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21/07/2021 | FRANCE | N°18PA02925

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 4ème chambre, 21 juillet 2021, 18PA02925


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme H... C... a demandé au Tribunal administratif de Melun :

1°) d'annuler l'arrêté du 1er avril 2014 par lequel le maire de Saint-Maur-des-Fossés a décidé de la recruter du 2 avril au 1er octobre 2014 en qualité de rédacteur principal de 2ème classe non titulaire ;

2°) d'annuler l'arrêté du 2 octobre 2014 par lequel le maire de Saint-Maur-des-Fossés a décidé de la recruter du 2 octobre au 30 novembre 2014 en qualité de rédacteur principal de 2ème classe non titulaire ;

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°) d'annuler la décision du 3 octobre 2014 par laquelle le maire de Saint-Maur-des-Fossés a décidé ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme H... C... a demandé au Tribunal administratif de Melun :

1°) d'annuler l'arrêté du 1er avril 2014 par lequel le maire de Saint-Maur-des-Fossés a décidé de la recruter du 2 avril au 1er octobre 2014 en qualité de rédacteur principal de 2ème classe non titulaire ;

2°) d'annuler l'arrêté du 2 octobre 2014 par lequel le maire de Saint-Maur-des-Fossés a décidé de la recruter du 2 octobre au 30 novembre 2014 en qualité de rédacteur principal de 2ème classe non titulaire ;

3°) d'annuler la décision du 3 octobre 2014 par laquelle le maire de Saint-Maur-des-Fossés a décidé de ne pas renouveler son engagement au-delà du 1er novembre 2014 ;

4°) d'annuler la décision du 29 octobre 2014 par laquelle le maire de Saint-Maur-des-Fossés a décidé de ne pas renouveler son engagement au-delà du 1er décembre 2014 ;

5°) d'annuler la décision du 8 décembre 2014 par laquelle le maire de Saint-Maur-des-Fossés a rejeté le recours gracieux présenté le 27 novembre 2014.

Par un jugement n° 1500916 du 28 juin 2018, le Tribunal administratif de Melun a rejeté ses demandes.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés les 29 août 2018, 27 janvier 2020 et 27 mars 2020, Mme C..., représentée par Me B..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1500916 du 28 juin 2018 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande ;

2°) d'annuler l'arrêté du 1er avril 2014 par lequel le maire de Saint-Maur-des-Fossés a décidé de la recruter du 2 avril au 1er octobre 2014 en qualité de rédacteur principal de 2ème classe non titulaire ;

3°) d'annuler l'arrêté du 2 octobre 2014 par lequel le maire de Saint-Maur-des-Fossés a décidé de la recruter du 2 octobre au 30 novembre 2014 en qualité de rédacteur principal de 2ème classe non titulaire ;

4°) d'annuler la décision du 3 octobre 2014 par laquelle le maire de Saint-Maur-des-Fossés a décidé de ne pas renouveler son engagement au-delà du 1er novembre 2014 ;

5°) d'annuler la décision du 29 octobre 2014 par laquelle le maire de Saint-Maur-des-Fossés a décidé de ne pas renouveler son engagement au-delà du 1er décembre 2014 ;

6°) d'annuler la décision du 8 décembre 2014 par laquelle le maire de Saint-Maur-des-Fossés a rejeté le recours gracieux présenté le 27 novembre 2014 ;

7°) de mettre à la charge de la commune de Saint-Maur-des-Fossés le versement de la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement attaqué ne vise ni n'analyse les écritures des parties en méconnaissance de l'article R. 611-1 du code de justice administrative ;

- l'arrêté du 1er avril 2014, qui constitue une mesure de licenciement, est insuffisamment motivé en méconnaissance de la loi du 11 juillet 1979 et de l'article 42 du décret du 15 février 1988 ;

- l'arrêté du 1er avril 2014 a été pris à l'issue d'une procédure irrégulière en l'absence de communication de son dossier et d'entretien préalable prévu à l'article 42 du décret du 15 février 1988 ;

- en l'absence de preuve de la transmission de l'arrêté à la préfecture et de notification, elle doit être regardée comme ayant été maintenue en fonction après le 1er avril 2014 et avoir bénéficié d'un contrat conclu pour une durée d'un an, l'arrêté du 1er avril 2014 étant antidaté ;

- l'arrêté du 1er avril 2014 constitue une mesure de licenciement illégale ;

- l'arrêté du 1er avril 2014 procède au retrait illégal d'une décision créatrice de droits ;

- l'arrêté du 1er avril 2014 méconnaît le principe de non-rétroactivité ;

- l'arrêté du 1er avril 2014 est entaché d'erreur manifeste d'appréciation et n'est pas justifié par l'intérêt du service ;

- l'arrêté du 2 octobre 2014 méconnaît le principe de non-rétroactivité ;

- l'arrêté du 2 octobre 2014 procède au retrait illégal d'une décision créatrice de droits ;

- l'arrêté du 2 octobre 2014 constitue une mesure de licenciement illégale eu égard à son maintien en fonction pour une durée d'un an ;

- en l'absence de notification avant le 28 octobre 2014, elle doit être regardée comme ayant été maintenue en fonction après le 2 octobre 2014 et avoir bénéficié d'un contrat conclu pour une durée de six mois ;

- les décisions des 3 octobre, 29 octobre et 8 décembre 2014 ont été prises par une autorité incompétente ;

- les décisions des 3 octobre, 29 octobre et 8 décembre 2014 ne sont pas motivées ;

- les décisions des 3 octobre, 29 octobre et 8 décembre 2014 n'ont pas été précédées de la communication de son dossier ;

- le défaut de motivation et le défaut de consultation de son dossier méconnaissent le principe de non-discrimination garanti par le 1 de la clause 4 de la directive 1999/70/CE ;

- les décisions des 3 et 29 octobre 2014 sont illégales par voie de conséquence de l'illégalité de l'arrêté du 1er avril 2014 ;

- les décisions des 3 et 29 octobre 2014 portent atteinte aux conditions de recrutement initial du 2 avril au 1er avril 2015 résultant du courriel du 11 mars 2014 et de la prolongation tacite de la relation de travail ;

- les décisions des 3 octobre, 29 octobre et 8 décembre 2014 sont entachées d'erreur manifeste d'appréciation et ne sont pas justifiées par l'intérêt du service ;

- elle aurait dû être recrutée sur le fondement de l'article 3-3 de la loi du 26 janvier 1984 eu égard aux fonctions exercées.

Par des mémoires en défense et des pièces, enregistrés les 13 mai 2019, 26 février 2020 et 4 juin 2021, la commune de Saint-Maur-des-Fossés, représentée par Me J..., conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de Mme C... une somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens soulevés par Mme C... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la directive 1999/70/CE du Conseil du 28 juin 1999 ;

- le code général des collectivités locales ;

- la loi du 22 avril 1905 portant fixation du budget des dépenses et des recettes de l'exercice 1905 ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- le décret n° 87-1099 du 30 décembre 1987 ;

- le décret n° 88-145 du 15 février 1988 ;

- le décret n° 2012-924 du 30 juillet 2012 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme A..., première conseillère,

- les conclusions de M. Baronnet, rapporteur public,

- les observations de Me B..., en présence de Mme C....

- et les observations de Me Cochelard, avocat de la commune de Saint-Maur-des-Fossés.

Considérant ce qui suit :

1. Mme H... C... a été recrutée le 2 avril 2012 en qualité de rédacteur territorial principal non titulaire par la commune de Saint-Maur-des-Fossés (Val-de-Marne) et a été affectée au poste de responsable des médias et journaliste, pour une durée d'un an. Cet engagement a été renouvelé par un arrêté du 2 avril 2013, pour la même durée. Par un nouvel arrêté du 1er avril 2014, le maire de Saint-Maur-des-Fossés a procédé au renouvellement de cet engagement pour une durée de six mois, soit jusqu'au 1er octobre 2014. Par un arrêté du 2 octobre 2014, l'engagement de Mme C... a été renouvelé pour la période du 2 octobre au 30 novembre 2014. Par un courrier du 3 octobre 2014, Mme C... a été informée que son engagement prenait fin à son échéance, soit le 1er novembre 2014. La commune, dans un second courrier daté du 29 octobre 2014, a précisé à l'intéressée que, contrairement à ce qui lui avait annoncé dans le courrier du 3 octobre, son engagement ne serait pas renouvelé après le 30 novembre 2014 et non pas après le 31 octobre 2014. Le recours gracieux qu'elle a présenté auprès du maire de Saint-Maur-des-Fossés a été rejeté le 8 décembre 2014. Mme C... relève appel du jugement du Tribunal administratif de Melun du 28 juin 2018 qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions des 1er avril, 2 octobre, 3 octobre, 29 octobre et 8 décembre 2014.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Aux termes de l'article R. 741-2 du code de justice administrative : " La décision (...) contient le nom des parties, l'analyse des conclusions et mémoires ainsi que les visas des dispositions législatives ou réglementaires dont elle fait application. ".

3. Si Mme C... soutient que le jugement attaqué ne vise ni n'analyse l'ensemble des écritures des parties, il ressort des visas du jugement attaqué que le Tribunal administratif de Melun a analysé les conclusions et mémoires dont il a été saisi. Le jugement attaqué n'est, dès lors, pas entaché d'irrégularité.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne l'arrêté du 1er avril 2014 :

4. Les contrats passés par les collectivités et établissements publics territoriaux en vue de recruter des agents non-titulaires doivent, sauf disposition législative spéciale contraire, être conclus pour une durée déterminée et ne peuvent être renouvelés que par reconduction expresse. Le maintien en fonction à l'issue du contrat initial a pour effet de donner naissance à un nouveau contrat, conclu lui aussi pour une durée déterminée et dont la durée est soit celle prévue par les parties, soit, à défaut, celle qui était assignée au contrat initial.

5. Il ressort des pièces du dossier que le maire adjoint de la commune a pris un arrêté en date du 1er avril 2014 recrutant Mme C... du 2 avril au 1er octobre 2014 en qualité de rédacteur principal de 2ème classe. D'une part, Mme C... soutient que cet arrêté a été intentionnellement antidaté et n'a été pris qu'ultérieurement dans la mesure où il mentionne un retour du contrôle de légalité en date du 18 septembre 2014 et où le préfet n'a pas procédé au déféré de l'acte. Il ressort tant des pièces du dossier, et notamment de la copie écran versée par la commune, que de la mention apportée pour certifier le caractère exécutoire de l'acte que l'arrêté a été transmis au représentant de l'Etat le 2 avril 2014. Ni les circonstances alléguées, ni aucun autre élément ne sont de nature à établir que l'administration aurait antidaté l'arrêté du 1er avril 2014. D'autre part, nonobstant la circonstance que cet arrêté n'aurait pas un caractère exécutoire en l'absence de notification à l'intéressée en application de l'article L. 2131-1 du code général des collectivités territoriales, cet arrêté existe dès sa signature le 1er avril 2014 et a ainsi procédé à son recrutement. Dans ces conditions, Mme C... ne peut utilement soutenir qu'en l'absence d'arrêté entré en vigueur, elle a bénéficié à raison de son maintien en fonction d'un renouvellement tacite de son précédent engagement pour une durée d'un an, ni que l'arrêté du 1er avril 2014, qui met fin à son engagement le 1er octobre 2014, avant l'expiration de ce délai d'un an, révèle une décision de licenciement.

6. Ainsi qu'il a été dit au point 5, l'arrêté du 1er avril 2014, qui procède à son recrutement pour la période du 2 avril au 1er octobre 2014, ne constitue pas une mesure de licenciement. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation doit être écarté comme inopérant. Pour les mêmes motifs, les moyens tirés de l'absence de communication de son dossier et d'entretien préalable à son licenciement prévu à l'article 42 du décret du 15 février 1988 doivent être écartés.

7. Mme C... a été indirectement informée par voie électronique, le 11 mars 2014, par sa supérieure hiérarchique à la demande de la chargée de mission " recrutement et formation " à la direction des ressources humaines de la commune de Saint-Maur-des-Fossés, du renouvellement de son contrat en qualité de rédacteur territorial non titulaire pour une durée d'un an, du 2 avril 2014 au 1er avril 2015. D'une part, ce courriel, dont elle n'était pas directement le destinataire, ne constitue pas une décision créatrice de droits mais une information relative à l'intention qui était celle des services de la collectivité. D'autre part, il ressort des pièces du dossier, et notamment d'un courriel de la directrice générale adjointe des services du 7 mars 2014, que l'engagement de Mme C... devait être renouvelé pour une durée de six mois. Ni la déclaration préalable à l'embauche de l'URSSAF qui ne fait pas état de la durée de l'engagement, ni le tableau des congés annuels dont les droits de Mme C... sont calculés seulement jusqu'en octobre 2014, ni l'attestation de l'ancien maire en date du 11 mai 2016, selon laquelle il a donné des instructions en mars 2014 afin de renouveler l'engagement de l'intéressée pour une durée d'un an, qui ne révèle qu'une intention de ce dernier, ne suffisent à établir l'existence d'une décision renouvelant l'engagement de l'intéressée pour une durée d'un an. Par suite, Mme C... n'est pas fondée à soutenir que l'arrêté du 1er avril 2014, qui a procédé au renouvellement de son engagement pour une durée limitée à six mois, soit jusqu'au 1er octobre 2014, a procédé au retrait d'une décision créatrice de droits.

8. Mme C... doit être regardée comme demandant l'annulation de l'arrêté du 1er avril 2014 la recrutant en tant qu'il fixe une durée de six mois au lieu d'un an et met fin à l'engagement à l'issue de ce délai. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance du principe de non-rétroactivité en tant que l'arrêté du 1er avril 2014 est entré en vigueur avant sa notification en septembre 2014 est inopérant.

9. Un agent public qui a été recruté pour une durée déterminée ne bénéficie ni d'un droit au renouvellement de son engagement ni, à plus forte raison, d'un droit au maintien de ses conditions si l'administration envisage de procéder à son renouvellement. Toutefois, l'administration ne peut légalement décider, au terme de son engagement, de ne pas le renouveler ou de proposer à l'agent, sans son accord, un nouvel engagement substantiellement différent du précédent, que pour un motif tiré de l'intérêt du service. Un tel motif s'apprécie au regard des besoins du service ou de considérations tenant à la personne de l'agent.

10. Il ressort des pièces du dossier que l'engagement de Mme C... a été renouvelé, après la publication d'un avis de vacance d'emploi, afin de pallier l'impossibilité de recruter un agent titulaire. Dès lors, le maire de Saint-Maur-des-Fossés, en renouvelant l'engagement de Mme C... pour une durée de six mois et non pour douze mois, justifie d'un motif tiré de l'intérêt du service au regard des besoins de la collectivité et n'a pas entaché l'arrêté du 1er avril 2014 d'erreur manifeste d'appréciation.

En ce qui concerne l'arrêté du 2 octobre 2014 :

11. Mme C... doit être regardée comme demandant l'annulation de l'arrêté du 2 octobre 2014 la recrutant en tant qu'il fixe une durée de deux mois et met fin à l'engagement à l'issue de ce délai. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance du principe de non-rétroactivité en tant que l'arrêté du 2 octobre 2014 est entré en vigueur avant sa notification le 28 octobre 2014 est inopérant.

12. Pour les mêmes motifs que ceux mentionnés au point 7, Mme C... n'est pas fondée à soutenir que l'arrêté du 2 octobre 2014, qui a procédé au renouvellement de son contrat pour une durée limitée à deux mois, soit jusqu'au 30 novembre 2014, a procédé au retrait d'une décision créatrice de droits révélée par le courriel du 11 mars 2014.

13. D'une part, il résulte de ce qui a été dit au point 5 que Mme C... n'a pas bénéficié à raison de son maintien en fonction d'un renouvellement tacite de son précédent engagement pour une durée d'un an à compter du 2 avril 2014. D'autre part, nonobstant la circonstance que l'arrêté du 2 octobre 2014 ne lui a été notifié que le 28 octobre 2014, cet arrêté a, dès sa signature le 2 octobre 2014, procédé à son recrutement. Dans ces conditions, Mme C... ne peut utilement soutenir qu'en l'absence d'arrêté entré en vigueur, elle a bénéficié à raison de son maintien en fonction d'un renouvellement tacite de son précédent engagement pour une durée de six mois, ni que l'arrêté du 2 avril 2014, qui met fin à son engagement le 30 novembre 2014, révèle une décision de licenciement.

En ce qui concerne les décisions des 3 et 29 octobre 2014 et 8 décembre 2014 :

14. Par un arrêté n° 14P496 daté du 16 avril 2014, M. G... F..., député-maire de Saint-Maur-des-Fossés, a donné à Mme I... E..., maire-adjoint, délégation de fonction et de signature pour prendre des décisions et procéder à toutes les actions relevant de la compétence du maire et relatives aux ressources humaines. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence de la signataire des décisions doit être écarté.

15. Aux termes de l'article 65 de la loi du 22 avril 1905 portant fixation du budget des dépenses et des recettes de l'exercice 1905 : " Tous les fonctionnaires (...) ont droit à la communication personnelle et confidentielle de toutes les notes, feuilles signalétiques et tous autres documents composant leur dossier, soit avant d'être l'objet d'une mesure disciplinaire ou d'un déplacement d'office, soit avant d'être retardé dans leur avancement à l'ancienneté ".

16. Un agent dont l'engagement est arrivé à échéance n'a aucun droit au renouvellement de celui-ci. Il en résulte qu'alors même que la décision de ne pas renouveler cet engagement est fondée sur l'appréciation portée par l'autorité compétente sur l'aptitude professionnelle de l'agent et, de manière générale, sur sa manière de servir et se trouve ainsi prise en considération de la personne, elle n'est, sauf à revêtir le caractère d'une mesure disciplinaire, ni au nombre des mesures qui ne peuvent légalement intervenir sans que l'intéressé ait été mis à même de prendre connaissance de son dossier, ni au nombre de celles qui doivent être motivées en application des dispositions de la loi du 11 janvier 1979.

17. Le 1 de la clause n° 4 de l'accord-cadre du 18 mars 1999 sur le travail à durée déterminée, mis en œuvre par la directive 1999/70/CE du Conseil du 28 juin 1999, prévoit que : " Pour ce qui concerne les conditions d'emploi, les travailleurs à durée déterminée ne sont pas traités d'une manière moins favorable que les travailleurs à durée indéterminée comparables au seul motif qu'ils travaillent à durée déterminée, à moins qu'un traitement différent soit justifié par des raisons objectives ". Le principe de non-discrimination mentionné à la clause n° 4 de l'accord-cadre figurant en annexe à la directive 1999/70/CE du Conseil du 28 juin 1999 sur le travail à durée déterminée a pour seule portée de proscrire les différences de traitement opérées entre les travailleurs à durée déterminée et les travailleurs à durée indéterminée placés dans une situation comparable.

18. D'une part, à supposer même que les règles procédurales mettant fin aux fonctions d'un agent concernent les conditions d'emploi au sens de la directive, un travailleur à durée déterminée dont le contrat n'est pas renouvelé n'est pas dans une situation comparable à celle d'un travailleur à durée indéterminée dont il est mis fin aux fonctions en cours de contrat. Mme C... n'est, dès lors, pas fondée à soutenir que le défaut de motivation et de communication de son dossier préalablement au non-renouvellement de son contrat à durée déterminée méconnaît le principe de non-discrimination garanti par la directive 1999/70/CE.

19. D'autre part, il ne ressort pas des pièces du dossier que la décision de non-renouvellement de l'engagement de Mme C... ait été prise pour un motif disciplinaire. Par suite, les décisions contestées ne sont pas au nombre des décisions devant être motivées ou devant être prises après avoir mis l'intéressée en mesure de consulter son dossier administratif. Les moyens tirés du défaut de motivation et du défaut de consultation du dossier administratif doivent par conséquent être écartés.

20. Il résulte des motifs qui précèdent que Mme C... n'est pas fondée à invoquer, par la voie d'exception à l'encontre des décisions des 3 et 29 octobre 2014, l'illégalité de l'arrêté du 1er avril 2014.

21. Il résulte de ce qui a été dit au point 5 que Mme C... n'a pas bénéficié à raison de son maintien en fonction d'un renouvellement tacite de son précédent engagement pour une durée d'un an à compter du 2 avril 2014. Par suite, elle n'est pas fondée à soutenir qu'en mettant fin à ses fonctions à l'issue de son dernier engagement, les décisions des 3 et 29 octobre 2014 ont porté atteinte aux conditions de recrutement initiales d'une durée d'un an du 2 avril 2014 au 1er avril 2015.

22. Aux termes de l'article 3 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, dans sa rédaction applicable au litige : " Les collectivités et établissements mentionnés à l'article 2 peuvent recruter temporairement des agents contractuels sur des emplois non permanents pour faire face à un besoin lié à : / 1° Un accroissement temporaire d'activité, pour une durée maximale de douze mois, compte tenu, le cas échéant, du renouvellement du contrat, pendant une même période de dix-huit mois consécutifs ; (...) ". Aux termes de l'article 3-2 de la même loi : " Par dérogation au principe énoncé à l'article 3 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 précitée et pour les besoins de continuité du service, les emplois permanents des collectivités et établissements mentionnés à l'article 2 de la présente loi peuvent être occupés par des agents contractuels pour faire face à une vacance temporaire d'emploi dans l'attente du recrutement d'un fonctionnaire. / Le contrat est conclu pour une durée déterminée qui ne peut excéder un an. Il ne peut l'être que lorsque la communication requise à l'article 41 a été effectuée. / Sa durée peut être prolongée, dans la limite d'une durée totale de deux ans, lorsque, au terme de la durée fixée au deuxième alinéa du présent article, la procédure de recrutement pour pourvoir l'emploi par un fonctionnaire n'a pu aboutir. ". Aux termes de l'article 3-3 de la même loi, dans sa rédaction applicable au litige : " Par dérogation au principe énoncé à l'article 3 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 précitée et sous réserve de l'article 34 de la présente loi, des emplois permanents peuvent être occupés de manière permanente par des agents contractuels dans les cas suivants : (...) / 2° Pour les emplois du niveau de la catégorie A lorsque les besoins des services ou la nature des fonctions le justifient et sous réserve qu'aucun fonctionnaire n'ait pu être recruté dans les conditions prévues par la présente loi ; (...) / Les agents ainsi recrutés sont engagés par contrat à durée déterminée d'une durée maximale de trois ans. Ces contrats sont renouvelables par reconduction expresse, dans la limite d'une durée maximale de six ans. / Si, à l'issue de cette durée, ces contrats sont reconduits, ils ne peuvent l'être que par décision expresse et pour une durée indéterminée. ".

23. Aux termes de l'article 3 du décret du 30 juillet 2012 portant statut particulier du cadre d'emplois des rédacteurs territoriaux : " I. - Les rédacteurs territoriaux sont chargés de fonctions administratives d'application. (...) Ils contribuent à l'élaboration et à la réalisation des actions de communication, d'animation et de développement économique, social, culturel et sportif de la collectivité. / Les rédacteurs peuvent se voir confier des fonctions d'encadrement des agents d'exécution. (...) / II. - Les rédacteurs principaux de 2e classe et les rédacteurs principaux de 1re classe ont vocation à occuper les emplois qui, relevant des domaines d'activité mentionnés au I, correspondent à un niveau d'expertise acquis par la formation initiale, par l'expérience professionnelle ou par la formation professionnelle tout au long de la vie. / Ils peuvent à ce titre réaliser certaines tâches complexes de gestion administrative, budgétaire et comptable, être chargés de l'analyse, du suivi ou du contrôle de dispositifs ou assurer la coordination de projets. / Ils peuvent également se voir confier la coordination d'une ou de plusieurs équipes, et la gestion ou l'animation d'un ou de plusieurs services. ". En application de l'article 2 du décret du 30 décembre 1987 portant statut particulier du cadre d'emplois des attachés territoriaux, les attachés territoriaux peuvent être chargés des actions de communication interne et externe de la collectivité.

24. Mme C... a été recrutée en qualité de rédacteur principal non titulaire, par un arrêté du 30 mars 2012, par le maire de Saint-Maur-des-Fossés sur le fondement de l'article 3 alinéa 1 de la loi du 26 janvier 1984 pour la période courant du 2 avril 2012 au 1er avril 2013. Toutefois il est constant que la collectivité a entendu se fonder sur l'article 3-2 de la loi du 26 janvier 1984 compte tenu de l'existence d'une vacance d'emploi et de l'impossibilité de recruter un agent titulaire, et non sur le remplacement momentané d'un fonctionnaire autorisé à exercer ses fonctions à temps partiel ou même un remplacement pour faire face à un accroissement temporaire d'activité, pour une durée maximale de douze mois, compte-tenu, le cas échéant, du renouvellement du contrat, pendant une même période de dix-huit mois consécutifs. Les arrêtés des 2 avril 2013, 1er avril 2014 et 2 octobre 2014 ont été pris sur le fondement des dispositions de l'article 3-2 de la loi du 26 janvier 1984, dans sa rédaction issue de la loi n° 2012-347 du 12 mars 2012, afin de pourvoir à la vacance d'emploi compte tenu de l'impossibilité de recruter un agent titulaire. Il ressort des pièces du dossier que si Mme C... exerçait les fonctions d'éditorialiste du site internet municipal des ateliers d'arts de Saint-Maur, qu'elle assurait la rédaction et la mise en page de la newsletter mensuelle, du magazine municipal mensuel Saint-Maur infos et qu'elle a créé la rubrique web reportage sur le site internet de la ville, elle doit être regardée comme ayant contribué à l'élaboration et à la réalisation des actions de communication de la collectivité sans assurer des missions de chargés des actions de communication au sens du décret du 30 décembre 1987. La seule circonstance qu'en mars 2016, un poste de chargé de communication digitale a été pourvu par un attaché territorial de catégorie A ne suffit pas à établir que l'emploi qu'elle a occupé de mars 2012 à octobre 2014 relevait également de la catégorie A. Par suite, Mme C... n'est pas fondée à soutenir que les actes d'engagement dont elle a bénéficié devaient être regardés comme pris sur le fondement de l'article 3-3 de la loi du 26 janvier 1984.

25. Il est constant que les actes d'engagement de Mme C... intervenus sur le fondement de l'article 3-2 de la loi du 26 janvier 1984 excédaient la durée totale de deux ans. D'une part, Mme C... n'est pas fondée à soutenir que l'administration était tenue de procéder à la régularisation de son contrat dès lors que son engagement prenait fin le 30 novembre 2014. D'autre part, l'administration justifie d'un motif tiré de l'intérêt du service à ne pas maintenir l'intéressée dans une situation administrative irrégulière en ne renouvelant pas son engagement sur le fondement de l'article 3-2 de la loi du 26 janvier 1984, en dépit de la vacance d'emploi. Par suite, les décisions contestées ne sont entachées ni d'erreur de droit, ni d'erreur manifeste d'appréciation.

26. Il résulte de tout ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.

Sur les frais liés au litige :

27. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la commune de Saint-Maur-des-Fossés, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que Mme C... demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme C... le versement de la somme que la commune de Saint-Maur-des-Fossés demande sur le fondement des mêmes dispositions.

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la commune de Saint-Maur-des-Fossés présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme H... C... et à la commune de Saint-Maur-des-Fossés.

Délibéré après l'audience du 18 juin 2021, à laquelle siégeaient :

- Mme D..., présidente de chambre,

- Mme Julliard, présidente assesseure,

- Mme A..., première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 21 juillet 2021.

La rapporteure,

A-S A...La présidente,

M. D...

La greffière,

S. GASPARLa République mande et ordonne au préfet du Val-de-Marne en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 18PA02925


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 18PA02925
Date de la décision : 21/07/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-12-03-02 Fonctionnaires et agents publics. - Agents contractuels et temporaires. - Fin du contrat. - Refus de renouvellement.


Composition du Tribunal
Président : Mme HEERS
Rapporteur ?: Mme Anne-Sophie MACH
Rapporteur public ?: M. BARONNET
Avocat(s) : SCP ARVIS et KOMLY-NALLIER

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2021-07-21;18pa02925 ?
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