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12/05/2022 | FRANCE | N°21PA01679

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 4ème chambre, 12 mai 2022, 21PA01679


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. H... B... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 18 janvier 2021 par lequel le préfet de police l'a obligé à quitter le territoire français sans délai et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 2101062/8 du 22 février 2021, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 31 mars 2021 et le 21 février 2022,

M. B..., représenté par Me Fournier, dema

nde à la Cour :

1°) de l'admettre au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire ;

2°) d'annuler c...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. H... B... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 18 janvier 2021 par lequel le préfet de police l'a obligé à quitter le territoire français sans délai et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 2101062/8 du 22 février 2021, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 31 mars 2021 et le 21 février 2022,

M. B..., représenté par Me Fournier, demande à la Cour :

1°) de l'admettre au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire ;

2°) d'annuler ce jugement ;

3°) d'annuler cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet de police de réexaminer sa situation et de procéder à l'effacement de son nom du système d'information Schengen ;

4°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour et une autorisation de travail dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat le paiement d'une somme de 1 200 euros à verser à son conseil sur le fondement des dispositions combinées de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative, sous réserve qu'elle renonce à percevoir la part contributive de l'Etat.

Il soutient que :

- le tribunal a entaché son jugement d'omission à statuer concernant les moyens tirés de la méconnaissance des dispositions des 6° et 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dirigés contre l'obligation de quitter le territoire français ;

- l'obligation de quitter le territoire français est insuffisamment motivée et cette insuffisance révèle un défaut d'examen de sa situation ;

- elle est entachée d'erreur de fait ;

- elle méconnait les dispositions de l'article L. 743-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnait les dispositions des 6° et 7° de l'article L.313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnait les dispositions de l'article L. 424-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'il est parent d'un enfant ayant obtenu la reconnaissance du statut de réfugié ;

- elle méconnait enfin les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que celles de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- datant de plus d'un an, cette décision n'est plus exécutoire ;

- la décision lui refusant l'octroi d'un délai de départ volontaire est illégale du fait de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français ;

- elle a été signée par une autorité incompétente ;

- elle est entachée d'une erreur de droit et d'erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision fixant le pays de destination est illégale du fait de l'illégalité des décisions de refus de titre de séjour et d'obligation de quitter le territoire français ;

- elle est insuffisamment motivée ;

- elle méconnait l'article 33 de la convention de Genève et l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des liberté fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.

Par un mémoire en défense, enregistré le 10 février 2022, le préfet de police conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.

M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Paris le 28 avril 2021.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme E...,

- et les observations de Me Fournier, représentant M. B...,

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., ressortissant russe, né le 18 mai 1983, est irrégulièrement entré en France le 5 juillet 2012, selon ses déclarations, et a sollicité son admission au séjour au titre du droit d'asile le 5 décembre 2012 auprès des services de la préfecture de police. Sa demande a fait l'objet d'une décision de rejet par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides le

29 janvier 2014, décision confirmée par la Cour nationale du droit d'asile le 13 novembre 2014. Sa demande de réexamen de sa demande d'asile a été rejetée comme irrecevable par l'OFPRA le 31 mars 2016. Par un arrêté du 18 janvier 2021, le préfet de police l'a obligé à quitter le territoire français sans délai et a fixé le pays de renvoi. M. B... relève appel du jugement du 22 février 2021 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la demande d'admission à l'aide juridictionnelle à titre provisoire :

2. M. B... ayant été admis à l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Paris du 28 avril 2021, ses conclusions tendant à son admission à l'aide juridictionnelle provisoire sont dépourvues d'objet.

Sur la régularité du jugement :

3. Dans sa requête présentée devant le tribunal administratif de Paris, M. B... avait soulevé, à l'encontre de l'obligation de quitter le territoire français, les moyens tirés de la méconnaissance des dispositions des 6° et 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Or, le tribunal administratif n'a pas visé ces moyens, qui n'étaient pas inopérants, et n'y a pas davantage répondu. Par suite, le jugement attaqué doit être annulé.

4. Il y a lieu d'évoquer l'affaire et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. B... devant le tribunal administratif de Paris.

Sur la légalité de l'arrêté contesté :

En ce qui concerne le moyen commun aux décisions attaquées :

5. L'arrêté attaqué a été signé par M. A... F..., attaché d'administration d'État,

qui disposait d'une délégation de signature à cette fin, consentie par un arrêté n° 2020-01102 du

28 décembre 2020, régulièrement publié au recueil des actes administratifs spécial de la

préfecture de Paris. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'acte attaqué

manque en fait et doit être écarté.

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

6. En premier lieu, la décision litigieuse vise les dispositions pertinentes du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et indique les considérations de fait qui en constituent le fondement, à savoir, notamment, l'absence de droit au séjour de M. B... dont la demande de réexamen de sa demande d'asile a été définitivement rejetée le 31 mars 2016 par l'OFPRA. En outre, il ressort des termes de cet arrêté, qui mentionne que M. B... est célibataire et père de quatre enfants à sa charge, que, contrairement à ce que soutient l'intéressé, le préfet a examiné sa situation au regard de son droit au respect de sa vie privée et familiale. Par suite, la décision litigieuse est suffisamment motivée et permet au requérant d'en contester utilement le bien-fondé. Par ailleurs, il ne ressort pas des termes de cet arrêté que le préfet, qui n'était pas tenu de faire état de l'ensemble des éléments de faits relatifs à la situation de

M. B..., n'aurait pas procédé à un examen personnel de sa situation, ni qu'il aurait entaché sa décision d'erreur de fait.

7. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 743-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors applicable : " Le demandeur d'asile dont l'examen de la demande relève de la compétence de la France et qui a introduit sa demande auprès de l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides bénéficie du droit de se maintenir sur le territoire français jusqu'à la notification de la décision de l'office ou, si un recours a été formé, dans le délai prévu à l'article L. 731-2 contre une décision de rejet de l'office, soit jusqu'à la date de la lecture en audience publique de la décision de la Cour nationale du droit d'asile, soit, s'il est statué par ordonnance, jusqu'à la date de la notification de celle-ci (...) ". Aux termes de l'article L. 743-2 du même code : " Par dérogation à l'article L. 743-1, sous réserve du respect des stipulations de l'article 33 de la convention relative au statut des réfugiés, signée à Genève le 28 juillet 1951, et de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, adoptée à Rome le 4 novembre 1950, le droit de se maintenir sur le territoire français prend fin et l'attestation de demande d'asile peut être refusée, retirée ou son renouvellement refusé lorsque : (...) 4° bis Sans préjudice du 4° du présent article, l'office a pris une décision d'irrecevabilité en application du 3° de l'article L. 723-11 (...) ". Enfin, aux termes de l'article R. 723-19 du même code : " I - La décision du directeur général de l'office est notifiée à l'intéressé par lettre recommandée avec demande d'avis de réception (...) / III - La date de notification de la décision de l'office et, le cas échéant, de la Cour nationale du droit d'asile qui figure dans le système d'information de l'office est communiquée au préfet compétent et au directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration au moyen de traitements informatiques fait foi jusqu'à preuve du contraire ".

8. Si M. B... soutient que la seule production du relevé " Telemofpra " n'est pas suffisante pour s'assurer de l'effectivité de la notification des décisions de rejet de la demande de protection internationale par l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides et par la Cour nationale du droit d'asile et que les plis recommandés avec accusé de réception sont nécessaires, il ressort toutefois des termes de l'article R. 723-19 précité que la date de notification de la décision de l'office, et le cas échéant, de la Cour nationale du droit d'asile, qui figure dans le système d'information de l'office, fait foi jusqu'à preuve du contraire, laquelle n'est pas ici rapportée par M. B.... Par suite, le moyen tiré de ce que la décision portant obligation de quitter le territoire français méconnaît les dispositions de l'article L. 743-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.

9. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors applicable : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 6° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à la condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée ; (...) / 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ; (...) ".

10. M. B... se prévaut de la présence de ses quatre enfants en France dont il soutient contribuer à l'entretien et à l'éducation. Toutefois, il ne produit aucun élément de nature à établir cette allégation, à l'exception de son fils G... D... B..., pour lequel il a obtenu la garde exclusive par jugement du tribunal de grande instance de Caen le 3 février 2015. A cet égard, la seule circonstance que son fils mineur soit né en France et y soit scolarisé ne lui confère aucun droit au regard de la législation en vigueur, alors au demeurant que M. B... ne fait valoir aucune circonstance qui s'opposerait à ce que son enfant l'accompagne en Russie et y poursuive sa scolarité. Enfin, si le requérant soutient que sa mère réside régulièrement sur le territoire français, il ne justifie pas de la nécessité de sa présence auprès d'elle. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.

En quatrième lieu, aux termes de l'article L. 314-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers, devenu l'article L. 424-3 : " Sauf si la présence de l'étranger constitue une menace pour l'ordre public, la carte de résident est délivrée de plein droit, sous réserve de la régularité du séjour : (..) 8° A l'étranger reconnu réfugié en application du livre VII ainsi qu'à : (...) d) Ses ascendants directs au premier degré si l'étranger qui a obtenu le bénéfice de la protection est un mineur non marié. (...) ".

Si M. B... fait valoir qu'il est le père d'une fille née le 17 janvier 2019 qui a obtenu le bénéfice du statut de réfugié, il n'établit pas le lien de filiation de cet enfant par la seule production d'un acte de reconnaissance établi le 7 janvier 2019. Si les services de la préfecture l'ont convoqué pour l'examen de sa demande de titre de séjour " en qualité de membre de famille de réfugié ", cette circonstance n'est pas de nature à établir sa qualité de père d'un enfant réfugié alors même que cette convocation mentionne une demande d'admission exceptionnelle au séjour et non une demande de titre sur le fondement des dispositions citées au point précédent et qu'elle a pu être déposée au regard de la qualité de réfugié de sa mère. Le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du 8° de l'article L. 314-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.

11. En cinquième lieu, aux termes des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. (...) ". Et, aux termes de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " 1. Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale. / 2. Les Etats parties s'engagent à assurer à l'enfant la protection et les soins nécessaires à son bien-être, compte tenu des droits et des devoirs de ses parents, de ses tuteurs ou des autres personnes légalement responsables de lui, et ils prennent à cette fin toutes les mesures législatives et administratives appropriées ". Il résulte de ces stipulations que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant.

12. M. B..., qui n'établit contribuer qu'à l'entretien de son fils mineur G... D... B... dont il a la garde exclusive, ne justifie d'aucun obstacle à ce que celui-ci retourne vivre avec lui en Russie. Il n'établit pas non plus entretenir des liens d'une particulière intensité avec sa mère ni ne justifie de la nécessité de sa présence auprès d'elle. Par ailleurs, si l'intéressé soutient vivre en France depuis près de dix ans et se prévaut de son intégration dans ce pays, il n'établit pas la continuité de sa présence par les pièces qu'il produit, notamment pour la période comprise entre 2013 et 2016. En outre, la seule production de trois attestations de l'association Emmaüs ainsi que des relevés de cotisation témoignant de sa participation à cette association est insuffisante pour considérer que l'intéressé, qui ne travaille pas et ne parle pas le français, pourrait se prévaloir d'une insertion particulière. Enfin, M. B... n'établit pas être dépourvu d'attache dans son pays d'origine où il a vécu jusqu'à ses vingt-neuf ans. Il suit de là que le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées doit être écarté.

En sixième lieu, au regard des considérations exposées ci-dessus, le requérant n'établit pas que le préfet aurait entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation.

En septième lieu, la circonstance que la décision attaquée aurait perdu son caractère exécutoire est sans incidence sur sa légalité.

En ce qui concerne le refus d'octroi d'un délai de départ volontaire :

13. En premier lieu, la décision portant obligation de quitter le territoire français n'étant entachée d'aucune des illégalités alléguées, le moyen tiré de l'exception d'illégalité de cette décision, invoqué à l'appui des conclusions dirigées contre la décision de refus de délai de départ volontaire doit, en conséquence, être écarté.

14. En deuxième lieu, aux termes des dispositions du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors applicable : " Pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, l'étranger dispose d'un délai de trente jours à compter de sa notification pour rejoindre le pays dont il possède la nationalité ou tout autre pays non membre de l'Union européenne ou avec lequel ne s'applique pas l'acquis de Schengen où il est légalement admissible. (...) Toutefois, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, décider que l'étranger est obligé de quitter sans délai le territoire français : 1° Si le comportement de l'étranger constitue une menace pour l'ordre public ; (...) 3° S'il existe un risque que l'étranger se soustraie à cette obligation. Ce risque peut être regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : a) Si l'étranger, qui ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, n'a pas sollicité la délivrance d'un titre de séjour ; (...) d) Si l'étranger s'est soustrait à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement ; (...) f) Si l'étranger ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, notamment parce qu'il ne peut justifier de la possession de documents d'identité ou de voyage en cours de validité, ou qu'il a dissimulé des éléments de son identité, ou qu'il n'a pas déclaré le lieu de sa résidence effective ou permanente, ou qu'il s'est précédemment soustrait aux obligations prévues par les articles L. 513-4, L. 552-4, L. 561-1 et L. 561-2. (...) "

15. Il ressort des pièces du dossier que M. B... est entré irrégulièrement sur le territoire français en 2012, qu'il s'y est maintenu sans titre de séjour et qu'il a fait l'objet de trois précédentes mesures d'éloignement le 28 janvier 2015, le 9 juin 2016 et le 14 novembre 2017 auxquelles il s'est soustrait. Le préfet de police s'est fondé dans sa décision litigieuse sur ces trois motifs, lesquels suffisent à établir la réalité d'un risque de fuite. Il suit de là que le préfet de police aurait pris la même décision s'il ne s'était fondé que sur ces seuls motifs. Par suite, les moyens tirés de ce que le préfet de police aurait entaché sa décision d'erreur de droit et d'erreur manifeste d'appréciation doivent être écartés.

En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :

16. En premier lieu, la décision portant obligation de quitter le territoire français n'étant entachée d'aucune des illégalités alléguées, le moyen tiré de l'exception d'illégalité de cette décision, invoqué à l'appui des conclusions dirigées contre la décision fixant le pays de renvoi doit, en conséquence, être écarté.

17. En deuxième lieu, la décision fixant le pays de destination est suffisamment motivée dès lors que l'arrêté attaqué mentionne que M. B... " n'établit pas être exposé à des peines ou traitements contraires à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en cas de retour dans son pays d'origine, ou dans son pays de résidence habituelle où il est effectivement admissible ", alors en outre que l'intéressé ne fait valoir aucun élément susceptible de constituer une violation des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

18. En dernier lieu, aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants. " et aux termes de l'article 33 de la convention de Genève du 28 juillet 1951 : " 1. Aucun des Etats contractants n'expulsera ou ne refoulera, de quelque manière que ce soit, un réfugié sur les frontières des territoires où sa vie ou sa liberté serait menacée en raison de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques. 2. Le bénéfice de la présente disposition ne pourra toutefois être invoqué par un réfugié qu'il y aura des raisons sérieuses de considérer comme un danger pour la sécurité du pays où il se trouve ou qui, ayant été l'objet d'une condamnation définitive pour un crime ou délit particulièrement grave, constitue une menace pour la communauté dudit pays. ".

19. M. B..., qui se borne à soutenir qu'il craint de subir des traitements inhumains et dégradants en cas de retour dans son pays d'origine, n'établit pas la réalité de ces risques, alors au demeurant qu'il résulte de ce qui a été dit au point 1 que sa demande d'asile a été rejetée définitivement par l'OFPRA et par la CNDA. Par suite, M. B... n'est pas fondé à soutenir que la décision fixant le pays de renvoi méconnaitrait les stipulations précitées ni qu'elle serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.

20. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêté contesté. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 2101062/8 du 22 février 2021 du tribunal administratif de Paris est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. B... devant le tribunal administratif de Paris est rejetée.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. H... B... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera délivrée au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 22 avril 2022, à laquelle siégeaient :

- Mme Heers, présidente,

- Mme Briançon, présidente-assesseure,

- Mme Portes, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 12 mai 2022.

La rapporteure,

C. E...

La présidente,

M. C... La greffière,

V. BREME

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 21PA01679 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 21PA01679
Date de la décision : 12/05/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme HEERS
Rapporteur ?: Mme Celine PORTES
Rapporteur public ?: M. BARONNET
Avocat(s) : FOURNIER

Origine de la décision
Date de l'import : 24/05/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2022-05-12;21pa01679 ?
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