Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme D... B... a demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler l'arrêté du 22 novembre 2019 par lequel le préfet du Val-de-Marne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle est susceptible d'être éloignée.
Par un jugement n° 2001465 du 5 février 2021, le tribunal administratif de Melun a annulé l'arrêté du 22 novembre 2019 et a enjoint au préfet du Val-de-Marne de délivrer à
Mme B... un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai de trois mois à compter de la notification du jugement.
Procédure devant la Cour :
I - Par une requête enregistrée le 4 mars 2021 sous le n°21PA01127, le préfet du Val-de-Marne, demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du 5 février 2021 ;
2°) de rejeter la demande présentée par Mme B... devant le tribunal administratif de Melun.
Il soutient que :
- il n'a méconnu ni les dispositions du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ni celles du 6° de l'article L. 511-4 du même code ;
- les autres moyens soulevés par Mme B... dans sa demande initiale ne sont pas fondés.
II - Par une requête enregistrée le 15 juillet 2021 sous le n°21PA03979, le préfet du Val-de-Marne demande à la Cour d'ordonner le sursis à exécution du jugement n° 2001465 du 5 février 2021 du Tribunal administratif de Melun.
Il soutient que les conditions fixées par les articles R. 811-15 et R. 811-17 du code de justice administrative sont satisfaites.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales,
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant, signée à New-York le 26 janvier 1990,
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile,
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme C...,
- les conclusions de M. Baronnet, rapporteur public,
Considérant ce qui suit :
1. Mme B..., de nationalité ivoirienne, née le 10 février 1996 à Glaou, est entrée en France en 2016 selon ses déclarations. Par un arrêté du 22 novembre 2019, le préfet du Val-de-Marne a refusé de lui délivrer le titre de séjour sollicité, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. Le préfet du Val-de-Marne relève appel du jugement du 5 février 2021 par lequel le tribunal administratif de Melun a annulé l'arrêté du 22 novembre 2019 et lui a enjoint de délivrer à Mme B... un titre de séjour dans un délai de trois mois à compter de la notification du jugement.
Sur la requête n°21PA01227 :
En ce qui concerne le moyen d'annulation retenu par le tribunal administratif :
2. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa version applicable au présent litige : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 6° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à la condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée ; Lorsque la filiation est établie à l'égard d'un parent, en application de l'article 316 du code civil, le demandeur, s'il n'est pas l'auteur de la reconnaissance de paternité ou de maternité, justifie que ce dernier contribue effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant, dans les conditions prévues à l'article 371-2 du même code, ou produit une décision de justice relative à la contribution à l'éducation et à l'entretien de l'enfant. Lorsque le lien de filiation est établi mais que la preuve de la contribution n'est pas rapportée ou qu'aucune décision de justice n'est intervenue, le droit au séjour du demandeur s'apprécie au regard du respect de sa vie privée et familiale et au regard de l'intérêt supérieur de l'enfant ; (...) ". Aux termes de l'article 371-2 du code civil, dans sa version applicable au présent litige : " Chacun des parents contribue à l'entretien et à l'éducation des enfants à proportion de ses ressources, de celles de l'autre parent, ainsi que des besoins de l'enfant. ".
3. Mme B... est mère d'une fille née le 26 août 2018 à Clichy qui a été reconnue par un ressortissant français. La requérante apporte la preuve de sa contribution à l'éducation et à l'entretien de son enfant à proportion de ses ressources, notamment par la production de son carnet de santé qui démontre le soin qu'elle apporte au suivi médical de ce dernier. Si elle n'établit pas que le père de son enfant, auteur d'une reconnaissance de paternité, subvienne aux besoins de leur fille, il ne ressort pas des pièces du dossier que cette défaillance soit due à une fraude. Par suite, l'intérêt supérieur de cet enfant dont la nationalité n'est pas contestée, est de se maintenir sur le territoire français et d'être assistée du seul parent qui assure sa subsistance. Dès lors, l'arrêté du 22 novembre 2019 refusant de délivrer à Mme B... un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français et fixant le pays de destination de son renvoi méconnaît les dispositions du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et doit donc être annulé.
4. Il résulte de ce qui précède que le préfet du Val-de-Marne n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Melun a annulé l'arrêté du 22 novembre 2019. Sa requête doit donc être rejetée.
Sur la requête n° 21PA03979 :
5. Le présent arrêt statuant sur la demande d'annulation du jugement n° 2001465 du 5 février 2021 du tribunal administratif de Melun, les conclusions de la requête n° 21PA03979 tendant au sursis à exécution de ce jugement sont devenues sans objet.
D E C I D E :
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur la requête n°21PA03979.
Article 2 : La requête n°21PA01227 du préfet du Val-de-Marne est rejetée.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à Mme B....
Copie en sera délivrée au préfet du Val-de-Marne.
Délibéré après l'audience du 22 avril 2022, à laquelle siégeaient :
- Mme Heers, présidente,
- Mme Briançon, présidente-assesseure,
- Mme Portes, première conseillère,
La rapporteure,
C. C...
La présidente,
M. A... La greffière,
V. BREME
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
2
N° 21PA01127