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17/02/2022 | FRANCE | N°21PA05519

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 8ème chambre, 17 février 2022, 21PA05519


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C... a demandé au Tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 8 juillet 2021 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a décidé son transfert aux autorités allemandes pour l'examen de sa demande d'asile.

Par un jugement n° 2110133 du 24 août 2021, le Tribunal administratif de Montreuil a annulé l'arrêté du 8 juillet 2021, a enjoint au préfet de la Seine-Saint-Denis de délivrer à

M. C... dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement, l'attes

tation de demande d'asile lui permettant de présenter sa demande d'asile à l'Office françai...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C... a demandé au Tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 8 juillet 2021 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a décidé son transfert aux autorités allemandes pour l'examen de sa demande d'asile.

Par un jugement n° 2110133 du 24 août 2021, le Tribunal administratif de Montreuil a annulé l'arrêté du 8 juillet 2021, a enjoint au préfet de la Seine-Saint-Denis de délivrer à

M. C... dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement, l'attestation de demande d'asile lui permettant de présenter sa demande d'asile à l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et a mis à la charge de l'État une somme de 1 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 25 octobre 2021, le préfet de la Seine-Saint-Denis demande à la Cour d'ordonner, sur le fondement des articles R. 811-15 et R. 811-17 du code de justice administrative, le sursis à exécution du jugement du 24 août 2021 du Tribunal administratif de Montreuil.

Il soutient que :

- le moyen invoqué tiré de ce qu'il n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation en décidant du transfert de la demande d'asile de M. C... est sérieux dès lors, d'une part, que

M. C... et Mme B... ne peuvent être regardés comme ayant mentionné à tort être célibataires alors que des interprètes en langue anglaise, langue qu'ils ont déclaré comprendre, sont intervenus pendant leurs entretiens et que les documents relatifs à la procédure Dublin leur ont été fournis dans cette langue et, d'autre part, qu'au vu du caractère exclusivement déclaratif du statut marital qui unirait M. C... et Mme B..., des dates d'entrée dans les pays de l'Union Européenne qui ne correspondent pas aux déclarations de l'intéressé, du silence de Mme B... quant à son statut de réfugiée en Italie depuis 2007, M. C... ne peut être regardé comme établissant être marié avec Mme B... ;

- l'exécution du jugement attaqué risque d'entraîner des conséquences difficilement réparables dès lors que M. C... bénéficiera d'une attestation de demande d'asile qui lui permettra de bénéficier d'un droit au séjour auquel il ne pouvait prétendre et que le risque de fuite est élevé compte tenu de la circonstance qu'il a déjà effectué plusieurs demandes d'asile dans différents pays de l'Union Européenne, sans qu'il ne soit jamais possible de procéder à son transfert vers l'État membre responsable ;

-les autres moyens soulevés par M. C... devant le Tribunal administratif de Montreuil ne sont pas fondés.

Par un mémoire en défense, enregistré le 9 janvier 2022, M. C..., représenté par

Me Mapche-Tagne, conclut au rejet de la requête et demande à la Cour :

1°) de l'admettre à l'aide juridictionnelle provisoire ;

2°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de lui délivrer l'attestation de demande d'asile lui permettant de présenter sa demande d'asile à l'Office français de protection des réfugiés et apatrides à compter de la notification de la décision à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de procéder sans délai au retrait de son signalement aux fins de non-admission dans le fichier d'information Schengen ;

4°) à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de sa situation et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour pendant ce réexamen ;

5°) de mettre à la charge de l'État la somme de 2 500 euros en application de l'article

L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- la requête est irrecevable dès lors qu'aucune requête au fond n'a été enregistrée au greffe de la Cour ;

-à titre subsidiaire, le préfet de la Seine-Saint-Denis ne justifie pas de moyens sérieux et de nature à justifier, outre l'annulation ou la réformation du jugement attaqué, le rejet des conclusions à fin d'annulation accueillies par le jugement du 24 août 2021 ; il ne démontre pas davantage le risque de conséquences difficilement réparables en cas d'exécution du jugement attaqué ;

- l'arrêté du 8 juillet 2021 est entaché d'un vice de procédure à défaut de remise des brochures dans une langue qu'il comprend conformément à l'article 4 du règlement (UE) n°604/2013 du 26 juin 2013 ;

- il est entaché d'un vice de procédure à défaut de la tenue de l'entretien dans les conditions prévues par l'article 5 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 ;

- il a été privé d'une garantie du fait du recours à un interprétariat par téléphone pour mener l'entretien individuel ;

- l'arrêté contesté méconnaît les articles 3 et 10 du règlement (UE) 604/2013 du

26 juin 2013 ;

- il méconnaît l'article 7 du règlement (UE) 604/2013 du 26 juin 2013 dès lors que sa demande d'asile a fait l'objet d'un rejet par les autorités allemandes et qu'il ne saurait être réadmis dans ce pays ;

- il méconnaît l'article 17 du règlement (UE) 604/2013 du 26 juin 2013 ; le préfet s'est cru à tort en situation de compétence liée pour prononcer son transfert vers l'Allemagne ;

- il a été pris en méconnaissance des articles L. 521-1 et suivants du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Vu :

- les autres pièces du dossier.

- la requête n° 21PA05262, enregistrée au greffe de la cour le 29 septembre 2021, par laquelle le préfet de la Seine-Saint-Denis a demandé l'annulation du même jugement.

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n°91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le décret n° 2020-1717 du 28 décembre 2020 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Larsonnier a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. C..., ressortissant nigérian né le 19 juillet 1986, est entré sur le territoire français le 7 mai 2021 et a déposé une demande d'asile le 20 mai 2021 auprès des services de la préfecture de la Seine-Saint-Denis. La consultation du système " Eurodac " ayant fait apparaître que ses empreintes avaient été relevées le 17 juin 2016 par les autorités italiennes et le 9 mai 2018 par les autorités allemandes, le préfet de la Seine-Saint-Denis a saisi le 25 mai 2021 les autorités italiennes et le 26 mai 2021 les autorités allemandes d'une demande de reprise en charge de l'intéressé. Ces dernières ont répondu favorablement à cette demande par une décision du 31 mai 2021. Par un arrêté du 8 juillet 2021, le préfet de la Seine-Saint-Denis a décidé du transfert de M. C... aux autorités allemandes. Par un jugement du 24 août 2021, le Tribunal administratif de Montreuil a annulé cet arrêté du 8 juillet 2021 et a enjoint au préfet de la

Seine-Saint-Denis de délivrer à M. C... dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement, l'attestation de demande d'asile lui permettant de présenter sa demande d'asile à l'Office français de protection des réfugiés et apatrides. Le préfet de la Seine-Saint-Denis demande à la Cour d'ordonner le sursis à exécution de ce jugement.

Sur la demande d'admission provisoire à l'aide juridictionnelle :

2. Aux termes de l'article 20 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique : " Dans les cas d'urgence (...), l'admission provisoire à l'aide juridictionnelle peut être prononcée par la juridiction compétente ou son président.(...) ".

3. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de prononcer, en application des dispositions précitées, l'admission provisoire de M. C... au bénéfice de l'aide juridictionnelle.

Sur les conclusions aux fins de sursis à exécution :

4. Aux termes de l'article R. 811-15 du code de justice administrative : " Lorsqu'il est fait appel d'un jugement de tribunal administratif prononçant l'annulation d'une décision administrative, la juridiction d'appel peut, à la demande de l'appelant, ordonner qu'il soit sursis à l'exécution de ce jugement si les moyens invoqués par l'appelant paraissent, en l'état de l'instruction, sérieux et de nature à justifier, outre l'annulation ou la réformation du jugement attaqué, le rejet des conclusions à fin d'annulation accueillies par ce jugement. ". Aux termes de l'article R. 811-15 du même code : " Dans les autres cas, le sursis peut être ordonné à la demande du requérant si l'exécution de la décision de première instance attaquée risque d'entraîner des conséquences difficilement réparables et si les moyens énoncés dans la requête paraissent sérieux en l'état de l'instruction. "

5. Aucun des moyens invoqués par le préfet de la Seine-Saint-Denis ne paraît, en l'état de l'instruction, sérieux et de nature à justifier l'octroi du sursis sollicité. Par suite, le préfet de la Seine-Saint-Denis n'est pas fondé à demander qu'il soit sursis à l'exécution du jugement du 24 août 2021 du Tribunal administratif de Montreuil.

6. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner sa recevabilité, que la requête du préfet de la Seine-Saint-Denis doit être rejetée.

Sur les conclusions aux fins d'injonctions présentées par M. C... :

7. M. C... reprend devant la Cour les conclusions aux fins d'injonction qu'il a présentées devant le Tribunal administratif de Montreuil. Il ressort du point 7 du jugement attaqué que le tribunal a enjoint au préfet de la Seine-Saint-Denis de délivrer à M. C... l'attestation de demande d'asile lui permettant de saisir l'Office français de protection des réfugiés et apatrides dans le délai d'un mois à compter de la notification du jugement. Or, l'injonction prononcée par le tribunal est exécutoire en vertu de l'article L. 11 du code de justice administrative. Il s'ensuit que les conclusions aux fins d'injonction présentées devant la Cour doivent être rejetées.

Sur les frais liés à l'instance :

8. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me Mapche-Tagne, avocat de M. C..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État, de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me Mapche-Tagne de la somme de 1 000 euros.

DÉCIDE :

Article 1er : M. C... est admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire.

Article 2 : La requête du préfet de la Seine-Saint-Denis est rejetée.

Article 3 : L'Etat versera à Me Mapche-Tagne, avocat de M. C..., la somme de

1 000 euros en application des dispositions des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et

L. 761-1 du code de justice administrative, sous réserve que Me Mapche-Tagne renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État.

Article 4 : Le surplus des conclusions présentées par M. C... est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur, au préfet de la

Seine-Saint-Denis, à M. A... C... et à Me Mapche-Tagne.

.

Délibéré après l'audience du 31 janvier 2022, à laquelle siégeaient :

- M. Ho Si Fat, président de la formation de jugement,

- Mme Bonneau-Mathelot, première conseillère

- Mme Larsonnier, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 février 2022.

La rapporteure,

Signé

V. LARSONNIER Le président,

Signé

F. HO SI FAT

La greffière,

Signé

N. COUTY

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 21PA05519


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 21PA05519
Date de la décision : 17/02/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

095-01


Composition du Tribunal
Président : M. HO SI FAT
Rapporteur ?: Mme Virginie LARSONNIER
Rapporteur public ?: Mme BERNARD
Avocat(s) : MAPCHE TAGNE

Origine de la décision
Date de l'import : 01/03/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2022-02-17;21pa05519 ?
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