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09/12/2021 | FRANCE | N°20PA03516

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 1ère chambre, 09 décembre 2021, 20PA03516


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 14 août 2019 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de renouveler son titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1910029 du 22 octobre 2020, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 22 novembre

2020 et des mémoires complémentaires enregistrés les 7 décembre 2020 et 14 février 2021, Mme B....

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 14 août 2019 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de renouveler son titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1910029 du 22 octobre 2020, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 22 novembre 2020 et des mémoires complémentaires enregistrés les 7 décembre 2020 et 14 février 2021, Mme B..., représentée par Me Menage, demande à la Cour :

1°) de réformer le jugement n° 1910029 du 22 octobre 2020 du tribunal administratif de Montreuil ;

2°) d'annuler la décision du 14 août 2019 ;

3°) d'ordonner la délivrance d'un titre de séjour en qualité d'" étranger malade " ;

4°) à défaut, d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis ou à tout autre préfet territorialement compétent de réexaminer sa situation dans un délai de quinze jours sous astreinte de cent euros par jour de retard ;

5°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis ou à tout autre préfet territorialement compétent de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour et une carte de séjour temporaire dans un délai de quinze jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de cent euros par jour de retard ;

6°) de mettre à la charge de l'Etat la sonne de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le délai de neuf mois qui sépare l'avis du collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration et la décision contestée est préoccupant ;

- l'avis a été édicté sans qu'elle ait été examinée, les mentions y figurant ne permettant de savoir ni si elle a été convoquée à un examen ni si des examens complémentaires ont été demandés ni si elle a dû justifier de son identité ;

- elle a déjà été titulaire d'un titre de séjour en qualité d'étranger malade du fait de cette pathologie ;

- elle souffre d'un syndrome de Lynch qui nécessite un suivi pluridisciplinaire spécialisé, notamment une cartographie génétique, indisponible en Algérie ;

- elle a subi des interventions chirurgicales en France ;

- son insertion professionnelle constitue une circonstance exceptionnelle au sens des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle est intégrée socialement.

La requête a été communiquée au préfet de la Seine-Saint-Denis qui n'a pas produit de mémoire en défense.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Gobeill,

- et les observations de Me Bert Lazli, substituant Me Menage, avocat de Mme B....

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du 14 août 2020, le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de renouveler le titre de séjour de Mme B..., lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Mme B... relève appel du jugement du

22 octobre 2020 par lequel le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa requête contre cet arrêté.

2. Aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : / (...) 7) au ressortissant algérien, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse pas effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays. ".

3. Il ressort des pièces du dossier que le syndrome de Lynch dont est atteinte Mme B... est susceptible de l'exposer à des conséquences d'une exceptionnelle gravité. Pour critiquer le motif de la décision contestée selon lequel elle peut effectivement bénéficier de soins en Algérie, la requérante produit notamment une attestation du 3 septembre 2019 d'un médecin des Hôpitaux Universitaires Paris Sud selon laquelle elle est suivie depuis plusieurs années pour cette pathologie et que cette dernière nécessite une intervention délicate qui ne peut être réalisée en Algérie, ainsi que deux certificats de médecins hospitaliers algériens, l'un de l'établissement public hospitalier de Ain El Hammam de Tizi Ouzou et l'autre du centre hospitalo-universitaire de Tizi Ouzou, certifiant qu'il est impossible de réaliser en Algérie la cartographie génétique nécessaire pour détecter de nouvelles apparitions de la tumeur. Ces documents, bien qu'établis postérieurement à la décision attaquée, se rapportent cependant à un suivi médical constitué antérieurement pour une patiente qui demandait le renouvellement de son titre de séjour dont il n'est pas contesté qu'il a été octroyé pour cette même pathologie. Le préfet de la Seine-Saint-Denis, à qui la requête a été communiquée, n'a pas produit d'observations en défense. Dans ces conditions, Mme B... est fondée à soutenir qu'en estimant que le traitement qu'elle suit est disponible en Algérie, le préfet de la Seine-Saint-Denis a méconnu le 7 de l'article 6 de l'accord franco-algérien modifié du 27 décembre 1968 précité et soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande. Par suite, et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens de la requête, ce jugement doit être annulé, ainsi que l'arrêté du préfet de la Seine-Saint-Denis du 14 août 2019 refusant de renouveler le titre de séjour de l'intéressée et lui faisant, en conséquence, obligation de quitter le territoire.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

4. Eu égard au motif d'annulation de l'arrêté attaqué ci-dessus retenu, le présent arrêt implique nécessairement que le préfet de la Seine-Saint-Denis délivre à Mme B... un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Sur les conclusions tendant au paiement des frais d'instance :

5. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'État une somme de 1 000 euros à verser à Mme B... en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 1910029 du 22 octobre 2020 du tribunal administratif de Montreuil ainsi que l'arrêté du préfet de la Seine-Saint-Denis du 14 août 2019 sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de la Seine-Saint-Denis de délivrer à Mme B... un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai de deux mois à compter de la notification qui lui sera faite de la présente décision.

Article 3 : L'Etat versera à Mme B... une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B..., au ministre de l'intérieur et au préfet de la Seine-Saint-Denis.

Délibéré après l'audience du 18 novembre 2021, à laquelle siégeaient :

- M. Lapouzade, président,

- M. Diémert, président-assesseur,

- M. Gobeill, premier conseiller,

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 9 décembre 2021.

Le rapporteur,

J.-F. GOBEILL

Le président,

J. LAPOUZADE La greffière,

C. POVSELa République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 20PA03516


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 20PA03516
Date de la décision : 09/12/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LAPOUZADE
Rapporteur ?: M. Jean-François GOBEILL
Rapporteur public ?: Mme GUILLOTEAU
Avocat(s) : MENAGE

Origine de la décision
Date de l'import : 21/12/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2021-12-09;20pa03516 ?
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