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30/06/2022 | FRANCE | N°20PA02535

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 4ème chambre, 30 juin 2022, 20PA02535


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... C... a demandé au tribunal administratif de Paris de condamner l'Etat au paiement d'une somme résultant de la différence entre les salaires " demi-nets " perçus et ceux qu'il aurait dû percevoir au titre de l'année 2012.

Par un jugement n° 1812910/5-2 du 2 juillet 2020, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire en réplique enregistrés le 1er septembre 2020 et le 1er avril 2021, M. B... C..., représenté

par Me Marchand, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1812910/5-2 du 2 juillet 20...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... C... a demandé au tribunal administratif de Paris de condamner l'Etat au paiement d'une somme résultant de la différence entre les salaires " demi-nets " perçus et ceux qu'il aurait dû percevoir au titre de l'année 2012.

Par un jugement n° 1812910/5-2 du 2 juillet 2020, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire en réplique enregistrés le 1er septembre 2020 et le 1er avril 2021, M. B... C..., représenté par Me Marchand, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1812910/5-2 du 2 juillet 2020 du tribunal administratif de Paris;

2°) de condamner l'Etat à lui verser une indemnité égale à la différence entre les salaires " demi-nets " perçus en faisant application de l'arrêté du 9 décembre 2005 et les salaires demi-nets qu'il aurait dû percevoir au titre de l'année 2012 en faisant application des taux de prélèvements prévus par les dispositions de l'article 67 de l'annexe IX au code général des impôts ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le tribunal ne pouvait lui opposer la prescription quadriennale dès lors :

- qu'il ignorait l'existence de la créance jusqu'au 25 avril 2017, date de la lecture du jugement du tribunal administratif de Nantes ;

- qu'un conservateur des hypothèques n'étant pas rémunéré par l'Etat mais percevant des salaires payés par les requérants selon les dispositions des articles 879 et 884 du code général des impôts, il en résulte que le litige ne porte pas sur la réclamation d'une créance de rémunération auprès de l'Etat mais sur un prélèvement excessif opéré par l'Etat et qu'ainsi, le fait générateur est alors rattaché non à l'exercice au cours duquel la décision a été prise mais à l'exercice au cours duquel elle a été régulièrement notifiée, notification qui en l'espèce n'a pas eu lieu ;

- qu'il ne pouvait agir de lui-même au sens de l'article 3 de la loi du 31 décembre 1968, du fait du contexte d'instabilité juridique créé par l'Etat ;

- il est fondé à solliciter le versement d'une indemnité égale à la différence entre les salaires " demi-nets " perçus, en faisant application de l'arrêté du 9 décembre 2005, et les salaires demi-nets qu'il aurait dû percevoir au titre de l'année 2012, en faisant application des taux de prélèvements prévus par les dispositions de l'article 67 de l'annexe IX au code général des impôts.

Par un mémoire en défense, enregistré le 4 mars 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code civil ;

- le code général des impôts ;

- la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968 relative à la prescription des créances sur l'Etat, les départements, les communes et les établissements publics ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. D...,

- et les conclusions de M. Baronnet, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. C... a été nommé conservateur des hypothèques de 1ère catégorie à compter du 30 décembre 2011 et affecté au bureau des hypothèques de Paris (8ème bureau). M. C... a présenté, le 8 avril 2018, une demande préalable réceptionnée le 11 avril suivant, tendant au paiement de la différence entre les salaires qu'il a perçus au titre de l'année 2012 et ceux qu'il aurait dû percevoir selon lui. En l'absence de réponse à sa demande, il a demandé la condamnation de l'Etat à lui verser les salaires qu'il estime lui être dus du 1er janvier au 31 décembre 2012. Par un jugement du 2 juillet 2020 dont il relève appel, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

2. Pour rejeter sa demande, le tribunal administratif de Paris a relevé qu'était expiré le délai de prescription quadriennale prévu par les dispositions de l'article 3 de la loi du 31 décembre 1968 relative à la prescription des créances sur l'Etat, les départements, les communes et les établissements publics.

3. D'une part, aux termes de l'article 1er de la loi du 31 décembre 1968 relative à la prescription des créances sur l'Etat, les départements, les communes et les établissements publics : " Sont prescrites, au profit de l'Etat, des départements et des communes, sans préjudice des déchéances particulières édictées par la loi, et sous réserve des dispositions de la présente loi, toutes créances qui n'ont pas été payées dans un délai de quatre ans à partir du premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle les droits ont été acquis ". Aux termes de l'article 3 de la même loi : " La prescription ne court ni contre le créancier qui ne peut agir, soit par lui-même ou par l'intermédiaire de son représentant légal, soit pour une cause de force majeure, ni contre celui qui peut être légitimement regardé comme ignorant l'existence de sa créance ou de la créance de celui qu'il représente légalement. ".

4. D'autre part, aux termes de l'article 879 du code général des impôts, dans sa version alors applicable : " Il est payé par les requérants, aux conservateurs des hypothèques, des salaires pour l'accomplissement des formalités visées aux 1° et 2° de l'article 878. ". Aux termes de l'article 884 du même code : " Pour tenir compte au Trésor des dépenses qu'il assume pour l'exécution du service hypothécaire, il est établi, sur les salaires bruts annuels des conservateurs des hypothèques, un prélèvement, dont le taux, progressif par tranches, et les conditions d'application sont réglés par arrêté du ministre de l'économie et des finances. ".

5. Lorsqu'un litige oppose un agent public à son administration sur le montant des rémunérations auxquelles il a droit en application d'une réglementation, le fait générateur de la créance se trouve en principe dans les services accomplis par l'intéressé. La prescription est alors acquise au début de la quatrième année suivant chacune de celles au titre desquelles ses services auraient dû être rémunérés. Il en va toutefois différemment si le préjudice allégué résulte non de l'application d'une réglementation mais d'une décision individuelle illégale, le fait générateur de la créance devant alors être rattaché, non à l'exercice au cours duquel la décision a été prise, mais à celui au cours duquel elle a été régulièrement notifiée.

6. Le requérant soutient que le litige ne porte pas sur la réclamation d'une créance de rémunération auprès de l'Etat mais sur un prélèvement excessif opéré par l'Etat dès lors que les conservateurs des hypothèques perçoivent des salaires payés par les requérants desquels sont prélevées des sommes selon le barème établi par l'arrêté du 9 novembre 2005 qui, faute d'avoir fait l'objet d'une publication, était donc inapplicable. Toutefois, M. C... contestant l'application d'une règlementation qu'il considère être illégale, le litige relève de ceux opposant un agent public à son administration sur le montant des rémunérations auxquelles il a droit en application d'une réglementation. La créance trouvant son fait générateur dans le versement de ses rémunérations au cours de l'année 2012, il en résulte que le délai de prescription a commencé à courir à compter du 1er janvier 2013.

7. Si M. C... soutient n'avoir eu connaissance de l'arrêté du 9 novembre 2005 que par les jugements des tribunaux administratifs de Toulouse et de Nantes des 27 avril et 26 décembre 2017, il est constant cependant, ainsi que l'ont relevé les premiers juges, qu'il en avait eu connaissance dans le délai de prescription, cet arrêté étant mentionné dans la note PBO n° 83 du 7 décembre 2005 du sous-directeur du budget et de la logistique de la direction générale des impôts et dans la note PBO n° 2 du 4 avril 2008 du chef de service des ressources de la même direction dont il a été informé dans le cadre de ses fonctions, sans qu'y fasse obstacle la circonstance que l'application de ce texte a été ultérieurement déclarée illégale par le juge administratif. La simple circonstance que " l'administration [aurait] créé un contexte d'instabilité juridique et d'incompréhension " n'est pas de nature à le faire regarder comme n'ayant pu agir au sens de l'article 3 de la loi du 31 décembre 1968 précitée.

8. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions tendant à la condamnation de l'Etat et à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... C... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté numérique et industrielle.

Délibéré après l'audience du 17 juin 2022, à laquelle siégeaient :

- Mme Heers, présidente de chambre,

- Mme Briançon, présidente assesseure,

- M. Gobeill, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 30 juin 2022.

Le rapporteur,

J.-F. D...

La présidente,

M. A...La greffière,

V. BREME

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté numérique et industrielle, en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 20PA02535


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 20PA02535
Date de la décision : 30/06/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme HEERS
Rapporteur ?: M. Jean-François GOBEILL
Rapporteur public ?: M. BARONNET
Avocat(s) : C.V.S.

Origine de la décision
Date de l'import : 12/07/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2022-06-30;20pa02535 ?
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