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18/11/2021 | FRANCE | N°20PA00854

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 1ère chambre, 18 novembre 2021, 20PA00854


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... E... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 29 août 2019 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1922931/1-3 du 5 février 2020, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 6 mars 2020, un mémoire com

plémentaire enregistré le 18 mai 2020 et un mémoire en réplique enregistré le 28 septembre 2020, M...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... E... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 29 août 2019 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1922931/1-3 du 5 février 2020, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 6 mars 2020, un mémoire complémentaire enregistré le 18 mai 2020 et un mémoire en réplique enregistré le 28 septembre 2020, M. E..., représenté par Me Walther, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1922931/1-3 du 5 février 2020 du tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler l'arrêté du 29 août 2019 du préfet de police ;

3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 150 euros par jour de retard ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans le même délai et sous la même astreinte et de lui délivrer pendant cet examen une autorisation provisoire de séjour avec autorisation de travail ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à verser son conseil sur le fondement des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

S'agissant de la décision portant refus de titre de séjour :

- elle a été signée par une autorité incompétente ;

- elle est entachée d'un défaut de motivation et d'examen de sa situation personnelle ;

- elle méconnaît les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

S'agissant de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- elle est entachée d'un défaut de motivation ;

- elle est illégale par voie d'exception, dès lors que la décision portant refus de titre de séjour est elle-même illégale ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et celles des articles 3-1 et 9 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

S'agissant de la décision fixant le pays de destination :

- elle emporte pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité.

M. E... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Paris du 17 août 2020.

Par un mémoire en défense enregistré le 10 septembre 2020, le préfet de police conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Doré a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. E..., ressortissant congolais né en août 1983, est entré en France, selon ses déclarations, en février 2013. Le 5 août 2019, il a sollicité la délivrance d'un titre de séjour en se prévalant de sa vie privée et familiale. Par un arrêté du 29 août 2019, le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. M. E... fait appel du jugement du 5 février 2020 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur les conclusions aux fins d'annulation :

2. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors en vigueur : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° À l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée (...) ".

3. M. E... fait valoir qu'il réside en France de manière continue depuis 2013 et qu'il vit depuis 2017 aux côtés de son épouse de nationalité congolaise, titulaire d'un titre de séjour pluriannuel, et de leurs trois enfants nés sur le territoire français le 10 octobre 2015, le 6 octobre 2017 et le 28 octobre 2018. À l'appui de sa requête d'appel, M. B... D... produit des avis d'imposition, des factures d'électricité et de télécommunication, des avis d'échéance de Paris habitat et une attestation d'assurance habitation mentionnant leurs deux noms, ainsi que des attestations de son épouse, de voisins et des responsables de la crèche et de l'école maternelle fréquentées par leurs enfants. A... pièces sont suffisantes pour justifier l'existence d'une vie commune avec son épouse dès lors, notamment, que si cette dernière a déclaré aux services de police le 9 janvier 2018 que M. E... n'habitait pas chez elle, elle a également indiqué qu'il était son conjoint et qu'ils allaient se marier, mariage intervenu le 2 juin 2018. A... mêmes pièces attestent également de la participation de M. E... à l'éducation et à l'entretien de ses enfants nés en France. Dans A... conditions, en rejetant la demande de délivrance d'un titre de séjour présentée par M. E... au motif, notamment, qu'il ne justifiait pas d'une vie commune avec son épouse, le préfet de police a entaché l'arrêté du 29 août 2019 d'une erreur d'appréciation au regard des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

4. Le refus de titre de séjour opposé à M. E... étant ainsi entaché d'illégalité, l'obligation de quitter le territoire français dont il est assorti doit, par voie de conséquence, également être annulée, de même que la décision fixant le pays de destination.

5. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que M. E... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

6. Aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. La juridiction peut également prescrire d'office cette mesure ".

7. Compte tenu de ses motifs, l'annulation prononcée par le présent arrêt n'implique pas que soit délivré à M. E... un titre de séjour. En revanche, il y a lieu d'enjoindre au préfet de police de procéder au réexamen de sa demande dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte.

Sur les frais liés à l'instance :

8. M. E... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale. Par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me Walther, avocat de M. B...-D..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État, de mettre à la charge de l'État le versement à Me Walther de la somme de 1 000 euros.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1922931/1-3 du 5 février 2020 du tribunal administratif de Paris ainsi que l'arrêté du préfet de police du 29 août 2019 sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de police de procéder au réexamen de la situation de M. E... dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : L'État (ministère de l'intérieur) versera à Me Walther, avocat de M. B...-D..., une somme de 1 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve qu'elle renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... E..., au ministre de l'intérieur et au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 21 octobre 2021, à laquelle siégeaient :

- M. Diémert, président de la formation de jugement en application des articles L. 234-3 (1er alinéa) et R. 222-6 (1er alinéa) du code de justice administrative,

- M. Gobeill, premier conseiller,

- M. Doré, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 18 novembre 2021.

Le rapporteur,

F. DORÉLe président,

S. DIÉMERT

La greffière,

Y. HERBER

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 20PA00854 5


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 20PA00854
Date de la décision : 18/11/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. - Séjour des étrangers. - Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. DIEMERT
Rapporteur ?: M. François DORE
Rapporteur public ?: Mme GUILLOTEAU
Avocat(s) : WALTHER

Origine de la décision
Date de l'import : 30/11/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2021-11-18;20pa00854 ?
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