Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société par actions simplifiées (SAS) Financière MP Landowski a demandé au tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge, en droits, intérêts et pénalités, des rappels de taxe sur les salaires auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2014 et 2015.
Par un jugement n° 1820475 du 22 septembre 2020, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 20 novembre 2020 et 1er avril 2021, la SAS Financière MP Landowski, représenté par Me Fonlupt, avocat, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1820475 du 22 septembre 2020 du tribunal administratif de Paris ;
2°) de prononcer la décharge, en droits, intérêts et pénalités, des rappels de taxe sur les salaires auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2014 et 2015 en ce qui concerne les rémunérations versées à son directeur administratif et financier ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
La SAS Financière MP Landowski soutient que :
- la procédure d'imposition est irrégulière dès lors qu'aucun débat oral et contradictoire sur l'affectation de M. A... au service financier n'est intervenu tant en ce qui concerne l'année 2014 que l'année 2015 ;
- elle n'est pas redevable de la taxe sur les salaires pour ce qui concerne les rémunérations versées à M. A..., ce dernier étant affecté exclusivement au secteur " prestation de services ".
Par un mémoire en défense, enregistré le 12 février 2021, et un mémoire, enregistré le 6 avril 2021 et non communiqué, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.
Le ministre fait valoir que les moyens invoqués par la SAS Financière MP Landowski ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Fullana ;
- les conclusions de M. Sibilli, rapporteur public ;
- et les observations de Me Roucoux, substituant Me Fonlupt, pour la SAS Financière MP Landowski.
Considérant ce qui suit :
1. La société par actions simplifiées (SAS) Financière MP Landowski exerce une activité de holding mixte comportant, d'une part, une activité de prestations de services pour les sociétés du groupe soumises à la taxe sur la valeur ajoutée et, d'autre part, une activité de gestion de la trésorerie et des placements ainsi que la gestion des produits financiers et notamment des dividendes, n'entrant pas dans le champ d'application de la taxe sur la valeur ajoutée. A la suite d'une vérification de comptabilité puis d'un contrôle sur pièces, conclus par deux propositions de rectification du 19 octobre 2016, elle a été assujettie à des rappels de taxe sur les salaires au titre des années 2014 et 2015, assortis d'une majoration de 10 % sur le fondement de l'article 1728 du code général des impôts et d'intérêts de retard, concernant notamment les rémunérations servies à M. A..., directeur administrateur et financier. La SAS Financière MP Landowski fait appel du jugement par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge de ces impositions et pénalités.
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
2. En premier lieu, aux termes du premier alinéa de l'article L. 13 du livre des procédures fiscales : " Les agents de l'administration des impôts vérifient sur place, en suivant les règles prévues par le présent livre, la comptabilité des contribuables astreints à tenir et à présenter des documents comptables ". Lorsque la vérification de comptabilité a été effectuée dans les propres locaux de l'entreprise, si celle-ci allègue que les opérations de vérification ont été conduites sans qu'elle ait eu la possibilité d'avoir un débat oral et contradictoire avec le vérificateur, il lui appartient de justifier que ce dernier se serait refusé à un tel débat.
3. Il résulte de l'instruction et notamment de la proposition de rectification du 19 octobre 2016 que les opérations de vérification de comptabilité ayant donné lieu aux redressements au titre de l'année 2014 se sont déroulées du 5 septembre 2016 au 18 octobre 2016 dans les locaux de la société en présence de M. A... et que les rappels proposés ont été discutés à de multiples reprises et exposés lors de la réunion de synthèse le 18 octobre 2015, en présence de M. A.... Dans ces conditions, il appartient à la société requérante d'établir que le service se serait refusé à un débat oral et contradictoire avec le vérificateur. Si la SAS Financière MP Landowski soutient qu'elle n'a pas bénéficié d'un tel débat en ce qui concerne les fonctions exercées par M. A... et notamment l'affectation de l'intéressé à l'un de ses deux secteurs d'activité, au motif que le vérificateur a toujours considéré qu'il exerçait des fonctions transversales, que la proposition de rectification n'est pas motivée et ne comporte de référence au débat oral et contradictoire qu'en ce qui concerne la détermination du rapport et du taux d'assujettissement, il résulte de l'instruction que la question de l'affectation de M. A... au secteur de la gestion financière du groupe a donné lieu à des échanges avec le vérificateur, sans d'ailleurs qu'à ce stade la société n'ait pas été mise en mesure de contester les affirmations du vérificateur. Au demeurant, il ne résulte pas de l'instruction que des pièces de nature comptable aient été soumises au débat par le vérificateur, ou que ce dernier se soit refusé à tenir compte de pièces de cette nature qu'aurait produites la société. Par suite, le moyen tiré de ce qu'elle a été privée d'un débat et oral contradictoire sur ce point au titre de la taxe sur les salaires pour l'année 2014 doit être écarté.
4. En second lieu, il résulte de l'instruction que la proposition de rectification du 19 octobre 2016 concernant la taxe sur les salaires au titre de l'année 2015 a été adressée à la suite d'un contrôle sur pièces du dossier fiscal de la société requérante. Si cette dernière soutient que l'administration aurait dû engager et respecter la procédure de vérification de comptabilité, il ne résulte d'aucune disposition du code général des impôts qu'elle était tenue de le faire dès lors qu'elle s'est bornée à établir le montant des rappels à partir des éléments figurant au dossier fiscal de cette dernière. En outre, s'il est constant que le service s'est appuyé sur les renseignements obtenus dans le cadre de la vérification de comptabilité de la société qui s'est déroulée du 5 septembre 2016 au 18 octobre 2016, il résulte de ce qui a été dit au point précédent que cette vérification n'est pas intervenue dans des conditions irrégulières. Par suite, le moyen tiré de ce que la requérante a été privée d'un débat et oral contradictoire au titre de la taxe sur les salaires pour l'année 2015 doit être écarté.
Sur le bien-fondé de l'imposition :
5. Aux termes de l'article 231 du code général des impôts : " 1. Les sommes payées à titre de rémunérations aux salariés, à l'exception de celles correspondant aux prestations de sécurité sociale versées par l'entremise de l'employeur, sont soumises à une taxe égale à 4,25 % de leur montant évalué selon les règles prévues à l'article L. 136-2 du code de la sécurité sociale, sans qu'il soit toutefois fait application du deuxième alinéa du I du même article. Cette taxe est à la charge des entreprises et organismes (...) qui paient ces rémunérations lorsqu'ils ne sont pas assujettis à la taxe sur la valeur ajoutée ou ne l'ont pas été sur 90 % au moins de leur chiffre d'affaires au titre de l'année civile précédant celle du paiement desdites rémunérations. L'assiette de la taxe due par ces personnes ou organismes est constituée par une partie des rémunérations versées, déterminée en appliquant à l'ensemble de ces rémunérations le rapport existant, au titre de cette même année, entre le chiffre d'affaires qui n'a pas été passible de la taxe sur la valeur ajoutée et le chiffre d'affaires total (...).
6. L'administration a assigné à la SAS Financière MP Landowski des rappels de taxe sur les salaires au titre des années 2014 et 2015 en incluant dans son assiette imposable les rémunérations du directeur administratif et financier et en leur appliquant le coefficient d'assujettissement à la taxe sur les salaires, déterminé au niveau de la société. Il résulte des dispositions de l'article 231 du code général des impôts que, lorsqu'une entreprise exerce son activité dans des domaines différents, dont certains n'entrent pas dans le champ de la taxe sur la valeur ajoutée, les rémunérations des salariés ne sont passibles de la taxe sur les salaires qu'à la condition qu'ils exercent leur activité, en tout ou partie, dans le domaine n'entrant pas dans le champ de la taxe sur la valeur ajoutée. Il ne résulte pas de l'instruction, que M. A..., directeur administratif et financier de la société par actions simplifiée requérante, pourrait être présumé, eu égard à sa qualité, comme exerçant des fonctions de nature transversale impliquant nécessairement une intervention dans le secteur situé hors du champ de la taxe sur la valeur ajoutée.
7. La société requérante fait valoir que M. A... a été engagé par elle, en tant que société tête de groupe, pour assister les entreprises du groupe dans leur gestion comptable, fiscale et financière et non pour gérer le patrimoine financier de la holding, et qu'il n'a aucun pouvoir pour prendre des actes et décisions relatives au secteur financier qui relèvent exclusivement de la présidente de la société. Il résulte toutefois de l'instruction, et en particulier du contrat de travail et de la fiche de poste de M. A..., que si celui-ci exerce diverses missions relevant de la direction administrative et financière des filiales, il est également chargé de l'établissement de l'intégration fiscale du groupe et de ses comptes consolidés, sans qu'ait d'incidence à cet égard la circonstance que cette mission est déléguée à un cabinet extérieur, ainsi que des relations avec les commissaires aux comptes, experts comptables, établissements financiers et administration fiscale. En outre, la fiche de poste mentionne également, au titre des finalités de ses attributions, la gestion des relations bancaires et la gestion des risques d'assurance, et, au titre de ses missions, la maîtrise du ratio d'endettement du bilan consolidé et le développement de la capacité d'autofinancement du groupe, en liaison avec les responsables de chaque site et la présidente du groupe. A défaut de toute précision en sens contraire dans le contrat de travail ou la fiche de poste, ces missions, qui se rattachent à la gestion financière, doivent être regardées comme exercées au profit de l'ensemble du groupe et pas seulement de ses filiales. Enfin, le mandat de gestion produit par la société ne contient aucun élément permettant d'établir l'affectation exclusive de M. A... au secteur des prestations de services au profit des filiales du groupe. Dans ces conditions, M. A... doit être regardé comme ayant exercé ses fonctions dans le domaine d'activité de la société n'entrant pas dans le champ de la taxe sur la valeur ajoutée et ses rémunérations doivent être prises en compte dans le calcul de la taxe sur les salaires.
8. Il résulte de tout ce qui précède que la société requérante n'est pas fondée à se plaindre que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Sa requête doit dès lors être rejetée, y compris ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de la société par actions simplifiées (SAS) Financière MP Landowski est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société par actions simplifiées (SAS) Financière MP Landowski et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.
Copie en sera adressée à la direction spécialisée de contrôle fiscal Ile-de-France.
Délibéré après l'audience du 28 mars 2022, à laquelle siégeaient :
- M. Carrère, président de chambre,
- M. Simon, premier conseiller,
- Mme Fullana, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe de la Cour, le 11 avril 2022.
La rapporteure,
M. FULLANA Le président,
S. CARRERE
La greffière,
E. LUCE
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la relance en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 20PA03493