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28/07/2022 | FRANCE | N°21PA05713

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 4ème chambre, 28 juillet 2022, 21PA05713


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... D... a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 14 octobre 2020 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours en fixant le pays de renvoi, et a prononcé à son encontre une interdiction de retour pour une durée de deux ans.

Par un jugement n° 2012489 du 12 octobre 2021, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

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rocédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 8 novembre 2021, M. D..., représ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... D... a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 14 octobre 2020 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours en fixant le pays de renvoi, et a prononcé à son encontre une interdiction de retour pour une durée de deux ans.

Par un jugement n° 2012489 du 12 octobre 2021, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 8 novembre 2021, M. D..., représenté par Me Nessah, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", dans le délai d'un mois à compter de la notification de la décision à intervenir et sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre de l'article

L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

Sur la décision portant refus de titre de séjour :

- il justifie d'une présence continue sur le territoire français depuis 2003 ;

- la décision méconnaît les stipulations de l'article 6.5 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié, dès lors notamment qu'il justifie d'une ancienneté de présence continue en France depuis 2003 ;

- elle est entachée d'un vice de procédure en l'absence de saisine de la commission du titre de séjour ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation du fait d'un défaut d'examen de sa situation dans son ensemble ;

- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors qu'elle porte une atteinte disproportionnée à son droit de mener une vie privée normale.

Sur la décision portant interdiction de retour pour une durée de deux ans :

- elle est insuffisamment motivée au regard des quatre critères prévus au III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle est entachée d'une erreur d'appréciation dès lors qu'elle se fonde sur le seul critère tiré de ce qu'il aurait fait l'objet de précédentes mesures d'éloignement auxquelles il se serait soustrait.

La requête a été communiquée au préfet de la Seine-Saint-Denis qui n'a pas présenté de mémoire en défense.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. C... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A... D..., ressortissant algérien né le 28 janvier 1972, entré en France en 2003 selon ses déclarations, a sollicité, le 8 juillet 2019, d'une part son admission au séjour au titre de la vie privée et familiale et en qualité de salarié sur le fondement des articles 6.1, 6.5 et 7 b) de l'accord franco-algérien modifié et, d'autre part, son admission exceptionnelle au séjour sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 14 octobre 2020, le préfet de la Seine-Saint-Denis lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours, a fixé le pays de renvoi et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de deux ans. M. D... relève appel du jugement du 12 octobre 2021 par lequel le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne la décision portant refus de titre de séjour :

2. D'une part, aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien modifié : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : 1. au ressortissant algérien, qui justifie par tout moyen résider en France depuis plus de dix ans ou plus de quinze ans si, au cours de cette période, il a séjourné en qualité d'étudiant. (...) / 5. au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (...) ".

3. D'autre part, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".

4. Enfin, en application de l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors applicable, le préfet est tenu de saisir la commission du titre du séjour du seul cas des algériens qui remplissent effectivement les conditions prévues par l'accord franco-algérien auxquels il envisage de refuser le titre de séjour sollicité et non de celui de tous les demandeurs qui se prévalent de ces stipulations.

5. En premier lieu, M. D... déclare qu'il a " orienté sa demande de titre de séjour au titre des dix ans de présence sur le territoire ". Il doit ainsi être regardé comme invoquant les stipulations susvisées du 1. de l'article 6 de l'accord franco-algérien modifié. Il ressort toutefois des pièces du dossier qu'au titre de l'année 2011, M. D... ne produit qu'une promesse d'embauche en date du 17 juin 2011, un avis d'audience devant le tribunal administratif de Montpellier en date du 2 septembre 2011 dans le cadre de la contestation d'une décision de refus de séjour du préfet de l'Hérault du 30 septembre 2009, ainsi que la lettre de notification du 17 octobre 2011 du jugement correspondant à cette contestation du tribunal précité du 10 octobre 2011, dont la lecture fait au demeurant apparaître que l'intéressé n'était pas présent à l'audience. Ces pièces étant insuffisantes à établir la présence continue de M. D... sur le territoire français au titre de l'année 2011, alors par ailleurs qu'il n'a produit aucune pièce au titre du dernier trimestre de l'année 2010, ce dernier ne justifie pas résider en France depuis plus de dix ans à la date de l'arrêté attaqué. Par suite et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les pièces produites au soutien du moyen postérieures à l'année 2011, M. D... n'est pas fondé à invoquer ces stipulations.

6. En second lieu, M. D... fait valoir qu'il est arrivé en France en 2003 et n'a pas quitté le territoire français depuis cette date, qu'il est inconnu des services de police et de justice et justifie d'une parfaite intégration sociale et professionnelle. Toutefois, d'une part, ainsi qu'il a été dit au point 5, M. D... ne justifie pas résider en France de manière continue depuis plus de dix ans à la date de la décision attaquée. D'autre part, il est célibataire sans charges de famille et ne justifie pas être dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine où il doit être regardé comme ayant vécu jusqu'à l'âge de 40 ans au moins. Enfin, il n'établit aucune intégration particulière en France, notamment professionnelle. Par suite, M. D... n'est pas fondé à invoquer les stipulations du 5. de l'article 6 de l'accord franco-algérien modifié ni celles de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

7. En troisième lieu, il résulte de ce qui a été dit aux points 5 et 6 que le préfet n'était pas tenu de réunir préalablement la commission du titre de séjour avant de statuer sur la demande de M. D.... Par suite, le moyen tiré d'un vice de procédure tenant à un défaut de saisine de cette commission ne peut, dès lors, qu'être écarté.

8. Enfin, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'en refusant de faire application de son pouvoir discrétionnaire de régularisation, le préfet de la Seine-Saint-Denis aurait entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation.

En ce qui concerne la décision portant interdiction de retour sur le territoire français :

9. Aux termes du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa version applicable au litige, et désormais codifié à l'article L. 612-10 du même code : " L'autorité administrative, par une décision motivée, assortit l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français, d'une durée maximale de trois ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français, lorsque aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger. / Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative ne prononce pas d'interdiction de retour. / [...] Lorsqu'elle ne se trouve pas en présence du cas prévu au premier alinéa du présent III, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, assortir l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée maximale de deux ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français. / [...] La durée de l'interdiction de retour mentionnée aux premier, sixième et septième alinéas du présent III ainsi que le prononcé et la durée de l'interdiction de retour mentionnée au quatrième alinéa sont décidés par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français [...] ".

10. Si le préfet doit tenir compte, pour décider de prononcer à l'encontre d'un étranger soumis à une obligation de quitter sans délai le territoire français une interdiction de retour et fixer sa durée, de chacun des quatre critères énumérés au III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ces mêmes dispositions ne font pas obstacle à ce qu'une telle mesure soit décidée quand bien même une partie de ces critères, qui ne sont pas cumulatifs, ne serait pas remplie. Il résulte en outre des termes mêmes de ces dispositions que l'autorité administrative prend en compte les circonstances humanitaires qu'un étranger peut faire valoir et qui peuvent justifier qu'elle ne prononce pas d'interdiction de retour à son encontre.

11. D'une part, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales n'est pas en lui-même opérant à l'encontre de la décision portant interdiction de retour sur le territoire français.

12. D'autre part, aux termes de la décision litigieuse, le préfet de la Seine-Saint-Denis a relevé que l'intéressé a déclaré être entré en France le 6 septembre 2003 sans justifier de cette date, et qu'il ne justifiait pas de l'intensité, de l'ancienneté et de la stabilité de ses liens personnels et familiaux en France, ni de conditions d'existence pérennes, ni même d'une insertion forte dans la société française. Le préfet a en outre fait état de la situation professionnelle et familiale de M. D... et rappelé que l'intéressé a fait l'objet de deux mesures d'éloignement auxquelles il s'est soustrait, éléments sur lesquels, parmi ceux mentionnés au huitième alinéa du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet s'est fondé pour fixer à deux ans l'interdiction de retour sur le territoire français. Si l'autorité administrative doit aussi, si elle estime que figure au nombre des motifs qui justifie sa décision une menace pour l'ordre public, indiquer les raisons pour lesquelles la présence de l'intéressé sur le territoire français doit, selon elle, être regardée comme une telle menace, elle n'est pas tenue, à peine d'irrégularité, de le préciser expressément si, comme en l'espèce, après prise en compte de ce critère, elle ne retient pas cette circonstance au nombre des motifs de sa décision. Dans ces conditions, la décision litigieuse atteste de la prise en compte par le préfet de la Seine-Saint-Denis, au vu de la situation de l'intéressé, de l'ensemble des critères prévus par la loi. Au regard de ces motifs, qui sont corroborés par ce qui a été dit aux points 5 et 6, et en l'absence de circonstances humanitaires qui justifieraient que l'autorité administrative ne prononce pas d'interdiction de retour, le préfet de la Seine-Saint-Denis a pu, sans commettre d'erreur manifeste d'appréciation, prononcer à l'encontre de l'intéressé une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de deux ans.

13. Il résulte de tout ce qui précède que M. D... n'est fondé pas à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, doivent être rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. D... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... D... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet de la Seine-Saint-Denis.

Délibéré après l'audience du 1er juillet 2022 à laquelle siégeaient :

- Mme Heers, présidente,

- Mme Briançon, présidente assesseure,

- M. Mantz, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 28 juillet 2022.

Le rapporteur,

P. C...

La présidente,

M. B...

La greffière,

O. BADOUX-GRARE

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 21PA05713 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 21PA05713
Date de la décision : 28/07/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme HEERS
Rapporteur ?: M. Pascal MANTZ
Rapporteur public ?: M. BARONNET
Avocat(s) : NESSAH

Origine de la décision
Date de l'import : 02/08/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2022-07-28;21pa05713 ?
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