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07/07/2021 | FRANCE | N°19PA03429

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2ème chambre, 07 juillet 2021, 19PA03429


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Canal + International a demandé au Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie de prononcer la décharge de la contribution calédonienne de solidarité déduite des dividendes qui lui ont été versés en 2016 par la société Canal + Calédonie pour un montant de 82 500 000 francs CFP.

Par un jugement n° 1800286 du 30 août 2019, le Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie a prononcé la décharge sollicitée.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire e

nregistrés les 30 octobre 2019 et 3 mars 2020, le gouvernement de la Nouvelle-Calédonie, représenté par...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Canal + International a demandé au Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie de prononcer la décharge de la contribution calédonienne de solidarité déduite des dividendes qui lui ont été versés en 2016 par la société Canal + Calédonie pour un montant de 82 500 000 francs CFP.

Par un jugement n° 1800286 du 30 août 2019, le Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie a prononcé la décharge sollicitée.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 30 octobre 2019 et 3 mars 2020, le gouvernement de la Nouvelle-Calédonie, représenté par la Selarl de Greslan-Lentignac, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 30 août 2019 du Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie ;

2°) de rejeter la demande présentée par la société Canal + International devant le tribunal ;

3°) de mettre à la charge de cette société la somme de 500 000 francs CFP sur le fondement de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la contribution calédonienne de solidarité n'entre pas dans le champ d'application de la convention fiscale calédonienne ;

- elle ne peut être concernée par les règles de plafonnement prévues par cette convention ;

- il est possible de déroger à la convention fiscale franco-calédonienne ;

- il résulte des travaux préparatoires à la loi instituant la contribution calédonienne de solidarité que tel était effectivement l'intention du législateur néo-calédonien.

Par un mémoire en défense enregistré le 3 février 2020, la société Canal + International, représentée par Me Richard Heurtier, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens invoqués par le gouvernement de la Nouvelle-Calédonie ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 31 mai 2021, la clôture d'instruction a été fixée au 15 juin 2021.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu la décision du Conseil d'Etat n°s 433915, 433916, 433917, 442217, 442221 du

5 mai 2021.

Vu :

- la loi organique n° 99-209 et la loi n° 99-210 du 19 mars 1999, relatives à la Nouvelle-Calédonie ;

- la loi n° 83-676 du 26 juillet 1983 et la convention fiscale entre le gouvernement de la République française et le conseil de gouvernement de la Nouvelle-Calédonie et dépendances en vue d'éviter les doubles impositions et de prévenir l'évasion fiscale, signée à Nouméa le 31 mars 1983 et à Paris le 5 mai 1983 ;

- la loi du pays n° 2014-20 du 31 décembre 2014 ;

- le code des impôts de la Nouvelle-Calédonie ;

- le code de justice administrative dans sa version applicable en Nouvelle-Calédonie.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Bonneau-Mathelot,

- et les conclusions de Mme Jimenez, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. La société Canal + International a été assujettie à la cotisation calédonienne de solidarité (CCS) à raison des dividendes qui lui ont été distribués en 2016 par la Sas Canal + Calédonie. Par le jugement susvisé du 30 août 2019, dont le gouvernement de la Nouvelle-Calédonie relève appel, le Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie a déchargé la société Canal + International de cette imposition.

2. L'article 2 de la convention fiscale entre le gouvernement de la République française et le conseil de gouvernement de la Nouvelle-Calédonie et dépendances en vue d'éviter les doubles impositions et de prévenir l'évasion fiscale, signée à Nouméa le 31 mars 1983 et à Paris le 5 mai 1983, approuvée par la loi du 26 juillet 1983, stipule que : " 1. La présente convention s'applique aux impôts sur le revenu et aux droits d'enregistrement perçus pour le compte d'un territoire quel que soit le système de perception. 2. Les impôts actuels auxquels s'applique la Convention sont : / (...) ; / b) En ce qui concerne le territoire de la Nouvelle-Calédonie et Dépendances : / i) l'impôt sur le revenu ; / ii) l'impôt sur les sociétés ; / iii) l'impôt sur les bénéfices industriels et commerciaux des entreprises dont les activités relèvent de la métallurgie et des minerais ; / iv) l'impôt sur les bénéfices industriels et commerciaux des entreprises productrices et exportatrices de minerai de nickel ; / v) l'impôt sur le revenu des valeurs mobilières ; / vi) l'impôt sur le revenu des créances, dépôts et cautionnements ; / vii) les droits d'enregistrement et la taxe hypothécaire. / 3. La convention s'applique aussi aux impôts de nature identique ou analogue à ceux qui sont visés au paragraphe 4 [lire " paragraphe 2 "] qui seraient établis après la date de signature de la Convention et qui s'ajouteraient aux impôts actuels ou qui les remplaceraient. / (...) ". Aux termes du 2 de l'article 9 de cette même convention fiscale : " 1. Les dividendes payés par une société qui est un résident d'un territoire à un résident de l'autre territoire sont imposables dans cet autre territoire. / 2. Toutefois, ces dividendes sont aussi imposables dans le territoire dont la société qui paie les dividendes est un résident, et selon la législation de ce territoire, mais si la personne qui reçoit les dividendes en est le bénéficiaire effectif, l'impôt ainsi établi ne peut excéder : / a) 5 p. cent du montant brut des dividendes si le bénéficiaire effectif est une société (autre qu'une société de personnes) ; / (...) ".

3. L'article 12 de la " loi du pays " du 31 décembre 2014 instituant une contribution calédonienne de solidarité, dans sa rédaction issue de la " loi du pays " du 31 décembre 2015 portant diverses dispositions d'ordre fiscal, dispose que : " Les personnes physiques et morales relevant de l'impôt sur le revenu des valeurs mobilières prévu aux articles 528 et suivants du code des impôts sont assujetties à une contribution sur les produits des valeurs mobilières ". Aux termes de l'article 13 de la même " loi du pays " : " Les produits de valeurs mobilières mentionnés à l'article 12 s'entendent des produits des valeurs mobilières définis aux articles 529 et 550 à Lp. 553 bis du code des impôts ". Aux termes de son article 14 : " La contribution sur les produits de valeurs mobilières est assise sur le montant retenu pour l'établissement de l'impôt sur le revenu des valeurs mobilières. / Les produits de valeurs mobilières exonérés de l'impôt sur le revenu de valeurs mobilières en application des dispositions de l'article Lp. 536 du code des impôts ne sont pas soumis à la contribution ". Aux termes de son article 15 : " La contribution portant sur les produits de valeurs mobilières est établie, contrôlée et recouvrée selon les mêmes règles et sous les mêmes sûretés, privilèges et sanctions que l'impôt sur le revenu des valeurs mobilières. Elle est notamment liquidée sur la déclaration prévue à l'article Lp. 544 du code des impôts et avancée par les sociétés distributrices des produits de valeurs mobilières ". Aux termes enfin de son article 24 : " Le montant des contributions mentionnées aux articles 1er à 23 est déterminé en appliquant aux assiettes définies aux articles 2, 4, 10, 14, 18 et 22 un taux de référence fixé par délibération du congrès ".

4. Il résulte des dispositions, citées au point 3, des articles 13 et 14 de la " loi du pays " du 31 décembre 2014 que la contribution calédonienne de solidarité sur les produits des valeurs mobilières, qui constitue une imposition autonome et distincte des quatre autres contributions instaurées par cette " loi du pays ", a la même assiette que l'impôt sur le revenu des valeurs mobilières. Elle présente, par suite, un caractère analogue à l'impôt sur le revenu des valeurs mobilières. Par ailleurs, aucune disposition de la " loi du pays " du 31 décembre 2014 n'exclut la contribution calédonienne de solidarité sur les produits des valeurs mobilières du champ d'application du mécanisme de plafonnement fixé par le a) du paragraphe 2 de l'article 9 de la convention fiscale entre le gouvernement de la République française et le conseil de gouvernement de la Nouvelle-Calédonie et dépendances des 31 mars et 5 mai 1983. Il s'ensuit qu'en adoptant les dispositions de cette " loi du pays ", le législateur de pays n'a, en tout état de cause, pas dérogé à la convention fiscale. Dès lors, la " loi du pays " du 31 décembre 2014 n'avait ni pour objet ni pour effet d'exclure la contribution calédonienne de solidarité du mécanisme de plafonnement prévu à l'article 9 de la convention fiscale.

5. Il résulte de tout ce qui précède que le gouvernement de la Nouvelle-Calédonie n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie a déchargé la société Canal + International de la contribution calédonienne de solidarité à laquelle elle a été assujettie à raison des dividendes qui lui ont été distribués en 2016 par la Sas Canal + Calédonie. Il y a lieu, par voie de conséquence, de rejeter sa requête en toutes ses conclusions. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie une somme au titre des frais supportés par la société Canal + International dans la présente instance.

DECIDE :

Article 1er : La requête du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par la société Canal + International sur le fondement de l'article L.761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : La présente ordonnance sera notifiée au gouvernement de la Nouvelle-Calédonie et à la société Canal + International.

Copie en sera adressée au Haut-commissaire de la République en Nouvelle-Calédonie.

Délibéré après l'audience du 30 juin 2021, à laquelle siégeaient :

- Mme Brotons, président de chambre,

- M. Magnard, premier conseiller,

- Mme Bonneau-Mathelot, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 7 juillet 2021.

Le rapporteur,

S. BONNEAU-MATHELOTLe président,

I. BROTONS

Le greffier,

S. DALL'AVA

La République mande et ordonne au Haut-commissaire de la République en Nouvelle-Calédonie en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 19PA03429


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 19PA03429
Date de la décision : 07/07/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme BROTONS
Rapporteur ?: Mme Sonia BONNEAU-MATHELOT
Rapporteur public ?: Mme JIMENEZ
Avocat(s) : SELARL DE GRESLAN-LENTIGNAC

Origine de la décision
Date de l'import : 29/03/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2021-07-07;19pa03429 ?
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