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16/02/2022 | FRANCE | N°21PA00384

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2ème chambre, 16 février 2022, 21PA00384


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Jeannette DHM a demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge, en droits et majorations, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre de la période du 1er mars 2013 au 28 février 2015 et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été assignés au titre de la période du 1er mars 2013 au 31 mars 2016, et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 10 000 euros en application de l'article L. 761-1 du cod

e de justice administrative.

Par un jugement n° 1819111/1-2 du 24 novembre 2020...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Jeannette DHM a demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge, en droits et majorations, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre de la période du 1er mars 2013 au 28 février 2015 et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été assignés au titre de la période du 1er mars 2013 au 31 mars 2016, et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 10 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1819111/1-2 du 24 novembre 2020, le Tribunal administratif de Paris a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 22 janvier et 20 mai 2021, la société Jeannette DHM, représentée par Me Xavier Rohmer et Me Emilie Lecomte, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement n° 1819111/1-2 du 24 novembre 2020 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) de prononcer la décharge des impositions en litige ;

3°) d'annuler l'avis de mise en recouvrement, la mise en demeure et la décision de rejet de la réclamation contentieuse ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 10 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- il n'est pas établi que la minute de la décision a été signée par le président et le greffier d'audience ;

- le jugement est insuffisamment motivé ;

- l'avis de mise en recouvrement, la mise en demeure de payer et la décision de rejet de la réclamation ont été émis à l'issue d'une procédure irrégulière et encourent dès lors l'annulation ;

- sa comptabilité ne pouvait être qualifiée de comptabilité tenue au moyen de systèmes informatisés ;

- sa comptabilité ne saurait être regardée comme informatisée au sens de la doctrine administrative référencée BOI-BIC-DECLA-30-10-20-40 ;

- l'administration ne pouvait en conséquence mettre en œuvre la procédure de vérification propre aux comptabilités informatisées ;

- l'erreur commise à cet égard entraine la nullité de la procédure d'imposition ;

- l'instruction 13 L 1 06 prévoit que les contribuables concernés par le contrôle des comptabilités informatisées sont les contribuables astreints à la présentation de documents comptables ;

- elle a été privée de tout débat contradictoire sur les fonctionnalités réelles de sa caisse enregistreuse ;

- elle a en réalité fait l'objet d'une procédure d'évaluation d'office ;

- quand bien même sa comptabilité aurait été tenue au moyen de systèmes informatisés, le service a vicié les garanties légales qui lui étaient imparties dans ce cadre ; le courrier pré-imprimé sur lequel le gérant de la société a dû formaliser son choix d'option mentionnait la " remise " au service vérificateur des copies des fichiers nécessaires, et non leur " mise à disposition " comme prévu par le texte ; le service ne lui a pas apporté une information suffisante sur les modalités pratiques et les enjeux portés par les différentes options, ne lui permettant pas d'exercer un choix éclairé ;

- le rejet de comptabilité n'est pas motivé par les premiers juges ;

- les motifs retenus par le tribunal sont insuffisants ;

- les bandes journalières Z du 1er mars 2012 au 30 juin 2013 ont été fournies et étaient détaillées et les recettes y étaient ventilées ;

- le défaut de pièces justificatives sur douze jours est un motif insuffisant de rejet de la comptabilité ;

- le caractère insuffisant de la marge commerciale n'est pas établi ;

- le service n'a pas pris en compte le fait que des prix distincts étaient pratiqués en salle et au comptoir ;

- le fonctionnement et la clientèle spécifique de la société n'ont pas été pris en compte ;

- les circonstances particulières liées au vol d'alcool n'ont pas été prises en compte ;

- des erreurs de saisie ont été commises dans la retranscription des factures ;

- la reconstitution de recettes n'est pas régulièrement motivée ;

- le premier exercice vérifié n'a pas donné lieu à des rectifications.

Par un mémoire en défense enregistré le 16 mars 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par la société requérante ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 13 avril 2021, la clôture de l'instruction a été fixée au 21 mai 2021.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Magnard,

- et les conclusions de Mme Jimenez, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. La société Jeannette DHM, qui exerce une activité de brasserie, café, bar et restaurant, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période du 1er mars 2012 au 28 février 2015, étendue en matière de taxe sur la valeur ajoutée au 31 mars 2016, à l'issue de laquelle l'administration fiscale a mis à sa charge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période du 1er mars 2013 au 31 mars 2016 ainsi que des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés au titre de la période du 1er mars 2013 au 28 février 2015, assortis de pénalités. La société Jeannette DHM relève appel du jugement du 24 novembre 2020 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge de ces impositions.

Sur la régularité du jugement :

2. La minute du jugement attaqué a été signée par le président et le greffier d'audience. Le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article R. 741-7 du code de justice administrative ne peut par suite qu'être écarté.

3. Les premiers juges, qui n'étaient pas tenus de répondre à tous les arguments soulevés par la société requérante à l'appui de ses moyens, ont statué sur les moyens qui leur ont été soumis, et notamment sur celui tiré du caractère non probant de la comptabilité. La circonstance, à la supposer établie, que les motifs retenus par les premiers juges seraient insuffisants pour écarter la comptabilité, est sans influence sur la régularité du jugement.

Sur les conclusions à fin d'annulation de l'avis de mise en recouvrement, de la mise en demeure de payer et de la décision de rejet de la réclamation contentieuse :

4. Les décisions par lesquelles l'administration statue sur les réclamations contentieuses des contribuables ne constituent pas des actes détachables de la procédure d'imposition. Par suite, les conclusions à fin d'annulation de telles décisions ne peuvent faire l'objet d'un recours contentieux dans le cadre de la procédure fixée par les articles L. 199 et R. 199-1 et suivants du livre des procédures fiscales et se confondent avec les conclusions tendant à la réduction ou à la décharge des impositions contestées. Les conclusions de la société requérante tendant à l'annulation de la décision du 23 août 2018 par laquelle l'administration fiscale a statué sur sa réclamation préalable doivent de ce fait être rejetées. Il en va de même, pour les mêmes motifs, des conclusions tendant à l'annulation des avis de mise en recouvrement du 31 janvier 2018.

5. Les conclusions de la requérante visant à l'annulation de la mise en demeure de payer n° 180200118 du 22 février 2018 ne comportent aucun des moyens relatifs au contentieux du recouvrement limitativement énumérés au 2° de l'article L. 281 du livre des procédures fiscales pouvant seuls être invoqués à l'appui d'une demande de décharge de l'obligation de payer résultant d'un acte de poursuite. Les moyens relatifs au contentieux d'assiette soulevés par la requérante dans le présent litige ne peuvent utilement être articulés au soutien de conclusions dirigées contre un acte de poursuite. Il y a par suite lieu de rejeter lesdites conclusions.

Sur les conclusions en décharge :

En ce qui concerne la procédure d'imposition :

6. Aux termes de l'article L. 47 du livre des procédures fiscales : " (...) une vérification de comptabilité ne peut être engagée sans que le contribuable en ait été informé par l'envoi ou la remise d'un avis de vérification. / Cet avis doit préciser les années soumises à vérification et mentionner expressément, sous peine de nullité de la procédure, que le contribuable a la faculté de se faire assister par un conseil de son choix. (...) / En cas de contrôle inopiné tendant à la constatation matérielle des éléments physiques de l'exploitation ou de l'existence et de l'état des documents comptables, l'avis de vérification de comptabilité est remis au début des opérations de constatations matérielles ". Aux termes du II de l'article L. 47-A du même livre : " - En présence d'une comptabilité tenue au moyen de systèmes informatisés et lorsqu'ils envisagent des traitements informatiques, les agents de l'administration fiscale indiquent par écrit au contribuable la nature des investigations souhaitées. Le contribuable formalise par écrit son choix parmi l'une des options suivantes : / a) Les agents de l'administration peuvent effectuer la vérification sur le matériel utilisé par le contribuable ; / b) Celui-ci peut effectuer lui-même tout ou partie des traitements informatiques nécessaires à la vérification. Dans ce cas, l'administration précise par écrit au contribuable, ou à un mandataire désigné à cet effet, les travaux à réaliser ainsi que le délai accordé pour les effectuer. Les résultats des traitements sont alors remis sous forme dématérialisée répondant à des normes fixées par arrêté du ministre chargé du budget ; / c) Le contribuable peut également demander que le contrôle ne soit pas effectué sur le matériel de l'entreprise. Il met alors à la disposition de l'administration les copies des documents, données et traitements soumis à contrôle. Ces copies sont produites sur tous supports informatiques, répondant à des normes fixées par arrêté du ministre chargé du budget. L'administration restitue au contribuable avant la mise en recouvrement les copies des fichiers et n'en conserve pas de double. L'administration communique au contribuable, sous forme dématérialisée ou non au choix du contribuable, le résultat des traitements informatiques qui donnent lieu à des rehaussements au plus tard lors de l'envoi de la proposition de rectification mentionnée à l'article L. 57. / Le contribuable est informé des noms et adresses administratives des agents par qui ou sous le contrôle desquels les opérations sont réalisées. ". Aux termes de l'article L. 13 dudit livre : " (...) / Lorsque la comptabilité est tenue au moyen de systèmes informatisés, le contrôle porte sur l'ensemble des informations, données et traitements informatiques qui concourent directement ou indirectement à la formation des résultats comptables ou fiscaux et à l'élaboration des déclarations rendues obligatoires par le code général des impôts ainsi que sur la documentation relative aux analyses, à la programmation et à l'exécution des traitements / (...) ".

7. En premier lieu, s'il est constant que la société Jeannette DHM ne disposait pas, au cours des années litigieuses, d'une comptabilité informatisée au sens des dispositions du II de l'article L. 47 A du livre des procédures fiscales, la seule circonstance que l'administration ait effectué certaines des démarches prévues par cet article et ait notamment interrogé l'intéressée sur les modalités de contrôle à mettre en œuvre dans le cadre de ces dispositions n'a privé le contribuable d'aucune des garanties attachées au déroulement du contrôle de droit commun prévu par les dispositions de l'article L. 47 de ce livre, dès lors que le vérificateur n'a tiré aucune conséquence de l'absence de sauvegarde des données permettant le contrôle d'une comptabilité informatisée. Notamment, l'administration n'a pas déduit de cette absence de sauvegarde l'existence d'une opposition à contrôle fiscal, et a établi les impositions en litige selon la procédure de rectification contradictoire prévue aux articles L. 55 à L. 61 du livre des procédures fiscales, et non selon la procédure d'évaluation d'office prévue à l'article L. 74 du même livre. Les observations de l'intéressée ont été partiellement pris en compte dans le cadre d'une réponse aux observations du contribuable et, contrairement à ce qui est soutenu, elle a bénéficié de la garantie liée à la saisine de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires. Elle n'établit par ailleurs pas avoir sollicité le bénéfice d'autres recours dans le délai imparti. Les circonstances que des insuffisances relatives à la tenue d'une comptabilité informatisée ont été, d'ailleurs parmi de nombreuses autres ainsi que le rappelle la société requérante elle-même, retenues pour écarter la comptabilité, que les observations de la société relatives à la comptabilité n'ont pas été retenues par le service et que l'administration a procédé à une reconstitution de recettes, ne révèlent pas, contrairement à ce qui est soutenu, la mise en œuvre d'une procédure d'évaluation d'office. Par les moyens qu'elle invoque, la société requérante n'apporte aucun élément de nature à démontrer qu'elle aurait été privée d'aucune garantie susceptible d'exercer une influence sur la procédure d'imposition.

8. En deuxième lieu, dès lors qu'ainsi qu'il vient d'être dit la comptabilité ne pouvait être regardée comme informatisée au sens des dispositions du II de l'article L. 47 A du livre des procédures fiscales, les moyens tirés de la méconnaissance des modalités de la procédure de contrôle prévues à cet article sont inopérants.

9. En troisième lieu, il résulte de l'instruction que les opérations de vérification sur place de la comptabilité se sont déroulées, à la demande du président de la société requérante et après une première intervention au siège de la société le 12 mai 2016, faisant suite à un contrôle inopiné en date du 4 mai 2016, dans les locaux du comptable jusqu'au 14 décembre 2016. Il appartient dès lors au contribuable qui allègue avoir été privé d'un débat oral et contradictoire de justifier que le vérificateur se serait refusé à un tel débat. En se bornant à faire valoir qu'elle a été privée du bénéfice d'un véritable débat contradictoire sur les fonctionnalités réelles de sa caisse enregistreuse, la société requérante n'apporte pas la preuve qui lui incombe.

10. En quatrième lieu, aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation. ". Il résulte de ces dispositions que, pour être régulière, une proposition de rectification doit comporter la désignation de l'impôt concerné, de l'année d'imposition et de la base d'imposition, et énoncer les motifs sur lesquels l'administration entend se fonder pour justifier les redressements envisagés, de façon à permettre au contribuable de formuler utilement ses observations. La proposition de rectification du 19 décembre 2016 répond à ces exigences et détaille avec précision la méthode de reconstitution des recettes et les motifs de rejet de la comptabilité. En se bornant à faire valoir que la marge reconstituée n'a pas été motivée de manière " tangible et vérifiable ", la société requérante ne remet pas valablement en cause la régularité de la proposition de rectification.

11. L'instruction 13 L 1 06 qui prévoit que les contribuables concernés par le contrôle des comptabilités informatisées sont les contribuables astreints à la présentation de documents comptables est relative à la procédure d'imposition et n'est par suite pas invocable sur le fondement des dispositions de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales. Elle ne comporte au surplus aucune interprétation de la loi fiscale différente de ce qui précède.

En ce qui concerne le bien-fondé de l'imposition :

S'agissant de la comptabilité :

12. Les rehaussements litigieux, concernent, en matière d'impôt sur les sociétés, la période courant du 1er mars 2013 au 28 février 2015 et en matière de taxe sur la valeur ajoutée, la période courant du 1er mars 2013 au 31 mars 2016. Il résulte de l'instruction que la société Jeannette DHM n'a présenté pour la période allant du 1er juillet 2013 au 31 mars 2016 que des bandes Z journalières incomplètes qui mentionnaient uniquement le montant toutes taxes comprises du chiffre d'affaires de la journée ventilé par taux de taxe sur la valeur ajoutée sans faire figurer la nature des produits vendus. Or, la globalisation des recettes en fin de journée, en l'absence de justificatifs concernant le détail des articles vendus, suffit à elle seule à écarter la valeur probante de la comptabilité présentée, l'administration fiscale étant dans l'impossibilité d'effectuer les rapprochements nécessaires entre les comptes d'achat, les comptes de stocks et les ventes. Il suit de là que la comptabilité a été écartée à bon droit pour ce seul motif, alors même que des bandes journalières Z détaillées auraient été fournies pour la période courant du 1er mars 2012 au 30 juin 2013, que l'absence de présentation de bandes journalières Z au titre de douze journées serait un motif insuffisant de rejet de la comptabilité et que le caractère insuffisant de la marge commerciale ne serait pas établi. A supposer même que la société requérante ait entendu se prévaloir sur le fondement des dispositions de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales de la doctrine administrative en ce qu'elle prévoit que le défaut de valeur probante d'une comptabilité ne peut résulter que de graves irrégularités et que l'enregistrement global des recettes en fin de journée ne suffit pas à lui seul à faire écarter la comptabilité présentée, une telle interprétation ne fait pas obstacle à ce que soit écartée une comptabilité où la globalisation des recettes en fin de journée s'accompagne de l'absence de justificatifs concernant le détail des articles vendus.

S'agissant de la reconstitution de recettes :

13. La comptabilité étant, ainsi qu'il vient d'être dit, dépourvue de caractère probant et les compléments d'impositions litigieux ayant été établis conformément à l'avis de la commission départementale des impôts directs et du chiffre d'affaires, la société requérante supporte, en vertu des dispositions de l'article L. 192 du livre des procédures fiscales, la charge d'apporter la preuve de l'exagération des impositions qu'elle conteste.

14. En premier lieu, la société Jeannette DHM, pour contester la reconstitution de recettes opérée par le service, soutient que celui-ci n'a pas pris en compte la circonstance que des prix distincts étaient appliqués en salle et au comptoir. Il résulte de l'instruction que le vérificateur a pris en compte les prix figurant sur la carte et a admis en outre des prix inférieurs pour le café et la bière. En se bornant à produire un tableau afférent à une seule journée située en dehors de la période de redressement, concernant certaines boissons seulement, la société ne justifie pas que les prix retenus par le vérificateur seraient excessifs.

15. En deuxième lieu, la société Jeannette DHM soutient que le service n'a pas tenu compte de son implantation dans un quartier populaire, rue du Faubourg Saint-Denis dans le 10ème arrondissement de Paris et de sa clientèle spécifique, jeune et désargentée, circonstances ayant notamment pour conséquence un taux de perte sur les bières de près de 50 %, ainsi qu'un taux d'offerts important afin de fidéliser sa clientèle. Toutefois, la société requérante ne justifie pas de ce que ces caractéristiques impliqueraient de tels taux de perte et d'offerts. Le moyen doit par suite être écarté.

16. En troisième lieu, si la société requérante entend se prévaloir de circonstances de fait particulières relatives aux années 2014 et 2015, au cours desquelles elle soutient avoir été confrontée à des vols réguliers d'alcool de la part d'une partie de son personnel, elle n'apporte aucun élément de preuve à l'appui de ses allégations.

17. En quatrième lieu, la société Jeannette DHM fait état de multiples erreurs commises par le service lors de la retranscription des factures de fournisseurs. Il résulte toutefois de l'instruction que ces erreurs, qui ne concernaient que quatorze factures sur cinq cent soixante-trois et ont été corrigées lors de la réponse aux observations du contribuable du 13 mars 2017, ne sont pas de nature à remettre en cause la validité de la méthode de reconstitution retenue par l'administration.

18. Enfin, la seule circonstance que le premier exercice vérifié n'ait donné lieu à aucune rectification, le détail des recettes ayant été présenté, n'est de même pas de nature à remettre en cause la méthode utilisée par l'administration au titre des exercices suivants, et cela alors même que le taux de marge réalisé au titre de ce premier exercice aurait été plus faible que celui résultant de la reconstitution opérée et qu'aucune évolution des conditions d'exploitation n'aurait été constatée au cours de l'ensemble de la période vérifiée.

19. Il résulte de ce qui précède que la société Jeannette DHM n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, le versement de la somme que la société requérante demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : La requête de la société Jeannette DHM est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société Jeannette DHM et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

Copie en sera adressée au chef des services fiscaux chargé de la direction de contrôle fiscal d'Ile-de-France.

Délibéré après l'audience du 2 février 2022, à laquelle siégeaient :

- M. Platillero, président,

- M. Magnard, premier conseiller,

- Mme Bonneau-Mathelot, premier conseiller,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 16 février 2022.

Le rapporteur,

F. MAGNARDLe président assesseur,

En application de l'article R. 222-26 du code

de justice administrative

F. PLATILLERO

Le greffier,

I. BEDR

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la relance en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 21PA00384


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 21PA00384
Date de la décision : 16/02/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. PLATILLERO
Rapporteur ?: M. Franck MAGNARD
Rapporteur public ?: Mme JIMENEZ
Avocat(s) : SCP AUGUST et DEBOUZY

Origine de la décision
Date de l'import : 22/02/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2022-02-16;21pa00384 ?
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