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05/05/2022 | FRANCE | N°21PA04268

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 5ème chambre, 05 mai 2022, 21PA04268


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... épouse B... a demandé au tribunal administratif de Montreuil l'annulation de l'arrêté du 3 décembre 2020 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 2014810 du 28 juin 2021, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 27 juill

et 2021, Mme C..., représentée par Me Taj, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 201481...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... épouse B... a demandé au tribunal administratif de Montreuil l'annulation de l'arrêté du 3 décembre 2020 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 2014810 du 28 juin 2021, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 27 juillet 2021, Mme C..., représentée par Me Taj, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2014810 du 28 juin 2021 du tribunal administratif de Montreuil ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet de la Seine-Saint-Denis du 3 décembre 2020 ;

3°) d'enjoindre à toute autorité administrative, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour, dans le délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard, à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de sa situation, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, et de lui délivrer, durant cet examen, une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'arrêté contesté est insuffisamment motivé ;

- il est entaché d'un défaut d'examen de sa situation ;

- il méconnaît les dispositions de l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle aurait dû se voir délivrer un récépissé de demande de titre de séjour dans l'attente de l'examen de son dossier ;

- l'arrêté contesté méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- il méconnaît les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation eu égard à ses conséquences sur sa situation personnelle ;

- il est entaché d'une erreur de fait ;

- elle est fondée à se prévaloir de l'illégalité, par voie d'exception, des décisions portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français.

La requête a été communiquée au préfet de la Seine-Saint-Denis, qui n'a pas produit de mémoire en défense.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. A... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme C..., ressortissante indienne née le 2 août 1968, a sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 3 décembre 2020, le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. Mme C... relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent [...] ". Aux termes de l'article L. 211-5 du même code : " La motivation [...] doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision ". Aux termes des dispositions alors codifiées à l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un État membre de l'Union européenne, [...] lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : / [...] 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré ; / [...] La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée. Elle n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour dans les cas prévus aux 3° [...] du présent 1 [...] ".

3. L'arrêté contesté relève que Mme C..., " entrée en France le 21 mars 2019 [...] ne peut plus se prévaloir des dispositions de l'article L. 313-11 alinéa 11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qu'en effet, il ressort de l'avis émis par le collège des médecins de l'OFII que l'état de santé de l'intéressée nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, qu'eu égard à l'offre de soins dans le pays dont elle est originaire, elle peut effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine ", et que, " au vu des éléments du dossier et à la date de l'avis, son état de santé lui permet de voyager sans risque vers le pays d'origine ", de sorte que " son maintien sur le territoire français n'est pas justifié à ce titre ". Il indique également que " l'intéressée ne justifie ni d'une ancienneté sur le territoire français ni d'une insertion professionnelle en France d'une intensité et d'une qualité telles qu'elle puisse prétendre à une admission exceptionnelle au séjour au titre du travail ", et que l'intéressée, mariée à un compatriote ayant introduit une demande similaire et mère de deux enfants mineurs, ne justifie pas d'obstacles l'empêchant de poursuivre une vie privée et familiale normale dans son pays d'origine ". Ainsi, la décision portant refus de titre de séjour comporte les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement. Par ailleurs, la décision portant obligation de quitter le territoire français a été prise, en application du 3° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, à la suite du refus de titre de séjour opposé à Mme C.... En conséquence, sa motivation se confond avec celle du refus du titre de séjour dont elle découle nécessairement et n'implique pas de mention spécifique, en droit comme en fait, dès lors que, comme c'est le cas en l'espèce, ce refus est lui-même motivé. Enfin, le préfet de la Seine-Saint-Denis a précisé, pour justifier la décision fixant le pays de renvoi, que Mme C... " n'établit pas être exposée à des peines ou traitements contraires à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en cas de retour dans son pays d'origine ou tout autre pays où elle est effectivement réadmissible ". Par suite, Mme C... n'est pas fondée à soutenir que l'arrêté contesté serait insuffisamment motivé.

4. En deuxième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de la Seine-Saint-Denis n'aurait pas procédé à un examen approfondi de la situation de Mme C....

5. En troisième lieu, la circonstance que le préfet de la Seine-Saint-Denis n'a pas délivré à Mme C... un récépissé de demande de titre de séjour dans l'attente de l'examen de son dossier est en tout état de cause sans incidence sur la légalité de l'arrêté contesté. Par suite, le moyen doit être écarté.

6. En quatrième lieu, aux termes des dispositions alors codifiées à l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : / [...] 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. [...] La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat [...] ".

7. Pour refuser à Mme C..., qui est séropositive au virus de l'immunodéficience humaine (VIH) et souffre de diabète, la délivrance du titre de séjour sollicité, le préfet de la Seine-Saint-Denis s'est fondé sur l'avis du collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII), en date du 18 juin 2020, indiquant que si l'état de santé de la requérante nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut entraîner pour elle des conséquences d'une exceptionnelle gravité, elle peut, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont elle est originaire, y bénéficier effectivement d'un traitement approprié et a estimé en conséquence que son admission au séjour n'avait pas lieu d'être prononcée sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Or, Mme C... ne produit aucune pièce indiquant que les soins nécessités par les pathologies dont elle souffre ne seraient pas effectivement disponibles en Inde. A cet égard, si Mme C... soutient que les soins adaptés à son état de santé seraient difficiles d'accès en Inde du fait d'obstacles socio-économiques et d'une marginalisation des patients atteints du VIH, elle n'apporte aucun élément de preuve au soutien de ses allégations. Ainsi, les éléments produits par Mme C... ne permettent pas de remettre en cause l'avis du collège des médecins de l'OFII. Par ailleurs, la circonstance que l'époux de Mme C..., également atteint du VIH, a obtenu des titres de séjour entre 2014 et 2018, est sans incidence sur ce point. Dans ces conditions, Mme C... n'est pas fondée à soutenir que l'arrêté contesté, qui n'est pas entaché d'erreur de fait, méconnaîtrait les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

8. En cinquième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1°) Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; / 2°) Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

9. Mme C... soutient qu'elle a épousé un compatriote en 2001, et que deux enfants sont nés, en 2003 et 2006, de cette union. Toutefois, l'époux de Mme C... était seulement titulaire d'un récépissé de demande de carte de séjour à la date de l'arrêté contesté. Par ailleurs, Mme C..., entrée en France en mars 2019, soit moins de deux ans avant l'édiction de l'arrêté contesté, n'apporte aucune précision ni élément de preuve quant à son intégration sociale en France. Ainsi, l'arrêté contesté n'a pas porté au droit de Mme C... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris. Dans ces conditions, Mme C... n'est pas fondée à soutenir que cet arrêté méconnaîtrait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

10. En sixième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'arrêté contesté serait entaché d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de ses conséquences sur la situation personnelle de Mme C....

11. En septième lieu, aux termes des dispositions alors codifiées à l'article L. 312-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Dans chaque département est instituée une commission du titre de séjour [...] ". Aux termes de l'article L. 312-2 du même code : " La commission est saisie par l'autorité administrative lorsque celle-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article L. 313-11 ou de délivrer une carte de résident à un étranger mentionné aux articles L. 314-11 et L. 314-12, ainsi que dans le cas prévu à l'article L. 431-3 / [...] ".

12. Ainsi qu'il a été dit ci-dessus, Mme C... ne remplit pas les conditions pour se voir délivrer un titre de séjour sur le fondement des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Dès lors, le préfet de la Seine-Saint-Denis n'était pas tenu de soumettre son cas à la commission du titre de séjour avant de statuer sur sa demande. Le moyen ne peut donc qu'être écarté.

13. Enfin, il résulte de ce qui précède que le moyen tiré, par voie d'exception, de l'illégalité des décisions portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français, doit être écarté.

14. Il résulte de tout ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte et celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... épouse B... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de la Seine-Saint-Denis.

Délibéré après l'audience du 31 mars 2022, à laquelle siégeaient :

- Mme Vinot, présidente de chambre,

- Mme Vrignon-Villalba, présidente assesseure,

- M. Aggiouri, premier conseiller.

Rendu public par mise à dispositions au greffe, le 5 mai 2022.

Le rapporteur,

K. A...La présidente,

H. VINOT

La greffière,

F. DUBUY-THIAM

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 21PA04268 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 21PA04268
Date de la décision : 05/05/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme VINOT
Rapporteur ?: M. Khalil AGGIOURI
Rapporteur public ?: Mme LESCAUT
Avocat(s) : TAJ

Origine de la décision
Date de l'import : 17/05/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2022-05-05;21pa04268 ?
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