greffe de la Cour que des moyens de légalité interne, invoque dans un mémoire ampliatif enregistré le 15 février 2022 un moyen de légalité externe tiré du vice de procédure commis par le préfet pour n'avoir pas recueilli l'avis du collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII). Ce moyen, fondé sur une cause juridique distincte de ceux invoqués dans sa requête, et qui n'est pas d'ordre public, constitue une demande nouvelle qui, présentée après l'expiration du délai d'appel, est tardive et, par suite, irrecevable.

4. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qui, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an. La condition prévue à l'article L. 412-1 n'est pas opposable. / La décision de délivrer cette carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. / Sous réserve de l'accord de l'étranger et dans le respect des règles de déontologie médicale, les médecins de l'office peuvent demander aux professionnels de santé qui en disposent les informations médicales nécessaires à l'accomplissement de cette mission. Les médecins de l'office accomplissent cette mission dans le respect des orientations générales fixées par le ministre chargé de la santé. Si le collège de médecins estime dans son avis que les conditions précitées sont réunies, l'autorité administrative ne peut refuser la délivrance du titre de séjour que par une décision spécialement motivée. Chaque année, un rapport présente au Parlement l'activité réalisée au titre du présent article par le service médical de l'office ainsi que les données générales ".

5. Il résulte des dispositions précitées que l'autorité préfectorale, qui n'est pas liée par l'avis du collège des médecins de l'OFII, est compétente pour statuer sur les conditions de fond prévues au premier alinéa de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Le moyen tiré de ce que le préfet n'aurait pas été compétent pour se prononcer sur l'état de santé de Mme C... et la disponibilité en Guinée des soins qui lui sont nécessaires ne peut, par suite, qu'être écarté.

6. En troisième lieu, si Mme C... verse aux débats divers résultats d'examens, comptes rendus médicaux et ordonnances faisant apparaître qu'elle souffre d'une polyarthrite rhumatoïde et d'un diabète de type 2, et qu'elle établit par ailleurs suivre un traitement pharmacologique composé de Metformine chlorhydate 1000 mg, de Sitagliptine 50 mg cp, d'Esomeprazole (magnésium) 20 mg gel, de Methotrexate 5 mg cp, de Paracétamol 1g cp et de Colecalciferol 80 000 UI/2 ml sol buv (ZYMAD 80 000 UI S buv en ampoule Amp/2ml) et devoir surveiller l'évolution de sa glycémie, elle ne justifie pas ce faisant que le défaut de cette prise en charge l'exposerait à des conséquences d'une exceptionnelle gravité ni, en tout état de cause, qu'elle ne pourrait bénéficier d'un traitement équivalent en Guinée. Dès lors, le moyen tiré de ce que le préfet aurait commis une erreur d'appréciation dans l'application des dispositions de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne peut qu'être écarté.

7. En quatrième lieu, Mme C... soutient que le préfet a commis une erreur de fait en retenant qu'elle ne justifiait pas de son intégration professionnelle alors qu'elle établit, par les contrats de travail et bulletins de paie produits dans l'instance, avoir travaillé comme aide à domicile du mois de janvier 2017 au mois d'avril 2021 avant d'exercer l'emploi d'assistante de vie à compter du mois de mai 2021. Il ressort toutefois des pièces du dossier que sa demande de titre était exclusivement fondée sur les dispositions de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en sorte qu'une telle erreur est insusceptible d'avoir exercé une quelconque influence sur le sens de la décision portant refus de séjour.

8. En cinquième lieu, l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales prévoit que " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...). 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

9. A supposer même que Mme C... puisse être regardée comme établissant sa présence en France depuis l'année 2013, elle n'y serait entrée qu'à l'âge de quarante-quatre ans, et n'y dispose pas d'attaches familiales à la date de l'arrêté attaqué, la circonstance qu'elle se soit mariée avec un ressortissant français le 16 juillet 2021, postérieurement à l'adoption de l'acte attaqué, étant inopérante alors, du reste, qu'elle ne justifie d'aucune communauté de vie antérieurement à ce mariage. Dans ces conditions, et alors qu'elle n'est pas dépourvue d'attaches en Guinée puisqu'y résident toujours ses enfants majeurs, A... C... n'établit pas que le préfet de police aurait méconnu les droits qu'elle tient des stipulations précitées de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

10. Il résulte de tout ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Par suite, ses conclusions à fins d'annulation doivent être rejetées de même que, par voie de conséquence, ses conclusions à fins d'injonction et celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... C... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 20 octobre 2022, à laquelle siégeaient :

- Mme Vinot, présidente de chambre,

- Mme Vrignon-Villalba, présidente assesseure,

- M. Perroy, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 10 novembre 2022.

Le rapporteur,

G. D...

La présidente,

H. VINOTLa greffière,

E. VERGNOL

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 21PA06188 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 21PA06188
Date de la décision : 10/11/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme VINOT
Rapporteur ?: M. Gilles PERROY
Rapporteur public ?: M. SIBILLI
Avocat(s) : CHERON

Origine de la décision
Date de l'import : 23/11/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2022-11-10;21pa06188 ?
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