Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 19 décembre 2019 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour et l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours en fixant le pays à destination duquel il pourra être renvoyé.
Par un jugement n° 2112462 du 16 septembre 2021, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et des pièces complémentaires, enregistrées les 18 décembre 2021 et 16 janvier 2022, M. A..., représenté par Me Partouche-Kohana, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 2112462 du 16 septembre 2021 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de police en date du 19 décembre 2019 refusant de lui délivrer un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et fixant le pays de renvoi ;
2°) d'annuler cet arrêté ;
3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de quinze jours sous astreinte de 100 euros par jour de retard, à défaut, de réexaminer sa situation administrative dans le même délai et de lui délivrer dans cette attente une autorisation provisoire de séjour sous la même astreinte.
Il soutient que :
- le jugement est insuffisamment motivé.
En ce qui concerne la décision portant refus de séjour :
- elle est insuffisamment motivée ;
- elle est entachée d'un défaut d'examen de sa situation personnelle ;
- elle est entachée d'un vice de procédure au motif que le préfet a omis de saisir la commission du titre de séjour ;
- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des conséquences sur sa situation personnelle.
En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire :
- elle est insuffisamment motivée ;
- elle est illégale par voie d'exception de l'illégalité du refus de délivrance d'un titre de séjour.
En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.
Par un mémoire en défense enregistré le 23 mai 2022 le préfet de police conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.
M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du 5 novembre 2021.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Boizot, rapporteur ;
- et les observations de Me Partouche-Kohana pour M. A....
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., ressortissant mauritanien né le 31 décembre 1976, déclare être entré en France en juillet 2006. Il a sollicité son admission exceptionnelle au séjour sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 19 décembre 2019, le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour et l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours en fixant le pays de renvoi. M. A... relève régulièrement appel du jugement n° 2112462 du 16 septembre 2021 qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté précité.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. Aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 sur le fondement du troisième alinéa de cet article peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. / (...) L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans. ".
3. Il ressort des nombreuses pièces du dossier, produites à hauteur d'appel, que M. A... justifie de manière suffisamment précise, pour chacune des années en cause à compter de 2010, à savoir, notamment, les nombreux bulletins de paye couvrant une période comprise entre mars 2010 et juin 2021 ainsi que des relevés bancaires faisant état de mouvements de fonds (retraits ou crédits) réguliers pour les années en litige, des avis d'imposition, des attestations de rechargement de son passe Navigo et des courriers administratifs, de l'ancienneté et de la continuité de son séjour sur le territoire français depuis plus de dix ans à la date de l'arrêté attaqué, daté de la fin de l'année 2019. Ainsi, dès lors que M. A... établit avoir résidé en France habituellement depuis plus de dix ans à la date de l'arrêté attaqué, le préfet de police était tenu, en application des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, de soumettre sa demande de titre de séjour à la commission du titre de séjour, pour avis, avant de se prononcer sur sa demande d'admission exceptionnelle au séjour. Ce vice de procédure a privé M. A... d'une garantie. Par suite, M. A... est fondé à demander l'annulation de la décision par laquelle le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, ainsi que, par voie de conséquence, des décisions l'obligeant à quitter le territoire français et fixant le pays de renvoi.
4. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner le moyen tiré de la régularité du jugement entrepris, que M. A... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté ses conclusions aux fins d'annulation, et à demander en conséquence à la Cour d'annuler le jugement et l'arrêté entrepris.
Sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte :
5. Eu égard au motif d'annulation retenu ci-dessus, l'exécution du présent arrêt n'implique pas nécessairement que le préfet de police délivre un titre de séjour à M. A.... En revanche, elle implique nécessairement que le préfet de police saisisse la commission du titre de séjour et réexamine la situation de M. A.... Il y a lieu, en application de l'article L. 911-2 du code de justice administrative, d'enjoindre au préfet de police d'y procéder, dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, sans qu'il soit besoin de prononcer une astreinte.
D E C I D E :
Article 1er : Le jugement n° 2112462 du 16 septembre 2021 du tribunal administratif de Paris et l'arrêté du 19 décembre 2019 du préfet de police sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au préfet de police de saisir la commission du titre de séjour et de procéder au réexamen de la situation de M. A... dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de police.
Délibéré après l'audience du 10 juin 2022, à laquelle siégeaient :
- M. Carrère, président de chambre,
- M. Soyez, président assesseur,
- Mme Boizot, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe de la Cour, le 28 juin 2022.
La rapporteure,
S. BOIZOTLe président,
S. CARRERE
La greffière,
C. DABERT
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 21PA06463