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23/06/2021 | FRANCE | N°19PA02558

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2eme chambre, 23 juin 2021, 19PA02558


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie de condamner le gouvernement de la Nouvelle-Calédonie à lui verser la somme de

344 334 405 francs CFP à titre de dommages et intérêts, augmentée des intérêts moratoires à compter de la demande préalable d'indemnisation du 24 octobre 2018 ou de la date d'enregistrement de la requête.

Par un jugement n° 1900072 du 11 juin 2019, le Tribunal administratif de

Nouvelle-Calédonie a rejeté cette demande.

Pr

océdure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 1er août 2019 et le 21 février...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie de condamner le gouvernement de la Nouvelle-Calédonie à lui verser la somme de

344 334 405 francs CFP à titre de dommages et intérêts, augmentée des intérêts moratoires à compter de la demande préalable d'indemnisation du 24 octobre 2018 ou de la date d'enregistrement de la requête.

Par un jugement n° 1900072 du 11 juin 2019, le Tribunal administratif de

Nouvelle-Calédonie a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 1er août 2019 et le 21 février 2020, M. A..., représenté par Me E... C..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie du 11 juin 2019 ;

2°) de condamner le gouvernement de la Nouvelle-Calédonie à lui verser la somme de 344 334 405 francs CFP à titre de dommages et intérêts, augmentée des intérêts moratoires à compter de la demande préalable d'indemnisation du 24 octobre 2018 ou de la date d'enregistrement de la requête ;

3°) de mettre à la charge de la Nouvelle-Calédonie une somme de 2 000 000 francs CFP au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le tribunal ne s'est pas prononcé sur les moyens tirés des fautes commises par l'administration ;

- l'imposition sur le revenu établie au titre de l'année 2005 était prescrite ;

- l'administration a établi une imposition au titre de l'année 2007 sur la base d'une déclaration erronée, sans tenir compte de la déclaration rectificative faisant état de revenus inférieurs ;

- les redressements notifiés à la société Les Jariots sont irréalistes et entachés d'une erreur de méthode au regard de la détermination du montant des produits taxables ;

- l'assignation en liquidation judiciaire était prématurée et non justifiée par la seule créance fiscale ;

- l'impôt sur le revenu établi au titre de l'année 2005 a été contesté ;

- les revenus taxés au titre de cette année n'ont jamais été perçus ;

- le préjudice subi procédant de la surtaxe d'impôt sur les sociétés s'élève à 93 010 693 XPF ;

- le préjudice économique du fait de la cessation d'activité de la société Les Jariots s'élève à 93 010 693 XPF au titre de l'impôt payé, à 49 467 000 XPF au regard de la vente des lots en stocks, à 120 654 800 XPF au regard de l'abandon du programme de construction et à 29 919 050 XPF au regard de la mise en oeuvre de la garantie bancaire ;

- le préjudice subi du fait des fautes relatives à l'impôt sur le revenu des années 2005 et 2007 s'élève à 34 282 862 XPF ;

- le préjudice moral global s'élève à 17 000 000 XPF ;

- le lien de causalité entre les fautes commises et le préjudice subi est établi.

Par des mémoires en défense enregistrés les 24 et 28 janvier 2020, le gouvernement de la Nouvelle-Calédonie, représenté par la SCP Potier de la Varde - Buk Lament - Robillot, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de M. A... une somme de

4 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 24 janvier 2020, la clôture de l'instruction a été fixée au

25 février 2020.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi organique n° 99-209 et la loi n° 99-210 du 19 mars 1999, relatives à la Nouvelle-Calédonie ;

- le code des impôts de la Nouvelle-Calédonie ;

- le code de justice administrative dans sa version applicable en Nouvelle-Calédonie.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. D...,

- et les conclusions de Mme Jimenez, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A... relève appel du jugement en date du 11 juin 2019 par lequel le Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie a rejeté sa demande en réparation du préjudice subi en raison de fautes qu'auraient commises les services fiscaux dans l'assiette et le recouvrement de l'impôt sur le revenu mis à sa charge au titre des années 2005 et 2007 et d'impositions mises à la charge de la SARL Les Jariots, dont il était le gérant et l'associé, au titre de l'exercice clos en 2006.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Les premiers juges ont rejeté les conclusions de M. A... au motif que les préjudices invoqués n'étaient pas distincts du paiement de l'impôt, n'étaient pas constitutifs d'un préjudice personnel, n'étaient pas établis ou ne procédaient pas de manière certaine et directe des agissements de l'administration fiscale. Les moyens tirés de l'existence de fautes commises par l'administration fiscale étaient par suite devenus sans incidence sur l'issue du litige. Les premiers juges, qui ont d'ailleurs statué sur l'existence de certaines des fautes invoquées dans l'établissement des cotisations d'impôt sur le revenu mises à la charge de M. A... au titre des années 2005 et 2007, n'étaient en conséquence pas tenus d'y répondre.

Sur les conclusions à fin d'indemnisation :

3. Une faute commise par l'administration lors de l'exécution d'opérations se rattachant aux procédures d'établissement et de recouvrement de l'impôt est de nature à engager la responsabilité de l'Etat à l'égard du contribuable ou de toute autre personne si elle leur a directement causé un préjudice. Un tel préjudice, qui ne saurait résulter du seul paiement de l'impôt, peut être constitué des conséquences matérielles des décisions prises par l'administration et, le cas échéant, des troubles dans ses conditions d'existence dont le contribuable justifie. Le préjudice invoqué ne trouve pas sa cause directe et certaine dans la faute de l'administration si celle-ci établit soit qu'elle aurait pris la même décision d'imposition si elle avait respecté les formalités prescrites ou fait reposer son appréciation sur des éléments qu'elle avait omis de prendre en compte, soit qu'une autre base légale que celle initialement retenue justifie l'imposition. Enfin, l'administration peut invoquer le fait du contribuable ou, s'il n'est pas le contribuable, du demandeur d'indemnité comme cause d'atténuation ou d'exonération de sa responsabilité.

En ce qui concerne les procédures d'établissement et de recouvrement de l'impôt sur le revenu :

4. Le préjudice invoqué pour un montant de 34 282 862 francs CFP résulte du paiement de l'imposition établie et recouvrée de manière prétendument fautive. Il suit de ce qu'il a été dit au point 3. qu'un tel préjudice ne saurait être indemnisé dans le cadre d'un recours tendant à ce que soit reconnue la responsabilité de l'Etat. Si M. A... se prévaut d'un préjudice moral qu'il évalue à la somme de 17 000 000 francs CFP il ne produit pas au dossier d'éléments suffisants permettant de démontrer un préjudice de cette nature, directement lié aux décisions des services fiscaux de Nouvelle-Calédonie prises en ce qui concerne l'impôt sur le revenu.

En ce qui concerne les procédures d'établissement et de recouvrement de l'impôt sur les sociétés mis à la charge de la société les Jariots :

S'agissant de la procédure d'établissement de l'impôt :

5. M. A... fait valoir que l'administration aurait rattaché à tort les produits correspondant à des ventes de terrains à l'exercice clos en 2006, avant la livraison effective des biens concernés en 2007. Il ne produit toutefois aucun document permettant à la Cour d'apprécier, pour chaque terrain concerné, la date de livraison du bien. Si M. A... fait valoir que des travaux, notamment de viabilisation, devaient encore être effectués sur les terrains vendus, il n'identifie aucune provision constituée à ce titre, et ne fournit en tout état de cause aucune pièce permettant de chiffrer, pour chaque opération de vente, les travaux restant à réaliser. La faute commise à cet égard par l'administration ne saurait être établie par la production de rapports d'expertise non contradictoires faisant état de ce que la valeur de la variation de stocks aurait été calculée de manière erronée, en l'absence de pièces justificatives permettant à la Cour de vérifier l'existence d'une telle erreur. En se bornant à produire à cet égard un certificat de conformité datant de 2013 et un jugement du 4 octobre 2010 du Tribunal de première instance de Nouméa dans une affaire opposant la SARL Les Jariots aux époux T., M. A... ne met pas non plus la Cour en mesure d'identifier la faute qu'aurait commise l'administration dans la procédure d'établissement de l'impôt sur les sociétés de ladite société. L'erreur commise par l'administration n'étant pas établie, le moyen tiré de ce que les résultats taxés ont un caractère irréaliste est dépourvu de portée.

S'agissant de la procédure de recouvrement de l'impôt :

6. Lorsqu'une imposition a été mise à la charge d'un contribuable, il ne peut être reproché au service chargé du recouvrement d'engager des poursuites. En effet, ce service n'a pas à vérifier le bien-fondé de l'impôt et a pour mission, dès lors que l'impôt est légalement exigible, d'en assurer le recouvrement dans les plus brefs délais. En l'absence de décharge, totale ou partielle, des impositions litigieuses, accordée par l'administration fiscale ou prononcée à l'issue d'une instance juridictionnelle, c'est à bon droit que le service du recouvrement a engagé des poursuites aux fins de recouvrer les sommes dues. S'agissant des impositions mises à la charge de la société Les Jariots, M. A... n'établit pas, en se bornant à faire valoir le caractère précipité de l'assignation en liquidation judiciaire formé par le service du recouvrement, la faute qu'aurait commise l'administration en cherchant à recouvrer des impositions qui, à la date de cette assignation, étaient exigibles. Il résulte au demeurant de l'instruction que la société n'avait sollicité aucun délai de paiement, qu'elle n'avait donné aucune suite aux démarches amiables ou contentieuses de l'administration pour parvenir au règlement des sommes dues, et que les avis à tiers détenteur opérés sur son compte bancaire et auprès des offices notariaux s'étaient avérés inopérants.

7. Il résulte de tout ce qui précède que le requérant n'est en tout état de cause pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie a rejeté sa demande. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la Nouvelle-Calédonie, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, le versement de la somme que le requérant demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce de mettre à la charge de M. A... une somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article

L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : M. A... versera au gouvernement de la Nouvelle-Calédonie la somme de

2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au gouvernement de

la Nouvelle-Calédonie.

Copie en sera adressée au Haut-commissaire de la République en Nouvelle-Calédonie.

Délibéré après l'audience du 9 juin 2021, à laquelle siégeaient :

- Mme Brotons, président de chambre,

- M. D..., premier conseiller,

- Mme Bonneau-Mathelot, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 23 juin 2021.

Le rapporteur,

F. D...Le président,

I. BROTONS

Le greffier,

S. DALL'AVA

La République mande et ordonne au Haut-commissaire de la République en Nouvelle-Calédonie en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 19PA02558


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2eme chambre
Numéro d'arrêt : 19PA02558
Date de la décision : 23/06/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme BROTONS
Rapporteur ?: M. Franck MAGNARD
Rapporteur public ?: Mme JIMENEZ
Avocat(s) : ASCOTT ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 29/06/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2021-06-23;19pa02558 ?
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