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05/10/2021 | FRANCE | N°19PA03968

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 7ème chambre, 05 octobre 2021, 19PA03968


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société anonyme (SA) La Gentilhommière a demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période comprise entre le 1er janvier 2011 et le 31 décembre 2013 et des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2011, 2012 et 2013, ainsi que des majorations correspondantes et de l'amende prévue par l'article 1759 du code général des imp

ts qui lui a été appliquée.

Par un jugement n° 1713144/1-3 du 9 octobre 2019, ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société anonyme (SA) La Gentilhommière a demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période comprise entre le 1er janvier 2011 et le 31 décembre 2013 et des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2011, 2012 et 2013, ainsi que des majorations correspondantes et de l'amende prévue par l'article 1759 du code général des impôts qui lui a été appliquée.

Par un jugement n° 1713144/1-3 du 9 octobre 2019, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 9 décembre 2019, la SA La Gentilhommière, représentée par Me Oliel, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1713144/1-3 du 9 octobre 2019 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) de prononcer la décharge de ces impositions et de cette amende ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat les dépens ainsi que le versement de la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la détermination du coefficient multiplicateur dit " solide/liquide " pour la reconstitution de son chiffre d'affaires est entachée d'une erreur de calcul ;

- la détermination du grammage de café par café servi est erronée et aboutit à des résultats disproportionnés qui vicient radicalement la méthode de reconstitution du chiffre d'affaires ;

- le taux de pertes et d'offerts retenu par le service n'est pas conforme à ses conditions réelles d'exploitation ;

- l'amende prévue par l'article 1759 du code général des impôts qui lui a été infligée est intervenue au cours de l'année de 2015 alors que l'exercice 2011 était prescrit, exercice au titre duquel les rappels de droits servent de base de calcul à l'amende.

Par un mémoire en défense, enregistré le 10 mars 2020, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Hamon,

- et les conclusions de M. Segretain, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. La SA La Gentilhommière, qui exploite une brasserie à Paris, a fait l'objet en 2014 d'une vérification de comptabilité sur la période du 1er janvier 2011 au 31 décembre 2013, étendue au 31 mai 2014 en ce qui concerne la taxe sur la valeur ajoutée (TVA), à l'issue de laquelle elle a été assujettie à des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés au titre des exercices clos entre 2011 et 2013, à des rappels de TVA au titre de la période comprise entre le 1er janvier 2011 et le 31 janvier 2013 ainsi qu'à l'amende prévue par l'article 1759 du code général des impôts. Elle fait appel du jugement par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge de ces impositions, en droits et pénalités, et de cette amende.

Sur la charge de la preuve :

2. Aux termes du deuxième alinéa de l'article L. 192 du livre des procédures fiscales : " (...) la charge de la preuve incombe au contribuable lorsque la comptabilité comporte de graves irrégularités et que l'imposition a été établie conformément à l'avis de la commission. La charge de la preuve des graves irrégularités invoquées par l'administration incombe, en tout état de cause, à cette dernière lorsque le litige ou la rectification est soumis au juge. ".

3. Il est constant que la comptabilité de la société n'était assortie d'aucune pièce justificative de recettes sur l'ensemble des exercices. Compte tenu des graves irrégularités ainsi relevées, et alors que les impositions contestées ont été établies conformément à l'avis de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires rendu le 13 juin 2016, il incombe à la requérante de démontrer que les impositions mises à sa charge procèdent d'une reconstitution viciée dans son principe ou sont exagérées.

Sur la reconstitution du chiffre d'affaires :

4. Pour reconstituer le chiffre d'affaires de la SA La Gentilhommière, le service a appliqué la méthode dite " des liquides " qui a consisté dans un premier temps à déterminer, en dépouillant les pièces de recettes de la société, que les catégories de boissons " bières " et " pause café " représentaient plus du tiers du total des ventes, puis dans un deuxième temps à retirer de la catégorie " pause-café " les solides et boissons non caféinées y étant incluses, pour déterminer que la part des recettes issues de ventes de bière et de café dans les recettes totales de la SA La Gentilhommière s'élevait respectivement à 18,09 % et à 11,67 %, soit 29,73 % des recettes totales, aboutissant à un ratio entre les ventes de ce panel de produits et les recettes totales de 3,36 %. Ce ratio a ensuite été appliqué au chiffre d'affaires reconstitué du panel constitué des bières et du café, lequel a été déterminé en valorisant les quantités achetées revendues à partir du prix unitaire moyen et de la répartition des ventes constatés, un abattement général de 10 % y étant appliqué pour tenir compte des pertes et des offerts.

5. En premier lieu, la requérante n'est pas fondée à soutenir que le service aurait, pour la détermination de ce ratio, fait une application incohérente de deux pourcentages de 16,31 % puis 11,67 % du total des ventes concernant le même produit " café ", dès lors qu'il résulte de l'instruction que seul le pourcentage de 11,67 %, résultant de la déduction des produits autres que le café vendus sous l'appellation " pause café ", a été appliqué.

6. En deuxième lieu, en se bornant en appel comme en première instance à relever que la catégorie " boissons fraîches " représente 12,94 % des ventes totales et aurait, dès lors, dû être retenue dans le panel de produits par préférence à la catégorie " café " qui en représente 11,67 %, la requérante n'établit pas que le panel retenu par l'administration, qui représente près du tiers du chiffre d'affaires, ne serait pas pertinent et que la méthode de reconstitution ainsi mise en œuvre serait radicalement viciée ou excessivement sommaire.

7. En troisième lieu, pas plus en appel qu'en première instance la société requérante n'établit que le volume de huit grammes par café servi, fixé par le service conformément à l'avis de la commission départementale des impôts, serait insuffisant, ni que le volume de neuf grammes correspond à ses conditions réelles d'exploitation, en se bornant à invoquer les constatations d'un huissier réalisées postérieurement aux années d'imposition en litige, ainsi que de la documentation de la société commercialisant les grains de café utilisés, laquelle recommande un dosage de sept grammes et mentionne la possibilité pour l'utilisateur de procéder au réglage de ce dosage.

8. Enfin la requérante reprend en appel le moyen tiré de ce que l'administration aurait mal évalué les pertes et les offerts, sans apporter d'élément de fait ou de droit nouveau de nature à remettre en cause l'appréciation des premiers juges. Il y a lieu, par suite, d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus à bon droit par le Tribunal.

Sur l'amende prévue par l'article 1759 du code général des impôts ;

9. Aux termes de l'article 117 du code général des impôts : " Au cas où la masse des revenus distribués excède le montant total des distributions tel qu'il résulte des déclarations de la personne morale visées à l'article 116, celle-ci est invitée à fournir à l'administration, dans un délai de trente jours, toutes indications complémentaires sur les bénéficiaires de l'excédent de distribution. / En cas de refus ou à défaut de réponse dans ce délai, les sommes correspondantes donnent lieu à l'application de la pénalité prévue à l'article 1759 ". L'article 1759 de ce même dispose : " Les sociétés et les autres personnes morales passibles de l'impôt sur les sociétés qui versent ou distribuent, directement ou par l'intermédiaire de tiers, des revenus à des personnes dont, contrairement aux dispositions des articles 117 et 240, elles ne révèlent pas l'identité, sont soumises à une amende égale à 100 % des sommes versées ou distribuées. (...) ".

10. La pénalité prévue à l'article 1759 précité du code général des impôts a pour fait générateur l'expiration du délai de trente jours imparti à la personne morale pour désigner les bénéficiaires de la distribution, en vertu de l'article 117 du code général des impôts. Il ne résulte ni de cet article 1759 ni d'aucune autre disposition, que la pénalité prévue à cet article doive être établie au titre d'une année déterminée. En application du 2ème alinéa de l'article L. 188 du livre des procédures fiscales, la prescription de la pénalité prévue à l'article 1759 du code général des impôts en matière de distributions occultes intervient à la fin de la quatrième année suivant celle au cours de laquelle l'infraction a été commise. En l'espèce, il est constant que le délai de réponse à la demande de l'administration de lui divulguer le nom des bénéficiaires des revenus réputés distribués a expiré le 21 janvier 2015, la circonstance que les revenus réputés distribués se rattachent à l'exercice clos en 2011 étant sans incidence. Par ailleurs l'amende n'était pas davantage prescrite lors de sa notification le 13 mars 2015. Dès lors le moyen tiré de ce que cette amende serait atteinte de prescription doit être écarté.

11. Il résulte de tout ce qui précède que la SA La Gentilhommière n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions présentées au titre des dépens ainsi que sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la SA La Gentilhommière est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SA La Gentilhommière et au ministre de l'action et des comptes publics.

Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Ile-de-France (division juridique est).

Délibéré après l'audience du 14 septembre 2021, à laquelle siégeaient :

- M. Jardin, président de chambre,

- Mme Hamon, présidente assesseure,

- Mme Jurin, première conseillère,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 5 octobre 2021.

La rapporteure,

P. HAMON

Le président,

C. JARDIN

La greffière,

C. BUOT

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la relance en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 19PA03968


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 19PA03968
Date de la décision : 05/10/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-01-03-02-02-01 Contributions et taxes. - Généralités. - Règles générales d'établissement de l'impôt. - Rectification (ou redressement). - Proposition de rectification (ou notification de redressement). - Motivation.


Composition du Tribunal
Président : M. JARDIN
Rapporteur ?: Mme Perrine HAMON
Rapporteur public ?: M. SEGRETAIN
Avocat(s) : WAN AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 12/10/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2021-10-05;19pa03968 ?
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