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17/02/2022 | FRANCE | N°21PA03424

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 5ème chambre, 17 février 2022, 21PA03424


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Paris l'annulation de l'arrêté du 14 avril 2021 par lequel le préfet de police a décidé son transfert aux autorités allemandes aux fins d'examen de sa demande d'asile.

Par un jugement n° 219069 du 21 mai 2021, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Paris a admis M. A..., à titre provisoire, au bénéfice de l'aide juridictionnelle, a annulé l'arrêté du préfet de police du 14 avril 2021, a enjoint au préfet de pol

ice d'enregistrer la demande d'asile de M. A... dans un délai de deux mois à compter de...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Paris l'annulation de l'arrêté du 14 avril 2021 par lequel le préfet de police a décidé son transfert aux autorités allemandes aux fins d'examen de sa demande d'asile.

Par un jugement n° 219069 du 21 mai 2021, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Paris a admis M. A..., à titre provisoire, au bénéfice de l'aide juridictionnelle, a annulé l'arrêté du préfet de police du 14 avril 2021, a enjoint au préfet de police d'enregistrer la demande d'asile de M. A... dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement, a mis à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 100 euros au titre des frais liés à l'instance, et a rejeté le surplus des conclusions de sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête sommaire et un mémoire ampliatif, enregistrés le 21 juin 2021 et le 26 octobre 2021, le préfet de police demande à la Cour :

1°) d'annuler les articles 2 à 4 du jugement n° 219069 du 21 mai 2021 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Paris ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. A... devant le tribunal administratif de Paris.

Il soutient que :

- l'arrêté contesté ne méconnaît ni les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni les dispositions de l'article 17 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013 ;

- les autres moyens soulevés en première instance par M. A... ne sont pas fondés.

Par un mémoire en défense, enregistré le 22 novembre 2021, M. A..., représenté par Me Pafundi, conclut au non-lieu à statuer, à ce qu'il soit admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle à titre provisoire et à ce qu'il soit mis à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il fait valoir que la requête du préfet de police a perdu son objet dès lors, d'une part, qu'il s'est vu délivrer un dossier de demande d'asile en procédure normale et que l'Office français de protection des réfugiés et apatrides l'a admis au bénéfice de la protection subsidiaire par une décision du 6 septembre 2021, d'autre part, que son transfert n'est plus susceptible d'exécution compte tenu de l'expiration du délai de six mois.

M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale, par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Paris du 10 novembre 2021.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le décret n° 2020-1717 du 28 décembre 2020 ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Aggiouri a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant afghan né le 9 août 1996, a sollicité son admission au séjour en France au titre de l'asile. Le préfet de police a décidé, par un arrêté du 14 avril 2021, de transférer M. A... aux autorités allemandes. Par un jugement du 21 mai 2021, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Paris a admis M. A... au bénéfice de l'aide juridictionnelle à titre provisoire, a annulé l'arrêté du 14 avril 2021 du préfet de police, a enjoint au préfet de police d'enregistrer sa demande d'asile dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement, a mis à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 100 euros au titre des frais liés à l'instance, et a rejeté le surplus des conclusions de sa demande. Le préfet de police relève appel des articles 2 à 4 de jugement.

Sur les conclusions tendant à l'admission à l'aide juridictionnelle provisoire :

2. M. A... ayant été admis à l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Paris du 10 novembre 2021, ses conclusions tendant à son admission à l'aide juridictionnelle à titre provisoire, présentées dans son mémoire en défense enregistré le 22 novembre 2021, doivent être rejetées.

Sur les conclusions à fin d'annulation des articles 2 et 3 du jugement :

3. L'article 29 du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 dispose : " Le transfert du demandeur [...] de l'État membre requérant vers l'État membre responsable s'effectue [...] au plus tard, dans un délai de six mois à compter de l'acceptation par un autre État membre de la requête aux fins de prise en charge ou de reprise en charge de la personne concernée ou de la décision définitive sur le recours ou la révision lorsque l'effet suspensif est accordé [...] / 2. Si le transfert n'est pas exécuté dans le délai de six mois, l'État membre responsable est libéré de son obligation de prendre en charge ou de reprendre en charge la personne concernée et la responsabilité est alors transférée à l'État membre requérant. Ce délai peut être porté à un an au maximum s'il n'a pas pu être procédé au transfert en raison d'un emprisonnement de la personne concernée ou à dix-huit mois au maximum si la personne concernée prend la fuite ". Aux termes des dispositions alors codifiées à l'article L. 742-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'étranger qui a fait l'objet d'une décision de transfert peut en demander l'annulation au président du tribunal administratif. Aux termes des dispositions alors codifiées à l'article L. 742-5 du même code : " [...] La décision de transfert ne peut faire l'objet d'une exécution d'office ni avant l'expiration d'un délai de quinze jours ou, si une décision de placement en rétention prise en application de l'article L. 551-1 ou d'assignation à résidence prise en application de l'article L. 561-2 a été notifiée avec la décision de transfert, avant l'expiration d'un délai de quarante-huit heures, ni avant que le tribunal administratif ait statué, s'il a été saisi ".

4. Il résulte de la combinaison de ces dispositions que l'introduction d'un recours devant le tribunal administratif contre la décision de transfert a pour effet d'interrompre le délai de six mois fixé à l'article 29 du règlement (UE) 604/2013, qui courait à compter de l'acceptation du transfert par l'Etat requis, délai qui recommence à courir intégralement à compter du jugement par lequel le tribunal administratif statue au principal sur cette demande, quel que soit le sens de sa décision. En cas de rejet du recours par le premier juge, ce délai court à compter de la notification à l'administration du jugement qui, l'appel étant dépourvu de caractère suspensif, rend à nouveau la mesure de transfert susceptible d'exécution.

5. En l'espèce, le délai de six mois imparti à l'administration pour procéder au transfert de M. A... aux autorités allemandes a recommencé à courir à compter du 21 mai 2021, date à laquelle le préfet de police a reçu notification du jugement du tribunal administratif de Paris. Dès lors, et alors qu'en tout état de cause, M. A... a été admis au bénéfice de la protection subsidiaire par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) du 6 septembre 2021, l'arrêté de transfert est devenu caduc dès le 21 novembre 2021. La caducité de cette décision a pour effet de priver d'objet les conclusions du préfet de police tendant à l'annulation des articles 2 et 3 du jugement contesté, par lesquels le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Paris a fait droit aux conclusions aux fins d'annulation et d'injonction présentées par M. A.... Par suite, il n'y a plus lieu de statuer sur ces conclusions.

Sur les conclusions à fin d'annulation de l'article 4 du jugement :

6. Il ressort des pièces du dossier qu'il n'y avait pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme au titre des frais liés à l'instance. Par suite, le préfet de police est fondé à demander l'annulation de l'article 4 du jugement contesté, et le rejet de la demande présentée par M. A... sur le fondement des articles

L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 devant le tribunal administratif de Paris.

Sur les conclusions présentées devant la Cour sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

7. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme demandée par M. A... au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

DÉCIDE :

Article 1er : Les conclusions de M. A... tendant à son admission à l'aide juridictionnelle à titre provisoire sont rejetées.

Article 2 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions du préfet de police tendant à l'annulation des articles 2 et 3 du jugement n° 219069 du 21 mai 2021 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Paris.

Article 3 : L'article 4 du jugement n° 219069 du 21 mai 2021 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Paris est annulé.

Article 4 : Les conclusions présentées par M. A... sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, devant le tribunal administratif de Paris et devant la Cour, sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur, à M. B... A... et à Me Pafundi.

Copie en sera adressée au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 27 janvier 2022, à laquelle siégeaient :

- Mme Vinot, présidente de chambre,

- Mme Vrignon-Villalba, présidente assesseure,

- M. Aggiouri, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 17 février 2022.

Le rapporteur,

K. AGGIOURILa présidente,

H. VINOT

La greffière,

A. MAIGNAN

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 21PA03424 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 21PA03424
Date de la décision : 17/02/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

095-02-03


Composition du Tribunal
Président : Mme VINOT
Rapporteur ?: M. Khalil AGGIOURI
Rapporteur public ?: Mme LESCAUT
Avocat(s) : ANGLADE et PAFUNDI A.A.R.P.I

Origine de la décision
Date de l'import : 01/03/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2022-02-17;21pa03424 ?
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