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01/06/2022 | FRANCE | N°21PA02389

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 7ème chambre, 01 juin 2022, 21PA02389


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... C... a demandé au Tribunal administratif de Melun d'annuler l'arrêté du 23 juin 2020 par lequel le préfet de Seine-et-Marne a rejeté sa demande de certificat de résidence, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi et d'enjoindre au préfet de Seine-et-Marne de lui délivrer un titre de séjour assorti d'une astreinte de 150 euros par jour de retard à compter du délai de quinze jours suivant la notification du jugement à intervenir ou,

à défaut, de réexaminer sa situation dans les mêmes conditions de délai et d'a...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... C... a demandé au Tribunal administratif de Melun d'annuler l'arrêté du 23 juin 2020 par lequel le préfet de Seine-et-Marne a rejeté sa demande de certificat de résidence, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi et d'enjoindre au préfet de Seine-et-Marne de lui délivrer un titre de séjour assorti d'une astreinte de 150 euros par jour de retard à compter du délai de quinze jours suivant la notification du jugement à intervenir ou, à défaut, de réexaminer sa situation dans les mêmes conditions de délai et d'astreinte et de lui délivrer durant cet examen une autorisation provisoire de séjour.

Par un jugement n° 2005929 du 8 avril 2021, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 4 mai 2021, M. C..., représenté par Me Delcour, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2005929 du 8 avril 2021 du Tribunal administratif de Melun ;

2°) d'annuler l'arrêté du 23 juin 2020 du préfet de Seine-et-Marne ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement attaqué est insuffisamment motivé ;

- le refus de titre de séjour est entaché d'un vice de procédure en l'absence de saisine de la commission du titre de séjour ;

- il méconnaît l'article 6-1 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;

- il est entaché d'erreur de droit, d'erreur de fait et d'erreur manifeste d'appréciation ;

- il méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article 7 de l'accord franco-algérien ;

- il méconnaît les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Par un mémoire en défense, enregistré le 20 octobre 2021, le préfet de Seine-et-Marne conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens invoqués par le requérant ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme A...,

- et les observations de M. C....

Considérant ce qui suit :

1. M. B... C..., ressortissant algérien, né le 26 novembre 1979, est entré sur le territoire français, selon ses déclarations, le 9 décembre 2006. Le 5 mars 2019, il a sollicité la délivrance d'un certificat de résidence sur le fondement de l'article 6-1 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968. Par arrêté du 23 juin 2020, le préfet de Seine-et-Marne a rejeté cette demande, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays de renvoi. M. C... relève appel du jugement du 8 avril 2021, par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur les conclusions aux fins d'annulation :

2. Aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : / 1) au ressortissant algérien, qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans ou plus de quinze ans si, au cours de cette période, il a séjourné en qualité d'étudiant (...). ".

3. Il ressort des pièces du dossier que M. C... est entré en France le 9 décembre 2006 sous couvert d'un visa court séjour valable du 4 décembre 2006 au 3 décembre 2007 puis qu'il y a poursuivi des études de médecine et a travaillé en qualité d'interne, puis en qualité d'assistant spécialiste associé au sein des hôpitaux de Montpellier, de Strasbourg et de Colmar jusqu'au 10 mars 2014. A compter de cette date, il a été mis fin à ses fonctions à raison de la découverte, lors de l'examen d'une demande de titre de séjour présentée par le requérant le 11 février 2013, de l'utilisation d'une carte d'identité obtenue frauduleusement lui ayant permis de poursuivre ses études de médecine et d'exercer en parallèle en qualité d'interne. Il est suffisamment établi par les pièces du dossier, et notamment les nombreux bulletins de salaire produits par le requérant, tant en première instance qu'en appel, que M. C... a séjourné de manière habituelle en France sur l'ensemble de cette période de décembre 2006 à mars 2014. A compter du mois de mars 2014, le requérant soutient s'être maintenu en France. S'il ressort des pièces du dossier qu'il a présenté en vue d'un recrutement au sein de l'hôpital de Tarbes un curriculum vitae indiquant qu'il était retourné en Algérie entre septembre 2015 et septembre 2017 pour exercer en qualité de médecin spécialiste à l'hôpital de Béchar, le requérant soutient aujourd'hui n'être pas retourné en Algérie pendant cette période et avoir falsifié son curriculum vitae. En effet, concernant les années 2014, 2015, 2016 et 2017, le requérant établit par de nombreuses pièces probantes et concordantes, et notamment des factures d'électricité, d'internet, d'eau, de téléphone et d'autres factures attestant de déplacements en France ainsi que par la production de relevés bancaires et notamment de relevés mensuels d'opérations de carte bancaire, qui ont été produits pour la première fois devant la Cour et qui n'étaient notamment pas produits devant la Cour administrative d'appel de Bordeaux dans l'instance n° 18BX01370, sa résidence habituelle en France pendant les années 2014 à 2017. Enfin, il n'est pas contesté que M. C... résidait en France au cours des années 2018 et 2019. En outre, la circonstance que le requérant ait un temps résidé en France et utilisé une fausse carte d'identité française, ne suffit pas à caractériser l'existence d'une menace à l'ordre public. En conséquence, dès lors qu'il justifie résider habituellement en France depuis plus de dix ans à la date de l'arrêté attaqué, le requérant est fondé à soutenir qu'en lui refusant le titre de séjour sollicité sur ce fondement, le préfet de Seine-et-Marne a méconnu les stipulations précitées de l'article 6-1 de l'accord franco-algérien.

4. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer ni sur la régularité du jugement, ni sur les autres moyens de la requête, que M. C... est fondé, d'une part, à soutenir que, c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande et d'autre part, à solliciter l'annulation du jugement ainsi que celle de l'arrêté du 23 juin 2020.

Sur les frais liés au litige :

5. Il y a lieu dans les circonstances de l'espèce de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à M. C... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 2005929 du 8 avril 2021 du Tribunal administratif de Melun et l'arrêté du 23 juin 2020 du préfet de Seine-et-Marne sont annulés.

Article 2 : L'Etat versera à M. C... une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... C..., au ministre de l'intérieur et au préfet de Seine-et-Marne.

Délibéré après l'audience du 10 mai 2022, à laquelle siégeaient :

- M. Jardin, président,

- Mme Hamon, présidente assesseure,

- Mme Jurin, première conseillère,

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 1er juin 2022.

La rapporteure,

E. A...Le président,

C. JARDIN

La greffière,

C. BUOT

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 21PA02389 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 21PA02389
Date de la décision : 01/06/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. JARDIN
Rapporteur ?: Mme Elodie JURIN
Rapporteur public ?: M. SEGRETAIN
Avocat(s) : DELCOUR

Origine de la décision
Date de l'import : 14/06/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2022-06-01;21pa02389 ?
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