Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 25 juin 2021 par laquelle le préfet de police a refusé le renouvellement de son titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination en cas d'exécution d'office, et lui a fait interdiction de retour sur le territoire d'une durée de trois ans.
Par un jugement n° 2113808 du 27 octobre 2021, le tribunal administratif de Paris a annulé l'arrêté du 25 juin 2021 et a enjoint au préfet de police de délivrer à M. A... un titre de séjour " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée, le 29 novembre 2021, le préfet de police demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n°2113808 du 27 octobre 2021 du tribunal administratif de Paris ;
2°) de rejeter la demande de M. A... devant le tribunal administratif.
Il soutient que :
- la présence de M. A... constitue une menace pour l'ordre public ;
- il ne justifie pas d'une vie privée et familiale en France ni d'une participation à l'éducation et à l'entretien de son enfant français.
Par des mémoires, enregistrés le 3 janvier et 25 août 2022, M. A..., représenté par Me Djemaoun, avocat, conclut au rejet de la requête du préfet de police et, à titre subsidiaire à l'annulation de l'arrêté préfectoral du 25 juin 2021, ainsi, qu'à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que les moyens présentés par le préfet ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. B... ;
- et les observations de Me Djemaoun, représentant M. A....
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., ressortissant malien, né en 1985, était titulaire d'un titre pluriannuel mention " vie privée et familiale " en qualité de parent d'enfant français. Par un arrêté du 25 juin 2021, le préfet de police a rejeté sa demande de renouvellement de ce titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire sans délai, et lui a fait interdiction de retour d'une durée de trois ans. Le préfet de police demande à la Cour d'annuler le jugement du 27 octobre 2021, par lequel le tribunal administratif de Paris a annulé cet arrêté du 25 juin 2021.
2. Aux termes de l'article L. 412-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, en vigueur depuis le 1er mai 2021 : " La circonstance que la présence d'un étranger en France constitue une menace pour l'ordre public fait obstacle à la délivrance et au renouvellement de la carte de séjour temporaire, de la carte de séjour pluriannuelle et de l'autorisation provisoire de séjour prévue aux articles L. 425-4 ou L. 425-10 ainsi qu'à la délivrance de la carte de résident et de la carte de résident portant la mention " résident de longue durée-UE ". Aux termes de l'article L. 411-4 du même code, en vigueur depuis le 1er mai 2021, qui a repris les dispositions de l'article L. 313-18 de l'ancien code code : " La carte de séjour pluriannuelle a une durée de validité de quatre ans, sauf lorsqu'elle est délivrée : / (...) / 10° Aux étrangers mentionnés aux articles L. 423-1, L. 423-7 et L. 423-23 ; dans ce cas, sa durée est de deux ans ". Aux termes de l'article L. 423-7 du même code, en vigueur depuis le 1er mai 2021, qui a repris les dispositions du 6° de l'article L. 313-11 : " L'étranger qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France et qui établit contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil, depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1 ". Et en vertu de l'article 371-2 du code civil, chacun des parents contribue à l'entretien et à l'éducation des enfants à proportion de ses ressources, de celles de l'autre parent, ainsi que des besoins de l'enfant.
3. D'une part, les infractions pénales commises par un étranger ne sauraient, à elles seules, justifier légalement une mesure de refus de délivrance ou de renouvellement de titre de séjour et d'éloignement et ne dispensent pas l'autorité compétente d'examiner, d'après l'ensemble des circonstances de l'affaire, si la présence de l'intéressé sur le territoire français est de nature à constituer une menace pour l'ordre public. Lorsque l'administration se fonde sur l'existence d'une telle menace, il appartient au juge de l'excès de pouvoir, saisi d'un moyen en ce sens, de rechercher si les faits qu'elle invoque à cet égard sont de nature à justifier légalement sa décision.
4. Il ressort des pièces du dossier que M. A... a été condamné le 21 mai 2015 par le tribunal correctionnel de Paris à une amende de 100 euros et à la suspension de son permis de conduire pendant une durée de deux mois, pour conduite d'un véhicule en ayant fait usage de stupéfiants le 15 mars 2015. Par un jugement du 13 septembre 2018, rendu en comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité, le président du tribunal de grande instance de Paris l'a condamné à une amende de 300 euros, pour conduite d'un véhicule malgré une suspension administrative ou judiciaire de permis de conduite le 31 août 2018. Par un jugement du 29 novembre 2018 rendu dans les mêmes conditions, le président du tribunal de grande instance de Paris a de nouveau condamné M. A... à une peine de deux mois d'emprisonnement avec sursis, à une amende de 500 euros et à une peine d'annulation du permis de conduire avec interdiction de solliciter un nouveau permis pendant une période d'un mois, pour conduite d'un véhicule en ayant fait usage de stupéfiants en récidive, le 27 mai 2018. Enfin, le 22 octobre 2019, M. A... a été condamné par le tribunal correctionnel de Versailles à quatre mois d'emprisonnement, 500 euros d'amende et à la confiscation du véhicule ayant servi à commettre une infraction, pour conduite d'un véhicule sans assurance et malgré l'annulation judiciaire du permis de conduire, le 4 mai 2019. Or pour répréhensibles qu'ils soient, ces faits, cantonnés à la conduite de véhicule sans permis de conduire et parfois sous l'emprise de stupéfiants, ne suffisent pas à faire regarder la présence de M. A... sur le territoire français comme constituant une menace pour l'ordre public, au sens de l'article L 412-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, de nature à faire obstacle au renouvellement de son titre de séjour.
5. D'autre part, M. A... a épousé en 2010 une Française avec laquelle il a eu un fils, de nationalité française. Si celui-ci vit désormais au domicile de sa mère, il résulte des décisions du juge aux affaires familiales du tribunal judiciaire de Bobigny que M. A... continue à exercer son autorité parentale et conserve un droit de visite, et qu'il a obligation de contribuer aux charges éducative de son enfant, en versant une somme de 150 euros par mois. Il ressort des pièces du dossier que l'intéressé fait effectivement usage de son droit de visite auprès de son fils et qu'il verse régulièrement une allocation à la mère de l'enfant, quoique d'un montant inférieur à celui fixé par l'autorité judiciaire. M. A... établit également, par la production d'attestations, suivre la scolarité de son enfant. Il doit ainsi être regardé comme participant effectivement à l'éducation et à l'entretien de son enfant français.
6. Il résulte de ce qui précède que le préfet de police n'est pas fondé à soutenir que, par le jugement attaqué, c'est à tort que le tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 25 juin 2021, portant refus de séjour, obligation de quitter le territoire et interdiction de retour en France d'une durée de trois ans.
Sur les frais liés au litige :
7. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros au titre des frais exposés par M. A... et non compris dans les dépens.
D E C I D E :
Article 1er : La requête du préfet de police est rejetée.
Article 2 : L'Etat versera à M. A... la somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et des outre-mer et à M. C... A....
Copie en sera adressé au préfet de police.
Délibéré après l'audience du 21 septembre 2022, à laquelle siégeaient :
- M. Soyez, président,
- M. Simon, premier conseiller,
- Mme Boizot, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 20 octobre 2022.
Le rapporteur,
C. B...Le président,
J-E. SOYEZLa greffière,
E. LUCE
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 21PA06080