Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme A... C... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du
13 janvier 2020 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.
Par un jugement n° 2002757/6-2 du 1er décembre 2020, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés les 14 et 24 mai 2021, Mme C..., représentée par Me Lamine, demande à la Cour, dans le dernier état de ses écritures :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Paris ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet de police du 13 janvier 2020 ;
3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer un titre de séjour, dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt, sous astreinte de vingt euros par jour de retard, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation administrative et de saisir la commission du titre de séjour, dans les mêmes conditions de délai et d'astreinte ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à son avocat au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.
Elle soutient que :
- la requête est recevable ;
- le préfet aurait dû saisir la commission du titre de séjour, en application de l'article
L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; or, ni le préfet de police ni les premiers juges n'ont expliqué en quoi sa situation ne rentrait pas dans les critères de délivrance d'une carte de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ; à cet égard, le jugement est insuffisamment motivé ;
- elle n'a pas refusé que sa situation soit examinée au regard de l'article L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- l'arrêté méconnait son droit au respect de sa vie privée et familiale consacré par les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- il est entaché d'un défaut d'examen sérieux de sa situation personnelle ;
- il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de l'article L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- il méconnaît les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de ces dispositions.
Par un mémoire en défense, enregistré le 7 janvier 2022, le préfet de police conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par Mme C... ne sont pas fondés.
Mme C... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 25 mars 2021 du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Paris.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
M. B... a présenté son rapport au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme A... C..., ressortissante tunisienne née le 9 juillet 2001 à Tunis, relève appel du jugement du 1er décembre 2020 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de police du 13 janvier 2020 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, en fixant son pays de destination.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés. ".
3. Dans sa demande introductive d'instance, Mme C... s'était bornée à soutenir qu' " en l'espèce, la préfecture a refusé de renouveler une carte de séjour au visa de ces dispositions [l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile] sans pour autant saisir préalablement la Commission du titre de séjour. Un tel vice rend sa décision illégale ". Par suite, en estimant que Mme C... " n'établissant pas être en situation de bénéficier de plein droit d'un titre de séjour en France sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 du code précité, le préfet n'était pas tenu de saisir la commission du titre de séjour " et qu'ainsi le moyen tiré du défaut de consultation de cette commission devait être écarté, les premiers juges, qui ont répondu au moyen soulevé au regard de l'argumentation dont ils étaient saisis, ont suffisamment motivé le jugement attaqué. Il suit de là que le moyen tiré de l'irrégularité du jugement attaqué doit être écarté.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
4. En premier lieu, par un arrêté n° 2019-00749 du 11 septembre 2019, régulièrement publié au recueil des actes administratifs spécial n° 75-2019-313 de la préfecture de Paris du
12 septembre 2019, le préfet de police a donné délégation à Mme F... E..., cheffe du 9ème bureau à la sous-direction de l'administration des étrangers à la direction de la police générale à la préfecture de police, pour signer tous actes, arrêtés et décisions dans la limite de ses attributions, au nombre desquelles figure l'édiction des décisions de refus de titre de séjour assorties d'une obligation de quitter le territoire français, en cas d'absence ou d'empêchement d'autorités dont il n'est pas établi qu'elles n'étaient pas absentes ou empêchées. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence de la signataire de l'arrêté contesté manque en fait et doit être écarté.
5. En deuxième lieu, l'arrêté litigieux vise les textes dont il est fait application, expose les circonstances de fait propres à la situation personnelle de Mme C..., dont les éléments sur lesquels le préfet de police s'est fondé pour refuser de lui délivrer un titre de séjour, pour l'obliger à quitter le territoire français et pour fixer le pays de renvoi. Dès lors, cet arrêté comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de chacune des décisions contestées et permet ainsi à la requérante d'en contester utilement le bien-fondé. En outre, contrairement à ce que soutient Mme C..., le préfet n'avait pas à faire état de l'ensemble des éléments de fait à raison desquels il a estimé que ces décisions ne méconnaissaient pas les textes qu'il a visés. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisante motivation ne peut qu'être écarté.
6. En troisième lieu, il ne ressort ni des termes de la décision attaquée ni d'aucune autre pièce du dossier que le préfet de police n'aurait pas procédé à un examen particulier de la situation personnelle de Mme C....
7. En quatrième lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors en vigueur : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ; (...) " Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
8. Il ressort des pièces du dossier que Mme C..., alors âgée de quatorze ans, est entrée en France le 5 septembre 2015 sous couvert d'un visa de court séjour valable jusqu'au
13 septembre 2015, et qu'elle s'est maintenue, avec ses parents et son frère, en situation irrégulière sur le territoire français depuis lors. En outre, l'intéressée n'établit ni même n'allègue qu'elle ne pourrait poursuivre sa scolarité dans son pays d'origine ou que la cellule familiale ne pourrait s'y reconstituer. Dès lors, dans les circonstances de l'espèce et eu égard aux conditions de séjour en France de l'intéressée, la requérante n'est pas fondée à soutenir que l'arrêté attaqué aurait porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels il a été pris. Il n'a donc pas méconnu les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni les dispositions de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile précitées.
9. En cinquième lieu, lorsqu'il est saisi d'une demande de délivrance d'un titre de séjour sur le fondement d'une des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d''asile, le préfet n'est pas tenu d'examiner d'office si l'intéressé peut prétendre à une autorisation de séjour sur le fondement d'une autre disposition de ce code. Le préfet de police n'était, dès lors, pas tenu de statuer sur le droit de Mme C... à séjourner en France à un autre titre que celui qui était invoqué. Il ressort en ce sens de la fiche de salle produite par le préfet en première instance que Mme C... n'a sollicité qu'un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ". Il ne ressort pas davantage de la motivation de la décision attaquée portant refus de titre de séjour que le préfet de police ait examiné d'office si l'intéressée était susceptible de se voir délivrer un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation au regard de ces dernières dispositions doit être écarté comme inopérant.
10. Il résulte de tout ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêté du préfet de police en date du 13 janvier 2020. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte, ainsi que celles tendant à l'application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, ne peuvent qu'être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... C... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de police.
Délibéré après l'audience du 25 janvier 2022, à laquelle siégeaient :
- M. Ivan Luben, président de chambre,
- Mme Marianne Julliard, présidente assesseure,
- Mme Marie-Dominique Jayer, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 15 février 2022.
Le président-rapporteur,
I. B...L'assesseure la plus ancienne,
M. D...
Le greffier,
E.MOULINLa République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 21PA02646