Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 5 août 2020 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour et l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours en fixant le pays de renvoi.
Par un jugement n° 2008970 du 22 janvier 2021, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et des mémoires, enregistrés les 2 février 2021, 24 février 2021 et
6 mars 2021, et des pièces enregistrées le 9 mars 2021, M. C... B..., représenté par Me Habibi Alaoui puis par Me Assor-Doukhan, demande à la Cour, dans le dernier état de ses écritures :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler cet arrêté ;
3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ou " salarié " dans le délai d'un mois à compter de la décision à intervenir et sous astreinte de 150 euros par jour de retard ou, à défaut, de procéder au réexamen de sa situation à compter de la décision à intervenir et sous astreinte de 150 euros par jour de retard et de lui délivrer, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 500 euros au titre de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative ;
Il soutient que :
- la décision portant refus de titre de séjour est entachée d'une insuffisance de motivation ;
- le préfet n'a pas procédé à un examen complet de sa situation ;
- elle est entachée d'une erreur de fait dès lors qu'il n'a pas été condamné, et qu'il n'a pas présenté de faux documents au soutien de sa demande de titre de séjour ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de l'article l. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors qu'il remplit les conditions d'admission au séjour posées par la circulaire du 28 novembre 2012 ;
- elle méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français est illégale à raison de l'illégalité du refus de titre sur laquelle elle se fonde ;
La requête a été communiquée au préfet de la Seine-Saint-Denis, qui n'a pas produit de mémoire.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Briançon, rapporteure,
- et les observations de Me Maillot représentant M. B....
Considérant ce qui suit :
1. M. C... B..., ressortissant marocain né le 12 juillet 1994, est entré en France le 13 juillet 2012. Le 29 juin 2017, il a sollicité son admission exceptionnelle au séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, demande complétée le 6 mars 2019. Par un arrêté du 5 août 2020, le préfet de la Seine-Saint-Denis a rejeté sa demande, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. M. B... relève appel du jugement du 22 janvier 2021 par lequel le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur la légalité de la décision portant refus de titre de séjour :
2. Aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : 1° Restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police (...) ". Aux termes de l'article L. 211-5 du même code : " La motivation exigée par le présent chapitre doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision ".
3. M. B... soutient que le préfet de la Seine-Saint-Denis a commis une erreur de fait en lui opposant d'une part, la circonstance qu'il avait, au soutien de sa demande de titre de séjour, produit un faux contrat de travail et des preuves de présence frauduleuses, et d'autre part, un jugement du tribunal correctionnel de Nanterre du 11 septembre 2018 et un arrêt de la Cour d'appel de Versailles du 29 mai 2019 qui ne concernent pas M. B..., le préfet indiquant que " au terme du jugement correctionnel, il apparaît que M. B... a produit à l'appui de sa demande de titre un kit de faux document constitué d'un faux contrat de travail et de preuves de présence frauduleuses ". Or, il ressort des pièces du dossier, comme le fait valoir M. B..., qui produit les décisions de justice en cause adressées à son avocat après autorisation de l'avocat général, que le jugement du tribunal correctionnel de Nanterre et l'arrêt de la Cour d'appel de Versailles concernent une personne sans aucun lien avec M. B.... Dès lors cette erreur de fait, au demeurant non contestée par le préfet, a eu une incidence sur la décision en litige. Par suite, M. B... est fondé, pour ce motif, à demander l'annulation de l'arrêté attaqué.
4. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens de la requête, que M. B... est fondé à demander l'annulation du jugement du tribunal administratif de Montreuil ainsi que celle de l'arrêté du 5 août 2020 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé son admission au séjour et l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours en fixant le pays de destination.
Sur les conclusions à fin d'injonction sous astreinte :
5. Eu égard à son motif, l'annulation prononcée par le présent arrêt implique seulement qu'il soit enjoint au préfet de la Seine-Saint-Denis de réexaminer la situation de M. B... dans un délai de deux mois à compter de sa notification. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'assortir cette injonction d'une astreinte.
Sur les frais liés à l'instance :
6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement à M. B... d'une somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
Article 1er : Le jugement n° 2008970 du 22 janvier 2021 du tribunal administratif de Montreuil et l'arrêté du 5 août 2020 du préfet de la Seine-Saint-Denis pris à l'encontre de M. B... sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au préfet de la Seine-Saint-Denis de procéder au réexamen de la situation administrative de M. B... dans un délai de deux mois à compter de la date de notification du présent arrêt.
Article 3 : L'Etat versera une somme de 1 500 euros à M. B... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de la Seine-Saint-Denis.
Délibéré après l'audience du 22 avril 2022, à laquelle siégeaient :
- Mme Heers, présidente de chambre,
- Mme Briançon, présidente-assesseure,
- Mme Portes, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 25 mai 2022.
La rapporteure,
C. BRIANÇON
La présidente,
M. A...La greffière,
V. BREMELa République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N° 21PA00551 2