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28/06/2022 | FRANCE | N°21PA06286

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 1ère chambre, 28 juin 2022, 21PA06286


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 25 mars 2019 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 2010015 du 10 novembre 2021 le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa requête.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 10 décembre 2021, M.

A..., représenté par Me Besse, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du 10 novembre 2021 ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 25 mars 2019 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 2010015 du 10 novembre 2021 le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa requête.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 10 décembre 2021, M. A..., représenté par Me Besse, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du 10 novembre 2021 par lequel le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa requête ;

2°) d'annuler l'arrêté du 25 mars 2019 du préfet de la Seine-Saint-Denis refusant de lui délivrer un titre de séjour, et l'obligeant à quitter le territoire français, ou à titre subsidiaire d'annuler seulement cette obligation de quitter le territoire français ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de lui délivrer un titre de séjour, ou subsidiairement de réexaminer sa situation et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour, dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

S'agissant du refus de titre de séjour :

- il est entaché d'erreur de fait et d'un défaut d'examen particulier ;

- il est entaché d'erreur manifeste d'appréciation ;

- il méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

S'agissant de l'obligation de quitter le territoire français :

- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ; elle méconnaît les stipulations du 5) de l'article 6 de l'accord franco-algérien et celles de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

La requête a été communiquée au préfet de la Seine-Saint-Denis, qui n'a pas présenté de mémoire en défense.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, modifié, relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour des ressortissants algériens et de leurs familles ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code du travail ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme B... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant algérien, né en 1983, entré en France en octobre 2008 sous couvert d'un visa de court séjour, a sollicité le 26 juin 2017 son admission exceptionnelle au séjour en qualité de salarié. Par un arrêté du 25 mars 2019, le préfet de la Seine-Saint-Denis a rejeté sa demande et l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours. M. A... a contesté cette décision devant le tribunal administratif de Montreuil, lequel par un jugement du 10 novembre 2021, dont il fait appel, a rejeté sa requête.

Sur le refus de délivrance d'un titre de séjour :

2. Aux termes du b) de l'article 7 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " Les ressortissants algériens désireux d'exercer une activité professionnelle salariée reçoivent, après le contrôle médical d'usage et sur présentation d'un contrat de travail visé par les services du ministre chargé de l'emploi, un certificat de résidence valable un an pour toutes professions et toutes régions, renouvelable et portant la mention "salarié" : cette mention constitue l'autorisation de travail exigée par la législation française ; (...) ". Aux termes de l'article L. 5221-2 du code du travail : " Pour entrer en France en vue d'y exercer une profession salariée, l'étranger présente : / 1° Les documents et visas exigés par les conventions internationales et les règlements en vigueur ; / 2° Un contrat de travail visé par l'autorité administrative ou une autorisation de travail. ". Aux termes de l'article R. 5221-3 du même code, dans sa rédaction alors en vigueur : " L'autorisation de travail peut être constituée par l'un des documents suivants : (...) / 8° La carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ", délivrée en application du 1° de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ou le visa de long séjour valant titre de séjour mentionné au 7° de l'article R. 311-3 du même code, accompagné du contrat de travail visé. (...) ". Enfin, aux termes de l'article R. 5221-11 de ce code, alors en vigueur : " La demande d'autorisation de travail relevant des 4°, 8° (...) de l'article R. 5221-3 est faite par l'employeur. ".

3. Il est constant que si la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIRECCTE) a réceptionné le 26 décembre 2017 la demande d'autorisation de travail pour M. A..., transmise par son employeur, cette dernière a adressé une demande de pièces complémentaires à celui-ci par courrier du 25 juin 2018. Il résulte des dispositions précitées du code du travail qu'il n'appartient qu'à l'employeur de remplir toutes diligences pour s'assurer du traitement effectif de sa demande. Il ressort des pièces du dossier que le courrier du 25 juin 2018 de la DIRECCTE est resté sans réponse, ce qui l'a conduite à émettre le 16 août 2018, un avis défavorable à la demande d'autorisation de travail de l'intéressé. Si M. A... soutient que son employeur n'a pas reçu cette demande de pièces complémentaires, comme celui-ci en a attesté par courrier du 12 septembre 2018, n'en ayant eu connaissance qu'à la suite du passage de M. A... à la préfecture au cours de ce mois, il ne ressort pas des pièces du dossier que dès qu'il en a ainsi été informé, il ait transmis ces pièces. Si, de même, M. A... soutient que lui-même a envoyé ces pièces par courrier recommandé réceptionné le 8 janvier 2019 par la préfecture, il ne démontre pas, en tout état de cause, et alors que comme il a déjà été dit, il ne lui appartenait pas de faire cette démarche, que l'ensemble des pièces réclamées par la DIRECCTE étaient jointes à son courrier, celui-ci se bornant à indiquer en attachement " pièces manquantes ". Si M. A... verse au dossier un certain nombre de pièces dont il prétend qu'elles étaient jointes à son courrier adressé à la préfecture, il ne produit en particulier, ni le formulaire CERFA N° 15186 qui correspond à la demande d'autorisation de travail pour conclure un contrat avec un salarié étranger, ni les justificatifs de son expérience professionnelle, demandés par la DIRECCTE. Dès lors, le préfet a pu mentionner dans sa décision que M. A... n'avait pas obtenu d'autorisation de travail, conformément à l'avis défavorable de la DIRECCTE du 16 août 2018 en raison de l'absence de transmission des pièces complémentaires demandées, sans entacher celle-ci d'erreur de fait. En outre le préfet a pris également en compte les bulletins de salaire que M. A... a produit à l'appui de sa demande couvrant la période 2014 à 2017, pour apprécier son insertion professionnelle en France. Par suite, M. A... n'est pas plus fondé à soutenir que la décision contestée serait entachée d'un défaut d'examen particulier de sa situation professionnelle.

4. Les stipulations de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 régissent d'une manière complète les conditions dans lesquelles les ressortissants algériens peuvent être admis à séjourner en France, y exercer une activité professionnelle, et les règles concernant la nature des titres de séjour qui peuvent leur être délivrés. Un ressortissant algérien ne peut donc se prévaloir des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile relatives à l'admission exceptionnelle au séjour. Cependant si l'accord franco-algérien ne prévoit pas de semblables modalités d'admission au séjour, ses stipulations n'interdisent pas au préfet de délivrer un certificat de résidence à un ressortissant algérien qui ne remplit pas l'ensemble des conditions auxquelles est subordonnée la délivrance de plein droit de ce certificat. Il appartient en effet au préfet, dans l'exercice du pouvoir discrétionnaire dont il dispose sur ce point, d'apprécier, compte tenu de l'ensemble des éléments de la situation personnelle de l'intéressé, l'opportunité d'une mesure de régularisation.

5. Il ressort des pièces du dossier que si M. A... a été embauché dans une menuiserie, à compter du 1er novembre 2014 dans le cadre d'un contrat à durée déterminée, comme manœuvre, puis en contrat à durée indéterminée à partir d'août 2015 sur un poste d'aide-menuisier, à la date de la décision contestée du 25 mars 2019, il n'avait une expérience que de quatre ans et demi dans cette société. Si M. A... fait valoir qu'il remplit les conditions énoncées par la circulaire du 28 novembre 2012 du ministre de l'intérieur relative aux conditions d'examen des demandes d'admission au séjour déposées par des ressortissants étrangers en situation irrégulière, en vue de la régularisation de sa situation au regard du droit au séjour, celle-ci est dépourvue de toute valeur réglementaire et il ne peut donc utilement s'en prévaloir. En outre s'il verse des preuves de sa présence en France à partir de l'année 2010, ni la durée de son séjour, ni l'emploi qu'il occupe depuis août 2015, lequel ne présente pas de spécificité particulière, ni au surplus les liens sociaux invoqués non démontrés au dossier, ne permettent de considérer que le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation de la situation personnelle du requérant en ne faisant pas usage de son pourvoir de régularisation.

6. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...) / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".

7. Il est constant que M. A... est célibataire, sans charge de famille, et que sa fratrie réside en Algérie, où il a vécu jusqu'à l'âge de 25 ans. Comme il a déjà été dit, il n'établit pas l'intensité de ses liens sociaux en France. Le moyen tiré de l'atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée en méconnaissance des stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, doit être écarté.

Sur l'obligation de quitter le territoire français :

8. Pour les mêmes motifs que déjà exposés, les moyens tirés de ce que la décision contestée méconnaîtrait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et serait entachée d'erreur manifeste d'appréciation au regard de son insertion professionnelle et personnelle doivent être écartés. Si M. A... invoque le 5) de l'article 6 de l'accord franco-algérien, relatif aux titres de séjours pour les ressortissants algériens dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à leur droit au respect de leur vie privée et familiale une atteinte disproportionnée, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il ait sollicité un titre de séjour sur ce fondement. En tout état de cause, le moyen tiré de la méconnaissance de cet article, doit être écarté, pour les mêmes motifs.

9. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 25 mars 2019 du préfet de la Seine-Saint-Denis. Par suite ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte doivent également être rejetées.

Sur les frais liés à l'instance :

10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que M. A... demande au titre des frais qu'il a exposés.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de la Seine-Saint-Denis.

Délibéré après l'audience du 2 juin 2022, à laquelle siégeaient :

- M. Lapouzade, président de chambre,

- M. Diémert, président-assesseur,

- Mme Renaudin, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 28 juin 2022.

La rapporteure,

M. RENAUDINLe président,

J. LAPOUZADE

La greffière,

Y. HERBER

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 21PA06286


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 21PA06286
Date de la décision : 28/06/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LAPOUZADE
Rapporteur ?: Mme Mathilde RENAUDIN
Rapporteur public ?: Mme GUILLOTEAU
Avocat(s) : BESSE

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2022-06-28;21pa06286 ?
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