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10/06/2021 | FRANCE | N°20PA01647

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 5eme chambre, 10 juin 2021, 20PA01647


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... C... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 28 février 2019 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français à l'expiration d'un délai de trente jours et a fixé le pays à destination et d'enjoindre au préfet de police, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de quinze jours à compter de la notification du présent jugement ou, à déf

aut, de réexaminer sa situation et de lui délivrer dans l'attente une autorisation pr...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... C... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 28 février 2019 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français à l'expiration d'un délai de trente jours et a fixé le pays à destination et d'enjoindre au préfet de police, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de quinze jours à compter de la notification du présent jugement ou, à défaut, de réexaminer sa situation et de lui délivrer dans l'attente une autorisation provisoire de séjour.

Par un jugement n° 1912184 du 12 décembre 2019, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 4 juillet 2020, M. C... représenté par Me D... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1912184 du 12 décembre 2019 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler la décision de refus de titre de séjour du 28 février 2019 ;

3°) d'annuler la décision d'obligation de quitter le territoire français du 28 février 2019 ;

4°) d'annuler la décision fixant le Mali comme pays de renvoi du 28 février 2019 ;

5°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer sur le fondement de l'article L. 911-1 du code de justice administrative un titre de séjour sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter d'un délai de quinze jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir ou à défaut, d'enjoindre au préfet de police de réexaminer sa situation sous la même astreinte.

Il soutient que :

- le jugement est insuffisamment motivé ;

- la décision de refus de titre de séjour est insuffisamment motivée et stéréotypée ;

- elle méconnaît l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans la mesure où il séjourne en France depuis 2001 ;

- elle méconnaît le 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile compte tenu de son état de santé alors qu'il est suivi en neurologie vasculaire depuis son accident vasculaire cérébral en 2015 et qu'une telle prise en charge ne peut être assurée au Mali ;

- elle méconnaît le 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation personnelle ;

- la décision d'obligation de quitter le territoire français est insuffisamment motivée et stéréotypée ;

-elle est illégale par la voie de l'exception d'illégalité de la décision de refus de titre de séjour ;

- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales :

- la décision fixant le Mali comme pays de renvoi est illégale par la voie de l'exception d'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français.

- elle méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales car le Mali est un pays en guerre depuis de nombreuses années.

Le préfet de police, auquel la requête de M. C... a été communiquée, n'a pas présenté de mémoire en défense.

Par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal judiciaire de Paris en date du 5 mars 2020, M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme A... a été entendu au cours de l'audience publique

Considérant ce qui suit :

1. M. C..., ressortissant malien, né le 26 mai 1977, a sollicité le renouvellement du titre de séjour qui lui avait été délivré sur le fondement des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 28 février 2019, le préfet de police a rejeté sa demande de titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français à l'expiration d'un délai de trente jours et fixé le pays à destination. Par un jugement n° 1912184 du 12 décembre 2019, dont M. C... fait appel, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Il résulte des motifs mêmes du jugement que le Tribunal administratif de Paris a expressément répondu aux moyens contenus dans le mémoire produit par M. C.... En particulier, le tribunal administratif, qui n'était pas tenu de répondre à tous les arguments avancés par les parties, n'a pas omis de répondre au moyen tiré de qu'il ne pourrait pas bénéficier d'une prise en charge adaptée à son état de santé au Mali. En effet, le tribunal a indiqué que si M. C... suit un traitement anticoagulant et fait l'objet d'une prise en charge en neurologie vasculaire en raison des séquelles de l'accident vasculaire cérébral dont il a été victime en France en 2015, le seul certificat médical établi le 9 mai 2018 par un médecin généraliste en des termes non circonstanciés ne saurait en attester. Par suite, M. C... n'est pas fondé à soutenir que le jugement serait entaché d'irrégularité à raison d'une insuffisance de motivation.

Sur le bien-fondé du jugement :

En ce qui concerne le refus de titre de séjour :

S'agissant de la légalité externe :

3. Aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : 1° Restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police (...) ". Aux termes de l'article L. 211-5 du même code : " La motivation exigée par le présent chapitre doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision ".

4. La décision de refus de renouvellement du titre de séjour de M. C... vise la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, le 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile sur le fondement duquel l'intéressé a demandé, le 30 janvier 2019, le renouvellement de titre de séjour et mentionne l'avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration consulté sur la demande de titre de séjour l'intéressé. Par ailleurs, l'arrêté précise que si M. C... déclare que l'une de ses soeurs réside sur le territoire national, il est célibataire sans charge de famille en France et il n'est pas dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine où résident ses trois enfants ainsi qu'une autre de ses soeurs. Ainsi, le préfet de police a suffisamment énoncé, par une motivation non stéréotypée, les considérations de droit et de fait fondant sa décision de refus de titre de séjour, et a respecté les exigences de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration.

S'agissant de la légalité interne :

5. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : / (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ; (...)11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'État ".

6. Le préfet de police a estimé, au vu de l'avis de l'office français de l'immigration et de l'intégration que, si l'état de santé de M. C... nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, l'intéressé pouvait bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé au Mali. Il est constant que M. C... suit un traitement anticoagulant et fait l'objet d'une prise en charge en neurologie vasculaire en raison des séquelles de l'accident vasculaire cérébral dont il a été victime en France en 2015. Toutefois, l'intéressé n'établit pas qu'il ne pourrait bénéficier d'une prise en charge adaptée à son état de santé au Mali en se bornant à produire un certificat médical non circonstancié d'un médecin généraliste daté du 9 mai 2018 et en faisant état de considérations générales sur la pauvreté et l'insuffisance des structures sanitaires du Mali. Dès lors, il ne démontre pas que le préfet de police aurait entaché sa décision d'une erreur d'appréciation en estimant qu'eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé au Mali, il peut y bénéficier d'un traitement approprié à son état de santé. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.

7. Aux termes des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance (...) ".

8. M. C... déclare être célibataire et sans charge de famille en France et ne fournit aucune précision ni justification quant aux liens amicaux qu'il y aurait tissés en France. Par ailleurs, il n'est pas dépourvu d'attaches familiales au Mali, où résident ses trois enfants, dont deux sont mineurs. Dans ces conditions, le refus de titre de séjour attaqué ne peut être regardé comme ayant porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels il a été pris. Par ailleurs, il ne méconnaît pas davantage les dispositions précitées du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et n'est entaché d'aucune erreur manifeste d'appréciation de la situation personnelle de l'intéressé.

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

S'agissant de la légalité externe :

9. Aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée. Elle n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour dans les cas prévus aux 3° et 5° du présent I, sans préjudice, le cas échéant, de l'indication des motifs pour lesquels il est fait application des II [délai de départ volontaire] et III [interdiction de retour sur le territoire français] (...) ".

10. La décision d'obligation de quitter le territoire français vise l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et précise que si M. C... déclare que l'une de ses soeurs réside sur le territoire national, il est célibataire sans charge de famille en France et il n'est pas dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine où résident ses trois enfants ainsi qu'une autre de ses soeurs. Ainsi, préfet de police a suffisamment énoncé, par une motivation non stéréotypée, les considérations de droit et de fait fondant sa décision d'obligation de quitter le territoire français et a respecté les exigences de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

S'agissant de la légalité interne :

11. En l'absence de toute illégalité de la décision de refus de titre de séjour, le moyen soulevé, par voie d'exception, de l'illégalité de la décision d'obligation de quitter le territoire français ne peut qu'être écarté.

12. Pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 8, le moyen selon lequel l'obligation de quitter le territoire français méconnaîtrait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut qu'être écarté.

En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :

13. En l'absence de toute illégalité de la décision d'obligation de quitter le territoire français, le moyen soulevé, par voie d'exception, de l'illégalité de la décision fixant le pays de renvoi ne peut qu'être écarté.

14. Aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ".

15. M. C... ne produit aucun élément permettant d'établir la réalité des risques auxquels il serait personnellement exposé en cas de retour dans son pays d'origine. Par suite, la décision fixant le pays de renvoi de M. C... prise par le préfet de police n'a pas méconnu les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

16. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

17. Le présent arrêt qui rejette les conclusions aux fins d'annulation présentées par le requérant n'implique par lui-même aucune mesure d'exécution. Ses conclusions à fin d'injonction ne peuvent, par suite, qu'être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête présentée par M. C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... C... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée, pour information, au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 27 mai 2021, à laquelle siégeaient :

- M. Formery, président de chambre,

- M. Platillero, président assesseur,

- Mme A..., premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 10 juin 2021.

Le rapporteur,

I. A...Le président,

S.-L. FORMERY

La greffière,

C. DABERT

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 20PA01647


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 5eme chambre
Numéro d'arrêt : 20PA01647
Date de la décision : 10/06/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Exces de pouvoir

Analyses

335 Étrangers.

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. FORMERY
Rapporteur ?: Mme Isabelle MARION
Rapporteur public ?: Mme LESCAUT
Avocat(s) : PARTOUCHE-KOHANA

Origine de la décision
Date de l'import : 22/06/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2021-06-10;20pa01647 ?
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