Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 13 juin 2020 par lequel le préfet de police l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination et lui a interdit le retour sur le territoire français pour une durée de trois ans.
Par un jugement n° 2008334 du 11 août 2020, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Paris a annulé l'arrêté du préfet de police en date du 13 juin 2020 et enjoint au préfet de police de délivrer à M. B... une autorisation provisoire de séjour dans un délai de quinze jours à compter de la notification du jugement.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 26 août 2020, le préfet de police demande à la Cour :
1°) d'annuler les articles 2 à 4 de ce jugement ;
2°) de rejeter la demande de première instance présentée par M. B....
Le préfet de police soutient que :
- l'auteur de l'arrêté litigieux disposait d'une délégation de signature consentie par arrêté du 11 janvier 2020 régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la préfecture de Paris le 3 février 2021 ;
- les autres moyens soulevés dans la demande de première instance doivent être écartés.
La requête n'a pu être communiquée à M. B..., qui réside à une adresse inconnue et est par ailleurs connu sous alias.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Boizot a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Le préfet de police relève appel du jugement n° 2008334 du 11 août 2020, par lequel la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 13 juin 2020 obligeant M. B..., ainsi désigné sous alias, ressortissant marocain, né le 1er août 2000, à quitter sans délai le territoire français, fixant le pays de destination et prononçant à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de trois ans.
Sur le moyen d'annulation retenu par le tribunal administratif :
2. Aux termes des dispositions du premier alinéa de l'article L. 212-1 du code des relations entre le public et l'administration : " Toute décision prise par une administration comporte la signature de son auteur ainsi que la mention, en caractères lisibles, du prénom, du nom et de la qualité de celui-ci " .
3. Il ressort de l'original de l'arrêté n° 2020-00117 du 31 janvier 2020 portant délégation de signature à M. E... D..., attaché d'administration d'Etat, qui est produit en appel, qu'il comporte la signature de M. A... F..., préfet de police de Paris. En outre, par cet arrêté, publié le 3 février 2020 au recueil des actes administratifs spécial de la préfecture de Paris, délégation a été consentie à M. E... D..., attaché de l'administration de l'Etat, délégation à l'effet de signer les décisions dans la limite de ses attributions, dont relève la police des étrangers, en cas d'absence ou d'empêchement d'autorités dont il ne ressort pas des pièces du dossier qu'elles n'ont pas été absentes ou empêchées lors de la signature de l'acte attaqué. Ainsi, M. D... signataire de l'arrêté litigieux, bénéficiait d'une délégation de signature régulière. La circonstance que l'ampliation de cet arrêté ne comporte pas la signature de son auteur est sans incidence sur sa légalité. Dès lors, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens invoqués, le préfet de police de Paris est fondé à soutenir que c'est à tort que la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Paris a retenu le motif tiré de l'incompétence pour annuler l'arrêté du préfet de police en date du 13 juin 2020.
4. Il appartient toutefois à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. B... devant le tribunal administratif de Paris.
Sur les autres moyens soulevés par M. B... :
5. En premier lieu, il ressort des termes de l'arrêté contesté que, pour obliger M. B... à quitter le territoire français, le préfet de police s'est fondé sur les dispositions du 1° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors en vigueur, a retenu que l'intéressé ne justifiait pas être entré régulièrement sur le territoire français et qu'il n'a pas sollicité la délivrance d'un titre de séjour. En outre, le préfet a retenu que le comportement de l'intéressé a été signalé le 13 juin 2020 pour vol en réunion avec violence. Enfin, pour prendre cette décision, le préfet a également retenu que, compte tenu des circonstances propres au cas d'espèce, il n'était pas porté une atteinte disproportionnée au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale. L'arrêté litigieux mentionne dès lors les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement. Par suite, les moyens tirés de l'insuffisance de motivation et du défaut d'examen ne peuvent qu'être écartés.
6. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, en vigueur à la date de la décision contestée : " II - Pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, l'étranger dispose d'un délai de trente jours à compter de sa notification pour rejoindre le pays dont il possède la nationalité ou tout autre pays non membre de l'Union européenne ou avec lequel ne s'applique pas l'acquis de Schengen où il est légalement admissible. (...) / Toutefois, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, décider que l'étranger est obligé de quitter sans délai le territoire français : / 1° Si le comportement de l'étranger constitue une menace pour l'ordre public ; / (...) / 3° S'il existe un risque que l'étranger se soustraie à cette obligation. Ce risque peut être regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : / a) Si l'étranger, qui ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, n'a pas sollicité la délivrance d'un titre de séjour ; / (...) / f) Si l'étranger ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, notamment parce qu'il ne peut présenter des documents d'identité ou de voyage en cours de validité, (...) qu'il ne justifie pas d'une résidence effective et permanente dans un local affecté à son habitation principale (...) / h) Si l'étranger a explicitement déclaré son intention de ne pas se conformer à son obligation de quitter le territoire français ".
7. Il est constant que M. B... n'a pas sollicité la délivrance d'un titre de séjour alors qu'il ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français et qu'il ne peut présenter de documents d'identité ou de voyage. Le préfet de police pouvait ainsi légalement, pour ces seuls motifs, décider de ne pas accorder à l'intéressé de délai de départ volontaire.
8. En dernier lieu, aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " III - L'autorité administrative, par une décision motivée, assortit l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français, d'une durée maximale de trois ans à compter de sa notification, lorsque aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger ou lorsque l'étranger n'a pas satisfait à cette obligation dans le délai imparti. / Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative ne prononce pas d'interdiction de retour. (...) / La durée de l'interdiction de retour mentionnée au premier alinéa du présent III ainsi que le prononcé et la durée de l'interdiction de retour mentionnée au quatrième alinéa sont décidés par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français. (...) ". Il ressort des termes mêmes de ces dispositions que l'autorité compétente doit, pour décider de prononcer à l'encontre de l'étranger soumis à l'obligation de quitter le territoire français une interdiction de retour et en fixer la durée, tenir compte, dans le respect des principes constitutionnels, des principes généraux du droit et des règles résultant des engagements internationaux de la France, des quatre critères qu'elles énumèrent, sans pouvoir se limiter à ne prendre en compte que l'un ou plusieurs d'entre eux. La décision d'interdiction de retour doit comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement, de sorte que son destinataire puisse à sa seule lecture en connaître les motifs. Cette motivation doit attester de la prise en compte par l'autorité compétente, au vu de la situation de l'intéressé, de l'ensemble des critères prévus par la loi.
9. Si l'intéressé allègue vivre en France depuis 2014, il ne se prévaut d'aucune attache familiale sur le territoire national. En outre, le préfet de police a pu, à bon droit, retenir, au sens et pour l'application des dispositions citées au point, l'existence d'une menace pour l'ordre public, en raison de faits de vol en réunion commis avec violence par l'intéressé. Dès lors, M. B... n'est pas fondé à contester l'interdiction de retour de trois ans dont il fait l'objet.
10. Il résulte de tout ce qui précède que la demande présentée par M. B... devant le tribunal administratif de Paris doit être rejetée, ainsi que, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et d'admission au bénéfice de l'aide juridictionnelle à titre provisoire, et celles relatives aux frais d'instance.
D E C I D E :
Article 1er : Les articles 2 à 4 du jugement n° 2008334 du 11 août 2020 de la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Paris sont annulés.
Article 2 : La demande présentée par M. B... devant le tribunal administratif de Paris est rejetée.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à M. C... B....
Copie en sera adressée au préfet de police.
Délibéré après l'audience du 17 décembre 2021, à laquelle siégeaient :
- M. Carrère, président,
- M. Simon, premier conseiller,
- Mme Boizot, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe de la Cour, le 14 janvier 2022.
La rapporteure,
S. BOIZOTLe président,
S. CARRÈRE
La greffière,
C. DABERT
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 20PA02455