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31/05/2022 | FRANCE | N°20PA02426

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 4ème chambre, 31 mai 2022, 20PA02426


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... C... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 17 octobre 2018 par laquelle la ministre des armées a rejeté son recours préalable obligatoire formé contre sa décision du 23 février 2018 lui refusant le bénéfice du pécule modulable d'incitation au départ.

Par un jugement n° 1814616/5-1 du 25 juin 2020, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 24 août 20

20 et le 12 février 2022,

M. C..., représenté par Me Labetoule, demande à la Cour :

1°) d'annule...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... C... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 17 octobre 2018 par laquelle la ministre des armées a rejeté son recours préalable obligatoire formé contre sa décision du 23 février 2018 lui refusant le bénéfice du pécule modulable d'incitation au départ.

Par un jugement n° 1814616/5-1 du 25 juin 2020, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 24 août 2020 et le 12 février 2022,

M. C..., représenté par Me Labetoule, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler la décision implicite par laquelle la ministre des armées a rejeté son recours administratif préalable formé contre la décision du 23 février 2018 précitée ;

3°) d'enjoindre à la ministre des armées, à titre principal, de lui verser le pécule prévu à l'article 38 de la loi n° 2013-1168 du 18 décembre 2013 avec intérêts au taux légal à compter du 1er mars 2018 et capitalisation de ces intérêts, sous déduction du pécule versé à compter du

1er octobre 2019 et, à titre subsidiaire, de lui verser ce pécule selon les règles applicables à la date de la requête de première instance sous déduction du pécule versé à compter du 1er octobre 2020 ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la décision attaquée, qui ne comporte aucun motif en rapport avec les besoins du service, doit être regardée comme entachée de méconnaissance de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration ;

- la décision attaquée méconnaît l'article 38 de la loi du 18 décembre 2013 relative à la programmation militaire pour les années 2014 à 2019 en ce qu'elle se fonde sur des critères non prévus par cette loi, issus de la circulaire du 27 juillet 2017 de la direction générale de l'armement (DGA) ;

- la circulaire du 27 juillet 2017 portant sur les modalités d'attribution du pécule modulable d'incitation au départ des militaires pour l'année 2018 est entachée d'incompétence dès lors que les critères d'attribution du pécule fixés par elle ne relèvent pas du pouvoir réglementaire du ministre ;

- la circulaire du 27 juillet 2017 précitée est illégale en ce qu'elle porte atteinte à l'article 34 de la Constitution ;

- aucune nécessité de service ne justifie le refus d'attribution du pécule qui lui a été opposé alors que son profil correspondait parfaitement à l'objectif du service de rajeunissement de la pyramide d'âge ;

- il doit être regardé comme remplissant également les critères légaux de l'ancienneté de service et de l'intervalle le séparant de la limite d'âge de son grade ;

- la ministre ne dispose que d'un relatif pouvoir discrétionnaire qui s'exerce uniquement au regard des nécessités de service et auquel elle a en tout état de cause renoncé ;

- la décision attaquée est entachée d'une méconnaissance du principe d'égalité en ce que les critères appliqués par la DGA sont différents de ceux appliqués par les autres armées et en ce que l'administration n'a pas justifié les raisons pour lesquelles elle a privilégié d'autres demandes que la sienne ;

- l'argument de défense de la ministre en première instance tenant à sa " bonne employabilité " est erroné, alors notamment qu'il a été confronté au désintérêt total de l'administration quant à son évolution de carrière et qu'il lui a été demandé de changer de poste en 2019 ; en outre, un agent occupant un poste de direction à la DGA a reçu un avis favorable à l'obtention du pécule, ce qui démontre l'incohérence de cet argument ;

- l'administration aurait fait une économie d'environ 60 % en lui attribuant un pécule en mars 2018 ;

- il résulte du relevé de conclusions de la commission chargée d'examiner les demandes d'attribution du pécule produit par la ministre elle-même en première instance que le véritable motif de la décision de refus réside dans le montant initialement trop important du pécule, ce qui ne relève pas d'un critère légal ; ce motif est au demeurant corroboré par la circonstance qu'il a été admis, à la date du 1er octobre 2019, au bénéfice du paiement de la première fraction du pécule calculé sur 27 mois et non sur 48 mois comme il aurait dû l'être initialement ;

- le pécule n'est pas une mesure gracieuse mais fait partie des droits patrimoniaux du militaire ; or il a fait l'objet d'une discrimination constante de l'administration au cours de sa carrière, qui s'est vérifiée avec le défaut d'appréciation équitable avec lequel il s'est vu refuser l'attribution du pécule ;

- les contraintes invoquées par la ministre en défense relatives au contingentement ne sauraient constituer une motivation de l'intérêt du service pour justifier un refus.

Par un mémoire, enregistré le 4 octobre 2021, la ministre des armées conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

La ministre des armées a produit un mémoire le 15 avril 2022, enregistré après la clôture de l'instruction, qui n'a pas été communiqué.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la défense,

- la loi n° 2013-1168 du 18 décembre 2013,

- le décret n° 2013-1308 du 27 décembre 2013,

- l'arrêté du 16 novembre 2017 pris en application des articles 36 et 38 de la loi n° 2013-1168 du 18 décembre 2013 modifiée relative à la programmation militaire pour les années 2014 à 2019 et portant diverses dispositions concernant la défense et la sécurité nationale,

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. B...,

- les conclusions de M. Baronnet, rapporteur public,

Considérant ce qui suit :

1. M. C..., ingénieur en chef de l'armement, a demandé, par lettre du 26 septembre 2017, sa radiation des cadres avec le bénéfice du pécule modulable d'incitation au départ, institué par l'article 38 de la loi de programmation militaire du 18 décembre 2013. Par décision du 23 février 2018, la ministre des armées a rejeté cette demande. Par lettre du 11 mars 2018, réceptionnée le 20 mars 2018, M. C... a saisi la commission des recours des militaires d'un recours administratif préalable obligatoire à l'encontre de cette décision. Une décision implicite de rejet est née du silence gardé par la ministre des armées sur ce recours. Par une décision du 17 octobre 2018, prise après avis de la commission précitée, la ministre des armées a expressément rejeté le recours précité formé par M. C.... Ce dernier relève appel du jugement du 25 juin 2020 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 17 octobre 2018, qui s'est substituée tant à la décision initiale du 23 février 2018 qu'à la décision implicite de rejet.

Sur le bien-fondé du jugement :

2. Aux termes de l'article L. 4139-8 du code de la défense : " Les militaires de carrière mis à la retraite avec le bénéfice d'une pension liquidée dans les conditions fixées à l'article L. 25 du code des pensions civiles et militaires de retraite peuvent, sur demande agréée, dans la limite d'un contingent annuel fixé par arrêté interministériel, recevoir, dans les conditions fixées par décret en Conseil d'Etat, un pécule déterminé en fonction de la solde perçue en fin de service.(...) ". Aux termes du I de l'article 38 de la loi du 18 décembre 2013 relative à la programmation militaire pour les années 2014 à 2019 : " I.-Peuvent prétendre, à compter du 1er janvier 2014 et jusqu'au 31 décembre 2019, sur demande agréée par le ministre de la défense et dans la limite d'un contingent annuel fixé par arrêté conjoint du ministre de la défense et des ministres chargés de la fonction publique et du budget, au versement d'un pécule modulable d'incitation au départ déterminé en fonction de la solde budgétaire perçue en fin de service : 1° Le militaire de carrière en position d'activité se trouvant à plus de trois ans de la limite d'âge de son grade et pouvant bénéficier d'une solde de réserve en application de l'article L. 51 du code des pensions civiles et militaires de retraite ou d'une pension de retraite liquidée dans les conditions fixées aux articles L. 24 et L. 25 du même code ; (...) / Le pécule est attribué en tenant compte des nécessités du service, de l'ancienneté de service du militaire et de l'intervalle le séparant de la limite d'âge de son grade. (...) Un décret détermine, pour chaque catégorie de militaires mentionnée aux 1° à 3°, les conditions d'attribution ainsi que les modalités de calcul, de versement et, le cas échéant, de remboursement du pécule. (...) ". L'article 3 du décret du 27 décembre 2013 précité, pris pour l'application de l'article 38 de la loi du 18 décembre 2013, définit le montant du pécule en fonction du montant de la solde, du nombre d'années de service ainsi que de l'âge du militaire. L'article 2 de l'arrêté du 16 novembre 2017 précité fixe à 316 le nombre de pécules modulables d'incitation au départ susceptibles d'être accordés, pour l'année 2018, aux militaires, dans les conditions prévues par l'article 38 de la loi du 18 décembre 2013 et par le décret du 27 décembre 2013.

3. Il résulte de ces dispositions que le bénéfice de l'avantage qu'elles prévoient est subordonné non seulement à la réunion, par les militaires qui le demandent, de certaines conditions d'âge et d'ancienneté, mais encore à l'agrément du ministre qui peut l'accorder ou le refuser après avoir procédé à un examen particulier de la demande et pour des motifs tirés exclusivement des besoins du service.

4. Les conclusions de M. C... dirigées contre la décision implicite par laquelle la ministre des armées a rejeté son recours administratif préalable doivent être regardées comme dirigées contre la décision du 17 octobre 2018 par laquelle cette même autorité a expressément rejeté ce recours et qui s'y est substituée.

5. En premier lieu, aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : (...) 8° Rejettent un recours administratif dont la présentation est obligatoire préalablement à tout recours contentieux en application d'une disposition législative ou règlementaire. ". Aux termes de l'article L. 211-5 du même code : " La motivation exigée par le présent chapitre doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision. ".

6. La décision du 17 octobre 2018, après avoir visé et cité de manière exhaustive les textes applicables, répond de manière précise aux critiques formulées par M. C... dans son recours préalable à l'encontre de la décision du 23 février 2018, notamment aux moyens tirés de ce que la circulaire du 27 juillet 2017 ajouterait des critères supplémentaires à ceux prévus par les textes et de ce que la commission chargée d'émettre un avis sur sa demande n'aurait pas pondéré et hiérarchisé les critères d'examen de celle-ci. En outre, elle expose de manière circonstanciée les conditions dans lesquelles la demande du requérant a été examinée et les raisons pour lesquelles elle n'a pas été agréée, alors en outre que la ministre n'était aucunement tenue, contrairement à ce que soutient le requérant, de justifier les raisons pour lesquelles elle a privilégié d'autres demandes que la sienne. Enfin, elle énonce le motif pour lequel le moyen de M. C... tiré de l'exception d'illégalité de la circulaire précitée n'était pas recevable. Par suite, et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la critique de M. C... tirée de ce que cette décision ne comporterait aucun motif en rapport avec les besoins du service, qui relève du fond et non de la régularité de la motivation de la décision attaquée, cette dernière est suffisamment motivée.

7. En second lieu, aux termes de la circulaire du 27 juillet 2017 de la ministre des armées portant sur les modalités d'attribution du pécule modulable d'incitation au départ des militaires pour l'année 2018 : " 4.2. Instruction des dossiers. (...) Les dossiers complets sont soumis à l'avis d'une commission chargée d'examiner les demandes d'attribution du pécule et d'émettre un avis pour l'autorité décisionnaire selon les dispositions du point 4.3. ci-après. / 4.3. Commission. (...) Dans la limite de l'enveloppe financière disponible, la commission analyse les demandes notamment au regard des trois critères suivants : - rentabilité économique ; - employabilité ultérieure (au sein de la DGA ou du ministère des armées) ; - impact sur les pyramides. / La commission émet un avis favorable ou défavorable ou propose de différer la décision (...) ".

8. M. C... invoque l'illégalité, par voie d'exception, de la circulaire précitée en ce qu'elle ajouterait des critères, cités au point 7, à ceux expressément prévus au I de l'article 38 de la loi du 18 décembre 2013, cités au point 2. Il résulte toutefois d'une part des dispositions de l'article 38 de la loi du 18 décembre 2013 citées ci-dessus que l'attribution du pécule modulable d'incitation au départ n'a pas le caractère d'un avantage statutaire. La loi se borne à énoncer des critères généraux d'attribution et à renvoyer à un décret les conditions d'attribution et les modalités de calcul du pécule. Le ministre des armées est, ainsi, compétent, dans l'exercice de ses prérogatives d'organisation des services placés sous son autorité, pour établir, dans le respect des règles générales fixées par ces mêmes dispositions, la réglementation applicable au versement du pécule au sein de son administration.

9. Par ailleurs, dans le cas où un texte prévoit l'attribution d'un avantage sans avoir défini l'ensemble des conditions permettant de déterminer à qui l'attribuer parmi ceux qui sont en droit d'y prétendre ou de fixer le montant à leur attribuer individuellement, l'autorité compétente peut, qu'elle dispose ou non en la matière du pouvoir réglementaire, encadrer l'action de l'administration, dans le but d'en assurer la cohérence, en déterminant, par la voie de lignes directrices, sans édicter aucune condition nouvelle, des critères permettant de mettre en œuvre le texte en cause, sous réserve de motifs d'intérêt général conduisant à y déroger et de l'appréciation particulière de chaque situation. Dans ce cas, la personne en droit de prétendre à l'avantage en cause peut se prévaloir, devant le juge administratif, de telles lignes directrices si elles ont été publiées. En revanche, il en va autrement dans le cas où l'administration peut légalement accorder une mesure de faveur au bénéfice de laquelle l'intéressé ne peut faire valoir

aucun droit. S'il est loisible, dans ce dernier cas, à l'autorité compétente de définir des orientations générales pour l'octroi de ce type de mesures, l'intéressé ne saurait se prévaloir de telles orientations à l'appui d'un recours formé devant le juge administratif.

10. Pour l'application des dispositions citées au point 2, la ministre des armées a pris une circulaire, le 27 juillet 2017, qui a prévu notamment qu'une commission serait chargée d'examiner les demandes d'attribution du pécule et d'émettre un avis pour l'autorité décisionnaire selon trois critères qui sont la rentabilité économique, l'employabilité ultérieure de l'agent, au sein de la DGA ou du ministère des armées, ainsi que l'impact de son départ sur les pyramides. Cette circulaire, par laquelle la ministre des armées a déterminé des critères permettant de mettre en œuvre l'article 38 de la loi du 18 décembre 2013, sans ajouter de conditions nouvelles, sous réserve de motifs d'intérêt général conduisant à y déroger et de l'appréciation particulière de chaque situation, et qui a été régulièrement publiée, constitue des lignes directrices par lesquelles la ministre s'est bornée à bon droit à encadrer l'action de l'administration dans le but d'en assurer la cohérence, alors même qu'elle disposerait en la matière, ainsi qu'il a été dit au point 8, du pouvoir réglementaire pour établir, dans le respect des règles générales fixées par la loi, la réglementation applicable au versement de ce pécule au sein de son administration. Par suite, les moyens du requérant tirés de ce que la décision attaquée méconnaîtrait l'article 38 de la loi du

18 décembre 2013 en ce qu'elle se fonderait sur des critères non prévus par cette loi et de ce qu'elle serait entachée d'une méconnaissance du principe d'égalité en ce que les critères appliqués par la DGA seraient différents de ceux appliqués par les autres armées doivent être écartés. Pour les mêmes motifs, les moyens tirés de ce que la circulaire du 27 juillet 2017 serait entachée d'incompétence en ce que les critères d'attribution du pécule ne relèveraient pas du pouvoir réglementaire du ministre et de ce qu'elle méconnaîtrait l'article 34 de la Constitution doivent être également écartés.

11. En troisième lieu, la circonstance, à la supposer même établie, que le ministère des armées aurait fait une économie d'environ 60 % en lui attribuant un pécule en mars 2018, est sans incidence sur la légalité de la décision en litige.

12. En quatrième lieu, M. C... soutient que, pour refuser d'agréer sa demande, la ministre des armées ne s'est pas fondée sur le contingentement légal tel que fixé par l'article 2 de l'arrêté du 16 novembre 2017 mais sur un contingentement par grades et par armées qui n'est pas prévu par les textes et qui a conduit à un refus alors même que le contingent total n'était pas épuisé. Il résulte de l'examen de la décision attaquée que, d'une part, elle a notamment été prise au visa de l'instruction du 11 février 2014 du ministre de la défense relative aux modalités d'attribution du pécule modulable d'incitation au départ des militaires (PMID) institué par l'article 38 de la loi du 18 décembre 2013 et que, d'autre part, il résulte du point 5 de cette instruction que " les décisions d'acceptation ou de rejet des demandes de pécule sont arrêtées par chaque armée ou formation rattachée, sur proposition des directions de personnel, dans la limite des directives fixées par la direction des ressources humaines du ministère de la défense (DRH-MD) ". La ministre pouvait donc, ainsi qu'il a été dit au point 8, au titre de son pouvoir d'organisation des services placés sous son autorité et dans le respect du contingent global de pécules alloué à l'ensemble des militaires par l'arrêté du 16 novembre 2017, confier à la DRH-MD la mission de procéder à une répartition, entre les différentes armées et formations rattachées composant le ministère des armées, de l'ensemble de ces pécules pour tenir compte des nécessités du service. Par suite, et à supposer même que le contingent global de pécules n'eût pas été épuisé à la date de la décision attaquée, la ministre a pu légalement se fonder sur l'annexe 9

de la directive de cadrage RH 2018 pour le personnel militaire, fixant l'enveloppe des leviers de départ statutaires 2018 à treize PMID pour les colonels dont quatre attribués aux ingénieurs en chef de l'armement, pour refuser d'agréer la demande de M. C.... Le moyen doit, en conséquence, être écarté ainsi que celui, pour les mêmes motifs, tiré de ce que les contraintes du contingentement ne sauraient être invoquées par la ministre pour justifier des nécessités de service.

13. En cinquième lieu, il résulte de la décision attaquée que, pour refuser d'agréer la demande de pécule de M. C..., la ministre s'est également fondée sur la circonstance que

" le profil atypique de l'intéressé ne correspondait pas à la cible majeure de cette campagne ". Elle a en outre fait valoir dans ses écritures en défense que la décision de refus du PMID avait également été prise au regard de l'employabilité ultérieure de l'intéressé qui était " avérée ", celui-ci occupant un poste de directeur adjoint de l'unité nucléaire, radiologique, bactériologique et chimique au sein du conseil général de l'armement, organisme présidé par la ministre des armées, et exerçant de ce fait au sein d'une structure stratégique pour la réflexion en matière d'armement et la gestion des industries de défense et des corps militaires de l'armement. Enfin et compte tenu de ce qui précède, la ministre a fait valoir qu'avait été pris en compte le caractère prioritaire du maintien de M. C... sur son affectation, peu important à cet égard la circonstance, en l'admettant même établie, que les perspectives de promotion de l'intéressé eussent été très faibles. Si M. C... soutient, d'une part, qu'aucune nécessité de service ne justifiait le refus qui lui a été opposé alors que son profil correspondait parfaitement à l'objectif du service de rajeunissement de la pyramide d'âge, cette allégation n'est corroborée par aucun élément probant. S'il fait d'autre part valoir que les arguments du ministre relatifs à sa " bonne employabilité " seraient erronés, dès lors notamment qu'il aurait fait l'objet d'un désintérêt total de l'administration quant à son évolution de carrière et qu'il lui aurait été demandé de changer de poste dès 2019, il ne l'établit pas davantage, la seule production d'un courriel du 11 décembre 2018 d'un responsable de la direction des ressources humaines lui indiquant qu'il avait été " déclaré mobile prioritaire en 2019 " étant insuffisante à cet égard.

14. En sixième lieu, si M. C... soutient que le véritable motif de la décision de refus d'attribution du pécule réside dans le montant, initialement calculé sur 48 mois de solde brute, trop important de celui-ci, une telle allégation n'est également corroborée par aucun élément probant, les seules circonstances que le requérant a été admis au bénéfice du pécule au titre de l'année 2019, date à laquelle celui-ci n'était plus calculé que sur 27 mois, et que le relevé de conclusions de la commission chargée d'examiner les demandes d'attribution du pécule a fait mention dans ses commentaires que les droits à pécule de M. C... devaient être calculées sur 48 mois n'étant pas de nature à l'établir. En tout état de cause, la circonstance, à la supposer même établie, que des considérations financières ou budgétaires n'aient pas été étrangères à la décision de refus opposée au requérant, cette dernière ne saurait être regardée, pour ce seul motif, comme ne répondant pas à des nécessités de service. Par suite et alors qu'aucun commencement de preuve n'est davantage produit au soutien de l'allégation du requérant selon laquelle ses droits à pécule au titre de 2018 n'auraient pas fait l'objet d'une appréciation équitable, il ne ressort pas des pièces du dossier que, pour prendre la décision attaquée, la ministre, qui ne saurait être regardée comme ayant renoncé à l'exercice de son pouvoir d'appréciation, se soit fondée sur des motifs étrangers aux besoins du service. Il s'ensuit que le moyen doit être écarté.

15. Enfin, la circonstance, à la supposer également établie, qu'un autre militaire, occupant un poste de direction à la DGA, aurait reçu de la part de la commission mentionnée au point 11 un avis favorable à l'obtention du pécule ce qui, selon le requérant, serait de nature à démontrer l'incohérence avec laquelle la ministre des armées a fait application du critère de l'employabilité, est sans incidence sur la légalité de la décision litigieuse, qui doit s'apprécier au regard des caractéristiques de la seule situation de M. C....

16. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Il y a lieu, par voie de conséquence, de rejeter sa requête en toutes ses conclusions, y compris celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... C... et au ministre des armées.

Délibéré après l'audience du 22 avril 2022 à laquelle siégeaient :

- Mme Heers, présidente,

- Mme Briançon, présidente-assesseure,

- M. Mantz, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 31 mai 2022.

Le rapporteur,

P. B...

La présidente,

M. A... La greffière,

V. BREME

La République mande et ordonne au ministre des armées en ce qui la concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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No 20PA02426


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 20PA02426
Date de la décision : 31/05/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme HEERS
Rapporteur ?: M. Pascal MANTZ
Rapporteur public ?: M. BARONNET
Avocat(s) : LABETOULE

Origine de la décision
Date de l'import : 07/06/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2022-05-31;20pa02426 ?
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