Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La succession de M. D... G... a demandé au tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge ou à défaut la réduction, en droit et pénalités, des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu, ainsi que de la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus et des contributions sociales, auxquelles elle a été assujettie au titre de l'année 2013.
Par un jugement n° 1820630 du 30 septembre 2020, le tribunal administratif de Paris a rejeté la demande des héritiers de M. D... G....
Procédure devant la Cour :
Par une requête et des mémoires complémentaires, enregistrés les 17 novembre 2020 et 14 juin, et des pièces, enregistrées le 6 juillet 2021 et le 7 janvier 2022, MM. B... et Samy G... et Mme C... G..., ayants-droits de M. D... G..., (ci après " la succession de M. D... G... "), représentés par Me Bernigard, avocat, demandent à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1820630 du 30 septembre 2020 du tribunal administratif de Paris ;
2°) de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu, de la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus, et des contributions sociales auxquelles a été assujetti M. D... G... au titre de l'année 2013, mises à la charge de sa succession ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 6 000 euros, sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
La succession de M. D... G... soutient que :
- la proposition de rectification est insuffisamment motivée ;
- l'administration a méconnu son obligation d'information prévue à l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales ;
- elle a manqué à son obligation de loyauté ;
- le montant du prix d'acquisition des parts sociales acquises en 1998 est manifestement sous-évalué.
Par des mémoires, enregistrés les 5 mai et 29 juin 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Simon,
- les conclusions de M. Sibilli, rapporteur public,
- et les observations de Me Nestor, substituant Me Bernigard, pour la succession de M. D... G....
Une note en délibéré, enregistrée le 14 mars 2022, a été produite pour la succession de M. D... G... par Me Bernigard.
Considérant ce qui suit :
1. M. D... G... a fait l'objet d'un contrôle sur pièces de sa déclaration de revenu établie au titre de l'année 2013. Après son décès intervenu le 11 octobre 2016, une proposition de rectification à l'impôt sur le revenu, à la contribution sur les hauts revenus et aux contributions sociales a été adressée, en vertu de l'article 204 du code général des impôts, au domicile de M. A... G... au nom de la succession du contribuable vérifié, à raison d'une plus-value de cession des titres de la société Montmartroise Hôtelière, acquis par M. D... G... en 1998. MM B... et A... G... et I... C... G..., ayants-droits de M. D... H..., ont produit des observations en réponse à la proposition de rectification, ayant conduit l'administration à ne pas appliquer la pénalité de 40 % pour manquement délibéré. A la suite de l'avis de mise en recouvrement, les intéressés ont demandé des informations sur l'origine des informations relatives au prix d'acquisition retenu pour la détermination de la plus-value en litige. L'administration a confirmé le prix d'acquisition retenu. La succession de M. D... G... demande à la Cour d'annuler le jugement du 30 septembre 2020 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande de décharge ou de réduction des impôts et intérêts de retard mis à sa charge pour un montant restant en litige, après dégrèvement intervenu avant le jugement pour la somme de 82 115 euros en droits et pénalités. Ils demandent également la décharge des cotisations supplémentaires en litige.
Sur la procédure d'imposition :
2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation. (...) ".
3. Il résulte de ces dispositions que, pour être régulière, une proposition de rectification doit comporter la désignation de l'impôt concerné, de l'année d'imposition et de la base d'imposition, et énoncer les motifs sur lesquels l'administration entend se fonder pour justifier les redressements envisagés, de façon à permettre au contribuable de formuler ses observations de façon entièrement utile. En revanche, sa régularité ne dépend pas du bien-fondé de ces motifs. S'agissant comme en l'espèce d'une plus-value de cession de valeurs mobilières, la motivation doit comprendre les termes de référence utilisés par l'administration pour justifier les valeurs retenues, et le nombre de parts détenues par le contribuable que l'administration a retenu.
4. Il résulte de l'instruction que la proposition de redressement adressé à la succession de M. D... G..., qui remettait en cause le prix d'acquisition des parts cédées, mentionnait le montant estimé de la valeur d'acquisition des actions détenues, la référence utilisée pour retenir cette valeur, et le nombre de parts détenus par M. D... G... dans la société dont les parts étaient cédées. En outre, elle rappelait les dispositions applicables du code général des impôts. La circonstance que l'année d'acquisition estimée soit erronée, ainsi que celle de création de l'entreprise, est sans influence sur le respect de l'obligation de motivation. Le moyen tenant au défaut de motivation doit ainsi être écarté.
5. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales : " L'administration est tenue d'informer le contribuable de la teneur et de l'origine des renseignements et documents obtenus de tiers sur lesquels elle s'est fondée pour établir l'imposition faisant l'objet de la proposition prévue au premier alinéa de l'article L. 57 ou de la notification prévue à l'article L. 76. Elle communique, avant la mise en recouvrement, une copie des documents susmentionnés au contribuable qui en fait la demande. ". En vertu de ces dispositions, il incombe, notamment, à l'administration d'informer, au plus tard avant la mise en recouvrement, le contribuable dont elle envisage de rectifier les bases d'imposition, de l'origine et de la teneur des renseignements recueillis dans l'exercice de son droit de communication et qu'elle a effectivement utilisés pour fonder les impositions, avec une précision suffisante, afin que l'intéressé soit mis à même de demander, avant la mise en recouvrement des impositions, que les documents qui contiennent ces renseignements soient mis à sa disposition.
6. S'il incombe à l'administration, quelle que soit la procédure d'imposition mise en œuvre, et à tout moment avant la mise en recouvrement, d'informer le contribuable dont elle envisage soit de rehausser, soit d'arrêter d'office les bases d'imposition, de l'origine et de la teneur des renseignements obtenus auprès de tiers, qu'elle a utilisés pour établir les impositions, avec une précision suffisante pour permettre à l'intéressé, notamment, de discuter utilement leur provenance ou de demander, avant la mise en recouvrement des impositions qui en procèdent, que les documents qui, le cas échéant, contiennent ces renseignements soient mis à sa disposition, cette obligation ne s'étend pas aux documents déposés au greffe du tribunal de commerce ou du tribunal de grande instance, en vertu d'une obligation légale ayant pour objet de les rendre accessibles au public.
7. Il résulte de l'instruction que l'administration a évalué la valeur d'acquisition des parts sociales détenues par M. G... en consultant le fichier K bis de la société et en se référant au montant du capital social mentionné en 1963, à la création de la société. L'administration n'avait pas à communiquer l'origine de cette information avant d'adresser la proposition de rectification dès lors que ces fichiers sont à la disposition du public et qu'en outre, elle a fait connaître aux intéressés, en réponse à leurs observations, la source des informations obtenues. Il résulte également de l'instruction que ceux-ci ont pu avoir accès aux informations sur la création et la transformation de la société et que l'un des héritiers de M. E... était lui-même co-associé de celle-ci avec son père. Dans ces conditions, les requérants ne sont pas fondés à soutenir qu'ils auraient été privés de la garantie prévue à l'article L. 76 B précité du livre des procédures fiscales.
8. Si les requérants soutiennent avoir été victime d'un manque de loyauté de l'administration caractérisé selon eux par la communication d'informations partielles et erronées qui faisait remonter l'acquisition des parts sociales avant l'arrivé en France de leur père et les ont empêchés de contester utilement les redressements alors qu'ils n'étaient pas informés des affaires du défunt, il résulte de l'instruction que ces derniers ont pu modifier la valeur de cession en faisant valoir que celle-ci était grevée d'une prime pour garantie de découvert et qu'ils ont produit les statuts de la société et des actes présentés comme contemporains de l'acquisition des actions en 1998. De plus, ils n'ont pas demandé à l'administration, avant la mise en recouvrement, de produire les documents dont elle s'est servie pour établir le redressement. Enfin, l'administration a renoncé à appliquer les pénalités pour manquement délibéré. Dans ces conditions, le moyen doit être écarté.
Sur le bien-fondé de l'imposition :
9. S'il incombe normalement à chaque partie, sous réserve des conséquences éventuellement attachées par des dispositions législatives à la procédure d'imposition, d'apporter la preuve de l'existence des faits dont elle se prévaut, il appartient au redevable de fournir tous éléments qu'il est seul à détenir permettant de déterminer l'imposition.
10. Aux termes du 1 du I l'article 150-0 A du code général des impôts dans sa rédaction applicable au litige : " (...) les gains nets retirés des cessions à titre onéreux, effectuées directement, par personne interposée ou par l'intermédiaire d'une fiducie, de valeurs mobilières, de droits sociaux, de titres mentionnés au 1° de l'article 118 et aux 6° et 7° de l'article 120, de droits portant sur ces valeurs, droits ou titres ou de titres représentatifs des mêmes valeurs, droits ou titres, sont soumis à l'impôt sur le revenu (...) ". En vertu de l'article 150-0 D du même code, dans sa rédaction alors applicable : " 1. Les gains nets mentionnés au I de l'article 150-0 A sont constitués par la différence entre le prix effectif de cession des titres ou droits, net des frais et taxes acquittés par le cédant, et leur prix effectif d'acquisition par celui-ci diminué, le cas échéant, des réductions d'impôt effectivement obtenues dans les conditions prévues à l'article 199 terdecies-0 A, ou, en cas d'acquisition à titre gratuit, leur valeur retenue pour la détermination des droits de mutation (...) ". Il résulte de ces dispositions que la plus-value résultant d'une cession de titres entrant dans leur champ, soumise à l'impôt sur le revenu dans la catégorie des plus-values de particuliers, est déterminée par différence entre le prix de cession de ces titres, le cas échéant diminué des frais inhérents à la cession, et leur prix d'acquisition, éventuellement augmenté des frais et taxes acquittés à cette occasion. Il incombe au contribuable de fournir tous éléments en sa possession relatifs à la détermination du prix d'acquisition des titres.
11. Il résulte de l'instruction qu'en l'absence de tout élément relatif au prix d'acquisition, par M. D... G..., des droits sociaux de la société Montmartroise Hôtelière, qui exploite l'hôtel meublé Le Bruxelles situé 10 rue de Bruxelles à Paris 9ème arrondissement, l'administration a retenu une valeur de la société de 35 820 euros correspondant à 99,5 % du capital social de la société, correspondant à la fraction du capital détenue par M. D... G..., à la date de la cession des titres en 2013, en retenant une date d'acquisition éloignée de plus de huit ans de la vente, fixée à la date présumée de création de la société en 1963. Les requérants contestent toutefois cette évaluation, faite sur la base du seul capital social de la société, et se prévalent de l'acquisition par M. D... G..., le 30 décembre 1998, des parts de la société Montmartroise Hôtelière, détenues par Mme F... en tant que gestionnaire de la société Hôtelière Jost, laquelle exploitait alors l'hôtel, pour un montant de 1 225 000 francs. Ils produisent en ce sens deux reçus signés de Mme F... confirmant la vente pour ce montant, des ordres de virement d'actions, un chèque de banque tiré sur la banque de M. D... G... à l'ordre du CEPME et la preuve du retrait de cette somme de son compte pour chèque de banque, ainsi qu'une attestation du conseil de l'intéressé attestant de la réalité de l'opération. Toutefois, ils n'apportent pas la preuve de la réalité de la cession de titres intervenue dès lors que les ordres de mouvement de titres ne comportent pas de visa de l'émetteur ou d'inscription au compte du bénéficiaire, qu'aucun acte de cession des titres en cause ou preuve d'un enregistrement officiel de cette cession n'est produit, et que les attestations, qui n'ont pas été enregistrées, sont dépourvues de date certaine, le chèque produit n'étant par ailleurs pas établi à l'ordre de Mme F... et aucune preuve de la créance détenue par le CEPME sur le cédant n'étant apportée. Dans ces conditions, la succession de M. D... G... n'établit pas que le prix d'acquisition doit être fixé à 1 225 000 euros.
12. Il résulte de ce qui précède que MM. B... et Samy G... et Mme C... G... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par jugement du 30 septembre 2020, le tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande. Par suite, leurs conclusions aux fins d'annulation de ce jugement et de décharge, ainsi que leurs conclusions relatives aux frais d'instance, doivent être rejetées.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de la succession de M. D... G... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la succession de M. D... G... et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.
Copie en sera adressée à la direction nationale des vérifications de situations fiscales (DNVSF).
Délibéré après l'audience du 17 février 2022, à laquelle siégeaient :
- M. Carrère, président,
- M. Soyez, président assesseur,
- M. Simon, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe de la Cour, le 18 mars 2022.
Le rapporteur,
C. SIMONLe président,
S. CARRERE
La greffière,
C. DABERT
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la relance en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 20PA03439