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15/02/2022 | FRANCE | N°21PA05693

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 3ème chambre, 15 février 2022, 21PA05693


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... B... et Mme C... D... épouse B... ont demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler les arrêtés du 5 août 2020 par lesquels le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de leur délivrer un titre de séjour, les a obligés à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement nos 2009268, 2009270 du 14 octobre 2021, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté leurs demandes.

Procédure devant la cour :

P

ar une requête enregistrée le 5 novembre 2021, M. et Mme B..., représentés par Me Lalevic, deman...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... B... et Mme C... D... épouse B... ont demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler les arrêtés du 5 août 2020 par lesquels le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de leur délivrer un titre de séjour, les a obligés à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement nos 2009268, 2009270 du 14 octobre 2021, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté leurs demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 5 novembre 2021, M. et Mme B..., représentés par Me Lalevic, demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement nos 2009268, 2009270 du 14 octobre 2021 du tribunal administratif de Montreuil ;

2°) d'annuler les arrêtés du 5 août 2020 du préfet de la Seine-Saint-Denis ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de leur délivrer une autorisation provisoire de séjour et de réexaminer leur situation, dans un délai de quinze jours à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros chacun au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- les décisions leur refusant des titres de séjour sont entachées d'erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dont les conditions d'application sont précisées par la circulaire n° NOR INTK1229185C du 28 novembre 2012, dès lors qu'ils justifient d'une présence en France depuis 2004, y sont bien intégrés et n'ont plus d'attaches dans leur pays d'origine ;

- ces décisions méconnaissent les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- les décisions portant obligation de quitter le territoire méconnaissent les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elles sont entachées d'une erreur manifeste d'appréciation.

La requête a été communiquée au préfet de la Seine-Saint-Denis qui n'a pas produit de mémoire en défense.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Mme A... a présenté son rapport au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. et Mme B..., ressortissants serbes nés respectivement les 30 octobre 1958 et

3 juillet 1962, qui seraient entrés successivement en France les 1er août et 18 juillet 2004 sous couvert de visas Schengen, ont sollicité le 20 novembre 2018 la délivrance de titres de séjour sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par deux arrêtés du 5 août 2020, le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de leur délivrer des titres sollicités, les a obligés à quitter le territoire dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination. M. et Mme B... relèvent appel du jugement du 14 octobre 2021 par lequel le tribunal administratif de Montreuil a rejeté leurs conclusions tendant à l'annulation de ces arrêtés.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. Aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa version en vigueur à la date des décisions attaquées : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 313-2. / L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans (...) ".

3. Pour rejeter les demandes de M. et Mme B..., le tribunal administratif de Montreuil a notamment retenu que les intéressés n'établissaient pas avoir fixé en France le centre de leurs intérêts privés et familiaux et qu'ainsi, le préfet de Seine-Saint-Denis n'avait commis aucune erreur manifeste d'appréciation en refusant leur admission exceptionnelle au séjour sur le fondement des dispositions précitées de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il ressort toutefois des très nombreuses pièces probantes produites par M. et Mme B..., telles que des relevés bancaires portant mention de mouvements, des avis d'imposition à l'impôt sur le revenu et à la taxe d'habitation, des contrats de bail, des factures d'électricité, des documents médicaux et des attestations d'amis, que les requérants ont résidé en France à partir de 2006 et jusqu'en 2020. Dès lors, M. et Mme B..., qui citent intégralement les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile sont fondés à soutenir - implicitement mais nécessairement - qu'en refusant leur admission exceptionnelle au séjour sur le fondement de ces dispositions, sans recueil préalable de l'avis de la commission du titre de séjour que le préfet de la Seine-Saint-Denis était tenu de saisir au sens des dispositions invoquées, ce dernier a entaché les décisions leur refusant la délivrance d'un titre de séjour d'un vice de procédure.

4. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que M. et Mme B... sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté leurs demandes de délivrance de titres de séjour. Il y a lieu, en conséquence, d'annuler ces décisions et, par voie de conséquence, les décisions portant obligation de quitter le territoire et fixant le pays de destination.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

5. Eu égard au motif d'annulation retenu, le présent arrêt implique seulement que le préfet de la Seine-Saint-Denis procède au réexamen de la demande de M. et Mme B..., après avoir saisi la commission du titre de séjour, dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'assortir cette injonction d'une astreinte.

Sur les frais liés au litige :

6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme totale de 1 000 euros à verser à M. et Mme B..., en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement nos 2009268, 2009270 du tribunal administratif de Montreuil du

14 octobre 2021 et les arrêtés du 5 août 2020 du préfet de Seine-Saint-Denis sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de la Seine-Saint-Denis de procéder au réexamen de la situation administrative de M. et Mme B... dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt après avoir saisi la commission du titre de séjour de la situation des intéressés.

Article 3 : L'Etat versera la somme totale de 1 000 euros à M. et Mme B... sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... B..., à Mme C... D... épouse B..., au préfet de la Seine-Saint-Denis et au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 25 janvier 2022 à laquelle siégeaient :

- M. Ivan Luben, président de chambre,

- Mme Marianne Julliard, présidente assesseure,

- Mme Marie-Dominique Jayer, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 15 février 2022.

La rapporteure,

M-D A...

Le président,

I. LUBEN

Le greffier,

E. MOULIN

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N°21PA05693 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 21PA05693
Date de la décision : 15/02/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. LUBEN
Rapporteur ?: Mme Marie-Dominique JAYER
Rapporteur public ?: Mme PENA
Avocat(s) : SELARL PETRA LALEVIC AVOCAT

Origine de la décision
Date de l'import : 22/02/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2022-02-15;21pa05693 ?
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