Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. F... B... a demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler l'arrêté
du 10 janvier 2019 par lequel le préfet du Val-de-Marne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays à destination, et d'enjoindre au préfet de lui délivrer, sous astreinte, un titre de séjour.
Par un jugement n 1902555 du 11 mai 2020, le tribunal administratif de Melun a rejeté ses demandes.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 8 décembre 2020, M. F... B..., représenté par
Me E... A..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Melun du 11 mai 2020 ;
2°) d'annuler les décisions contenues dans l'arrêté du 10 janvier 2019 par lesquelles le préfet du Val-de-Marne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays à destination ;
3°) d'enjoindre au préfet du Val-de-Marne de lui délivrer un titre de séjour dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, ou à défaut de réexaminer sa situation avec délivrance d'une autorisation provisoire de séjour dans un délai de trois mois ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à verser à son conseil sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- la commission du titre de séjour n'a pas été saisie de la demande de titre de séjour alors qu'il satisfaisait aux conditions de l'article L. 313-11-7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la motivation de la décision de refus de titre de séjour est insuffisante ;
- la décision repose sur une erreur de fait, s'agissant de sa vie privée et familiale ;
- il ne pourra pas bénéficier d'un traitement approprié de ses problèmes rénaux en Chine où il serait particulièrement exposé à l'épidémie de coronavirus ;
- il peut prétendre à un titre de séjour sur le fondement des articles L. 313-11-7° et
L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le refus de titre de séjour porte une atteinte disproportionnée à son droit à une vie privée et familiale garanti par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la commission du titre de séjour n'a pas été saisie de l'obligation qui lui est faite de quitter le territoire ;
- la motivation de l'obligation de quitter le territoire est entachée d'une erreur de fait, et elle est insuffisante ;
- l'obligation qui lui est faite de quitter le territoire repose sur un refus de titre de séjour entaché d'illégalité.
Par une décision n° 2020/016685 du 15 octobre 2020 le bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judicaire de Paris a accordé l'aide juridictionnelle totale à M. F... B... et a désigné Me E... A... pour l'assister.
Le préfet du Val-de-Marne, à qui la requête a été communiquée, n'a pas produit de mémoire en défense.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Le rapport de M. C... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Par un arrêté du 10 janvier 2019, le préfet du Val-de-Marne a refusé de renouveler le titre de séjour qui avait été délivré à M. B..., ressortissant chinois né le 18 juillet 1973 à Guangzhou (province du Guangdong) sur le fondement des dispositions du 11° de l'article
L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de destination. M. B... relève appel du jugement du 11 mai 2020 par lequel le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur le moyen tiré de l'erreur de fait :
2. Pour estimer que ses décisions ne portaient pas une atteinte excessive au droit au respect de la vie privée et familiale de M. B..., garanti par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, le préfet du
Val-de-Marne s'est fondé sur les circonstances que l'intéressé était célibataire et sans enfant, qu'il ne justifiait pas de liens privés et familiaux en France inscrits dans la durée et la stabilité et qu'il ne témoignait pas d'une insertion professionnelle en France. Or, il ressort des pièces du dossier que M. B... est l'époux d'une compatriote titulaire d'un titre de séjour en cours de validité, que leurs deux enfants sont nés en France en 2015 et 2017, que le requérant qui a été titulaire d'un titre de séjour " salarié " de 2012 à 2015, puis jusqu'en 2019 d'un titre de séjour " vie privée et familiale " en qualité d'étranger malade, justifie par la production d'avis d'imposition de ressources stables depuis 2006 et qu'il est propriétaire de son logement. Il en résulte que, s'agissant de l'appréciation portée sur la vie privée et familiale de l'intéressé, la décision du préfet du Val-de-Marne se fonde sur des éléments de fait matériellement inexacts. Il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet aurait nécessairement pris la même décision s'il n'avait pas retenu des faits erronés pour se prononcer sur l'atteinte portée au droit du demandeur au respect de sa vie privée et familiale. Elle est de ce fait entachée d'illégalité.
3. M. B... est dès lors fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du
10 janvier 2019.
Sur les conclusions aux fins d'injonction :
4. Eu égard au motif d'annulation retenu, le présent arrêt n'implique pas la délivrance du titre de séjour que M. B... avait sollicité sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il y a simplement lieu de prescrire au préfet du Val de Marne de statuer à nouveau sur la demande de renouvellement de la carte de séjour portant la mention " vie privée et familiale " sollicitée par l'intéressé en tenant compte de la situation de droit et de fait existant à la date de sa nouvelle décision dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt et de lui délivrer, sous quinzaine, une autorisation provisoire de séjour. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'assortir cette injonction du prononcé d'une astreinte.
Sur les frais exposés et non compris dans les dépens :
5. Il y a lieu dans les circonstances de l'espèce de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 300 euros à verser à Me E... A... sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 sous réserve que cette avocate renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Melun du 11 mai 2020 et l'arrêté du préfet du Val de Marne du 10 janvier 2019 sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au préfet du Val de Marne de réexaminer la demande de titre de séjour de M. B... en fonction de la situation de droit et de fait existant à la date de sa nouvelle décision dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt et de lui délivrer, sous quinzaine, une autorisation provisoire de séjour.
Article 3 : L'Etat versera à Me E... A... la somme de 1 300 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 alinéa 2 de la loi du
10 juillet 1991, sous réserve que cette avocate renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à la mission d'aide juridictionnelle qui lui a été confiée.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. F... B..., au ministre de l'intérieur, au préfet du Val-de-Marne et à Me E... A....
Délibéré après l'audience du 18 mai 2021, à laquelle siégeaient :
- M. C..., président-assesseur, assurant la présidence de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,
- Mme Jayer, premier conseiller,
- Mme Mornet, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 26 mai 2021.
L'assesseur le plus ancien,
M-D... Le président de la formation de jugement,
président-rapporteur,
Ch. C...
Le greffier,
E. MOULIN
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N° 20PA03830 2