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28/07/2022 | FRANCE | N°22PA00027

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 4ème chambre, 28 juillet 2022, 22PA00027


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler l'arrêté du 30 décembre 2020 par lequel le préfet du Val-de-Marne a refusé son admission au séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de 30 jours à compter de la notification de l'arrêté et a fixé la Côte d'Ivoire comme pays de destination.

Par un jugement n° 2102553 du 19 novembre 2021, le tribunal administratif de Melun a annulé l'arrêté du 30 décembre 2020, enjoint à l'autorité préfectorale

compétente de délivrer à M. A... un titre de séjour mention " vie privée et familiale " dans...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler l'arrêté du 30 décembre 2020 par lequel le préfet du Val-de-Marne a refusé son admission au séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de 30 jours à compter de la notification de l'arrêté et a fixé la Côte d'Ivoire comme pays de destination.

Par un jugement n° 2102553 du 19 novembre 2021, le tribunal administratif de Melun a annulé l'arrêté du 30 décembre 2020, enjoint à l'autorité préfectorale compétente de délivrer à M. A... un titre de séjour mention " vie privée et familiale " dans le délai de deux mois à compter de la notification du jugement et mis à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros à verser au conseil de M. A... sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés le 4 janvier 2022 le 1er février 2022 et le 20 mai 2022, le préfet du Val-de-Marne demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement dans toutes ses dispositions ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. A... devant le tribunal administratif de Melun.

Il soutient que :

- c'est à tort que les premiers juges ont annulé son arrêté du 30 décembre 2020, au motif qu'il aurait porté au droit de M. A... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ;

- c'est également à tort que le tribunal lui a enjoint de délivrer un titre de séjour à M. A... et a mis à sa charge la somme de 1 200 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Par un mémoire en défense, enregistré le 4 mai 2022, M. A..., représenté par

Me Luce, demande à la Cour :

1°) de rejeter la requête ;

2°) d'enjoindre au préfet du Val-de-Marne d'exécuter le jugement du tribunal administratif de Melun du 19 novembre 2021, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

3°) à titre subsidiaire, d'enjoindre à l'autorité préfectorale compétente de réexaminer sa demande à la lumière des motifs de la décision à intervenir et de prendre une nouvelle décision dans le délai d'un mois à compter de la notification de cette décision, sous astreinte de dix euros par jour de retard, et de lui délivrer dans l'attente une autorisation provisoire de séjour et de travail ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 800 euros à verser à son conseil, en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sous réserve qu'elle renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.

Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Paris du 18 février 2022.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Mantz, rapporteur,

- et les observations de Me Luce pour M. A....

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant ivoirien entré en France le 10 octobre 2017 selon ses déclarations, a sollicité, le 6 juillet 2020, la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors en vigueur. Par un arrêté du 30 décembre 2020, le préfet de police lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour et l'a obligé à quitter le territoire dans un délai de trente jours, en fixant le pays de destination. Par un jugement du 19 novembre 2021, le tribunal administratif de Melun a annulé cet arrêté et a enjoint à l'autorité territorialement compétente de délivrer à M. A... un titre de séjour dans un délai de deux mois. Le préfet du Val-de-Marne relève appel de ce jugement.

Sur l'appel principal du préfet du Val-de-Marne :

2. Il ressort des pièces du dossier que M. A... a été inscrit, au titre de l'année scolaire 2018-2019, en seconde générale et technologique au sein du lycée Fernand Léger à Ivry-sur-Seine (Val-de-Marne). Il y a obtenu de très bons résultats d'ensemble, se voyant notamment attribuer la mention " félicitations " au terme des 2ème et 3ème trimestres et s'étant fait en particulier remarquer pour son comportement volontariste et participatif. Il a ensuite, au titre de l'année scolaire 2019-2020, intégré la 1ère STI2D (Sciences et technologies de l'industrie et du développement durable) du lycée Jean Macé à Vitry-sur-Seine (Val-de-Marne), où il a également fait preuve d'une motivation et d'un sérieux reconnus par l'ensemble de ses professeurs, obtenant notamment la mention " félicitations " au 3ème trimestre. A la date de l'arrêté attaqué, M. A..., qui venait d'achever son premier trimestre de Terminale STI2D, a de nouveau fait l'objet d'une très bonne appréciation, le conseil de classe soulignant un " très bon trimestre " et le félicitant pour son " attitude exemplaire ". L'intéressé a d'ailleurs obtenu son baccalauréat à la session de juin 2021 avec une moyenne finale de 12,61 points et une mention " assez bien ". Il ressort en outre des nombreuses attestations produites, notamment de professeurs à titre individuel, de la proviseure-adjointe du lycée Fernand Léger et du proviseur du lycée Jean Macé, de l'équipe pédagogique des Terminales STI2D du lycée Jean Macé, de la classe de Terminale STI2D dans son ensemble, de la coordinatrice de la structure d'accueil et d'inclusion pour élèves non francophones du lycée Fernand Léger, d'enseignants chargés de cours au sein de la bibliothèque Couronnes à Paris 20ème, des coordinateurs du réseau de familles d'accueil JRS Val-de-Marne, ainsi que de l'hébergeante de M. A... jusqu'en septembre 2020 et du supérieur de la communauté des frères mineurs capucins D... qui l'a hébergé à compter du mois d'octobre 2020, que l'intéressé s'est fait unanimement apprécier pour sa volonté d'intégration dans la société française, notamment professionnelle, son intérêt et sa curiosité pour la langue et la culture françaises et sa persévérance au travail dans des conditions matérielles parfois difficiles. Par suite, dans les circonstances particulières de l'espèce, eu égard notamment aux gages sérieux d'insertion sociale et professionnelle que présente l'intéressé, et alors même que la date de naissance qu'il déclare n'est pas établie et qu'il ne justifie pas être totalement dépourvu d'attaches familiales ou autres dans son pays d'origine, le préfet du Val-de-Marne, en refusant son admission au séjour, a commis une erreur manifeste d'appréciation.

3. Il résulte de ce qui précède que le préfet du Val-de-Marne n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Melun a annulé son arrêté du 30 décembre 2020 refusant l'admission au séjour de M. A... et l'obligeant à quitter le territoire français.

Sur l'appel incident de M. A... :

En ce qui concerne les conclusions à fin d'exécution du jugement rendu par le tribunal administratif :

4. Il n'incombe pas à la présente formation de jugement de la Cour de statuer sur la demande de M. A... tendant à l'exécution du jugement n° 2102553 du tribunal administratif de Melun du 19 novembre 2021. De telles conclusions ne peuvent être, par suite, que rejetées.

En ce qui concerne les conclusions à fin d'injonction :

5. Eu égard au motif d'annulation retenu au point 2, l'exécution du présent arrêt implique que soit délivré à M. A... un titre de séjour mention " vie privée et familiale ". Cette délivrance ayant toutefois déjà été ordonnée par le tribunal administratif de Melun, il n'y a pas lieu de donner suite aux conclusions d'appel à fin d'injonction de M. A....

Sur les frais liés à l'instance :

6. M. A... ayant été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale, son avocat peut se prévaloir des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique. Il y a lieu dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me Luce, avocat de M. A..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de l'Etat le versement à cet avocat de la somme de 1 500 euros.

DECIDE :

Article 1er : La requête du préfet du Val-de-Marne et l'appel incident de M. A... sont rejetés.

Article 2 : L'Etat versera à Me Luce la somme de 1 500 euros en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que cet avocat renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et des outre-mer et à M. C... A....

Copie en sera adressée au préfet du Val-de-Marne.

Délibéré après l'audience du 1er juillet 2022, à laquelle siégeaient :

- Mme Heers, présidente de chambre,

- Mme Briançon, présidente-assesseure,

- M. Mantz, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 28 juillet 2022.

Le rapporteur,

P. MANTZ

La présidente,

M. B...

La greffière,

O. BADOUX-GRARE

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 22PA00027 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 22PA00027
Date de la décision : 28/07/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme HEERS
Rapporteur ?: M. Pascal MANTZ
Rapporteur public ?: M. BARONNET
Avocat(s) : LUCE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/08/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2022-07-28;22pa00027 ?
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