La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

09/11/2021 | FRANCE | N°21PA00974

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 3ème chambre, 09 novembre 2021, 21PA00974


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au Tribunal administratif de Montreuil d'annuler la décision du 6 janvier 2020 par laquelle le préfet de la Seine-Saint-Denis a rejeté sa demande de regroupement familial au bénéfice de son épouse.

Par un jugement n° 2002695 du 15 janvier 2021, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 24 février 2021, M. A..., représenté par Me Koszczanski, demande à la Cour :

1°) de prono

ncer son admission provisoire à l'aide juridictionnelle ;

2°) d'infirmer le jugement du Tribunal admin...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au Tribunal administratif de Montreuil d'annuler la décision du 6 janvier 2020 par laquelle le préfet de la Seine-Saint-Denis a rejeté sa demande de regroupement familial au bénéfice de son épouse.

Par un jugement n° 2002695 du 15 janvier 2021, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 24 février 2021, M. A..., représenté par Me Koszczanski, demande à la Cour :

1°) de prononcer son admission provisoire à l'aide juridictionnelle ;

2°) d'infirmer le jugement du Tribunal administratif de Montreuil ;

3°) d'annuler la décision du 6 janvier 2020 du préfet de la Seine-Saint-Denis ;

4°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis d'autoriser le regroupement familial au bénéfice de son épouse ou de procéder au réexamen de sa situation, dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à son avocat au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, sous réserve qu'elle renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État.

Il soutient que :

- la décision est insuffisamment motivée ;

- elle est entachée d'un défaut d'examen de sa situation personnelle ;

- elle est entachée d'une erreur de fait ;

- elle méconnaît les articles L. 411-1 et suivants du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; le préfet s'est cru en situation de compétence liée ;

- elle est entachée d'une erreur de droit, au regard du 3° de l'article L. 411-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.

La requête a été communiquée au préfet de la Seine-Saint-Denis, qui n'a pas présenté de mémoire en défense.

M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle partielle par une décision du 12 juillet 2021 du bureau d'aide juridictionnelle du tribunal judiciaire de Paris.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Julliard,

- les observations de Me Berdugo, représentant M. A....

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant sri lankais né le 10 septembre 1986 à Mullaitivu, relève appel du jugement du 15 janvier 2021 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du préfet de la Seine-Saint-Denis du 6 janvier 2020 lui refusant le bénéfice du regroupement familial.

Sur l'admission provisoire au bénéfice de l'aide juridictionnelle :

2. Aux termes de l'article 20 de la loi du 10 juillet 1991 : " Dans les cas d'urgence (...), l'admission provisoire à l'aide juridictionnelle peut être prononcée soit par le président du bureau ou de la section compétente du bureau d'aide juridictionnelle, soit par la juridiction compétente ou son président ".

3. Par une décision du 12 juillet 2021, le bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Paris a admis M. A... au bénéfice de l'aide juridictionnelle partielle. Par suite, ses conclusions tendant à ce que la Cour lui accorde le bénéfice d'une admission provisoire à l'aide juridictionnelle sont devenues sans objet.

Sur la légalité de la décision du 6 janvier 2020 :

4. Aux termes de l'article L. 411-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors en vigueur : " Le ressortissant étranger qui séjourne régulièrement en France depuis au moins dix-huit mois, sous couvert d'un des titres d'une durée de validité d'au moins un an prévus par le présent code ou par des conventions internationales, peut demander à bénéficier de son droit à être rejoint, au titre du regroupement familial, par son conjoint, si ce dernier est âgé d'au moins dix-huit ans, et les enfants du couple mineurs de dix-huit ans ". Aux termes de l'article L. 411-5 du même code : " Le regroupement familial ne peut être refusé que pour l'un des motifs suivants : / 1° Le demandeur ne justifie pas de ressources stables et suffisantes pour subvenir aux besoins de sa famille. (...) / 2° Le demandeur ne dispose pas ou ne disposera pas à la date d'arrivée de sa famille en France d'un logement considéré comme normal pour une famille comparable vivant dans la même région géographique ; / 3° Le demandeur ne se conforme pas aux principes essentiels qui, conformément aux lois de la République, régissent la vie familiale en France, pays d'accueil ". Aux termes de l'article L. 411-6 du même code : " Peut être exclu du regroupement familial : (...) 3° Un membre de la famille résidant en France ".

5. Il résulte de la combinaison de ces dispositions que si le préfet, lorsqu'il se prononce sur une demande de regroupement familial, est en droit de rejeter la demande dans le cas où l'intéressé ne justifierait pas remplir l'une ou l'autre des conditions conventionnellement requises, il dispose toutefois d'un pouvoir d'appréciation et n'est pas tenu par les dispositions précitées, notamment dans le cas où il est porté une atteinte excessive au droit de mener une vie familiale normale, tel qu'il est protégé par les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

6. Pour rejeter la demande de regroupement familial présentée par M. A... au bénéfice de son épouse, le préfet de la Seine-Saint-Denis, après avoir indiqué que " la procédure de regroupement familial ne peut être engagée que si les membres de famille pour lesquels l'introduction sur le territoire est demandée, résident hors de France " a conclu qu'" après un examen attentif de votre dossier, il s'avère que votre épouse n'est pas détentrice d'un titre de séjour lui permettant de se trouver en situation régulière sur le territoire français. Cette dernière s'est maintenue sur le territoire en situation irrégulière. Dès lors, aucune suite favorable ne peut être réservé à votre demande (...) ". Ainsi donc, le préfet s'est fondé sur l'unique circonstance que l'épouse du requérant était en situation irrégulière sur le territoire français sans rechercher s'il existait un motif exceptionnel de nature à permettre à M. A... d'obtenir, à titre dérogatoire, un regroupement familial sur place. Par suite, en se considérant en situation de compétence liée pour rejeter la demande de regroupement familial présentée par M. A... au seul motif que son épouse était en situation irrégulière, le préfet de Seine-Saint-Denis a entaché sa décision d'une erreur de droit. Il y a lieu en conséquence d'en prononcer l'annulation.

7. Il résulte de ce qui précède et sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête, que M. A... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte :

8. Le présent arrêt implique seulement qu'il soit enjoint au préfet de la Seine-Saint-Denis de procéder à un nouvel examen de la demande de M. A..., dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'assortir cette injonction d'une astreinte.

Sur les frais liés au litige :

9. M. A... obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle partielle. Par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me Koszczanski, avocat de M. A..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État, de mettre à la charge de l'Etat le versement à

Me Koszczanski de la somme de 1 500 euros.

DÉCIDE :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de M. A... tendant à obtenir le bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire.

Article 2 : Le jugement n° 2002695 du 15 janvier 2021 du Tribunal administratif de Montreuil et la décision du 6 janvier 2020 par laquelle le préfet de la Seine-Saint-Denis a rejeté la demande de regroupement familial présentée par M. A..., sont annulés.

Article 3 : Il est enjoint au préfet de la Seine-Saint-Denis de procéder au réexamen de la demande de regroupement familial présentée par M. A... dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 4 : L'Etat versera à Me Koszczanski, avocat de M. A..., une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que Me Koszczanski renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.

Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A..., au ministre de l'intérieur, au préfet de la Seine-Saint-Denis et à Me Koszczanski.

Délibéré après l'audience du 19 octobre 2021, à laquelle siégeaient :

- M. Bernier, président-assesseur, assurant la présidence de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,

- Mme Julliard, présidente assesseure,

- Mme Mornet, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 9 novembre 2021

La rapporteure,

M. JULLIARDLe président de la formation de jugement,

Ch. BERNIER

La greffière,

N. DAHMANI La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

3

N° 21PA00974


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 21PA00974
Date de la décision : 09/11/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. - Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. BERNIER
Rapporteur ?: Mme Marianne JULLIARD
Rapporteur public ?: Mme PENA
Avocat(s) : CABINET KOSZCZANSKI et BERDUGO

Origine de la décision
Date de l'import : 23/11/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2021-11-09;21pa00974 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award