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10/11/2022 | FRANCE | N°21PA01464

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 9ème chambre, 10 novembre 2022, 21PA01464


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Paris de condamner l'Etat à lui verser la somme de 70 000 euros, en réparation des conséquences dommageables de la décision du 4 novembre 2015 par laquelle il avait illégalement été affecté à l'ambassade de France au Caire au titre du volontariat civil international.

Par jugement n° 1905207 du 21 janvier 2021 le tribunal administratif de Paris a partiellement fait droit aux conclusions de M. C... en condamnant l'Etat à lui verser 3 500 euros de

dommages et intérêts et en rejetant le surplus de sa demande.

Procédure devant ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Paris de condamner l'Etat à lui verser la somme de 70 000 euros, en réparation des conséquences dommageables de la décision du 4 novembre 2015 par laquelle il avait illégalement été affecté à l'ambassade de France au Caire au titre du volontariat civil international.

Par jugement n° 1905207 du 21 janvier 2021 le tribunal administratif de Paris a partiellement fait droit aux conclusions de M. C... en condamnant l'Etat à lui verser 3 500 euros de dommages et intérêts et en rejetant le surplus de sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 19 mars 2021, M. C..., représenté par Me Saïdi, demande à la Cour :

1°) de réformer le jugement n° 1905207 du tribunal administratif de Paris en date du 21 janvier 2021 en tant qu'il a fixé le montant de la condamnation de l'Etat à la somme de 3 500 euros ;

2°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 70 000 euros en réparation des conséquences dommageables de la décision du 4 novembre 2015 portant affectation de l'intéressé à l'ambassade de France au Caire au titre du volontariat civil international ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- l'illégalité de la décision du 4 novembre 2015 a été constatée par jugement du 22 mai 2017 devenu définitif ;

- son affectation l'a conduit à négocier la rupture conventionnelle de son contrat de travail ;

- son préjudice de rémunération tient à la différence entre ce qu'il aurait perçu chez son ancien employeur et ce qu'il a effectivement perçu compte tenu de l'indemnisation au titre du chômage et de son nouvel emploi ;

- il justifie également d'un préjudice qui tient à l'écart entre ce qu'il aurait perçu s'il avait été affecté au Caire et ce qu'il a perçu avant de retrouver un nouvel emploi ; il a perdu une chance d'être prolongé au titre du volontariat civil international ;

- il a donné son congé du logement qu'il occupait et a pris un logement plus cher et plus éloigné ce qui génère un trouble dans les conditions d'existence de 5 000 euros et a dû vivre chez sa sœur dans l'intervalle, ce qui génère un préjudice résultant de troubles dans les conditions d'existence de 15 000 euros ;

- il a dû se rééquiper pour 10 000 euros ;

- il a subi un préjudice moral de 15 000 euros.

Par un mémoire en défense, enregistrés le 17 janvier 2022, le ministre de l'Europe et des affaires étrangères conclut au rejet de la requête de M. C....

Il fait valoir que les moyens soulevés par M. C... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général de la fonction publique ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. B...,

- et les conclusions de M. Sibilli, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. C... a fait l'objet le 4 novembre 2015, après avis favorable en vue de son habilitation sécurité, d'une décision du ministre des affaires étrangères et du développement international portant affectation à l'ambassade de France au Caire à compter du 15 décembre 2015, au titre du volontariat civil international. Cette décision a été rapportée le 10 décembre 2015 par le ministre, l'habilitation sécurité n'ayant en définitive pas été accordée. M. C... demande régulièrement à la Cour la réformation du jugement du 21 janvier 2021 par lequel le tribunal administratif de Paris, après avoir retenu l'illégalité fautive de la décision du 4 novembre 2015 mentionnée ci-dessus, a condamné l'Etat à lui verser 3 500 euros, en réparation des conséquences dommageables cette décision du 4 novembre 2015, en portant cette somme à la somme de 70 000 euros demandée.

2. Toute illégalité commise par l'administration constitue une faute susceptible d'engager sa responsabilité, pour autant qu'il en soit résulté un préjudice direct et certain. Ainsi que l'ont retenu à bon droit les premiers juges au point 3 de leur jugement, comme le faisait valoir le requérant, la décision du 4 novembre 2015 affectant M. C... au titre du volontariat civil international en administration à compter du 10 décembre suivant au Caire (Egypte) est entachée d'illégalité.

3. M. C... demande à ce titre, en premier lieu, la réparation du préjudice subi à raison du différentiel de rémunération résultant de la rupture conventionnelle du contrat de travail le liant à son ancien employeur, au cours de la période précédant la conclusion d'un nouveau contrat de travail. Il résulte toutefois de l'instruction que l'intéressé a conclu cette rupture conventionnelle dès le 27 octobre 2015, soit avant le 4 novembre 2015, alors qu'à cette date, et malgré les indications qu'avait pu donner l'administration, il n'avait pas été confirmé dans son affectation comme volontaire civil international. La circonstance que la rupture conventionnelle nécessite un délai de rétractation du salarié et un délai d'agrément par l'autorité administrative, à supposer qu'un tel délai soit justifié, est sans incidence sur ce qui précède. Le requérant ne peut non plus se plaindre de ne pas avoir bénéficié de la rémunération qu'il aurait pu percevoir à l'ambassade du Caire la première année ni, en tout état de cause la deuxième année, dès lors qu'il ne pouvait occuper cet emploi en l'absence d'habilitation confidentiel défense.

4. En deuxième lieu, si le requérant soutient avoir subi un préjudice matériel à raison de la vente de ses meubles et de l'obligation de se rééquiper intégralement, il ne justifie cependant pas de la consistance de ce préjudice.

5. En troisième lieu, il résulte de l'instruction que M. C... a résilié son contrat de bail après le 4 novembre 2015. A raison du lien direct et certain entre cette résiliation et la faute résultant de l'illégalité de cette décision, il est fondé à demander réparation des troubles dans les conditions d'existence occasionnés par le fait de se trouver sans logement, l'obligation d'en rechercher un nouveau, et l'obligation de se faire héberger avec son épouse et son fils de sept mois chez sa sœur durant deux mois. Il sera fait une juste appréciation du trouble dans les conditions d'existence ainsi subi en l'évaluant à 5 000 euros. En revanche, en l'absence de lien suffisamment direct avec la décision litigieuse du 4 novembre 2015, le requérant ne peut demander la réparation du préjudice subi du fait du coût locatif plus élevé et de l'éloignement plus important de son nouveau logement.

6. En dernier lieu, M. C... soutient avoir subi un préjudice moral du fait de l'espoir déçu de son départ en Egypte et du dénuement dans lequel il s'est trouvé lorsqu'il a été informé de l'impossibilité de rejoindre ses nouvelles fonctions. Il sera fait une juste appréciation des conséquences de l'espèce en évaluant ce préjudice à 2 500 euros

7. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros au titre des frais exposés par M. C... à l'occasion de l'instance et non compris dans les dépens, sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

8. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que, par jugement du 21 janvier 2021, le tribunal administratif de Paris a condamné l'Etat à lui verser la somme de 7 500 euros, et, dans cette mesure, à demander la réformation de ce jugement.

D E C I D E :

Article 1er : L'Etat est condamné à verser la somme de 7 500 euros à M. C....

Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Paris du 21 janvier 2021 est réformé en tant qu'il est contraire à l'article 1er du présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera la somme de 2 500 euros à M. C... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Les conclusions de la requête de M. C... sont rejetées pour le surplus.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C... et au ministre de l'Europe et des affaires étrangères.

Délibéré après l'audience du 21 octobre 2022, à laquelle siégeaient :

- M. Carrère, président

- M. Soyez, président assesseur,

- M. Simon, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 10 novembre 2022.

Le rapporteur,

C. B...Le président,

S. CARRERE

La greffière,

E. LUCE

La République mande et ordonne au ministre de l'Europe et des affaires étrangères en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 21PA01464


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 9ème chambre
Numéro d'arrêt : 21PA01464
Date de la décision : 10/11/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. CARRERE
Rapporteur ?: M. Claude SIMON
Rapporteur public ?: M. SIBILLI
Avocat(s) : SAIDI

Origine de la décision
Date de l'import : 13/11/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2022-11-10;21pa01464 ?
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