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03/11/2021 | FRANCE | N°20PA03011

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 7ème chambre, 03 novembre 2021, 20PA03011


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... C... A... a demandé au Tribunal administratif de Paris l'annulation de l'arrêté du 22 mai 2019 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 2008862/4-2 du 17 septembre 2020, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 20 octobre 2020, Mme A..., rep

résentée par Me Kerihuel, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2008862/4-2 du 17 sep...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... C... A... a demandé au Tribunal administratif de Paris l'annulation de l'arrêté du 22 mai 2019 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 2008862/4-2 du 17 septembre 2020, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 20 octobre 2020, Mme A..., représentée par Me Kerihuel, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2008862/4-2 du 17 septembre 2020 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 22 mai 2019 ;

3°) d'enjoindre, à titre principal, au préfet de police de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de trente jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) d'enjoindre, à titre subsidiaire, au préfet de police, de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " salarié " dans un délai de trente jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

5°) d'enjoindre, à titre infiniment subsidiaire, au préfet de police de réexaminer sa situation dans un délai de trente jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

6°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la décision de refus de renouvellement de titre de méconnaît les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile,

- elle remplit les critères de régularisation sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, énoncés par la circulaire du 28 novembre 2012 du ministre de l'intérieur, qui est opposable en application de l'article L. 312-3 du code des relations entre le public et l'administration ;

- la décision méconnaît les articles L. 313-11 et L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ainsi que les stipulations de l'articles 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation des conséquences sur sa situation personnelle ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français et celle fixant le pays de renvoi sont illégales par voie de conséquence de l'illégalité de la décision portant refus de renouvellement de titre de séjour ;

- elles méconnaissent les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elles sont entachées d'erreur manifeste d'appréciation.

La requête a été communiquée au préfet de police, lequel n'a pas produit de mémoire en défense.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile,

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Hamon,

- et les observations de Me Kerihuel, avocate de Mme A....

Considérant ce qui suit :

1. Mme A..., ressortissante kényane née le 29 juillet 1968, entrée en France le 25 septembre 2005 sous couvert d'un visa étudiant a été titulaire de titres de séjour en qualité d'étudiante jusqu'en août 2011 puis du 23 juillet 2012 au 3 septembre 2016. Le 2 septembre 2016, elle a sollicité un titre de séjour en qualité d'étranger malade. Le préfet de police, par un arrêté du 18 janvier 2017, a rejeté sa demande et a pris à son encontre une mesure d'éloignement. Le 11 avril 2019, elle a sollicité son admission exceptionnelle au séjour. Par un arrêté du 22 mai 2019, le préfet de police a rejeté sa demande, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. Mme A... fait appel du jugement par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur les conclusions aux fins d'annulation :

2. Aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa version applicable : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 313-2. / L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans. ".

3. Par ailleurs aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits de libertés d'autrui. ".

4. Il ressort des pièces du dossier, et n'est au demeurant pas contesté, que Mme A... résidait en France, à la date de la décision attaquée, depuis plus de quinze ans, qu'elle est mère d'une enfant née en France le 9 novembre 2017 et a obtenu en 2006 un diplôme d'université Langue, Littérature et Civilisation Française, Niveau 2 avec la mention bien, en 2007, un Master mention Administration des entreprises spécialité Management général puis un MBA " Change et Technology " en 2008, et est inscrite en formation doctorale. Il est tout aussi constant qu'ainsi que l'a relevé la commission du titre de séjour dans son avis du 30 juin 2014, favorable à la délivrance d'un titre de séjour, que Mme A... travaille régulièrement en tant qu'auxiliaire de vie et dispose de ressources suffisantes pour subvenir aux besoins de son foyer compte tenu du droit d'usage et d'habitation d'un logement à Paris, dont elle n'acquitte que les charges de copropriétés, qui lui a été conféré par acte notarié. Dans ces conditions, compte tenu de la durée et des conditions de son séjour en France, de son intégration ainsi que de sa situation familiale, Mme A... est fondée à soutenir que la décision refusant de lui délivrer un titre de séjour méconnaît les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation. Par suite, elle est fondée à en demander l'annulation ainsi que, par voie de conséquence, celle de la décision portant obligation de quitter le territoire français et de la décision fixant le pays de renvoi.

5. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête, que Mme A... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté attaqué du 22 mai 2019 du préfet de police.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

6. Compte tenu des motifs de l'annulation qu'il prononce, le présent arrêt implique nécessairement, en application des dispositions de l'article L. 911-1 du code de justice administrative, la délivrance à Mme A... d'un titre de séjour mention "vie privée et familiale". Il y a lieu d'enjoindre au préfet de police de procéder à cette délivrance dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt. Il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction de l'astreinte demandée.

Sur les frais liés à l'instance :

7. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 2008862/4-2 du 17 septembre 2020 du Tribunal administratif de Paris et l'arrêté du 22 mai 2019 du préfet de police sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de police de délivrer à Mme A... un titre de séjour portant la mention "vie privée et familiale" dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera à Mme A... la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... C... A..., au préfet de police et au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 12 octobre 2021, à laquelle siégeaient :

- M. Jardin, président de chambre,

- Mme Hamon, présidente assesseure,

- Mme Jurin, première conseillère,

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 3 novembre 2021.

La rapporteure,

P. HAMONLe président,

C. JARDIN

Le greffier,

C. MONGISLa République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 20PA03011 4


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 20PA03011
Date de la décision : 03/11/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03-01-02 Étrangers. - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière. - Légalité externe. - Motivation.


Composition du Tribunal
Président : M. JARDIN
Rapporteur ?: Mme Perrine HAMON
Rapporteur public ?: M. SEGRETAIN
Avocat(s) : KERIHUEL

Origine de la décision
Date de l'import : 09/11/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2021-11-03;20pa03011 ?
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