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15/06/2021 | FRANCE | N°21PA00969

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 3eme chambre, 15 juin 2021, 21PA00969


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... A... C... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 10 septembre 2020 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination de sa reconduite à la frontière, d'enjoindre au préfet de police de réexaminer sa situation et de lui délivrer dans cette attente une autorisation provisoire de séjour, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, et de mettre à la charge de l

'État une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... A... C... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 10 septembre 2020 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination de sa reconduite à la frontière, d'enjoindre au préfet de police de réexaminer sa situation et de lui délivrer dans cette attente une autorisation provisoire de séjour, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, et de mettre à la charge de l'État une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 2016574/2-2 du 25 janvier 2021, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 24 février 2021, M. A... C..., représenté par Me D..., doit être regardé comme demandant à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2016574/2-2 du 25 janvier 2021 du tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler l'arrêté du 10 septembre 2020 du préfet de police ;

3°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " et, à défaut, d'enjoindre au préfet de réexaminer sa situation, dans le délai de

15 jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement du 25 janvier 2021 du tribunal administratif de Paris est irrégulier faute de faire état de l'ancienneté de son séjour en France et de son intégration professionnelle ; il mentionne, à tort, que la mère de son enfant réside en France en situation irrégulière ;

- la décision portant refus de titre de séjour méconnait les dispositions de l'article

L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entachée d'erreur manifeste d'appréciation de sa situation personnelle ;

- elle méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle méconnait les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant.

La requête a été communiquée au préfet de police qui n'a pas présenté de mémoire en défense.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales,

- la convention internationale des droits de l'enfant,

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile,

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme B... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A... C..., ressortissant camerounais né le 14 septembre 1980, qui serait entré en France courant septembre 2011, a sollicité le 29 juillet 2020 auprès du préfet de police la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 10 septembre 2020, le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être éloigné.

M. A... C... relève appel du jugement du 25 janvier 2021 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande d'annulation des décisions contenues dans l'arrêté du préfet de police du 10 septembre 2020.

Sur le bien-fondé du jugement :

En ce qui concerne la décision de refus de titre de séjour :

2. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors applicable : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. (...) ". Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance (...). ". Aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale. ".

3. M. A... C... soutient qu'il est présent en France depuis neuf ans, qu'il est le père d'une enfant née le 16 octobre 2017 dont la mère séjourne régulièrement en France et à l'entretien et l'éducation de laquelle il contribue. Il ressort des pièces du dossier que si M. A... C..., entré en France en 2011, a cessé de mener une vie commune avec la mère de sa fille, cette dernière, titulaire d'un titre de séjour pluriannuel en cours de validité à la date de la décision attaquée, atteste qu'il contribue financièrement à l'entretien de leur enfant depuis janvier 2019 et qu'il est présent auprès d'elle depuis sa naissance ; qu'en particulier, il l'a accompagnée à la crèche presque tous les matins et l'a récupérée certains soirs ainsi qu'en atteste la directrice de l'établissement, s'est occupé de celle-ci durant la période pendant laquelle elle suivait sa formation à l'école d'infirmière et il s'implique d'une manière générale auprès de l'enfant tant en lui versant des subsides qu'en contribuant à son éducation. Il ressort ainsi des pièces du dossier que M. A... C... a inscrit l'enfant à l'école maternelle et est déclaré comme son représentant légal. Dans ces conditions, alors que la mère de la fille de M. A... C..., de nationalité camerounaise, était titulaire d'un titre de séjour pluriannuel en cours de validité à la date de la décision attaquée et que l'exécution de la décision attaquée aurait pour effet de séparer durablement le requérant de sa fille, l'arrêté du préfet de police du 10 septembre 2020 doit être regardé comme ayant méconnu les dispositions et stipulations précitées.

4. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur la régularité du jugement, que M. A... C... est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Paris a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation des décisions contenues dans l'arrêté du préfet de police du 10 septembre 2020.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

5. Eu égard au motif d'annulation retenu et alors qu'il ne résulte pas de l'instruction que des éléments de fait ou de droit nouveaux justifieraient que l'autorité administrative oppose une nouvelle décision de refus de séjour, le présent arrêt implique nécessairement la délivrance à

M. A... C... d'une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ". Il y a lieu, par suite, d'enjoindre au préfet de police de délivrer ce titre, dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte.

Sur les frais liés au litige :

6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'État le versement de la somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par M. A... C... et non compris dans les dépens.

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Paris n° 2016574/2-2 du 25 janvier 2021 et l'arrêté du préfet de police du 10 septembre 2020 sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de police de délivrer à M. A... C... un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera à M. A... C... une somme de 1 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... A... C..., au ministre de l'intérieur et au préfet de police.

Délibéré après l'audience publique du 18 mai 2021 à laquelle siégeaient :

- M. Bernier, président-assesseur, assurant la présidence de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,

- Mme B..., premier conseiller,

- Mme Mornet, premier conseiller,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 15 juin 2021.

Le rapporteur,

M-D. B...Le président de la formation de jugement,

Ch. BERNIER

Le greffier,

E. MOULIN

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

1

N° 08PA04258

2

N° 21PA00969


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 3eme chambre
Numéro d'arrêt : 21PA00969
Date de la décision : 15/06/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Exces de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. BERNIER
Rapporteur ?: Mme Marie-Dominique JAYER
Rapporteur public ?: Mme PENA
Avocat(s) : MENAGE

Origine de la décision
Date de l'import : 22/06/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2021-06-15;21pa00969 ?
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