Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme H... I... et M. D... C... ont demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 28 juin 2019 par laquelle le garde des sceaux, ministre de la justice, a rejeté leur demande de changement de nom pour leurs enfants mineurs B... et A... F..., J... " F... " à " I... ", ainsi que la décision du 22 novembre 2019 rejetant leur recours gracieux à l'encontre de cette décision.
Par un jugement n° 2000933/4-3 du 10 août 2021, le tribunal administratif de Paris a annulé les décisions attaquées et a enjoint au garde des sceaux, ministre de la justice, de proposer au Premier ministre le changement de nom sollicité dans un délai de trois mois.
Procédure devant la Cour :
Par un recours enregistré le 27 août 2021, le garde des sceaux, ministre de la justice, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 2000933/4-3 du 10 août 2021 du tribunal administratif de Paris ;
2°) de rejeter la demande présentée par Mme H... I... et M. D... C..., devant le tribunal administratif de Paris.
Il soutient que M. C... aurait pu entamer la procédure de changement de nom avant la naissance de ses enfants, que son nom d'origine pouvait être accolé au nom de son épouse pour constituer le nom de ses enfants dès lors que les préjudices résultant du port de ce nom pour les enfants mineurs ne sont pas établis, qu'en outre, et dès lors qu'il avait obtenu le changement de nom par lui sollicité, ses enfants en auraient bénéficié par l'effet de l'article 61-2 du code civil et qu'enfin les intéressés peuvent faire usage des dispositions de l'article 43 de la loi n° 85-372 du 23 décembre 1985.
La requête a été communiquée à Mme H... I... et à M. D... C..., qui n'ont pas présenté d'observations en défense.
Vu :
- le code civil ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. E...,
- et les conclusions de Mme Guilloteau, rapporteure publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme H... I... et M. D... C..., agissant pour le compte de leurs enfants mineurs, M. B... F... et M. A... F..., ont demandé au garde des sceaux, ministre de la justice, d'autoriser le changement de nom de ces enfants de " F... " à " I... ". Par une décision du 28 juin 2019, confirmée sur recours gracieux le 22 novembre 2019, ce ministre a rejeté cette demande. Mme I... et M. C... ayant demandé l'annulation de ces deux décisions au tribunal administratif de Paris, cette juridiction, par un jugement du 10 août 2021, en a prononcé l'annulation et a enjoint audit ministre de proposer au Premier ministre le changement de nom sollicité dans un délai de trois mois. Le garde des sceaux, ministre de la justice, relève appel de ce jugement devant la Cour.
2. Aux termes de l'article 1er de la loi du 6 fructidor an II : " Aucun citoyen ne pourra porter de nom ni de prénom autres que ceux exprimés dans son acte de naissance (...) ". Aux termes de l'article 61 du code civil : " Toute personne qui justifie d'un intérêt légitime peut demander à changer de nom (...) ".
3. Les premiers juges ont relevé qu'à l'appui de leur demande du changement du nom de leurs deux enfants, Mme I... et M. C... soutenaient qu'à la naissance de ces derniers, respectivement en 2006 puis en 2010, il leur fut impossible de leur adjoindre le nom de leur père qui, estimant son nom, " G... ", difficile à porter, avait engagé une procédure de changement de nom, laquelle a abouti en vertu d'un décret du Premier ministre du 26 novembre 2013. Ils ont estimé que, dans les circonstances de l'espèce, d'une part, la volonté de Mme I... et M. C... de ne pas transmettre le nom de " G... " à leurs enfants, d'autre part, le décret du 26 novembre 2013 accordant à M. C... le changement de nom demandé et, enfin, le souhait des deux enfants, B... et A..., de porter le nom de leurs deux parents mariés constituent des circonstances exceptionnelles de nature à caractériser l'intérêt légitime au sens de l'article 61 du code civil pour changer de nom et qu'ainsi, en déniant un tel intérêt aux requérants, le ministre de la justice a fait une inexacte application des dispositions de l'article 61 du code civil.
4. Devant la Cour, le garde des sceaux, ministre de la justice se borne à soutenir d'une part, que M. C... aurait pu entamer la procédure de changement de nom avant la naissance de ses enfants, d'autre part, que son nom d'origine pouvait être accolé au nom de son épouse pour constituer le nom de ses enfants dès lors " que les préjudices résultant du port du nom pour les enfants mineurs ne sont pas établis ", par ailleurs que, dès lors qu'il a obtenu le changement de nom, ses enfants en auraient bénéficié par l'effet de l'article 61-2 du code civil et qu'enfin les intéressés peuvent faire usage des dispositions de l'article 43 de la loi n° 85-1372 du 23 décembre 1985. De tels arguments, eu égard à leur caractère purement subjectif et à leur absence de tout lien avec une question de légalité, ne sauraient suffire à contester utilement les motifs du jugement attaqué, les premiers juges n'ayant commis aucune erreur de droit ni d'appréciation en statuant comme ils l'ont fait.
5. Il résulte de tout ce qui précède que le garde des sceaux, ministre de la justice, n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Paris a, par le jugement attaqué, prononcé l'annulation des décisions attaquées et lui a enjoint de proposer au Premier ministre le changement de nom sollicité dans un délai de trois mois. Son recours doit donc être rejeté.
DÉCIDE :
Article 1er : Le recours du garde des sceaux, ministre de la justice, est rejeté.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié au garde des sceaux, ministre de la justice, à Mme H... I... et à M. D... C....
Délibéré après l'audience du 19 mai 2022 à laquelle siégeaient :
- M. Lapouzade, président de chambre,
- M. Diémert, président-assesseur,
- M. Doré, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 2 juin 2022.
Le rapporteur,
S. E...Le président,
J. LAPOUZADE
La greffière,
Y. HERBER
La République mande et ordonne au garde des sceaux, ministre de la justice, en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
2
N° 21PA04841