Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme B... E... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 29 août 2017 par lequel la directrice de l'hôpital Robert-Debré a prononcé son licenciement pour insuffisance professionnelle et la décision du directeur des ressources humaines de l'Assistance publique - Hôpitaux de Paris (AP-HP) du 12 octobre 2017 rejetant son recours hiérarchique.
Par un jugement n° 1716606/2-2 du 4 février 2019, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 1er avril 2019, Mme E..., représentée par Me F..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du Tribunal administratif de Paris du 4 février 2019 ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 29 août 2017 et la décision du 12 octobre 2017, mentionnés ci-dessus ;
3°) d'enjoindre à l'AP-HP de la réintégrer dans ses fonctions, de reconstituer sa carrière et d'effectuer un rappel de salaires à compter du mois de novembre 2017 jusqu'à sa réintégration ;
4°) de mettre à la charge de l'AP-HP une somme de 3 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- son insuffisance professionnelle n'est pas démontrée ;
- les faits relatés dans le rapport du 27 juin 2017 ne sont pas établis.
Par un mémoire en défense, enregistré le 10 février 2020, l'AP-HP, représentée par Me C..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 1 800 euros soit mise à la charge de Mme E... sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que les moyens soulevés par Mme E... ne sont pas fondés.
Par deux mémoires en réplique, enregistrés le 6 et le 30 mars 2020, Mme E... conclut aux mêmes fins que la requête, et demande en outre à la Cour :
1°) à titre subsidiaire, en l'absence de réintégration et de reconstitution de sa carrière, de condamner l'AP-HP à lui verser une somme de 39 000 euros en réparation du préjudice moral et financier qu'elle a subi en raison de son licenciement abusif ;
2°) en tout état de cause, de condamner l'AP-HP à lui verser une somme de 27 000 euros en réparation du préjudice moral et financier qu'elle a subi distinctement du licenciement.
Elle soutient en outre que :
- elle doit être indemnisée des préjudices qu'elle a subis ;
- la fin de non-recevoir opposée par l'AP-HP à ses conclusions indemnitaires doit être écartée ;
- elle est en tout état de cause recevable à rechercher la responsabilité de l'AP-HP sur le fondement du risque.
Par un nouveau mémoire en défense, enregistré le 10 mars 2020, l'AP-HP conclut aux mêmes fins que son précédent mémoire en défense. Elle demande en outre à la Cour de rejeter les conclusions indemnitaires de Mme E....
Elle soutient en outre que :
- ces conclusions indemnitaires sont irrecevables dès lors qu'elles ont été présentées dans le cadre d'un mémoire en réplique, à une date postérieure à l'expiration du délai d'appel ;
- elles ne sont pas fondées, Mme E... ne justifiant pas de son préjudice.
Par une ordonnance du 10 mars 2020, la clôture de l'instruction a été fixée au 31 mars 2020.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 ;
- le décret n° 91-155 du 6 février 1991 ;
- le décret n° 2015-1434 du 5 novembre 2015 ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. D...,
- les conclusions de M. Baffray, rapporteur public,
- les observations de Me F... pour Mme E...,
- et les observations de Me A... substituant Me C... pour l'AP-HP.
Considérant ce qui suit :
1. Mme E..., a été recrutée par l'AP-HP le 5 janvier 2015 par contrat à durée indéterminée, en qualité de responsable budgétaire et financier au sein de l'hôpital Robert-Debré. Par un arrêté du 29 août 2017, la directrice de l'hôpital Robert-Debré a prononcé son licenciement pour insuffisance professionnelle. Cet arrêté de licenciement a été confirmé, après un recours hiérarchique de l'intéressée, par une décision du directeur des ressources humaines de l'AP-HP en date du 12 octobre 2017. Mme E... fait appel du jugement du 4 février 2019 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté et de la décision rejetant son recours hiérarchique.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. Aux termes de l'article 41-2 du décret du 6 février 1991 relatif aux dispositions générales applicables aux agents contractuels des établissements mentionnés à l'article 2 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 : " L'agent contractuel peut être licencié pour un motif d'insuffisance professionnelle (...) ". Le licenciement pour inaptitude professionnelle d'un agent public ne peut être fondé que sur des éléments révélant l'inaptitude de l'agent à exercer normalement les fonctions pour lesquelles il a été engagé ou correspondant à son grade et non sur une carence ponctuelle dans l'exercice de ces fonctions. Toutefois, une telle mesure ne saurait être subordonnée à ce que l'insuffisance professionnelle ait été constatée à plusieurs reprises au cours de la carrière de l'agent, ni qu'elle ait persisté après qu'il ait été invité à remédier aux insuffisances constatées. Par suite, une évaluation portant sur la manière dont l'agent a exercé ses fonctions durant une période suffisante et révélant son inaptitude à un exercice normal de ses fonctions est de nature à justifier légalement son licenciement.
3. Il ressort de l'arrêté attaqué et du rapport de la directrice des finances et des affaires médicales du 27 juin 2017 auquel il fait référence, que Mme E... " rencontre des difficultés dans l'exercice de ses fonctions sur l'ensemble du périmètre de ses responsabilités ; que ses compétences en matière de gestion budgétaire sont insuffisantes et ne lui permettent pas d'apporter à sa hiérarchie les réponses nécessaires avec efficacité et rapidité ; que ses compétences en informatique sont insuffisantes et ne permettent pas de réaliser dans les délais impartis les tableaux de synthèse budgétaire demandés ; que ses compétences managériales et sa capacité à prioriser les dossiers sont insuffisantes ". L'arrêté litigieux relève également que Mme E... a été " accompagnée avec beaucoup de bienveillance par sa hiérarchie ", ce qui ne lui a " pas permis (...) de progresser de façon visible sur les axes nécessaires ".
4. En premier lieu, si Mme E... fait état de sa formation, de ses expériences professionnelles passées, de ses évaluations antérieures à l'arrivée de la nouvelle directrice des finances et des affaires médicales en septembre 2016, de rivalités avec deux de ses collègues et de " menaces de mort " émanant de l'un d'eux, dont elle n'établit pas la réalité, elle ne conteste pas sérieusement les témoignages défavorables à son endroit, notamment sur le plan " relationnel ", que le rapport établi le 27 juin 2017 relate à propos d'évènements antérieurs au mois de septembre 2016. Si elle conteste son retard pour soumettre à sa hiérarchie le titre exécutoire établi à propos de " la redevance Médiance ", son erreur dans l'affaire du " budget CINFO " et la rétention d'informations qui lui est reprochée dans l'affaire " Soliris ", ces faits ressortent des échanges de courriers électroniques produits au dossier. Enfin, elle ne produit aucune pièce de nature à remettre en cause la réalité des constatations du rapport du 27 juin 2017 en ce qui concerne la souffrance au travail qui a été exprimée par les deux agents qui étaient placés sous sa responsabilité, sa mauvaise maitrise de l'outil bureautique, notamment du tableur " Excel ", ses retards à reproduire sur le réseau informatique du service les documents qu'elle conservait sur d'autres supports, et sa difficulté à coordonner ses congés avec ceux des autres agents du service. Compte tenu du niveau de responsabilité du poste d'encadrement qu'elle occupait, l'AP-HP a pu, sans entacher sa décision d'erreur de fait ou d'erreur d'appréciation, estimer que ces faits révélaient son inaptitude à exercer normalement les fonctions pour lesquelles elle avait été engagée, et étaient de nature à justifier son licenciement pour insuffisance professionnelle.
5. En second lieu, Mme E... qui ne conteste pas la réalité des incitations de ses supérieures hiérarchiques à respecter des horaires raisonnables et à prendre régulièrement ses congés, des évaluations approfondies établies en février 2017 par ces mêmes supérieures, des propositions de formations qu'elles lui ont adressées et dont elle ne démontre pas qu'elles auraient été inadaptées, des renforts en personnel qui lui ont été accordés et du suivi dont elle a fait l'objet, n'est pas fondée à soutenir que l'arrêté attaqué serait entaché d'une erreur de fait en ce qu'il fait état de l'" accompagnement " et de la " bienveillance " dont elle a bénéficié de la part de sa hiérarchie.
Sur les conclusions indemnitaires :
6. Le licenciement de Mme E... n'étant entaché d'aucune illégalité fautive, les conclusions de son premier mémoire en réplique fondées sur la responsabilité pour faute de l'AP-HP, ne peuvent, qu'être rejetées.
7. Mme E... n'établissant en tout état de cause pas avoir été placée par l'AP-HP dans une situation dangereuse, les conclusions de son second mémoire en réplique recherchant la responsabilité pour risque de l'AP-HP, doivent également être rejetées.
8. Il résulte de tout ce qui précède que, sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée à ses conclusions indemnitaires, Mme E... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté ses conclusions aux fins d'annulation, d'injonction et d'indemnisation.
Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'AP-HP qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement de la somme que Mme E... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il n'y a pas lieu dans les circonstances de l'espèce de faire droit aux conclusions de l'AP-HP présentées sur le fondement des mêmes dispositions.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme E... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de l'AP-HP, présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... E... et à l'Assistance publique- Hôpitaux de Paris.
Délibéré après l'audience du 21 mai 2021, à laquelle siégeaient :
- Mme Fuchs Taugourdeau, président de chambre,
- M. D..., président-assesseur,
- M. Pagès, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 4juin 2021.
Le rapporteur,
J-C. D...Le président,
O. FUCHS TAUGOURDEAU
Le greffier,
K. PETIT
La République mande et ordonne au ministre des solidarités et de la santé en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N° 19PA01200 2