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01/06/2021 | FRANCE | N°20PA01243

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 7ème chambre, 01 juin 2021, 20PA01243


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler la mise en demeure de payer la somme de 231 828,45 euros et la décharge de l'obligation de payer cette somme.

Par un jugement n° 1808092/1-2 du 14 avril 2020, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés le 23 avril 2020 et le 24 mars 2021, M. C..., représenté par la SARL Delpeyroux et associés, demande à la Cour :
>1°) d'annuler le jugement n° 1808092/1-2 du 14 avril 2020 du Tribunal administratif de Paris ;

2°...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler la mise en demeure de payer la somme de 231 828,45 euros et la décharge de l'obligation de payer cette somme.

Par un jugement n° 1808092/1-2 du 14 avril 2020, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés le 23 avril 2020 et le 24 mars 2021, M. C..., représenté par la SARL Delpeyroux et associés, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1808092/1-2 du 14 avril 2020 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) de prononcer l'annulation de la mise en demeure de payer la somme de 231 828,45 euros et la décharge de l'obligation de payer cette somme.

Il soutient que :

- en vertu de l'article 1857 du code civil, à la date de l'exigibilité des impositions, soit le 30 décembre 2009, date du jugement du tribunal administratif, il n'était plus associé de la SARL LAS, et l'administration fiscale ne pouvait plus agir contre lui ;

- il n'a reçu aucun acte de poursuite entre la date du jugement et le 18 février 2015, date de l'envoi de l'avis de mise en recouvrement, et la prescription n'ayant pas été interrompue, la créance était prescrite au 18 février 2015 ;

- aucune poursuite n'a été diligentée à son encontre dans les cinq ans qui ont suivi la dissolution de la SARL LAS et l'action est prescrite en application de l'article 1859 du code civil ;

- il est fondé à se prévaloir des énonciations de la documentation administrative publiée au BOI-REC-SOLID-20-10-10 20120912 n° 120 et n° 210.

Par un mémoire en défense, enregistré le 27 juillet 2020, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- la contestation d'une mise en demeure n'est pas au nombre des litiges dont doit connaître la justice administrative ;

- les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code civil ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative et le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Un mémoire, présenté par le ministre de l'éÉconomie, des fFinances et de la Rrelance, a été enregistré 10 mai 2021, après la date de la clôture d'instruction résultant de l'application des dispositions de l'article R. 613-2 du code de justice administrative.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. B...,

- et les conclusions de Mme Stoltz-Valette, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. La société LAS, dont M. C... était actionnaire à 50 %, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité à l'issue de laquelle le service l'a assujettie au titre des exercices clos de 1999 à 2003 à des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contributions additionnelles à cet impôt, assorties d'intérêts de retard et de pénalités pour manquement délibéré. Par un jugement du Tribunal administratif de Paris du 30 décembre 2009 et un arrêt de la Cour administrative d'appel de Paris du 15 novembre 2011, la société a obtenu la décharge des pénalités pour manquement délibéré pour l'ensemble des années en litige. Les 9 février et 13 octobre 2005, cette société a formé des réclamations contre ces impositions, assorties d'une demande tendant au bénéfice du sursis de paiement prévu à l'article L. 277 du livre des procédures fiscales. Le 30 octobre 2008, M. C... et M. D..., ce dernier autre associé à parts égales, ont cédé toutes leurs parts dans cette société à l'EURL Reynie Participations. Cette entreprise a décidé de dissoudre la société LAS, ce qui a entraîné, conformément à l'article 1844-5 du code civil, la transmission universelle de son patrimoine à son profit sans liquidation. N'ayant pu recouvrer les sommes en question de l'EURL Reynie Participations, l'administration a émis le 3 janvier 2018, à l'encontre de M. C..., en sa qualité d'associé de la société dissoute pendant la période d'imposition en cause, une mise en demeure de payer que le destinataire a contestée en vain. Le Tribunal administratif de Paris a rejeté la contestation de M. C... par un jugement du 14 avril 2020, dont il relève appel.

Sur l'exception d'incompétence soulevée par l'administration :

2. Aux termes de l'article L. 281 du livre des procédures fiscales : " Les contestations relatives au recouvrement des impôts (...) ne peuvent porter que : 1° Soit sur la régularité en la forme de l'acte ; 2° Soit sur l'existence de l'obligation de payer, sur le montant de la dette compte tenu des paiements effectués, sur l'exigibilité de la somme réclamée, ou sur tout autre motif ne remettant pas en cause l'assiette et le calcul de l'impôt. Les recours contre les décisions prises par l'administration sur ces contestations sont portés, dans le premier cas, devant le juge de l'exécution, dans le second cas, devant le juge de l'impôt tel qu'il est prévu à l'article L. 199. " Et aux termes de l'article 1857 du code civil : " A l'égard des tiers, les associés répondent indéfiniment des dettes sociales à proportion de leur part dans le capital social à la date de l'exigibilité ou au jour de la cessation des paiements. (...) ".

3. En contestant, devant le tribunal administratif, sa qualité d'associé de la Sarl LAS, M. C... a entendu mettre en cause, non l'assiette ou le calcul de la pénalité fiscale mise à la charge de cette société, mais l'obligation qui lui a été faite d'en acquitter le montant aux lieu et place de cette dernière, en vertu de la solidarité établie par les dispositions précitées de l'article 1857 du code civil. Ainsi, sa contestation est au nombre de celles que l'article L. 281 du livre des procédures fiscales rattache au contentieux du recouvrement de l'impôt. Par suite la fin de non-recevoir de l'administration tendant à l'incompétence du juge administratif, doit être écartée.

Sur le bien-fondé de l'obligation de payer :

4. D'une part, aux termes de l'article L. 274 du livre des procédures fiscales : " Les comptables publics des administrations fiscales qui n'ont fait aucune poursuite contre un redevable pendant quatre années consécutives à compter du jour de la mise en recouvrement du rôle ou de l'envoi de l'avis de mise en recouvrement sont déchus de tous droits et de toute action contre ce redevable. (...) ".

5. D'autre part, aux termes de l'article 1857 du code civil : " A l'égard des tiers, les associés répondent indéfiniment des dettes sociales à proportion de leur part dans le capital social à la date de l'exigibilité ou au jour de la cessation des paiements (...) ". L'article 1858 du même code dispose que : " Les créanciers ne peuvent poursuivre le paiement des dettes sociales contre un associé qu'après avoir préalablement et vainement poursuivi la personne morale. " Enfin, l'article 1859 du code civil précise que : " Toutes les actions contre les associés non liquidateurs ou leurs héritiers et ayants cause se prescrivent par cinq ans à compter de la publication de la dissolution de la société. " Ces dispositions sont applicables à l'ensemble des sociétés civiles de droit commun.

6. Il résulte de ces dispositions qu'elles permettent à l'administration des impôts, après en avoir vainement et préalablement poursuivi le paiement auprès de la société elle-même, de constituer les associés d'une société civile débiteurs des dettes fiscales de la société, à proportion de leur part respective dans le capital social à la date d'exigibilité de la créance litigieuse. Dans le cas où la société civile a été dissoute, la notification du titre exécutoire qu'il appartient à l'administration de délivrer à chacun des associés concernés, avant, le cas échéant, d'engager des poursuites en vue du recouvrement des impositions mises à leur charge, doit intervenir dans le délai de prescription de cinq ans à compter de la publication de cette dissolution.

7. Il résulte de l'instruction que la publication de la dissolution de la société LAS, qui a entraîné la transmission universelle de son patrimoine à l'EURL Reynie Participations, son unique associé, en application des dispositions de l'article 1844-5 du code civil, est intervenue le 23 juin 2009. Cette date constitue, conformément aux dispositions de l'article 1859 du code civil, le point de départ du délai de prescription prévu par cet article. Contrairement à ce que fait valoir l'administration, le cours de cette prescription n'a pas été interrompu par les actes de poursuite diligentés à l'encontre de la société Reynie Participations. Par suite, la prescription quinquennale prévue à l'article 1859 du code civil était acquise à la date de notification à M. C... de la mise en demeure de payer émise à son encontre le 3 janvier 2018.

8. Il en résulte que M. C... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge de l'obligation de payer la somme de 231 828,45 euros.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1808092/1-2 du 14 avril 2020 du Tribunal administratif de Paris est annulé.

Article 2 : M. C... est déchargé de l'obligation de payer la somme de 231 828,45 euros.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C... et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

Copie en sera adressée à la direction régionale des finances publiques d'Ile-de-France et de Paris (pôle contrôle fiscal et affaires juridiques - SCAD).

Délibéré après l'audience du 11 mai 2021, à laquelle siégeaient :

- M. Jardin, président de chambre,

- M. B..., président assesseur,

- M. Aggiouri, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 1er juin 2021.

Le rapporteur,

J. E. B... Le président

C. JARDIN

Le greffier,

C. MONGISLa République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la relance en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

7

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N° 20PA01243


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 20PA01243
Date de la décision : 01/06/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Contributions et taxes - Généralités - Recouvrement - Action en recouvrement - Détermination du redevable de l'impôt.

Contributions et taxes - Généralités - Recouvrement - Action en recouvrement - Actes de poursuite.


Composition du Tribunal
Président : M. JARDIN
Rapporteur ?: M. Jean-Eric SOYEZ
Rapporteur public ?: Mme STOLTZ-VALETTE
Avocat(s) : CABINET DELPEYROUX

Origine de la décision
Date de l'import : 08/06/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2021-06-01;20pa01243 ?
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