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23/06/2021 | FRANCE | N°20PA03523

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2eme chambre, 23 juin 2021, 20PA03523


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... D... a demandé au Tribunal administratif de Montreuil de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2010, 2011 et 2012.

Par un jugement n° 1900787/9 du 24 septembre 2020, le Tribunal administratif de Montreuil a constaté qu'il n'y avait plus lieu de statuer sur les conclusions de la demande de M. D... à hauteur des dégrèvements prononcés en cours d'in

stance, l'a déchargé partiellement, en droits et majorations, des impositions affér...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... D... a demandé au Tribunal administratif de Montreuil de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2010, 2011 et 2012.

Par un jugement n° 1900787/9 du 24 septembre 2020, le Tribunal administratif de Montreuil a constaté qu'il n'y avait plus lieu de statuer sur les conclusions de la demande de M. D... à hauteur des dégrèvements prononcés en cours d'instance, l'a déchargé partiellement, en droits et majorations, des impositions afférentes à l'année 2012 en conséquence d'une réduction de base de 50 193 euros, a mis à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, et a rejeté le surplus des conclusions de la demande de M. D....

Procédure devant la Cour :

Par une requête, un mémoire de production de pièces et un mémoire enregistrés les 23 novembre 2020,11 janvier et 11 mai 2021, M. D..., représenté par Me C... B..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement n° 1900787/9 du 24 septembre 2020 du Tribunal administratif de Montreuil en tant qu'il lui est défavorable ;

2°) de prononcer la décharge sollicitée devant ce tribunal ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- il n'était pas maître de l'affaire de la société AA Patrimoine Consulting au titre des années 2010 et 2011 et ne peut être regardé comme ayant eu cette qualité au titre de l'année 2012 ;

- l'apport en compte courant d'associé d'un montant de 95 000 euros est justifié ; cette somme correspond à un chèque tiré du compte bancaire de la SCI Amos, le 25 avril 2012, et remis à l'encaissement sur le compte de la Société AA Patrimoine à la même date ; la SCI Amos, dont il était l'associé à hauteur de 99 % du capital social, et qui détenait sa résidence principale, relevait de l'article 8 du code général des impôts et avait, par conséquence, un caractère transparent ; l'appréhension de la somme générée par la cession de sa résidence principale n'était soumise à aucun formalisme ; le virement de cette somme a été fait en avance de la répartition du résultat lui revenant ; il n'a pas été remboursé de la somme versée au crédit de son compte courant d'associé dès lors que la société AA Patrimoine Consulting a été placée en liquidation judiciaire pour insuffisance d'actifs ;

- la société AA Patrimoine Consulting n'avait pas à déclarer les commissions sur transactions immobilières réalisées par les agences immobilières exploitées par la société ADT en 2011 soit antérieurement à la transmission universelle de patrimoine ; les commissions sur transactions immobilières réalisées en 2012 ont été partagées entre la société AA Patrimoine Consulting et d'autres intermédiaires ; la vente réalisée par la SCI Amos n'a donné lieu à aucune commission.

Par un mémoire en défense et un mémoire de production de pièces enregistrés les 18 février et 1er mars 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au non-lieu à statuer à concurrence du dégrèvement prononcé en cours d'instance et au rejet du surplus des conclusions de la requête.

Il soutient que :

- l'intégralité de la taxation à titre de revenus distribués des commissions sur transactions immobilières au titre des années 2011 et 2012 est abandonnée ;

- les autres moyens invoqués par M. D... ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 30 avril 2021, la clôture d'instruction a été fixée au 17 mai 2021.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts ;

- le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme E...,

- les conclusions de Mme Jimenez, rapporteure publique,

- et les observations de Me B..., avocat de M. D....

Deux notes en délibéré, enregistrées les 9 et 10 juin 2021, ont été présentées par

Me B... pour M. D....

Considérant ce qui suit :

1. M. D... relève appel du jugement n° 1900787/9 du 24 septembre 2020 en tant que le Tribunal administratif de Montreuil n'a pas intégralement fait droit à sa demande tendant à la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2010, 2011 et 2012.

Sur l'étendue du litige :

2. Par une décision du 26 février 2021, postérieure à l'introduction de la requête, le directeur départemental des finances publiques de la Seine-Saint-Denis a prononcé le dégrèvement des impositions contestées, à concurrence d'une somme totale, en droits et pénalités, de

47 102 euros au titre de l'impôt sur le revenu et des contributions sociales de l'année 2011 et de 21 234 euros au titre de l'impôt sur le revenu et des contributions sociales de l'année 2012, en conséquence de l'abandon de l'intégralité des rectifications opérées au titre des revenus distribués afférents aux commissions sur transactions immobilières. Les conclusions de la requête relatives à ces impositions supplémentaires sont, dans cette mesure, devenues sans objet.

Sur la charge de la preuve

3. Aux termes de l'article R*. 194-1 du livre des procédures fiscales : " Lorsque, ayant donné son accord à la rectification ou s'étant abstenu de répondre dans le délai légal à la proposition de rectification, le contribuable présente cependant une réclamation faisant suite à une procédure contradictoire de rectification, il peut obtenir la décharge ou la réduction de l'imposition, en démontrant son caractère exagéré. / (...) ".

4. Il résulte de l'instruction que la proposition de rectifications du 20 décembre 2013 a été signifiée par voie d'huissier à M. D..., le 27 décembre 2013, à la dernière adresse connue de l'administration. En application des dispositions de l'article 659 du code de procédure civile, l'huissier a établi un procès-verbal de recherche par lequel il a attesté n'avoir pu le rencontrer alors que son nom figurait toujours sur la boîte aux lettres et que l'actuel locataire du logement, dont M. D... est le propriétaire, lui avait indiqué qu'il ignorait où il se trouvait. L'huissier a conclu avoir constaté que M. D... n'avait ni domicile, ni résidence, ni lieu de travail connu. Il a, dans ces circonstances, adressé à M. D..., par pli recommandé avec demande d'accusé de réception, copie du procès-verbal ainsi que de la proposition de rectifications du 20 décembre 2013. Le pli correspondant a été présenté, le destinataire en étant avisé, le 28 décembre 2013, à la dernière adresse connue, et est revenu avec la mention " non réclamé ". Il suit de là que la proposition de rectifications doit être regardée comme ayant été régulièrement notifiée, en tout état de cause le

28 décembre 2013. Dans ces circonstances, M. D..., qui n'a présenté aucune observation à cette proposition de rectifications, doit apporter, ce qu'il ne conteste pas, la preuve de l'exagération des impositions supplémentaires restant à sa charge.

Sur le bien-fondé des impositions :

5. En premier lieu, aux termes de l'article 111 du code général des impôts : " Sont notamment considérés comme revenus distribués : / (...) ; / c. Les rémunérations et avantages occultes ; / (...) ".

6. Il résulte de l'instruction, et notamment de la proposition de rectifications du 20 décembre 2013, qu'un compte-courant d'associé ouvert au nom de M. D... dans les écritures de la SAS AA Patrimoine Consulting a été crédité, le 25 avril 2012, de la somme de

95 000 euros. L'administration, qui a estimé que cette somme de 95 000 euros constituait un passif injustifié de la SAS AA Patrimoine Consulting l'a en conséquence intégré au revenu imposable de M. D..., attributaire du compte courant, dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, en application des dispositions précitées.

7. M. D... soutient que cette somme de 95 000 euros ne constitue pas un revenu distribué à son profit mais un apport en compte courant réalisé le 25 avril 2012 et provenant d'une avance sur la répartition lui revenant du résultat de la SCI Amos, société relevant de l'article 8 du code général des impôts. Il produit à l'appui de cette argumentation, outre les documents établissant d'une part que la somme en litige a été versée à partir du compte bancaire de la SCI Amos, ce que ne conteste d'ailleurs pas l'administration, d'autre part la vente, par la SCI, du bien qui constituait sa résidence principale, copie du bilan de la SCI Amos au 31 décembre 2012 jointe au dossier de première instance, qui mentionne expressément un acompte de 97 108 euros versé à M. D..., ainsi que le procès-verbal de l'assemblée générale de la SCI Amos du 31 janvier 2013 qui atteste de l'existence d'une plus-value sur la cession du bien en cause et du versement, au bénéfice de M. D..., le 25 avril 2012, d'un acompte sur la répartition de cette plus-value pour la somme de 97 108 euros. Il suit de là que M. D... doit être regardé comme établissant l'origine et la nature non imposable de la somme inscrite sur son compte courant dans les écritures de la SAS AA Patrimoine Consulting et à obtenir la réduction de sa base imposable de l'année 2012 à hauteur de la somme de 95 000 euros imposée dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers.

8. En second lieu, à supposer que d'autres revenus distribués aient été imposés entre les mains de M. D..., sur le fondement de l'article 109.1.1° du code général des impôts, à raison de la réintégration de diverses charges que l'administration fiscale a regardées comme n'ayant pas été exposées dans l'intérêt direct de la SAS AA Patrimoine Consulting, au motif qu'il était maître de l'affaire au cours des années concernées, il résulte de l'instruction que l'administration a constaté que M. D..., associé au capital de cette société depuis sa création le 1er juillet 2010, détenait

50 % du capital social, assurait la présidence de la société et disposait de la signature sur les comptes bancaires de cette société, ainsi que de la signature des actes (actes de sous-location des locaux, rapports de gérance, notamment), des documents administratifs (déclarations fiscales, demande de report de rendez-vous, mandat donné pour la représentation au cours des opérations de contrôle, notamment) et avait la maîtrise des relations avec les salariés, intermédiaires tels que les notaires, les clients et les fournisseurs. Dans ces conditions, et alors que M. D..., qui supporte la charge de la preuve faute d'avoir refusé les rectifications notifiées, ne conteste pas sérieusement les éléments susrappelés, c'est à bon droit que l'administration a estimé qu'il devait être considéré comme ayant été maître de l'affaire et dès lors appréhendé les sommes en cause.

9. Il résulte de ce tout ce qui précède que M. D... est seulement fondé à obtenir, outre le dégrèvement prononcé en cours d'instance, la réduction de sa base imposable à l'impôt sur le revenu et aux contributions sociales à hauteur de la rectification opérée, au titre de l'année 2012, dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers pour un montant de 95 000 euros et la décharge des impositions correspondantes ainsi que des pénalités y afférentes. Il y a lieu, par voie de conséquence, de réformer en ce sens le jugement attaqué. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat, partie perdante dans la présente instance, la somme de

1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur la requête de M. D... à hauteur des dégrèvements prononcés en cours d'instance.

Article 2 : La base imposable de M. D... à l'impôt sur le revenu et aux contributions sociales de l'année 2012 est réduite de 95 000 euros.

Article 3 : M. D... est déchargé des suppléments d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquels il a été assujetti au titre de l'année 2012, ainsi que des pénalités y afférentes, à raison de la réduction de base prononcée à l'article précédent.

Article 4 : Le jugement n° 1900787/9 du 24 septembre 2020 du Tribunal administratif de Montreuil est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 5 : L'Etat versera à M. D... une somme de 1 500 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Article 6 : Le surplus des conclusions de la requête de M. D... est rejeté.

Article 7 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... D... et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

Copie en sera adressée au directeur régional des finances publiques d'Ile-de-France et du département de Paris.

Délibéré après l'audience du 9 juin 2021, à laquelle siégeaient :

- Mme Brotons, président de chambre,

- M. Magnard, premier conseiller,

- Mme E..., premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 23 juin 2021.

Le rapporteur,

S. E...Le président,

I. BROTONS

Le greffier,

S. DALL'AVA

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la relance en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 20PA03523


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2eme chambre
Numéro d'arrêt : 20PA03523
Date de la décision : 23/06/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme BROTONS
Rapporteur ?: Mme Sonia BONNEAU-MATHELOT
Rapporteur public ?: Mme JIMENEZ
Avocat(s) : DEHORS-FRANCES

Origine de la décision
Date de l'import : 29/06/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2021-06-23;20pa03523 ?
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