Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société à responsabilité limitée (SARL) Villette Sud a demandé au tribunal administratif de Melun de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés, ainsi que des rappels de taxe sur la valeur ajoutée, de cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises et de taxes assises sur les salaires, et des pénalités et amendes correspondantes, auxquels elle a été assujettie au titre des périodes d'imposition 2010, 2011 et 2012.
Par un jugement n° 1800241 du 17 septembre 2020, le tribunal administratif de Melun a constaté qu'il n'y avait plus lieu à statuer sur les conclusions relatives aux impositions, pénalités et amendes relatives à l'année 2012 et a rejeté le surplus de sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 9 novembre 2020 la SARL Villette Sud, représentée par Me Roé, avocat, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1800241 du 17 septembre 2020 du tribunal administratif de Melun, en tant qu'il a rejeté les conclusions de la requête relatives aux impositions et pénalités relatives aux périodes d'imposition 2010 et 2011 ;
2°) de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée, de cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises et des taxes assises sur les salaires, et des pénalités correspondantes, auxquels elle a été assujettie au titre des périodes d'imposition 2010 et 2011 ;
3°) de condamner l'Etat au paiement des intérêts moratoires ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 500 euros, sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, et condamner l'Etat aux dépens.
Elle soutient que :
- la comptabilité de la société était probante et l'administration ne pouvait l'écarter comme non probante pour reconstituer son chiffre d'affaires ;
- les avoirs consentis à la société SECEM sont justifiés en raison de la vente de produits à proximité des dates limites de vente et des relations commerciales qu'elles entretenaient.
Par un mémoire, enregistré le 4 janvier 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que aucun des moyens de la requête n'est fondé.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de commerce ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Simon,
- et les conclusions de M. Sibilli, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. La société Villette Sud, constituée sous forme de société à responsabilité limitée (SARL) et exerçant une activité de vente au détail de produits de boucherie et d'alimentation générale au Kremlin-Bicêtre (Val-de-Marne), a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur les années et exercices 2010, 2011 et 2012. A l'issue des opérations de contrôle, l'administration a mis en recouvrement des compléments d'imposition à l'impôt sur les sociétés, et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée, de cotisation additionnelle sur la valeur ajoutée des entreprises, et de taxes assises sur les salaires, assortis d'intérêts de retards, de pénalités et de l'amende de l'article 1759 du code général des impôts. La société requérante a contesté l'ensemble de ces impositions devant le tribunal administratif de Melun qui, par jugement du 17 septembre 2020, a tenu compte du dégrèvement accordé en cours d'instance au titre de 2012 pour prononcer un non-lieu à statuer dans la limite de 454 343 euros, correspondant à la totalité des impositions et pénalités établies au titre de cette année, et a rejeté le surplus de la demande. La SARL Villette Sud demande à la Cour d'annuler le jugement du 17 décembre 2020, en tant qu'il rejette le surplus de la demande, et de prononcer la décharge des impositions mises à sa charge au titre des années 2010 et 2011, ainsi que des pénalités correspondantes.
2. En premier lieu, aux termes de l'article 54 du code général des impôts : " Les contribuables mentionnés à l'article 53 A sont tenus de représenter à toute réquisition de l'administration tous documents comptables, inventaires, copies de lettres, pièces de recettes et de dépenses de nature à justifier l'exactitude des résultats indiqués dans leur déclaration ". Aux termes de l'article L. 286 du même code : " I. Toute personne assujettie à la taxe sur la valeur ajoutée doit : (...) 3° Si elle ne tient pas habituellement une comptabilité permettant de déterminer son chiffre d'affaires tel qu'il est défini par le présent chapitre, avoir un livre aux pages numérotées sur lequel elle inscrit, jour par jour, sans blanc ni rature, le montant de chacune de ses opérations, en distinguant, au besoin, ses opérations taxables et celles qui ne le sont pas ". Aux termes de l'article L. 123-12 du code de commerce : " Toute personne physique ou morale ayant la qualité de commerçant doit procéder à l'enregistrement comptable des mouvements affectant le patrimoine de son entreprise. Ces mouvements sont enregistrés chronologiquement. Elle doit contrôler par inventaire, au moins une fois tous les douze mois, l'existence et la valeur des éléments actifs et passifs du patrimoine de l'entreprise. Elle doit établir des comptes annuels à la clôture de l'exercice au vu des enregistrements comptables et de l'inventaire. Ces comptes annuels comprennent le bilan, le compte de résultat et une annexe, qui forment un tout indissociable. ". Aux termes de l'article L. 123-14 du même code : " Les comptes annuels doivent être réguliers, sincères et donner une image fidèle du patrimoine, de la situation financière et du résultat de l'entreprise ". Il résulte de ces dispositions que l'absence de présentation des pièces justificatives de recettes suffit pour que la comptabilité d'une entreprise soit regardée comme dépourvue de valeur probante.
3. Il résulte de l'instruction qu'au cours de la période vérifiée, la SARL Villette Sud a globalisé le montant des recettes perçues par la vente de produits de boucherie, d'une part, et par la vente de produits alimentaires, d'autre part, sur un document comptable mensuel unique, sans distinguer entre les deux catégories de biens, et sans être en mesure de produire aucun justificatif de recettes, aucune bande de caisse enregistreuse n'ayant pu être présentée au vérificateur, et seul un brouillard de caisse assorti de tickets de caisse, présentant des ruptures, des manques, ou des globalisations par produits, ayant pu être présenté pour les produits de boucherie. Dans ces conditions, la comptabilité produite ne permet pas de s'assurer de la véracité des recettes mentionnées et ne peut, ainsi être regardée comme probante. L'administration justifie ainsi avoir, à bon droit, écarté comme non probante la comptabilité de la SARL Villette Sud.
4. En deuxième lieu, aux termes de l'article 39 du code général des impôts : " 1. Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant, sous réserve des dispositions du 5, notamment : / 1° Les frais généraux de toute nature, les dépenses de personnel et de main-d'œuvre, le loyer des immeubles dont l'entreprise est locataire ". Les charges pouvant être admises en déduction du bénéfice imposable, en application des dispositions de l'article 39 du code général des impôts, doivent avoir été exposées dans l'intérêt direct de l'entreprise ou se rattacher à sa gestion normale, correspondre à des charges effectives et être appuyées de justificatifs. Il appartient au contribuable de justifier du bien-fondé des charges inscrites dans sa comptabilité.
5. La SARL Villette Sud a inscrit au cours de l'exercice 2010 en charges une somme de 110 000 euros correspondant à onze avoirs de montant identique (10 550 euros chacun), facturés à la société SECEM. En arguant de ce que ces avoirs correspondent à des ventes de marchandises consenties en 2008 et 2009 en limite de péremption qui n'auraient été ni vendues ni utilisées par leur acquéreur, et des relations commerciales anciennes entre les deux sociétés, la société requérante, qui ne produit aucun justificatif de ventes en limite de péremption au cours de la période concernée, et dont le gérant assure les mêmes fonctions à la société SECEM dont il est également associé, n'établit pas que ces charges ont été exposées dans l'intérêt de l'entreprise.
6. En dernier lieu, les conclusions tendant à la décharge des rappels de cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises et de taxes assises sur les salaires, qui ont été mis à sa charge au titre des années 2010 et 2011, ne sont assorties d'aucun moyen. Elles doivent, en tout état de cause, être rejetées.
7. Il résulte de tout ce qui précède que la SARL Villette Sud n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par jugement du 17 septembre 2020, le tribunal administratif de Melun a rejeté le surplus de sa demande. Par voie de conséquences, ses conclusions présentées au titre des dispositions des articles L. 761-1 et R. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de la SARL Villette Sud est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société à responsabilité limitée (SARL) Villette Sud et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.
Copie en sera adressée à l'administrateur des finances publiques chargé de la direction spécialisée de contrôle fiscal Île-de-France.
Délibéré après l'audience du 24 janvier 2022, à laquelle siégeaient :
- M. Carrère, président de chambre,
- M. Simon, premier conseiller,
- Mme Boizot, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe de la Cour, le 11 février 2022.
Le rapporteur,
C. SIMONLe président,
S. CARRERE
La greffière,
C. DABERT
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la relance en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 20PA03289