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17/06/2021 | FRANCE | N°20PA03213

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 7eme chambre, 17 juin 2021, 20PA03213


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au Tribunal administratif de Montreuil d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 18 février 2020 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de renvoi et a prononcé une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de deux ans.

Par un jugement n° 2003625 du 7 octobre 2020, le Tribunal administratif de Montreuil a ann

ulé l'arrêté du préfet de la Seine-Saint-Denis, a enjoint au préfet de la Seine-Saint-...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au Tribunal administratif de Montreuil d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 18 février 2020 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de renvoi et a prononcé une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de deux ans.

Par un jugement n° 2003625 du 7 octobre 2020, le Tribunal administratif de Montreuil a annulé l'arrêté du préfet de la Seine-Saint-Denis, a enjoint au préfet de la Seine-Saint-Denis de délivrer un titre de séjour à M. B..., dans un délai de trois mois, et mis à la charge de l'Etat, la somme de 1 000 euros, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la Cour :

I - Par une requête, enregistrée le 3 novembre 2020 sous le n° 20PA03213, le préfet de la Seine-Saint-Denis demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2003625 du 7 octobre 2020 du Tribunal administratif de Montreuil ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. B... devant le Tribunal administratif de Montreuil.

Il soutient que :

- M. B... s'est soustrait à deux mesures d'éloignement, n'est pas intégré socialement et ne maîtrise pas le français ;

- la présence de ses frères ne saurait suffire à peser en sa faveur, dès lors qu'il est célibataire sans charge de famille et n'est pas dépourvu d'attaches dans son pays où vivent ses parents ;

- il ne justifie pas sa présence pour les années 2008, 2009, 2011, et 2012.

- les autres moyens soulevés en première instance par M. B... ne sont pas fondés.

Par un mémoire en défense, enregistré le 20 décembre 2020, M. B..., représenté par Me D..., demande à la Cour :

1°) de rejeter la requête ;

2°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de trois mois à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa demande en lui délivrant une autorisation provisoire de séjour ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé

II - Par une requête, enregistrée le 3 novembre 2020 sous le n° 20PA03214, le préfet de la Seine-Saint-Denis demande à la Cour de prononcer le sursis à exécution du jugement n° 2003625 du 7 octobre 2020 du Tribunal administratif de Montreuil.

Il soutient que les conditions fixées par les articles R. 811-15 et R. 811-17 du code de justice administrative sont en l'espèce remplies.

Par un mémoire en défense, enregistré le 20 décembre 2020, M. B..., représenté par Me D..., demande à la Cour :

1°) de rejeter la requête ;

2°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de trois mois à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa demande en lui délivrant une autorisation provisoire de séjour ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme C... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., ressortissant égyptien né le 29 août 1984, a sollicité une admission exceptionnelle au séjour. Par arrêté du 18 février 2020, le préfet de la Seine-Saint-Denis lui a refusé le titre sollicité, l'a obligé à quitter le territoire français, a fixé le pays de renvoi et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de deux ans. Par un jugement du 7 octobre 2020, le Tribunal administratif de Montreuil a annulé cet arrêté. Par deux requêtes, le préfet de la Seine-Saint-Denis relève appel de ce jugement et demande à la Cour d'en prononcer le sursis à exécution.

Sur la jonction :

2. Les requêtes n° 20PA03213 et n° 20PA03214 portant sur le même jugement et ayant fait l'objet d'une instruction commune, il y a lieu de les joindre pour y statuer par un seul arrêt.

Sur la requête enregistrée sous le n° 20PA03213 :

3. Aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 313-2. / L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans (...) ". En présence d'une demande de régularisation présentée, sur le fondement de l'article L. 313-14, par un étranger qui ne serait pas en situation de polygamie et dont la présence en France ne présenterait pas une menace pour l'ordre public, il appartient à l'autorité administrative de vérifier, dans un premier temps, si l'admission exceptionnelle au séjour par la délivrance d'une carte portant la mention " vie privée et familiale " répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard de motifs exceptionnels, et à défaut, dans un second temps, s'il est fait état de motifs exceptionnels de nature à permettre la délivrance, dans ce cadre, d'une carte de séjour temporaire portant la mention "salarié " ou " travailleur temporaire ".

4. Pour annuler l'arrêté attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil a considéré que le préfet de la Seine-Saint-Denis avait commis une erreur manifeste dans l'appréciation de la situation de M. B..., au regard des dispositions précitées de l'article L. 313-14, dès lors que ce dernier justifie d'une activité professionnelle présentant une certaine régularité et des niveaux de revenus non négligeables depuis 2008, et que trois de ses frères, dont l'un de nationalité française, séjournent régulièrement en France.

5. Il ressort toutefois des pièces du dossier que l'activité professionnelle dont se prévaut M. B... ne présente aucun caractère de stabilité et ne peut être rattachée aux revenus dont il fait état. Par ailleurs les autres éléments dont fait état M. B..., célibataire sans enfant entré en France à 22 ans, ne sont pas constitutifs, par eux-mêmes, de circonstances exceptionnelles d'admission au séjour au sens des dispositions de l'article L. 313-14 précitées du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite le préfet de la Seine-Saint-Denis est fondé à soutenir que c'est à tort que le Tribunal administratif de Montreuil a considéré que l'arrêté du 18 février 2020 était entaché d'une erreur manifeste d'appréciation et l'a annulé pour ce motif.

6. Il appartient toutefois à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. B... tant en première instance qu'en appel.

7. Il ressort des pièces du dossier que pour chacune des dix années précédant la décision attaquée M. B... justifie suffisamment, par la diversité et le nombre des justificatifs qu'il produit, qui émanent de plusieurs administrations et fournisseurs de services différents, ainsi que de médecins et hôpitaux, qu'il résidait habituellement sur le territoire français. Dans ces conditions il est fondé à soutenir que la décision attaquée a été prise en méconnaissance de l'obligation, prévue à l'article L. 313-14 précité du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, de soumettre sa demande pour avis à la commission du titre de séjour.

8. Par suite, le préfet de la Seine-Saint-Denis n'est pas fondé à se plaindre de ce que les premiers juges ont annulé le refus de séjour opposé à M. B... par l'arrêté attaqué ainsi que, par voie de conséquence, les décisions portant obligation de quitter le territoire français, fixant le pays de destination pour son éventuel éloignement et prononçant une interdiction de retour sur le territoire français.

9. Aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution (...) ". Aux termes de l'article L. 911-2 du même code : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette nouvelle décision doit intervenir dans un délai déterminé. / La juridiction peut également prescrire d'office l'intervention de cette nouvelle décision ".

10. Il résulte de ce qui précède que, compte tenu du motif d'annulation retenu, l'exécution du présent arrêt implique seulement que le préfet de la Seine-Saint-Denis saisisse la commission du titre de séjour de la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par M. B... et réexamine sa demande de titre de séjour. Il y a lieu, par voie de conséquence d'annuler l'article 2 du jugement attaqué, et d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de saisir cette commission de la demande de M. B... dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt et de réexaminer sa demande de titre séjour.

Sur la requête enregistrée sous le n° 20PA03214 :

11. Dès lors que la Cour statue, par le présent arrêt, sur les conclusions de la requête du préfet de la Seine-Saint-Denis tendant à l'annulation du jugement attaqué du Tribunal administratif de Montreuil, les conclusions de sa requête n° 20PA03214 tendant à ce qu'il soit sursis à son exécution sont devenues sans objet. Il n'y a pas lieu, par suite, d'y statuer.

Sur les frais liés à l'instance :

12. Dans les circonstances de l'espèce il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur la requête n° 20PA03214 du préfet de la Seine-Saint-Denis tendant au sursis à l'exécution du jugement n° 2003625 du 7 octobre 2020 du Tribunal administratif de Montreuil.

Article 2 : L'article 2 du jugement n° 2003625 du 7 octobre 2020 du Tribunal administratif de Montreuil est annulé. [HP1]

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête n° 20PA03213 du préfet de la Seine-Saint-Denis est rejeté[HP2].

Article 4 : Il est enjoint au préfet de la Seine-Saint-Denis de saisir la commission du titre de séjour de la demande de M. B... dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt et de réexaminer sa demande de titre de séjour.

Article 5 : L'Etat versera à M. B... la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur, au préfet de la Seine-Saint-Denis et à M. A... B....

Délibéré après l'audience du 25 mai 2021, à laquelle siégeaient :

- M. Jardin, président de chambre,

- Mme C..., président assesseur,

- M. Aggiouri, premier conseiller,

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 17 juin 2021.

Le rapporteur,

P. C...Le président,

C. JARDIN

Le greffier,

C. BUOT

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

[HP1]Il me semble que c'est cette formule qu'il faut utiliser car l'injonction relève du plein contentieux '''

[HP2]Pas totalement sure de cette formule

Nos 20PA03213, 20PA03214 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 7eme chambre
Numéro d'arrêt : 20PA03213
Date de la décision : 17/06/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Exces de pouvoir

Analyses

335-03-01-02 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière. Légalité externe. Motivation.


Composition du Tribunal
Président : M. JARDIN
Rapporteur ?: Mme Perrine HAMON
Rapporteur public ?: Mme STOLTZ-VALETTE
Avocat(s) : HADDAD

Origine de la décision
Date de l'import : 29/06/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2021-06-17;20pa03213 ?
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