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21/03/2022 | FRANCE | N°21PA03164

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 8ème chambre, 21 mars 2022, 21PA03164


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au Tribunal administratif de Melun d'annuler l'arrêté du 4 mars 2020 par lequel le préfet des Hauts-de-Seine l'a obligé à quitter le territoire sans délai, a fixé le pays de destination de cette mesure et lui a interdit de revenir sur le territoire pendant un an.

Par un jugement n° 2002374 du 15 mars 2021, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des pièces, enregistrées les 8 juin 2021, 27 janvier

et 2 mars 2022,

M. A..., représenté par Me Reghioui, demande à la Cour :

1°) d'annuler le ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au Tribunal administratif de Melun d'annuler l'arrêté du 4 mars 2020 par lequel le préfet des Hauts-de-Seine l'a obligé à quitter le territoire sans délai, a fixé le pays de destination de cette mesure et lui a interdit de revenir sur le territoire pendant un an.

Par un jugement n° 2002374 du 15 mars 2021, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des pièces, enregistrées les 8 juin 2021, 27 janvier et 2 mars 2022,

M. A..., représenté par Me Reghioui, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2002374 du 15 mars 2021 du Tribunal administratif de Melun ;

2°) d'annuler l'arrêté du 4 mars 2020 par lequel le préfet des Hauts-de-Seine l'a obligé à quitter le territoire sans délai, a fixé le pays de destination de cette mesure et lui a interdit de revenir sur le territoire pendant un an ;

3°) d'enjoindre au préfet des Hauts-de-Seine de procéder au réexamen de sa situation dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour durant ce réexamen, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil Me Reghioui d'une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- l'arrêté attaqué est insuffisamment motivé ;

S'agissant de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- elle n'a pas été précédée d'un examen sérieux et particulier de sa situation ;

- elle est entachée d'un vice de procédure dès lors que le principe du contradictoire a été méconnu ;

- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entachée d'une erreur de fait et d'une erreur de droit au regard de ces dispositions ;

- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de sa situation personnelle.

S'agissant de la décision fixant le pays de destination :

- elle est entachée d'un vice de procédure dès lors que le principe du contradictoire a été méconnu ;

S'agissant de la décision d'interdiction de retour d'un an :

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de sa situation personnelle.

Par un mémoire en défense, enregistré le 6 juillet 2021, le préfet des Hauts-de-Seine conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés.

M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Paris du 28 avril 2021.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales,

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile,

- la loi n°91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le décret n°2020-1717 du 28 décembre 2020 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Collet a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant philippin né le 2 avril 1973, est entré en France le 7 mars 2013 selon ses déclarations. Par arrêté du 4 mars 2020, le préfet des Hauts-de-Seine l'a obligé à quitter le territoire français sans délai sur le fondement du 1° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, a fixé le pays de destination et lui a interdit de revenir sur le territoire pendant une année. M. A... relève appel du jugement n° 2002374 du 15 mars 2021 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

2. En premier lieu, M. A... se borne à reproduire en appel, sans les assortir d'éléments nouveaux, les moyens qu'il avait développés en première instance tirés de ce que l'arrêté attaqué est insuffisamment motivé, la décision portant obligation de quitter le territoire français n'a pas été précédée d'un examen sérieux et particulier de sa situation et que les décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination d'une mesure d'éloignement sont entachées d'un vice de procédure dès lors que le principe du contradictoire a été méconnu. Il y a lieu, par adoption des motifs retenus par les premiers juges aux points 6, 10 et 14 puis aux points

2 et 4 du jugement attaqué, d'écarter ces moyens.

3. En deuxième lieu, le préfet a pu légalement prendre à l'encontre de l'intéressé un arrêté portant obligation de quitter le territoire français, en se fondant sur le caractère irrégulier de son séjour sur le territoire français sans méconnaître les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa numérotation alors en vigueur, dès lors que ces dispositions ne prescrivent pas la délivrance d'un titre de plein droit mais laissent à l'administration un large pouvoir pour apprécier si l'admission au séjour d'un étranger répond à des considérations humanitaires ou si elle se justifie au regard des motifs exceptionnels que celui-ci fait valoir. Par suite, les moyens tirés de ce que la décision d'obligation de quitter le territoire français méconnaît les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entachée d'une erreur de fait et d'une erreur de droit ne peuvent qu'être écartés.

4. En dernier lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa numérotation alors en vigueur : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : " (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République. "

5. M. A... est entré en France, selon ses propres déclarations, en mars 2013. Il fait valoir que ses parents sont décédés et que sa sœur et son frère résident en France en situation régulière. Il précise, par ailleurs, qu'il travaille à temps plein et subvient à ses besoins, qu'il déclare ses revenus, qu'il est parfaitement intégré en France, qu'il maîtrise la langue française et qu'il a pu développer au cours des 8 années passées en France des liens amicaux très solides et qu'il n'est jamais retourné dans son pays d'origine depuis son arrivée sur le territoire français. Toutefois, M. A... est célibataire et sans charge de famille en France et il n'établit pas être dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine où il a vécu jusqu'à l'âge de 40 ans. Par suite, en prononçant à son encontre une obligation de quitter le territoire français, le préfet des Hauts-de-Seine n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte contraire aux stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni méconnu les dispositions de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et commis d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle de M. A....

S'agissant de la décision d'interdiction de retour d'un an :

6. Aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa numérotation alors en vigueur : " (...) III.- L'autorité administrative, par une décision motivée, assortit l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français, d'une durée maximale de trois ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français, lorsque aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger. / Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative ne prononce pas d'interdiction de retour. (...). (...) La durée de l'interdiction de retour [est décidée] par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français. (...) ".

7. Il ressort des pièces du dossier que quand bien même l'employeur de M. A... s'apprêtait à déposer une demande d'autorisation de travail en vue de la délivrance d'un titre de séjour et que M. A... serait parfaitement intégré en France et dispose d'une résidence stable, il s'est maintenu en France au-delà de la durée de validité de son visa sans solliciter la délivrance d'un titre de séjour et il a déclaré devant les services de police son intention de ne pas se conformer à l'obligation de quitter le territoire français. Par suite, dès lors que le risque que M. A... se soustraie à la mesure d'éloignement pouvait être présumé en application des dispositions précitées de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ce dernier n'est pas fondé à soutenir qu'en prenant à son encontre une interdiction de retour d'une durée d'un an, le préfet des Hauts-de-Seine aurait entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de sa situation personnelle.

8. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du

4 mars 2020 par lequel le préfet des Hauts-de-Seine l'a obligé à quitter le territoire sans délai, a fixé le pays de destination de cette mesure et lui a interdit de revenir sur le territoire pendant un an. Par conséquent, l'ensemble des conclusions de sa requête d'appel ne peut qu'être rejeté.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 7 mars 2022, à laquelle siégeaient :

- M. Ho Si Fat, président de la formation de jugement,

- Mme Collet, première conseillère,

- Mme Larsonnier, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 21 mars 2022.

La rapporteure,

A. COLLETLe président,

F. HO SI FAT

La greffière,

N. COUTY

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 21PA03164


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 21PA03164
Date de la décision : 21/03/2022
Type d'affaire : Administrative

Analyses

335-01-03 Étrangers. - Séjour des étrangers. - Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. HO SI FAT
Rapporteur ?: Mme Aude COLLET
Rapporteur public ?: Mme BERNARD
Avocat(s) : REGHIOUI

Origine de la décision
Date de l'import : 29/03/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2022-03-21;21pa03164 ?
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