Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme A... C... a demandé au Tribunal administratif de Melun d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 16 décembre 2019 par lequel le préfet du Val-de-Marne lui a refusé le renouvellement de son titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.
Par un jugement n° 2000488 du 21 juillet 2020, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 30 août 2020 et le 23 novembre 2020, Mme C..., représentée par Me B..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 2000488 du 21 juillet 2020 du Tribunal administratif de Melun ;
2°) d'annuler l'arrêté du 16 décembre 2019 du préfet du Val-de-Marne ;
3°) d'enjoindre à l'autorité préfectorale de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour et de procéder au réexamen de sa situation, dans le délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le jugement attaqué est entaché d'irrégularité dès lors qu'il ne répond pas à l'ensemble des moyens soulevés et qu'il est entaché d'une erreur de droit et d'une erreur de fait ;
- la décision portant refus de renouvellement de titre de séjour méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle méconnaît les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors qu'elle réside habituellement en France ;
- le préfet du Val-de-Marne n'a pas procédé à un examen approfondi de sa situation ;
- la décision l'obligeant à quitter le territoire français est insuffisamment motivée ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation eu égard à ses conséquences sur sa situation personnelle ;
- la décision fixant le pays de destination est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation eu égard à ses conséquences sur sa situation personnelle.
Par un mémoire en défense, enregistré le 14 octobre 2020, le préfet du Val-de-Marne conclut au rejet de la requête.
Il soutient qu'aucun des moyens soulevés par Mme C... n'est fondé.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du royaume du Maroc en matière de séjour et d'emploi du 9 octobre 1987 modifié ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative et le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. D...,
- et les observations de Me B..., avocat de Mme C....
Considérant ce qui suit :
1. Mme C..., ressortissante marocaine née le 23 octobre 1972, a obtenu un titre de séjour en qualité d'étranger malade au titre de la période comprise entre le 16 octobre 2015 et le 15 octobre 2016. Le préfet du Val-de-Marne a refusé de renouveler son titre de séjour par un arrêté du 5 décembre 2017, qui a été annulé par le Tribunal administratif de Melun par un jugement du 28 juin 2018. Mme C... a, en exécution de ce jugement, bénéficié d'un titre de séjour en qualité d'étranger malade valable du 28 juin 2018 au 27 juin 2019. Par un arrêté du 16 décembre 2019, le préfet du Val-de-Marne a refusé de faire droit à la demande de renouvellement de ce titre de séjour présentée par Mme C..., l'a obligée à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination. Mme C... relève appel du jugement du 21 juillet 2020 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : / [...] 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat [...] ".
3. Le préfet du Val-de-Marne a refusé de délivrer un titre de séjour à Mme C... sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile au motif qu'elle " ne peut justifier d'une présence régulière sur le territoire français ". Pour établir sa résidence habituelle sur le territoire français, Mme C... produit notamment un contrat de bail concernant un logement à Saint-Pierre-du-Perray, signé le 20 juin 2019. Elle a produit également, en réponse à une mesure d'instruction diligentée par la Cour, les quittances de loyer émises au titre de ce logement pour la période comprise entre le 20 juin 2019 et le 30 juin 2019, ainsi que pour les mois de juillet, septembre, octobre, novembre et décembre 2019, lesquelles quittances font apparaître des virements effectués par Mme C... pour le paiement du loyer en août, septembre, octobre, novembre et décembre 2019. Ces éléments sont confirmés par des relevés bancaires également produits par Mme C... faisant état du virement, pour les mois de septembre 2019 et décembre 2019, des sommes réclamées par les quittances de loyer qui lui ont été adressées. Ces pièces sont suffisamment probantes pour établir que Mme C... résidait en France depuis au moins le 20 juin 2019. Dès lors, la requérante est fondée à soutenir que son séjour présentait, à la date de l'arrêté litigieux, un caractère d'ancienneté et de stabilité suffisant pour permettre de la regarder comme résidant habituellement en France au sens des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, Mme C... est fondée à demander l'annulation de la décision refusant de lui délivrer un titre de séjour, ainsi que, par voie de conséquence, des décisions l'obligeant à quitter le territoire français et fixant le pays de renvoi.
4. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la régularité du jugement attaqué, que Mme C... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet du Val-de-Marne du 16 décembre 2019.
Sur les conclusions à fins d'injonction :
5. L'annulation de la décision obligeant Mme C... à quitter le territoire français implique nécessairement que l'autorité préfectorale procède au réexamen de la situation administrative de l'intéressée au regard de son droit au séjour et lui accorde, dans cette attente, une autorisation provisoire de séjour. Il y a lieu, sous réserve d'un changement d'adresse de la requérante, d'enjoindre au préfet du Val-de-Marne de procéder à ce réexamen dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte.
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement à Mme C... de la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D É C I D E :
Article 1er : Le jugement n° 2000488 du 21 juillet 2020 du Tribunal administratif de Melun et l'arrêté du 16 décembre 2019 du préfet du Val-de-Marne sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au préfet du Val-de-Marne de procéder au réexamen de la situation de Mme C..., dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt et de lui délivrer, dans l'attente de ce réexamen, une autorisation provisoire de séjour.
Article 3 : L'Etat versera la somme de 1 500 euros à Mme C... sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme C... est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... C..., au préfet du Val-de-Marne et au ministre de l'intérieur.
Délibéré après l'audience du 11 mai 2021, à laquelle siégeaient :
- M. Jardin, président de chambre,
- M. Soyez, président assesseur,
- M. D..., premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 25 mai 2021.
Le rapporteur,
K. D...Le président,
C. JARDIN
Le greffier,
C. MONGIS
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N° 20PA02512 2