Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme B... D... épouse C... a demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler les décisions du 20 septembre 2018 par lesquelles le préfet du Val-de-Marne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination, d'enjoindre au préfet de lui délivrer un certificat de résidence portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement à intervenir et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un jugement n° 1808975 du 16 juin 2020, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 17 février 2021, Mme D..., représentée par
Me E..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1808975 du 16 juin 2020 du tribunal administratif de Melun ;
2°) d'annuler l'arrêté du 20 septembre 2018 du préfet du Val-de-Marne ;
3°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour dans le délai d'un mois à compter de notification de l'arrêt à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que la décision portant refus de titre de séjour méconnait les stipulations du 7 du paragraphe 6 de l'accord franco-algérien, faute de traitement disponible de la maladie de Hodgkin en Algérie et de possibilité d'accès effectif aux soins dans son pays d'origine.
La requête a été communiquée au préfet du Val-de-Marne qui n'a pas présenté de mémoire en défense.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme A... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme D..., ressortissante algérienne née en 1984, est entrée en France le
22 janvier 2017 sous couvert d'un visa de court séjour. Le 24 juillet 2017, elle a sollicité auprès du préfet du Val-de-Marne la délivrance d'un certificat de résidence en invoquant son état de santé. Par un arrêté du 20 septembre 2018, le préfet du Val-de-Marne a rejeté sa demande, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. Mme D... relève appel du jugement du 16 juin 2020 par lequel le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur le bien-fondé du jugement :
2. Aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) 5) au ressortissant algérien (...) dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (...) 7) au ressortissant algérien, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse pas effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays (...) ".
3. Il appartient à l'autorité administrative, lorsqu'elle envisage de refuser la délivrance d'un certificat de résidence à un ressortissant algérien qui en fait la demande au titre de ces stipulations, de vérifier, au vu de l'avis émis par le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII), que cette décision ne peut avoir des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur l'état de santé de l'intéressé et, en particulier, d'apprécier, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, la nature et la gravité des risques qu'entraînerait pour celui-ci un défaut de prise en charge médicale dans le pays d'origine. Lorsque le défaut de prise en charge médicale risque d'avoir des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur l'intéressé, l'autorité administrative ne peut refuser le certificat de résidence algérien sollicité que s'il existe des possibilités de traitement approprié de l'affection en cause en Algérie. Si de telles possibilités existent mais que l'intéressé fait valoir qu'il ne peut en bénéficier, soit parce qu'elles ne sont pas accessibles à la généralité de la population, eu égard notamment au coût du traitement ou à l'absence de modes de prise en charge adaptés, soit parce qu'en dépit de leur accessibilité, des circonstances exceptionnelles tirées des particularités de sa situation personnelle l'empêcheraient d'y accéder effectivement, il appartient à cette même autorité, au vu de l'ensemble des informations dont elle dispose, d'apprécier si l'intéressé peut ou non bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans son pays d'origine.
4. La partie qui justifie d'un avis du collège de médecins de l'OFII qui lui est favorable doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour. Dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, l'existence ou l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires. En cas de doute, il lui appartient de compléter ces échanges en ordonnant toute mesure d'instruction utile.
5. Il ressort des pièces du dossier que, pour refuser la délivrance d'un certificat de résidence à Mme D... qui souffre de la maladie de Hodgkin, sur le fondement du 7° de l'article 6 de l'accord franco-algérien, le préfet du Val-de-Marne a estimé, en s'appuyant sur l'avis établi par le collège des médecins de l'OFII en date du 26 mars 2018 que, si l'état de santé de l'intéressée nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour elle des conséquences d'une exceptionnelle gravité, la requérante pourrait, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont elle est originaire, y bénéficier effectivement d'un traitement approprié et que son état de santé lui permettait de voyager sans risque vers ce pays.
6. Pour contredire cet avis, Mme D... produit le certificat médical de son médecin traitant algérien mentionnant qu'il n'y a pas de kits pour cytaphérèse en Algérie, un article d'une revue médicale de 2017 faisant état de nombreuses lacunes dans la prise en charge des hémopathies malignes dans ce pays ainsi qu'un article du 26 octobre 2018 mentionnant que les patients souffrant de cancers du sang s'y heurtent à l'insuffisance de moyens thérapeutiques, principalement en radiothérapie et chimiothérapie, enfin, un témoignage du 2 février 2018, à caractère général, sur le traitement du cancer en Algérie. Si elle produit, également, un certificat médical de son médecin référent de l'Institut Curie, il résulte de ce dernier que la requérante a déjà bénéficié de soins en Algérie en 2011 pour le traitement de la maladie de Hodgkin et que, si elle a souffert d'une rechute en 2016, d'abord prise en charge dans son pays d'origine, son état ne nécessite désormais qu'une surveillance sous la forme de contrôles scanographiques, biologiques et cliniques. Il ne ressort pas des éléments produits par la requérante, actuellement en rémission complète, qu'elle ne pourrait pas bénéficier d'un suivi médical de ce type en Algérie, en particulier à Tizi-Ouzou dont elle est originaire, les pièces produites ne permettant pas de remettre en cause l'appréciation portée par les médecins du collège de l'OFII que pouvait s'approprier le préfet du Val-de-Marne.
7. Il résulte ce qui précède que Mme D... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de Mme D... épouse C... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... D... épouse C... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet du Val-de-Marne.
Délibéré après l'audience publique du 18 mai 2021 à laquelle siégeaient :
- M. Bernier, président-assesseur, assurant la présidence de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,
- Mme A..., premier conseiller,
- Mme Mornet, premier conseiller,
Rendu public par mise à disposition au greffe le 25 mai 2021.
Le rapporteur,
M-D. A...Le président de la formation de jugement,
Ch. BERNIER
Le greffier,
E. MOULIN
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
1
N° 08PA04258
2
N° 21PA00810