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05/07/2022 | FRANCE | N°21PA05262

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 8ème chambre, 05 juillet 2022, 21PA05262


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C... a demandé au Tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 8 juillet 2021 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a décidé son transfert aux autorités allemandes pour l'examen de sa demande d'asile.

Par un jugement n° 2110133 du 24 août 2021, le Tribunal administratif de Montreuil a annulé l'arrêté du 8 juillet 2021, a enjoint au préfet de la Seine-Saint-Denis de délivrer à

M. C... dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement, l'attes

tation de demande d'asile lui permettant de présenter sa demande d'asile à l'Office françai...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C... a demandé au Tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 8 juillet 2021 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a décidé son transfert aux autorités allemandes pour l'examen de sa demande d'asile.

Par un jugement n° 2110133 du 24 août 2021, le Tribunal administratif de Montreuil a annulé l'arrêté du 8 juillet 2021, a enjoint au préfet de la Seine-Saint-Denis de délivrer à

M. C... dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement, l'attestation de demande d'asile lui permettant de présenter sa demande d'asile à l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et a mis à la charge de l'État une somme de 1 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 29 septembre 2021, le préfet de la Seine-Saint-Denis demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2110133 du 24 août 2021 du Tribunal administratif de Montreuil ;

2°) de rejeter la demande de M. C... présentée devant le Tribunal administratif de Montreuil.

Il soutient que :

- M. C... et Mme B... ne peuvent être regardés comme ayant mentionné à tort être célibataires dès lors que des interprètes en langue anglaise, langue qu'ils ont déclaré comprendre, sont intervenus pendant leurs entretiens et que les documents relatifs à la procédure Dublin leur ont été fournis dans cette langue ; en outre, au vu du caractère exclusivement déclaratif du statut marital qui unirait M. C... et Mme B..., des dates d'entrée dans les pays de l'Union Européenne qui ne correspondent pas aux déclarations de l'intéressé, du silence de Mme B... quant à son statut de réfugié en Italie depuis 2007,

M. C... n'établit pas être marié avec Mme B... ;

- les autres moyens soulevés par M. C... en première instance ne sont pas fondés.

Par un mémoire en défense, enregistré le 11 avril 2022, M. C..., représenté par Me Pafundi, conclut au rejet de la requête et demande à la Cour :

1°) de l'admettre au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire ;

2°) de prononcer un non-lieu à statuer sur les conclusions à fin d'annulation présentées par le préfet de la Seine-Saint-Denis ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à son conseil en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la décision de transfert en litige n'est plus susceptible d'exécution depuis le

2 mars 2022 ;

- à titre subsidiaire, le préfet de la Seine-Saint-Denis a commis une erreur manifeste d'appréciation dans l'application des dispositions de l'article 17 du règlement (UE)

n° 604/2013.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le règlement n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le décret n° 2020-1717 du 28 décembre 2020 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme D... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. C..., ressortissant nigérian né le 19 juillet 1986, est entré sur le territoire français le 7 mai 2021 et a déposé une demande d'asile le 20 mai 2021 auprès des services de la préfecture de la Seine-Saint-Denis. La consultation du système " Eurodac " ayant fait apparaître que ses empreintes avaient été relevées le 17 juin 2016 par les autorités italiennes et le 9 mai 2018 par les autorités allemandes, le préfet de la Seine-Saint-Denis a saisi le

25 mai 2021 les autorités italiennes et le 26 mai 2021 les autorités allemandes d'une demande de reprise en charge de l'intéressé. Ces dernières ont répondu favorablement à cette demande par une décision du 31 mai 2021. Par un arrêté du 8 juillet 2021, le préfet de la Seine-Saint-Denis a décidé du transfert de M. C... aux autorités allemandes. Par un jugement du

24 août 2021, le Tribunal administratif de Montreuil a annulé cet arrêté du 8 juillet 2021 et a enjoint au préfet de la Seine-Saint-Denis de délivrer à M. C... dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement, l'attestation de demande d'asile lui permettant de présenter sa demande d'asile à l'Office français de protection des réfugiés et apatrides. Le préfet de la Seine-Saint-Denis relève appel de ce jugement.

Sur la demande d'admission provisoire à l'aide juridictionnelle :

2. Il résulte de l'article 20 de la loi du 10 juillet 1991 modifiée relative à l'aide juridique : " Dans les cas d'urgence (...) l'admission provisoire à l'aide juridictionnelle peut être prononcée (...) par la juridiction compétente ou son président (...) ". Aux termes de l'article 61 du décret du 28 décembre 2020 portant application de la loi n° 91-647 du

10 juillet 1991 relative à l'aide juridique : " L'admission provisoire peut être accordée dans une situation d'urgence, notamment lorsque la procédure met en péril les conditions essentielles de vie de l'intéressé (...) / L'admission provisoire est accordée par (...) le président de la juridiction saisie, soit sur une demande présentée sans forme par l'intéressé, soit d'office si celui-ci a présenté une demande d'aide juridictionnelle (...) sur laquelle il n'a pas encore été statué. ".

3. Il ressort des pièces du dossier que M. C..., qui a présenté son mémoire en défense le 11 avril 2022, n'a pas déposé de demande d'aide juridictionnelle auprès du bureau d'aide juridictionnelle. Eu égard aux circonstances de l'espèce, alors que la situation d'urgence, au sens de l'article 20 de la loi du 10 juillet 1991, n'est pas caractérisée, il n'y a pas lieu de prononcer l'admission provisoire de M. C... au bénéfice de l'aide juridictionnelle.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

4. Aux termes du paragraphe 1 de l'article 29 du règlement n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013, le transfert du demandeur vers l'Etat membre responsable de l'examen de sa demande d'asile doit s'effectuer " dès qu'il est matériellement possible et, au plus tard, dans un délai de six mois à compter de l'acceptation par un autre Etat membre de la requête aux fins de la prise en charge ou de reprise en charge de la personne concernée ou de la décision définitive sur le recours ou la révision lorsque l'effet suspensif est accordé conformément à l'article 27, paragraphe 3 ". Aux termes du paragraphe 2 du même article : " Si le transfert n'est pas exécuté dans le délai de six mois, l'État membre responsable est libéré de son obligation de prendre en charge ou de reprendre en charge la personne concernée et la responsabilité est alors transférée à l'État membre requérant. Ce délai peut être porté à un an au maximum s'il n'a pas pu être procédé au transfert en raison d'un emprisonnement de la personne concernée ou à dix-huit mois au maximum si la personne concernée prend la fuite ".

5. Aux termes du premier alinéa de l'article L. 742-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile repris à l'article L. 572-1 de ce code : " Sous réserve du second alinéa de l'article L. 742-1, l'étranger dont l'examen de la demande d'asile relève de la responsabilité d'un autre Etat peut faire l'objet d'un transfert vers l'Etat responsable de cet examen ". Aux termes du I de l'article L. 742-4 du même code dont les dispositions ont été reprises à l'article L. 572-5 de ce code : " L'étranger qui a fait l'objet d'une décision de transfert mentionnée à l'article L. 742-3 peut, dans le délai de quinze jours à compter de la notification de cette décision, en demander l'annulation au président du tribunal administratif. / Le président ou le magistrat qu'il désigne à cette fin (...) statue dans un délai de quinze jours à compter de sa saisine (...) ". Aux termes du second alinéa de l'article L. 742-5 du même code dont les dispositions ont été reprises à l'article L. 751-13 de ce code : " " La décision de transfert ne peut faire l'objet d'une exécution d'office ni avant l'expiration d'un délai de quinze jours ou, si une décision de placement en rétention prise en application de l'article L. 551-1 ou d'assignation à résidence prise en application de l'article L. 561-2 a été notifiée avec la décision de transfert, avant l'expiration d'un délai de quarante-huit heures, ni avant que le tribunal administratif ait statué, s'il a été saisi ". L'article L. 742-6 du même code dont les dispositions ont été reprises à l'article L. 572-7 de ce code prévoit que : " Si la décision de transfert est annulée, il est immédiatement mis fin aux mesures de surveillance prévues au livre V. L'autorité administrative statue à nouveau sur le cas de l'intéressé ".

6. Il résulte de la combinaison de ces dispositions que l'introduction d'un recours devant le tribunal administratif contre la décision de transfert a pour effet d'interrompre le délai de six mois fixé à l'article 29 du règlement (UE) n° 604/2013, qui courait à compter de l'acceptation du transfert par l'Etat requis, délai qui recommence à courir intégralement à compter de la date à laquelle le jugement du tribunal administratif statuant au principal sur cette demande, a été notifié à l'administration, quel que soit le sens de sa décision. Ni un appel ni le sursis à exécution du jugement accordé par le juge d'appel sur une demande présentée en application de l'article R. 811-15 du code de justice administrative n'ont pour effet d'interrompre ce nouveau délai. Son expiration a pour conséquence qu'en application des dispositions du paragraphe 2 de l'article 29 du règlement précité, l'Etat requérant devient responsable de l'examen de la demande de protection internationale.

7. En l'espèce, le délai de six mois imparti à l'administration pour procéder au transfert de M. C... à compter de l'acceptation, le 31 mai 2021, par les autorités allemandes de la demande de reprise en charge de l'intéressé a été interrompu par la présentation devant le Tribunal administratif de Montreuil, le 24 juillet 2021, de la demande de M. C... tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Seine-Saint-Denis du 8 juillet 2021 ordonnant son transfert aux autorités allemandes. Ce délai de six mois a recommencé à courir à compter de la notification à l'administration, le 30 août 2021, du jugement du 24 août 2021 par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Montreuil a annulé cet arrêté. Par suite, le délai de six mois ayant expiré le 28 février 2022, l'Allemagne a été libérée, en application des dispositions du paragraphe 2 de l'article 29 du règlement du 26 juin 2013, de son obligation de reprise en charge de M. C... et la décision de transfert en litige est devenue caduque.

8. Il résulte de ce qui a été dit que les conclusions de la requête du préfet de la Seine-Saint-Denis sont devenues sans objet. Il n'y a plus lieu d'y statuer.

Sur les frais liés à l'instance :

9. Il ne ressort pas des pièces du dossier que M. C... ait présenté une demande d'aide juridictionnelle dans la procédure d'appel. Dans ces conditions, son avocat ne peut pas se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Par suite, les conclusions présentées à ce titre par Me Pafundi, avocat de M. C..., doivent être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur la demande d'admission provisoire de M. C... au bénéfice de l'aide juridictionnelle.

Article 2 : Il n'y a plus lieu de statuer sur la requête du préfet de la Seine-Saint-Denis.

Article 3 : Les conclusions présentées par Me Pafundi, avocat de M. C..., sur le fondement des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à M. A... C....

Copie en sera adressée au préfet de la Seine-Saint-Denis.

Délibéré après l'audience du 2 juin 2022, à laquelle siégeaient :

- M. Ho Si Fat, président de la formation de jugement,

- Mme Collet, première conseillère

- Mme Larsonnier, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 5 juillet 2022.

La rapporteure,

V. D... Le président,

F. HO SI FAT

La greffière,

N. COUTY

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 21PA05262


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 21PA05262
Date de la décision : 05/07/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. HO SI FAT
Rapporteur ?: Mme Virginie LARSONNIER
Rapporteur public ?: Mme BERNARD
Avocat(s) : MAPCHE TAGNE

Origine de la décision
Date de l'import : 12/07/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2022-07-05;21pa05262 ?
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