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30/06/2021 | FRANCE | N°21PA00639

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 4ème chambre, 30 juin 2021, 21PA00639


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... F... a demandé au Tribunal administratif de la Polynésie française, en sa qualité d'ayant droit de M. G... F..., d'annuler la décision du 28 janvier 2020 par laquelle le Comité d'indemnisation des victimes des essais nucléaires (CIVEN) a arrêté le montant de l'indemnisation accordée à son époux en sa qualité de victime des essais nucléaires français à la somme de 5 764 euros, et de condamner le CIVEN à lui verser la somme de 70 420 euros au titre de la réparation intégrale des préjudice

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Par une ordonnance en date du 27 avril 2020, le Tribunal administratif d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... F... a demandé au Tribunal administratif de la Polynésie française, en sa qualité d'ayant droit de M. G... F..., d'annuler la décision du 28 janvier 2020 par laquelle le Comité d'indemnisation des victimes des essais nucléaires (CIVEN) a arrêté le montant de l'indemnisation accordée à son époux en sa qualité de victime des essais nucléaires français à la somme de 5 764 euros, et de condamner le CIVEN à lui verser la somme de 70 420 euros au titre de la réparation intégrale des préjudices subis.

Par une ordonnance en date du 27 avril 2020, le Tribunal administratif de la Polynésie française a accordé à Mme F..., à titre de provision, une somme de 5 764 euros.

Par un jugement n° 2000237 du 8 décembre 2020, le Tribunal administratif de la Polynésie française a porté l'indemnisation à la somme de 5 800 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 12 juin 2017.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 8 février 2021, Mme F..., représentée par Me E..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 65 420 euros au titre de la réparation intégrale des préjudices subis, assortie des intérêts au taux légal, avec leur capitalisation ;

3°) de confirmer le jugement du tribunal s'agissant des intérêts au taux légal ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

S'agissant des préjudices avant consolidation :

- le déficit fonctionnel temporaire doit être indemnisé à hauteur de 420 euros ;

- les souffrances endurées temporaires, évaluées par l'expert à 2 sur une échelle allant de 1 à 7, doivent être indemnisées à hauteur de 15 000 euros ;

- l'indemnisation du préjudice esthétique temporaire, évalué à 1.5/7, doit être portée à 10 000 euros ;

S'agissant des préjudices après consolidation :

- le préjudice d'agrément doit être indemnisé à hauteur de 10 000 euros ;

- le préjudice esthétique permanent doit être évalué à la somme de 10 000 euros ;

S'agissant des préjudices en-dehors de toute consolidation :

- elle est fondée à solliciter un préjudice d'anxiété lié à une pathologie évolutive, à hauteur de 20 000 euros.

Par un mémoire en défense, enregistré le 12 mars 2021, le CIVEN conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- l'évaluation des préjudices effectuée par le Tribunal doit être confirmée.

Par une ordonnance en date du 9 avril 2021, la clôture de l'instruction a été fixée au 28 avril 2021 à 12 heures.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code civil ;

- la loi n° 2010-2 du 5 janvier 2010 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme B..., présidente,

- les conclusions de M. Baronnet, rapporteur public,

- et les observations de Me E..., avocate de Mme F....

Considérant ce qui suit :

1. M. G... F... a été reconnu victime des essais nucléaires français, sur le fondement de la loi du 5 janvier 2010 relative à la reconnaissance et à l'indemnisation des victimes des essais nucléaires français, par une décision du Comité d'indemnisation des victimes des essais nucléaires (CIVEN) en date du 4 février 2019. Après expertise, le CIVEN lui a proposé, le 28 janvier 2020, une somme de 5 764 euros au titre de la réparation intégrale des préjudices subis. Mme F..., ayant-droit de M. F... décédé le 20 octobre 2019, relève appel du jugement du 8 décembre 2020 par lequel le tribunal administratif de la Polynésie française a porté le montant de cette indemnisation à la somme de 5 800 euros.

Sur l'évaluation des préjudices :

En ce qui concerne les préjudices avant consolidation :

2. . Il ne résulte pas de l'instruction que le tribunal aurait fait une insuffisante évaluation du préjudice subi à raison du déficit fonctionnel temporaire en allouant la somme de 300 euros à la requérante, sur la base d'un forfait journalier de 28,50 euros, au demeurant supérieur au barème du CIVEN.

3. Les souffrances temporaires endurées par M. F... ont été évaluées par l'expert à 2 sur une échelle allant de 1 à 7. Les premiers juges ont procédé à une juste appréciation de ce préjudice en allouant à ce titre la somme de 2 700 euros.

4. Le préjudice esthétique temporaire subi par M. F..., du fait des lésions cutanées et de leur traitement, a été évalué à 1,5 sur 7 par l'expert. Le tribunal n'a pas fait une insuffisante évaluation de ce préjudice en allouant à la requérante la somme de 1 400 euros.

En ce qui concerne les préjudices après consolidation :

5. Mme F... ne justifie pas plus en appel qu'en première instance du préjudice d'agrément subi par son époux. Si ce dernier était tenu de se couvrir afin de limiter son exposition au soleil, il ne se trouvait pas dans l'impossibilité de pratiquer ses activités de loisirs. Par suite, sa demande d'indemnisation au titre de ce préjudice doit être rejetée.

6. Le préjudice esthétique permanent a été évalué par l'expert à 1,5 sur une échelle allant de 1 à 7. Dans ces conditions, le tribunal n'a pas fait une insuffisante évaluation du préjudice subi à ce titre en allouant la somme de 1 400 euros à la requérante.

S'agissant des préjudices en-dehors de toute consolidation :

7. Le préjudice lié aux pathologies évolutives, qui constitue un préjudice spécifique lié à une évolution possible de la maladie et à la crainte de voir apparaître un second cancer, doit être indemnisé. Il sera fait une juste appréciation de ce préjudice en allouant à la requérante, en sa qualité d'ayant droit de son époux décédé, la somme de 1 500 euros.

8. Il résulte de tout ce qui précède que la somme de 5 800 euros que le CIVEN a été condamné à verser à Mme F... par les premiers juges doit être portée à 7 300 euros, qui inclut le montant de la somme versée à titre de provision en application de l'ordonnance du 27 avril 2020. Mme F..., ayant-droit de M. F..., est donc fondée à demander la réformation dans cette mesure du jugement n° 2000237 du 8 décembre 2020 du tribunal administratif de la Polynésie française.

Sur les intérêts et leur capitalisation :

9. Mme F... a droit aux intérêts au taux légal sur les condamnations prononcées à son profit par le présent arrêt à compter de la réception de sa demande d'indemnisation du 12 juin 2017, avec capitalisation à compter du 30 mars 2020, puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date.

Sur les frais liés au litige :

10. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement à Mme F... d'une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : La somme de 5 800 euros que le CIVEN a été condamné à verser à Mme F... par le jugement n° 2000237 du 8 décembre 2020 du Tribunal administratif de la Polynésie française est portée à 7 300 euros, y compris la somme de 5 764 euros versée à titre provisionnel. Cette somme portera intérêts au taux légal à compter du 12 juin 2017. Les intérêts échus à la date du 30 mars 2020 puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date, seront capitalisés pour produire eux-mêmes intérêts.

Article 2 : Le jugement est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : Le CIVEN versera à Mme F... une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... F... et au Comité d'indemnisation des victimes des essais nucléaires (CIVEN).

Copie en sera adressée à la ministre des armées.

Délibéré après l'audience du 17 juin 2021, à laquelle siégeaient :

- Mme B..., présidente de chambre,

- Mme D..., présidente assesseure,

- Mme A..., première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 30 juin 2021.

La présidente-rapporteure,

M. B...L'assesseure la plus ancienne,

M. D...

La greffière,

S. GASPARLa République mande et ordonne à la ministre des armées en ce qui la concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

No 21PA00639 5


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 21PA00639
Date de la décision : 30/06/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

60-04-01 Responsabilité de la puissance publique. Réparation. Préjudice.


Composition du Tribunal
Président : Mme HEERS
Rapporteur ?: Mme Mireille HEERS
Rapporteur public ?: M. BARONNET
Avocat(s) : CABINET TEISSONNIERE-TOPALOFF-LAFFORGUE

Origine de la décision
Date de l'import : 20/07/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2021-06-30;21pa00639 ?
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