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21/03/2022 | FRANCE | N°21PA01521

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 8ème chambre, 21 mars 2022, 21PA01521


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A... a demandé au Tribunal administratif de Melun d'annuler la décision du 10 juillet 2018 ainsi que la décision prise sur recours gracieux du 4 octobre 2018 par lesquelles le département de Seine-et-Marne a refusé de lui délivrer l'agrément pour l'adoption de ses deux nièces, Adelphine et Ascarica.

Par jugement n° 1809885 du 30 décembre 2020, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 23 mars 2021, M

me A..., représentée par Me Meurin, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n°1809885 d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A... a demandé au Tribunal administratif de Melun d'annuler la décision du 10 juillet 2018 ainsi que la décision prise sur recours gracieux du 4 octobre 2018 par lesquelles le département de Seine-et-Marne a refusé de lui délivrer l'agrément pour l'adoption de ses deux nièces, Adelphine et Ascarica.

Par jugement n° 1809885 du 30 décembre 2020, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 23 mars 2021, Mme A..., représentée par Me Meurin, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n°1809885 du 30 décembre 2020 du Tribunal administratif de Melun ;

2°) d'annuler la décision du 10 juillet 2018 ainsi que la décision prise sur recours gracieux du 4 octobre 2018 par lesquelles le département de Seine-et-Marne a refusé de lui délivrer l'agrément pour l'adoption de ses deux nièces, Adelphine et Ascarica ;

3°) d'enjoindre au département de Seine-et-Marne de lui délivrer l'agrément sollicité à compter du 27 décembre 2016, date de sa demande ;

4°) de mettre à la charge du département de Seine-et-Marne la somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

5°) de mettre à la charge du département de Seine-et-Marne les dépens.

Elle soutient que les décisions des 10 juillet 2018 et 4 octobre 2018 du département de Seine-et-Marne sont entachées d'une erreur d'appréciation au regard des dispositions de l'article R. 225-4 du code de l'action sociale et des familles dès lors qu'elle dispose de conditions d'hébergement optimales pour accueillir ses deux nièces, que ses revenus lui permettent de se dégager un solde disponible suffisant pour envisager la prise en charge de ses deux nièces et qu'elle dispose d'un relais familial qui représentera un appui solide lors de l'accueil de ses nièces en France.

Par un mémoire en défense, enregistré le 11 octobre 2021, le département de Seine-et-Marne conclut à la confirmation du jugement n°1809885 du 30 décembre 2020 du Tribunal administratif de Melun et au rejet de la requête de Mme A....

Il soutient que les moyens soulevés ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'action sociale et des familles ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Collet,

- et les conclusions de Mme Bernard, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. Le 27 décembre 2016, Mme A..., née le 8 février 1965 de nationalité française, a déposé une demande d'agrément aux fins d'adoption de ses deux nièces qui vivent en Haïti, Adelphine et Ascarica A..., alors âgées respectivement de 17 et 15 ans. Par décision du

10 juillet 2018, le département de Seine-et-Marne a refusé de lui délivrer cet agrément puis a rejeté le 4 octobre 2018 le recours gracieux formé contre cette décision. Par jugement n° 1809885 du

30 décembre 2020, dont Mme A... relève appel, le Tribunal administratif de Melun a rejeté le recours contentieux qu'elle a formé contre ces deux décisions.

2. Aux termes des dispositions de l'article R. 225-4 du code de l'action sociale et des familles : " Avant de délivrer l'agrément, le président du conseil départemental doit s'assurer que les conditions d'accueil offertes par le demandeur sur les plans familial, éducatif et psychologique correspondent aux besoins et à l'intérêt d'un enfant adopté. / A cet effet, il fait procéder, auprès du demandeur, à des investigations comportant notamment : - une évaluation de la situation familiale, des capacités éducatives ainsi que des possibilités d'accueil en vue d'adoption d'un enfant pupille de l'Etat ou d'un enfant étranger ; cette évaluation est confiée à des assistants de service social, à des éducateurs spécialisés ou à des éducateurs de jeunes enfants, diplômés d'Etat ; / - une évaluation, confiée à des psychologues territoriaux aux mêmes professionnels relevant d'organismes publics ou privés habilités mentionnés au septième alinéa de l'article L. 221-1 ou à des médecins psychiatres, du contexte psychologique dans lequel est formé le projet d'adopter. / Les évaluations sociale et psychologique donnent lieu chacune à deux rencontres au moins entre le demandeur et le professionnel concerné. Pour l'évaluation sociale, une des rencontres au moins a lieu au domicile du demandeur. / Le demandeur est informé, au moins quinze jours avant la consultation prévue à l'article R. 225-5, qu'il peut prendre connaissance des documents établis à l'issue des investigations menées en application des alinéas précédents. Les erreurs matérielles figurant dans ces documents sont rectifiées de droit à sa demande écrite. Il peut, à l'occasion de cette consultation, faire connaître par écrit ses observations sur ces documents et préciser son projet d'adoption. Ces éléments sont portés à la connaissance de la commission ". L'article R. 225-5 du même code prévoit que : " La décision est prise par le président du conseil départemental après consultation de la commission d'agrément prévue à l'article R. 225-9. (...) ".

3. Il ressort des pièces du dossier que pour refuser par ses décisions des 10 juillet 2018 et 4 octobre 2018 à Mme A... la délivrance de l'agrément qu'elle a sollicité en vue de l'adoption de ses deux nièces, le président du département de Seine-et-Marne a considéré, d'une part, que les conditions d'accueil sur les plans familial, éducatif et psychologique offertes à ses deux nièces ne correspondent pas à leurs besoins et à leurs intérêts dès lors que les conditions matérielles et éducatives ne sont pas réunies, qu'il n'y a aucune projection sur le déracinement et la prise en charge au quotidien et, d'autre part, que les conditions matérielles et financières ne sont pas suffisantes pour la prise en charge de deux adolescentes, qu'elles pourraient développer des problématiques liées à leur déracinement qu'elle ne prend pas en considération et qu'aucun réel projet n'est avancé.

4. S'agissant des conditions matérielles d'accueil, Mme A... est locataire à la date des décisions contestées d'un appartement de deux pièces de 56 mètres carrés ne comportant qu'une seule chambre qu'elle souhaite que ses deux nièces occupent, entrainant ainsi une promiscuité pour deux adolescentes de 15 et 17 ans quand bien même elle fait valoir qu'elle a, le 29 mars 2017, déposé une demande de logement social renouvelée le 22 février 2021, qu'elle a l'intention une fois que ses nièces se seront adaptées à la vie en France de déménager au sein d'un appartement plus grand, que ces dernières sont très proches, qu'elles vivent à Haïti dans des conditions de vie très précaires et qu'elles se projettent facilement dans son appartement disposant de tout le confort et les commodités nécessaires. Par ailleurs, s'agissant de ses ressources, si Mme A... se prévaut de la circonstance qu'elle a une situation professionnelle stable dès lors qu'elle est assistante maternelle depuis 1997, le département de Seine-et-Marne fait valoir qu'elle n'a aucun agrément en cette qualité mais exerce, en fait, une activité salariée dans le domaine du service à la personne. De plus, il ressort des pièces du dossier qu'à la date de sa demande d'agrément, son salaire était de 925 euros avec 702 euros de charges, laissant un reste à vivre de 223 euros mensuels pour un adulte et deux adolescentes, comme l'a relevé la commission d'agrément qui s'est réunie le 3 juillet 2018. Enfin, si, depuis le 1er janvier 2021, Mme A... se prévaut d'une rémunération de 1 502,42 euros par mois soit 1 464,46 euros après impôts, comme le fait valoir le département de Seine-et-Marne en défense sans être contesté, cette rémunération est, en tout état de cause, insuffisante dès lors qu'elle correspond pour trois adultes de plus de 14 ans à des ressources inférieures au seuil de pauvreté pour un ménage ainsi composé.

5. S'agissant du projet d'adoption sur le plan familial, éducatif et psychologique, Mme A... conteste l'absence de relais familial ancré et fiable dans son environnement en se prévalant de l'existence d'un entourage familial et amical solide sur lequel elle peut compter pour l'épauler dans l'accueil de ses nièces, notamment, sa sœur qui habite dans une commune voisine et sa tante qui l'a accueillie à son arrivée en France et qui habite également à proximité qui attestent d'une part, que les deux nièces s'entendent bien avec leurs cousins et, d'autre part, que la famille est très soudée, que les deux nièces ne seront pas isolées et être parties très souvent en Haïti et ainsi connaitre les filles qui sont très sérieuses et respectueuses. Mme A... soutient également qu'elle voyage régulièrement à Haïti et est très proche de ses nièces. Toutefois, si Mme A... se prévaut des conditions de précarité dans lesquelles se trouvent ses nièces en Haïti, elle n'avance aucun projet concret pour leur accompagnement au quotidien en France comme le lui a opposé le président du département de Seine-et-Marne dans ses décisions des 10 juillet 2018 et 4 octobre 2018.

6. Il ressort de tout ce qui précède que le président du département de Seine-et-Marne, en considérant dans les décisions contestées des 10 juillet 2018 et 4 octobre 2018, que les conditions d'accueil offertes, au sens des dispositions précitées du code de l'action sociale et des familles, sur les plans familial, éducatif et psychologique par Mme A... en vue de l'obtention d'un agrément pour l'adoption de ses deux nièces ne correspondent aux besoins et à l'intérêt de ces dernières n'a pas entaché ses décisions d'une erreur d'appréciation.

7. Par suite, Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que par jugement n°1809885 du 30 décembre 2020, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du 10 juillet 2018 et du 4 octobre 2018 par lesquelles le département de Seine-et-Marne a refusé de lui délivrer l'agrément pour l'adoption de ses deux nièces, Adelphine et Ascarica. Par voie de conséquence, il y a lieu de rejeter l'ensemble des conclusions de la requête d'appel de Mme A....

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... et au département de Seine-et-Marne.

Délibéré après l'audience du 7 mars 2022, à laquelle siégeaient :

- M. Ho Si Fat, président de la formation de jugement,

- Mme Collet, première conseillère,

- Mme Larsonnier, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 21 mars 2022.

La rapporteure,

A. COLLETLe président,

F. HO SI FAT

La greffière,

N. COUTY La République mande et ordonne au département de Seine-et-Marne en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 21PA01521


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 21PA01521
Date de la décision : 21/03/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

35-05 Famille. - Adoption.


Composition du Tribunal
Président : M. HO SI FAT
Rapporteur ?: Mme Aude COLLET
Rapporteur public ?: Mme BERNARD
Avocat(s) : SCP TOURAUT et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 29/03/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2022-03-21;21pa01521 ?
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