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08/07/2021 | FRANCE | N°20PA01905

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 5ème chambre, 08 juillet 2021, 20PA01905


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 17 janvier 2020 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 2004172 du 25 juin 2020, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 24 juillet 2020 et 19

juin 2021, M. E..., représenté par Me A..., doit être regardé comme demandant à la Cour :

1°) ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 17 janvier 2020 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 2004172 du 25 juin 2020, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 24 juillet 2020 et 19 juin 2021, M. E..., représenté par Me A..., doit être regardé comme demandant à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2004172 du 25 juin 2020 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du préfet de police du 17 janvier 2020 ;

3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " ou, à défaut, " salarié ", dès la notification du présent arrêt à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

M. E... soutient que :

S'agissant des moyens communs à l'ensemble des décisions :

- l'arrêté contesté est insuffisamment motivé ;

- il est entaché d'un défaut d'examen de sa situation personnelle.

S'agissant de la décision portant refus de titre de séjour :

- elle a été prise en méconnaissance des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le préfet de police a commis une erreur de droit en examinant sa situation au regard des dispositions de l'article L. 313-10 du même code et non de celles de l'article L. 313-14 de ce code ;

- elle a été prise en méconnaissance des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

S'agissant de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- elle a été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

S'agissant de la décision portant fixation du pays de renvoi :

- elle est illégale en raison de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français.

Par un mémoire en défense enregistré le 11 décembre 2020, le préfet de police conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. E... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme B... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. E..., ressortissant ivoirien né le 31 décembre 1982, est entré sur le territoire français le 5 octobre 2012 selon ses propres déclarations, et a sollicité l'admission exceptionnelle au séjour en qualité de salarié sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 17 janvier 2020, le préfet de police a refusé de lui délivrer le titre de séjour sollicité, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office. M. E... fait appel du jugement du 25 juin 2020 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

S'agissant des moyens communs à l'ensemble des décisions :

2. L'arrêté contesté comporte les mentions des textes applicables et vise notamment les articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il mentionne également les éléments de fait pertinents relatifs à la situation de M. E... et ayant fondé celui-ci. L'arrêté contesté relève que M. E... est entré sur le territoire français le 5 octobre 2012 selon ses déclarations, et a sollicité son admission au séjour en qualité de salarié sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il mentionne que M. E... a produit à l'appui de sa demande de titre de séjour un contrat de travail ainsi qu'un Cerfa de demande d'autorisation de travail en vue de conclure un contrat de travail avec la société " Siam Service Propreté " en qualité d'agent d'entretien. Il indique que ni cette circonstance, ni aucun autre élément relatif à la situation personnelle de l'intéressé ne permettent de le regarder comme justifiant d'un motif exceptionnel au sens des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ou de considérations humanitaires de nature à justifier son admission exceptionnelle au séjour. L'arrêté contesté expose en outre des éléments suffisants sur la situation personnelle et familiale du requérant. Il relève que M. E... est célibataire, sans charge de famille en France, qu'il n'est pas dépourvu d'attaches familiales à l'étranger, où réside son frère, que la circonstance que ses deux soeurs résident sur le territoire français ne lui ouvre aucun droit au séjour et que, par ailleurs, il n'établit pas être exposé à des traitements inhumains ou dégradants en cas de retour dans son pays d'origine. L'arrêté contesté porte également l'appréciation selon laquelle, compte tenu des circonstances propres au cas d'espèce, il n'est pas porté une atteinte disproportionnée au droit de l'intéressé à sa vie privée et familiale. Il suit de là que le moyen tiré de l'insuffisance de motivation doit être écarté comme manquant en fait.

3. En second lieu, il résulte de ce qui a été dit au point 2 que l'arrêté contesté n'est pas entaché de défaut d'examen de la situation personnelle de M. E....

S'agissant de la décision portant refus de titre de séjour :

4. En premier lieu, aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 313-2. (...) ".

5. M. E... soutient qu'il est présent en France depuis plus de sept années et est intégré professionnellement. Au soutien de ses allégations il produit notamment une demande d'autorisation de travail de la société " Siam Service Propreté " du 28 novembre 2018, un contrat de travail à durée indéterminée conclu avec cette même société le 1er décembre 2018 en qualité d'agent d'entretien à temps plein et les bulletins de paie correspondant à cet emploi du mois de décembre 2018 au mois de décembre 2019 ainsi que des bulletins de paie du mois de janvier 2018 au mois de novembre 2018 pour un emploi à temps partiel au sein de la même société au nom de M. C... E.... La société " Siam Service Propreté " a indiqué par une attestation de concordance que M. C... E... et le requérant sont la même personne et que par conséquent il a commencé à travailler pour elle dès le mois de janvier 2018. M. E... fait également valoir qu'il a validé le premier semestre de master I " civilisations, cultures et sociétés " du parcours " Méditerranée, Maghreb, Europe " de l'Université Paris 8. Toutefois, ces éléments ne constituent pas, eu égard notamment à la nature de son expérience, de ses qualifications professionnelles, des diplômes dont il se prévaut et des caractéristiques de l'emploi concerné, des considérations humanitaires ou des motifs exceptionnels ouvrant droit à l'admission exceptionnelle au séjour. Ainsi, c'est sans commettre d'erreur de droit que le préfet de police a pu opposer un refus à la demande de titre de séjour présentée par M. E....

6. En deuxième lieu, il ressort des termes mêmes de l'arrêté contesté que le préfet de police a examiné la situation de M. E... au regard des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et non des dispositions de l'article L. 313-10 de ce code. Dès lors, le moyen tiré de ce que le préfet de police aurait commis une erreur de droit en examinant sa situation sur un fondement erroné ne peut qu'être écarté.

7. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...) ".

8. Pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 5 et eu égard à la circonstance que M. E... est célibataire et sans charges de famille et ne justifie pas être dépourvu d'attaches familiales en Côte d'ivoire où réside son frère, le requérant n'établit pas qu'il entretient des liens personnels et familiaux avec la France tels que le refus de l'autoriser à séjourner porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus de délivrance d'un titre de séjour. Dès lors, le requérant ne remplit les conditions posées par le 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile pour bénéficier de plein droit d'un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ".

9. En quatrième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

10. M. E... soutient qu'il réside en France depuis plus de sept années et qu'il est parfaitement intégré dans la société française. Il fait valoir que ses deux soeurs vivent en situation régulière sur le territoire français, où se trouve également son cousin, et où il a tissé des liens avec ses amis, ses collègues, et ses camarades de promotion. Toutefois, ces éléments, à les supposer établis, sont insuffisants pour considérer que l'intéressé a fixé le centre de ses attaches privées en France, alors qu'il ressort des pièces du dossier que M. E... est célibataire, sans charge de famille en France, et que son petit frère réside en Côte d'Ivoire, où il a lui-même vécu au moins jusqu'à l'âge de vingt-neuf ans. Dans ces conditions, M. E... n'est pas fondé à soutenir que l'arrêté contesté a porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.

11. En dernier lieu, M. E... ne peut utilement se prévaloir de la circulaire n° NOR INTK1229185C du 28 novembre 2012, qui se borne à énoncer des orientations générales que le ministre de l'intérieur a pu adresser aux préfets pour les éclairer dans la mise en oeuvre de leur pouvoir de régularisation, sans les priver de leur pouvoir d'appréciation, et dont les dispositions sont dépourvues de tout caractère impératif et ne constituent pas des lignes directrices.

S'agissant de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

12. Pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 10, la décision portant obligation de quitter le territoire français n'a pas été prise en méconnaissance de son droit au respect de sa vie privée et familiale que M. E... tient des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

S'agissant de la décision portant fixation du pays de renvoi :

13. La décision portant obligation de quitter le territoire français n'étant pas entachée de l'illégalité alléguée, le moyen tiré de l'exception d'illégalité de cette décision, invoqué au soutien des conclusions en annulation dirigées contre la décision portant fixation du pays de renvoi, ne peut qu'être écarté.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

14. Le présent arrêt n'impliquant aucune mesure d'exécution, les conclusions à fin d'injonction sous astreinte présentées par M. E... doivent être rejetées.

Sur les conclusions relatives aux frais de l'instance :

15. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'État, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme demandée par M. E... au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. E... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... E... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 24 juin 2021, à laquelle siégeaient :

- M. Formery, président de chambre,

- Mme B..., premier conseiller,

- M. Sibilli, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 8 juillet 2021.

Le rapporteur,

I. B...Le président,

S.-L. FORMERYLa greffière,

C. DABERT

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

[DC1]Il manque le code de publication.

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N° 20PA01905


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 20PA01905
Date de la décision : 08/07/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. FORMERY
Rapporteur ?: Mme Isabelle MARION
Rapporteur public ?: Mme LESCAUT
Avocat(s) : SAMBA

Origine de la décision
Date de l'import : 27/07/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2021-07-08;20pa01905 ?
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