Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Paris l'annulation de l'arrêté du 14 octobre 2020 par lequel le préfet de police a refusé de renouveler son titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays de renvoi.
Par un jugement n° 2107175 du 6 juillet 2021, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 8 novembre 2021 et le 25 février 2022, M. A..., représenté par Me Hounkpatin, demande à la Cour, dans le dernier état de ses écritures :
1°) d'annuler le jugement n° 2107175 du 6 juillet 2021 du tribunal administratif de Paris ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet de police en date du 14 octobre 2020 ;
3°) d'enjoindre au préfet de police, à titre principal, de lui délivrer une carte de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard, à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de sa situation, et de lui délivrer, durant ce réexamen, une autorisation provisoire de séjour, dans le délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- la décision portant refus de titre de séjour est insuffisamment motivée ;
- le préfet de police n'a pas procédé à un examen approfondi de sa situation ;
- l'avis du collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) est irrégulier ;
- le préfet de police aurait dû saisir la commission du titre de séjour, en application de l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le préfet de police a méconnu les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- il a entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation eu égard à ses conséquences sur sa situation personnelle ;
- la décision l'obligeant à quitter le territoire français est insuffisamment motivée ;
- elle est entachée d'un défaut d'examen ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle méconnaît les dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation eu égard à ses conséquences sur sa situation personnelle ;
- elle est entachée de l'illégalité, par voie d'exception, de la décision portant refus de titre de séjour ;
- la décision fixant le pays de renvoi méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par un mémoire en défense, enregistré le 24 février 2022, le préfet de police conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir qu'aucun des moyens soulevés n'est fondé.
M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale, par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Paris en date du 27 septembre 2021.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le décret n° 2020-1717 du 28 décembre 2020 ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. B... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., ressortissant malien né le 28 juillet 1977, a sollicité le renouvellement de son titre de séjour sur le fondement des dispositions alors codifiées au 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 14 octobre 2020, le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays de renvoi. M. A... relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
2. Aux termes des dispositions alors codifiées à l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : / [...] 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. Les médecins de l'office accomplissent cette mission dans le respect des orientations générales fixées par le ministre chargé de la santé [...] ".
3. Le refus de titre de séjour opposé par le préfet de police à M. A..., qui souffre d'une algie vasculaire de la face, est fondé sur l'avis émis le 17 juillet 2020 par le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII), lequel relève que si l'état de santé de l'intéressé nécessite une prise en charge médicale, le défaut de celle-ci ne devrait pas entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité. Or, il ressort des pièces du dossier que M. A..., suivi depuis 2014 en milieu hospitalier, fait l'objet d'" infiltrations au niveau de l'émergence du nerf grand-occipital d'Arnold, de traitements par anticalcique et par triptan injectable ", ainsi qu'en atteste un certificat médical du 8 juin 2021 - postérieur à l'arrêté attaqué, mais qui se rapporte à une situation antérieure - lequel ajoute, d'une part, que " l'algie vasculaire de la face est une maladie qui entraîne des douleurs extrêmement intenses, décrites comme pouvant pousser les patients au suicide ", d'autre part, que " l'absence de recours à ces soins pourrait avoir des conséquences d'une grande gravité chez lui ". Ce tableau clinique est confirmé par un certificat médical du 1er août 2019, qui fait état de " crises de douleur atroces hémicrâniennes ", et qui précise que " pendant les périodes de recrudescence de crises un traitement aigu comportant du Sumitriptan injectable est impératif, compte tenu de l'intensité de la douleur ", associé à des " séries d'infiltrations occipitales si la fréquence des crises est très élevée ". Par suite, et au regard de ces certificats médicaux, produits pour la première fois en appel, c'est à tort que le préfet de police a estimé que le défaut de prise en charge médicale ne devrait pas entraîner, pour M. A..., de conséquences d'une exceptionnelle gravité.
4. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête, que M. A... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 14 octobre 2020 du préfet de police.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
5. Eu égard au motif d'annulation retenu ci-dessus, l'exécution du présent arrêt n'implique pas nécessairement que le préfet de police délivre un titre de séjour à M. A.... En revanche, elle implique nécessairement que le préfet de police réexamine la situation de M. A.... Il y a lieu, en application de l'article L. 911-2 du code de justice administrative, d'enjoindre au préfet de police d'y procéder, dans le délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte.
Sur les frais liés à l'instance :
6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de mettre à la charge de l'Etat le versement au conseil de M. A..., Me Hounkpatin, d'une somme de 1 000 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens, sous réserve que Me Hounkpatin renonce à percevoir la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n° 2107175 du tribunal administratif de Paris du 6 juillet 2021 et l'arrêté du préfet de police du 14 octobre 2020 sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au préfet de police de procéder au réexamen de la situation de M. A... dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 3 : L'Etat versera au conseil de M. A..., Me Hounkpatin, une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que celui-ci renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A..., à Me Hounkpatin, au préfet de police et au ministre de l'intérieur.
Délibéré après l'audience du 31 mars 2022, à laquelle siégeaient :
- Mme Vinot, présidente de chambre,
- Mme Vrignon-Villalba, présidente assesseure,
- M. Aggiouri, premier conseiller.
Rendu public par mise à dispositions au greffe, le 5 mai 2022.
Le rapporteur,
K. B...La présidente,
H. VINOT
La greffière,
F. DUBUY-THIAM
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N° 21PA05727 2