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08/07/2021 | FRANCE | N°20PA03366

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 5ème chambre, 08 juillet 2021, 20PA03366


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... B... a demandé au Tribunal administratif de Melun d'annuler la décision du 13 octobre 2015 par laquelle le préfet de Seine-et-Marne a refusé de lui délivrer un titre de séjour et d'enjoindre au préfet de Seine-et-Marne de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ", assortie d'une astreinte de 150 euros par jour de retard à l'expiration du délai de quinze jours suivant la notification du jugement à intervenir.

Par un jugement n° 1602517 d

u 8 décembre 2017, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.

Par un...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... B... a demandé au Tribunal administratif de Melun d'annuler la décision du 13 octobre 2015 par laquelle le préfet de Seine-et-Marne a refusé de lui délivrer un titre de séjour et d'enjoindre au préfet de Seine-et-Marne de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ", assortie d'une astreinte de 150 euros par jour de retard à l'expiration du délai de quinze jours suivant la notification du jugement à intervenir.

Par un jugement n° 1602517 du 8 décembre 2017, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.

Par une ordonnance n° 18PA02349 du 9 janvier 2019, le premier vice-président de la Cour administrative d'appel de Paris a rejeté la requête d'appel présentée par Mme B....

Par une décision n° 430515 du 9 novembre 2020, le Conseil d'État statuant au contentieux, saisi d'un pourvoi de Mme B..., a annulé l'ordonnance du 9 janvier 2019 et renvoyé l'affaire à la Cour, où elle a été enregistrée sous le numéro 20PA03366.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 13 juillet 2018, Mme B..., représentée par Me D..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1602517 du 8 décembre 2017 du Tribunal administratif de Melun rejetant sa demande d'annulation de la décision du 13 octobre 2015 par laquelle le préfet de Seine-et Marne a refusé de lui délivrer un titre de séjour ;

2°) d'annuler la décision du préfet de Seine-et-Marne du 13 octobre 2015 refusant de lui délivrer un titre de séjour ;

3°) d'enjoindre au préfet de Seine-et-Marne de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai de quinze jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 150 euros par jour de retard ou, à défaut, de réexaminer sa situation et de lui délivrer dans l'attente une autorisation provisoire de séjour, dans les mêmes conditions de délais et d'astreinte.

4°) de mettre à la charge de l'État une somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative contre renonciation au bénéfice de l'aide juridictionnelle.

Elle soutient que :

- la décision est insuffisamment motivée et entachée d'un défaut d'examen sérieux de sa situation personnelle ;

- elle est entachée d'un vice de procédure en l'absence de saisine du médecin de l'agence régionale de santé en méconnaissance de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît l'article L. 313-11 11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle méconnaît les articles L. 313-11 7° et L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Le préfet de Seine-et-Marne, auquel la requête a été transmise, n'a pas produit de mémoire en défense.

Mme B... a produit un mémoire qui a été enregistré le 23 juin 2021, soit après la clôture automatique d'instruction intervenue le dimanche 20 juin 2021 à 24 heures.

Par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal judiciaire de Paris en date du 6 avril 2018, confirmée le 28 mai 2018, le bénéfice de l'aide juridictionnelle a été refusée à Mme B....

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme E... ;

- et les observations de Mme Lescaut, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Mme A... B..., de nationalité cambodgienne, est entrée en France le 19 mai 2014 sous couvert d'un visa Schengen de court séjour d'une durée de validité de 90 jours. Elle s'est maintenue sur le territoire français irrégulièrement après expiration de la validité de son visa et a déposé, le 25 août 2014, une demande d'admission au séjour, sur le fondement des articles L. 313-11, 11° et L. 311-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, en faisant valoir son état de santé et sa qualité d'accompagnante de sa fille malade. Par une première décision du 29 décembre 2014, le préfet de Seine-et-Marne a rejeté cette demande. Le 16 avril 2015, Mme B... a sollicité la régularisation de sa situation administrative en France sur le fondement des articles L. 313-11 7° et L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Cette demande a été rejetée par le préfet de Seine-et-Marne par une décision du 13 octobre 2015. Mme B... a demandé au Tribunal administratif de Melun d'annuler cette décision du 13 octobre 2015. Par un jugement du 8 décembre 2017, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande. Mme B... a demandé à la Cour d'annuler ce jugement. Par une ordonnance du 9 janvier 2019, le premier vice-président de la Cour administrative d'appel de Paris a rejeté cette requête. Par une décision du 9 novembre 2020, le Conseil d'État, saisi par Mme B..., a annulé cette ordonnance et renvoyé l'affaire à la Cour.

2. Aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa version alors en vigueur : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 (...) peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7 (...). ".

3. Il ressort des pièces du dossier que Mme B..., née le 3 janvier 1930 à Phnom Penh, est venue en France, alors qu'elle était âgée de 84 ans, dans le but de se soigner et de rejoindre sa fille, Mme F... C..., née en 1960, de nationalité française, reconnue handicapée par la maison départementale des personnes handicapées de Seine-et-Marne et atteinte d'un cancer du foie. Mme B... est veuve et ses trois enfants ont quitté le Cambodge pour s'installer en France, en Australie et en Thaïlande. Elle n'a plus aucun membre de sa famille proche dans son pays d'origine et elle est à la charge de sa fille, de nationalité française. La requérante était par ailleurs soignée en France pour une tuberculose pulmonaire à la date de la décision de refus de séjour attaquée. Dans ces conditions, l'admission au séjour de Mme B... répond à des considérations humanitaires au sens de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, la décision du 13 octobre 2015 du préfet de Seine-et-Marne rejetant sa demande d'admission au séjour doit être annulée.

4. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête que Mme B... est fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement du 8 décembre 2017 le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

5. En raison du motif qui la fonde, l'annulation de la décision attaquée implique nécessairement, compte tenu de l'absence de changements de circonstances de droit ou de fait y faisant obstacle, qu'une carte de séjour portant la mention " vie privée et familiale " soit délivrée à la requérante sur le fondement de l'article L. 911-1 du code de justice administrative. Il y a lieu d'enjoindre au préfet de Seine-et-Marne de délivrer cette carte de séjour à Mme B... dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt.

Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'État une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par Mme B... et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1602517 en date du 8 décembre 2017 du Tribunal administratif de Melun est annulé.

Article 2 : La décision du 13 octobre 2015 du préfet de Seine-et-Marne est annulée.

Article 3 : Il est enjoint au préfet de Seine-et-Marne de délivrer une carte de séjour portant la mention " vie privée et familiale " à Mme B... dans le délai d'un mois courant à compter de la notification du présent arrêt.

Article 4 : L'État versera à Mme B... la somme de 2 000 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée, pour information, au préfet de Seine-et-Marne.

Délibéré après l'audience du 24 juin 2021, à laquelle siégeaient :

- M. Formery, président de chambre,

- M. Platillero, président assesseur,

- Mme E..., premier conseiller,

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 8 juillet 2021.

Le rapporteur,

I. E...Le président,

S.-L. FORMERY

La greffière,

F. DUBUY-THIAM

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N°20PA03366


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 20PA03366
Date de la décision : 08/07/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335 Étrangers.

Étrangers - Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. FORMERY
Rapporteur ?: Mme Isabelle MARION
Rapporteur public ?: Mme LESCAUT
Avocat(s) : SANJABI

Origine de la décision
Date de l'import : 27/07/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2021-07-08;20pa03366 ?
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